Genèse d’une idée par Laurence Noyer

Ci-dessous, Laurence Noyer nous explique en détail comment lui vient une idée pour répondre à une proposition d’écriture :

Création et genèse d’une idée pour un exercice créatif proposé par Pascal Perrat le 07 juin sur la proposition suivante : « Toute sa vie elle avait couru devant,croyant que ceux qui la suivaient couraient après elle. Un jour, elle décida de se laisser doubler. »

Voici, minute par minute et même seconde par seconde, la décomposition de mon travail et les déambulations de mon esprit pour parvenir au texte final.

1 – J’écris la phrase sur une feuille pour m’en imprégner. J’écris vite volontairement pour que certains mots se déforment, des lettres disparaissent ou en forment de nouvelles, de nouveaux mots apparaissent. Par exemple, vie devient vue.

2 – Je laisse des images se former en lisant le texte : «  voir ceux qui suivent » = rétroviseur = miroir. (première piste)

3 – Qui est « elle » ?

4 – Je cherche des expressions avec courir et j’en invente moi-même : Je me souviens que Proust, que je lis actuellement, parle des odeurs, des sons qui arrivent vers lui, qui le précèdent. =remplacer courir par accourir

5 – Je pense aux endroits de mon enfance = Je relis le texte = elle, c’est la vue. Ceux qui suivent, les autres sens : odorat, gout, toucher, ouïe. Je réécris tout le texte en remplaçant ces mots : « Toute sa vie , la vue avait couru devant,
croyant que l’odorat, le gout, le toucher, l’ ouïe qui la suivaient
couraient après elle.
Un jour, la vue décida de se laisser doubler… » = Je vois une nouvelle idée à exploiter : VOIR DOUBLE

6 – J’aimerais faire 5 strophes avec l’idée qu’à chaque fois un des sens se fait doubler un autre, mais sans les nommer. Garder « elle » pour le suspense.

7 – Je cherche ce que j’aime voir, entendre, toucher, sentir = Je note les vagues, le vent, l’odeur du matin…

8 – Je sens que je cale, ça part un peu dans tous les sens, certaines idées, certains concepts, s’amoncellent, mais rien de concret ne jaillit. Il faut trier, il faut surtout faire une pause. Et que mon texte se pose.

9 – Je regarde l’heure, il est 12h26 = en écrivant, ces chiffres, je sens (physiquement) que quelque chose se passe en moi, c’est ce qu’on appelle le déclic, la sensation qu’il faut creuser, qu’il y a matière à réflexion et je découvre une nouvelle piste : les AIGUILLES d’une montre.

10- Je note quelques expressions en rapport avec les heures :    « au quatrième top il sera », « 1,2,3, soleil » = et là je vois une trotteuse se retourner vers les autres aiguilles. Non seulement je la vois mais je SUIS (du verbe être) la trotteuse

Emboîtant le pas à cet article très intéressant, j’ail créé une courte vidéo
dans laquelle j’explique comment j’ai trouvé l’idée de l’exercice 237

Et vous, comment procédez-vous pour trouver vos idées ?  

Pour aller + loin voir : Mes astuces pour trouver des idées

14 réponses

  1. Marie Pierre Robert dit :

    Moi aussi j’ai apprécié de rentrer dans la tête de Laurence, me concernant, je me lance sans réflexion de façon spontanée et je vois ce que cela donne

  2. Delphine dit :

    Merci Laurence pour ce partage , et tous . Je rejoins assez Sabine sur l’idée de vacances ou .. de vacance ! Faire le vide , laisser l’esprit vagabonder … et s’amuser , goûter, voir , toucher . . . !

  3. Henriette Delascazes dit :

    Comme je prépare mes valises j’arrive après coup sur cette explication de Laurence.
    Oui, l’idée est intéressante de raconter comment on fait ?
    Mais y a-t-il vraiment une méthode ? Moi je fais un peu comme chacun de vous, je fais un copier-coller de la proposition, l’imprime et le laisse mûrir sur un coin de la table, puis peu à peu les idées viennent ou repartent, j’en change et recommence. Je cherche la plupart du temps à trouver le sens détourné de la proposition pour essayer de déjouer le piège (si piège il y a) de la banalité.
    Quelquefois malgré cela j’y plonge les deux pieds dedans !
    Quelquefois encore, j’ai l’intime conviction (là j’exagère) que cette proposition est faite juste pour moi (mon ego en prend un coup)et j’ai sous le coude un petit brin de texte qui me permet de partir en l’adaptant à l’idée (où ce que j’en déduis) de la pensée de Pascal.
    Alors des manières il y en a tant et tant que chacun a la sienne. C’est normal.
    Au départ, j’ai cru qu’il s’agissait d’une nouvelle proposition d’écriture demandée (pourquoi pas) par Laurence… et j’avoue que je regrettais de ne pas avoir le temps de réfléchir à cette proposition car l’idée est bonne.
    Je pars en vacances et n’aurait sans doute pas le temps d’écrire, je vous dis à tous : à bientôt.
    Amitiés mes amis d’écriture
    Henriette

