Portraits à couteaux tirés de Pascal Perrat

Faiseur de vent depuis 1947 

« Vous faites la cuisine ? ». L’homme s’indigne. Sa femme ? « Elle s’enquiquine dans une banque tout confort ». Ses parents ? « Un père militaire par nécessité, une mère au foyer, conne comme un balai ». Ses études ? « Une catastrophe ». Ce macho autodidacte de 55 ans a son franc-parler. Pas forcément l’attitude idéale dans l’univers impitoyable de la communication. 

Mais la force de Pascal Perrat est de savoir qu’il n’est là que de passage. « Je suis capable de foutre en l’air en quelques instants ce que j’ai mis du temps à construire ». Et cela fonctionne dans toutes ses vies. Un coup de gueule et c’est un gros contrat qui n’est pas conclu. Un brin d’ennui et c’est sa femme qui   est éconduite. Sa vie est avant tout la sienne et rien d’étonnant à ce que ce macho cite comme principal défaut son égoïsme. 

Car sa réussite, il ne la doit qu’à sa force de travail. Dyslexique incompris dès le plus jeune âge, il a tenté plusieurs filons avant de dénicher le plus lucratif. Et prit sa revanche sur des parents qui le qualifiaient de « débile ». 

On l’aura compris, Pascal Perrat est libre. Libre comme l’air qu’il aime brasser. Il le dit lui-même. « Mon travail dans la communication n’est que futilité ». Mais il a trouvé un bon filon et s’échine à l’exploiter. L’idée est simple : « La plupart des gens ont l’imagination empoussiérée. Mon métier est de remettre le moteur en route ». Il a commencé dans les écoles et travaille aujourd’hui pour les plus grandes entreprises où il épaule des dirigeants pour leur discours, écrits, vœux, etc. Un éveilleur d’idées ?  Le nom a été déposé. 

Mais à quoi peut se raccrocher le vent ? Pascal Perrat trouve ses attaches dans son Paris natal, du côté de ses quelques amis et revendique même un « sens de l’engagement ». Mais surtout, « faire bouger la tête d’une personne, voilà ce qui m’intéresse », assure-t-il. Car le vent peut aussi faire bouger les choses. À croire qu’il serait presque devenu utile.

Aurélien Ferron au CFPJ

Jongleur d’idées

« En quelques minutes, je peux fiche en l’air une situation établie ». Pascal Perrat aime les choses qui bougent. 

En 1985, dans la foulée, il change de job, de femme et arrête de fumer. Il abandonne l’agence immobilière qu’il a créée et devient scénariste, puis formateur et enfin, éveilleur d’idées. Son but : titiller l’imagination des autres. « Nous avons tous un enfant créateur qui sommeille en nous. Il suffit de le sortir, de le retrouver » confie-t-il. 

Ses mots préférés : cahin-caha et tohu-bohu. « C’est musical » Les gens sans originalité « L’ennuient, pour être poli… » . « Les gens ont une imagination sclérosée et poussiéreuse » s’énervent-ils. Son talent et son franc-parler lui ouvrent les portes de grandes sociétés. AVENTIS, AGF, VIVENDI, VEOLIA, etc., font appel à ses services. « J’ai briefé des patrons internationalement reconnus » confie-t-il fièrement. 

Une sacrée revanche pour cet autodidacte qui a pas mal souffert. Petit, ses parents le prennent pour un feignant et ses professeurs pour un cancre. Son parcours scolaire est un échec. La cause ?  Sa dyslexique. « À cette époque, la dyslexie était inconnue. Surtout dans les milieux populaires » confie-t-il. Mais sa force de caractère, son énergie et sa volonté l’aident à surmonter son handicap. Il apprend à jongler avec les mots qu’il déforme involontairement, les reforme à sa façon et écrit des poèmes. « L’imagination est quelque chose qui permet de vivre confortablement et d’avoir toujours des projets ». Et à plus de 60 ans, il en a encore plein la tête. 

Anne 

La forme « anar » 

À l’heure où d’autres ne rient déjà plus, lui ricane encore comme un gamin. Au CFPJ, assis derrière son ordinateur portable, il cherche à rendre « créatifs » les futurs journalistes de France. 

Eveilleur d’idée, tel est son métier. Avec ses exercices, ses petits jeux de l’esprit, il ramène sa science imaginative dans les entreprises, les écoles et les associations. 

« Depuis que j’ai inventé ce concept, cela intrigue les gens. L’imagination, les idées, tout le monde en a, même ceux qui croient ne pas en avoir. » La formule est bien rodée, elle fait ses preuves. Et cet autodidacte, dyslexique de surcroît, de s’enorgueillir de son absence de diplôme. 

Car rien ne semble plus l’amuser que de donner des conseils d’écriture, lui qui ne reçu, si longtemps, que des critiques. « Mes parents étaient persuadés que j’étais débile. Mes études furent catastrophiques et mon parcours lamentable. Avec un père militaire et une mère au foyer conne comme un balai, j’aurais dû finir  ado naze et inhibé. Mais plutôt que d’aller voir un psy, le me suis dit que, comme tout le monde, j’étais moi aussi, une pelote de laine avec plein de nœuds et qu’il fallait bien vivre avec ces nœuds. » 

Brimé par des parents qui ne croient pas en lui – il répète à l’envi à quel point sa mère est « conne » – il se « planque pour écrire » et fini par être publié. Ce sera un recueil de poésies (Un regard peut-être..) qui lui ouvre la voie pour son actuelle profession. 