    • Coucou Henriette,
      Avant que vous ne partiez en vacances…
      Il n’y a pas de méthode « LaurenceNoyer »
      J’ai noté – pour cet exercice précis – comment mon cerveau avait cogité, mais sur l’exercice de la semaine dernière, je n’ai pas procédé de la même manière. Autrement dit, il n’y a pas de méthode, pas de recettes, qu’on appliquerait systématiquement à chaque travail d’écriture.
      Il est vrai qu’on a tous un fonctionnement créatif personnel… ce qui fait notre originalité en matière d’écriture. Mais les méthodes diffèrent, et heureusement
      Bonnes vacances…

  4. Durand Jean Marc dit :

    Allez savoir pourquoi cette idée m’est venu, maintenant….mais je ferai plutôt un parallèle avec la cuisine. Pas la quotidienne, la roborative.
    Celle d’une soirée, pour un repas en amoureux, du joyeux et du créatif.

    Je pioche donc dans plusieurs livres de cuisine une base solide, avec quelques ingrédients farfelus (mais jamais à contre goût..à contresens!).

    Par exemple si je dessale une morue (je parle bien cuisine) pendant toute une nuit….pour envisager un parmentier « à la portugaise »…ce n’est pas pour y rajouter ensuite …du sel…et du sable.

    Je crée ma propre fiche et je me lance dans l’élaboration. Je pétris, je découpe, je mélange, je goûte, j’assaisonne. Et selon, je cuis avec tendresse, à la poêle ou en cocotte.

    Les textes préparées la veille, délicatement réchauffés gagnent encore en saveur et en consistance.

    A l’œil aussi, ça doit causer! Donc le contenant, l’assiette, la nappe….tout peut valoriser votre plat.

    Maintenant, une petite salade bien colorée, un texte bien cru peuvent avoir leur charme!

  5. . Janine dit :

    A l’inverse de Laurence, je ne regarde jamais les making-of des DVD, les coulisses du cinéma. Je trouve au contraire que cela gâche la magie de l’émotion que j’ai pu ressentir à la vision d’un film.
    Je me souviens en particulier de ma grande déception lorsque j’avais découvert sur une photo de tournage, tout le monde agglutiné autour de Fellini, et de Mastroianni, dans une scène de la Dolce Vita.
    Cette photo avait brisé mon rêve, et la scène d’amour redevenait factice et fabriquée.
    Quant à l’inspiration, c’est pour moi comme une pelote dont je tirerai le fil. Je laisse venir à moi les mots, les images, les sons. Ensuite, je lis, je relis, je corrige, et je recoorige, sans fin.

  6. Fanny dit :

    Tout d’abord, je ne lis pas les « rédactions » de mes copines et copains d’écriture.

    Ensuite, je recherche le sens caché de l’accroche car je pense que le « prof » a une petite idée dans ou derrière la tête. C’est un véritable amusement pour moi. Je laisse germer l’idée en essayant de rester au plus proche du sujet proposé mais en lui donnant un tour à ma façon. Là, c’est le sens créatif qui prend le relai (je ne saurais l’expliquer). Pour le dernier exercice,l’idée m’est venue en dormant (j’écris beaucoup dans ma tête la nuit). Durant 3 jours j’étais en panne sèche. bras, jambes (qui se chamaillaient ?), cœur, sexe ; comment lier ces 4 éléments. Ce qui m’a étonnée, à la relecture, c’est de constater que mon écriture intuitive avait intégré, malgré moi, une cinquième donnée, à savoir l’esprit.

    Finalement, ce qui est intéressant c’est de constater que l’Homme n’est pas encore formaté à la pensée unique.

  7. Je ne sais plus quel acteur entendu la semaine dernière, prétendait que la manière dont avait été fait le film importait peu. Seul le résultât comptait.
    Je ne suis pas d’accord
    J’ai toujours été passionnée par les making-of ou les biographies, les coulisses d’une oeuvre me semble aussi intéressant que l’oeuvre elle-même. La naissance d’une idée, sa formation, sa déformation, c’est passionnant.
    Chacun notre démarche personnelle, nous avons chemins parallèles.
    Bref, je trouve super les différentes méthodes proposées ci-dessus.
    Merci de ce partage.

  8. Antonio dit :

    C’est très intéressant de s’immiscer dans l’esprit de quelqu’un, merci Laurence.
    Ca aidera ou décomplexera sans doute beaucoup parmi nous.

    Pour ma part, je fais facilement le parallèle avec l’exercice physique.
    Une idée devient un rythme, un parcours, une perf parfois.

    Et pour en trouver une bonne, il faut la condition créative.
    Et pour avoir la condition créative, il faut pratiquer régulièrement, s’écouter, trouver son souffle, savoir accélérer, oser et revenir dans le rythme de départ, comme il faut savoir étirer son talent à la fin pour que la fois suivante cela paraisse moins dur encore.

    Et pour pratiquer, il faut accepter de commencer par suer, s’arrêter quand survient une idée de côté, pour repartir tranquillement, sans chercher de perf, juste le plaisir de courir après elle, à son rythme, sans oublier d’étirer à la fin son talent que l’on sent venir… comme la condition créative.

    C’est pourquoi Pascal, nous emmène en footing créatif chaque week-end avec ses exercices. Merci coach ! 😉

  9. Sabine dit :

    Voici un moment que je n’ai pas fait un exercice. Alors cette semaine je les ai tous notés sur une feuille, je les ai relu plusieurs fois pour bien m’en imprégner et je les emporte en vacances. Parce qu’en vacances, je prends le temps de regarder et d’écouter les gens, les animaux (les insectes surtout)et les choses.Oui, oui, les choses parlent aussi.
    Le temps d’ouvrir les yeux.
    Les idées viennent toutes seules.

  10. Miel dit :

    Merci Laurence pour ce partage…C’était très intéressant. Nous avons tous nos trucs pour trouver l’inspiration (la mienne rejoint celle de béryl) et elle vient, forcément à un moment ou un autre comme le prouvent chaque semaine, les billets des participants de ce blog, au départ en panne d’idée pour certains.
    L’inspiration finit par venir, c’est un fait. Ma préoccupation majeure se tourne plutôt vers la forme que le fond.
    Car avoir des idées, c’est bien, mais les mettre en forme est une autre paire de manche…
    Sous prétexte d’avoir une imagination débridée, l’auteur peut se laisser aller à des bavasseries, à des élucubrations babillardes qui ne passionnent que lui… Personnellement, je n’aime pas les textes bavards où l’on parle pour ne rien dire, surtout en ce qui concerne les dialogues qui pêchent souvent par platitude.
    Alors plutôt que de recopier au mot près ce que Muse nous souffle à l’oreille, apprenons à maîtriser ce qu’elle nous dit, à aiguiller, peaufiner pour en traduire sa quintessence plutôt que sa matière brut.
    Pour me captiver, de la concision avant tout…
    Alors inspiration, oui.
    Jacasserie, que nenni !

  11. Beautreillis dit :

    Chacun a sa façon de trouver des idées plus ou moins originales.
    Expliquer sa démarche est très intéressant. Merci Laurence

  12. C’est vrai, Pascal, que la Vie est une immense scène de théâtre où l’on est à la fois acteur et spectateur.
    En écriture , il ne faut surtout pas être raisonnable, considérer la Vie comme un jeu est une philosophie formidable. La vivre comme tel, est un défi permanent; possible et supportable par le biais des arts.
    Votre intervention vidéo m’a touché, par sa véracité et sa simplicité parce que vous mettez l’écriture à l’intérieur de l’être et non à l’extérieur, et encore moins au dessus.Et que vous vivez votre passion à fond.
    Merci également de m’avoir ouvert votre tribune.

  13. Beryl Dupuis-Mereau dit :

    Je fais un copier-coller de la proposition d’écriture de Pascal sur une page blanche d’ordinateur, je fais le vide dans ma tête, je lis la proposition une fois puis je laisse courir « ma plume ». A partir de là l’écriture est quasi automatique.

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