« C’était dans les années 80, on m’a proposé, suite à l’édition de mon livre, de faire écrire des poèmes aux enfants dans les écoles. » Ce sera le déclic. En effet, pourquoi ne pas développer cette idée pour des adultes ? Dynamiser les placides rédacteurs de la presse professionnelle, les publicitaires en panne et les mornes discours de chefs d’entreprises ou de politiciens, tel sera son nouveau pari. 

Et d’afficher aujourd’hui ses cinquante-cinq ans aujourd’hui, comme d’autres des trophées. Son parisianisme, son chauvinisme et son machisme assumés comme de petites provocations de plus, histoire de garder la forme « anar ». 

Il est content et le raconte de « refuser du boulot quand d’autres à mon âge sont au chômage ».Tant mieux s’il trouve du monde pour l’écouter, et pour l’écrire. YLC

lllacadi

Il fut l’un des premiers français à écrire le verlan … uniquement parce qu’il était dyslexique. À bientôt 70 ans, Pascal Perrat, ex-aide-pompiste et agent immobilier hors norme, a enfin atteint son objectif : (bien) vivre de son écriture. 

 » Tu vois la Une du journal, là ? C’est marqué Figaro … Eh bien, quand j’étais môme, j’étais capable d’écrire Garofi … et lire Figaro. Normal : j’étais dyslexique ! » Le problème du petit Pascal Perrat, c’est qu’au tout début des années 50, le trouble en question n’était pas encore identifié comme tel : le gamin fut donc très rapidement « cancre ». Pour le plus grand malheur de ses parents :  » Ma mère m’imaginait déjà toubib, mon père espérait faire de moi un ingénieur. T’imagines leur tête quand, après avoir échoué dans toutes les écoles, je me suis retrouvé en apprentissage de mécanique agricole ! » 

On imagine aisément la sienne aussi. Car P.P., s’il n’a pas le bac, n’en est pas moins  » médaillé de l’Académie française  » (pour un obscur recueil de poésie publié à compte d’auteur dans les années 70), et l’auteur d’ouvrages à succès (dans le monde des professionnels de l’écriture en’ tout cas) comme Enrichir son style. Quand il vous déclare qu’il n’est « pas vraiment un manuel », on est prêt à le croire sur parole. 

Il n’en fut pas toujours ainsi, loin de là. : pendant la moitié de sa vie, Perrat dû s’accommoder de l’idée que tout le monde le croyait bête comme ses pieds. Alors qu’il se sentait créatif, sinon poète. D’où malaise persistant. Après avoir pitoyablement échoué dans la mécanique agricole, tenté (sans conviction débordante) une carrière de vendeur de bagnoles d’occasion, puis d’agent immobilier hors norme, « Un jour, j’ai fermé l’agence« pour cause d’épidémie de décibels », ce qui m’a tout de même valu l’intérêt d’un type qui m’a ensuite ouvert les portes des stages en entreprise … » Pascal Perrat a eu la bonne idée de tirer les enseignements d’une vie pour le moins chaotique. 

Le résultat : un septuagénaire heureux de vivre. Qui se pince encore pour être sûr qu’il ne rêve pas, quand il se réveille dans sa petite propriété de Cadillac, dans le Bordelais. Et tant pis si ce dyslexique s’obstine à transformer Cadillac en lllacadi … 

P.E.R.R.A.T, mais catholique

Quelle mouche a bien pu piquer Pascal Perrat le 31 août 1940 ? Si cela reste un mystère, le petit parisien branché de Port-Royal a bien mûri depuis, sans trop grandir (à peine 1,72 m). 

A l’âge où d’autres prennent leur retraite, lui préfère éveiller les idées. 

Eveiller quoi ? L’imagination. En d’autre termes, il « remet en route la créativité de chacun. »

Et ca fonctionne bien. Depuis près de dix ans, il exerce ce métier de formateur éveilleur. Il agite la tête des élèves journalistes et celles des patrons d’entreprises prestigieuses. Un parcours réussi pour cet enfant « catastrophe scolaire.  » C’est dire s’il revient de loin. 

De son père militaire et de sa mère au foyer, l’enfant unique garde des souvenirs plutôt amers, sous couverts de « on est tous blessés par nos parents.  » 

Ca rassure. Un sensible qui s’est libéré de sa dyslexie dans l’écriture. D’abord poète en herbe, le trublion se forme sur le tas. Lui qui aime se définir comme « autodidacte. » Il a écumé plusieurs métiers: commercial, « éveilleur (déjà) poétique », scénariste… Bref, il a saisi les opportunités. 

Entre vieil ours bourru et gros nounours à câlin, l’homme au front dégarni a toujours eu la rage de vaincre et… de provoquer. Il cultive son ambivalence : il touche comme il énerve. 

Lucide sur ce fonds de commerce original, il sait que cela reste du vent. Rictus aigu et spontané : mi-ange, mi-démon. 

Orlane, Portrait de Pascal Perrat

Paroles

Ce dont il est le plus fier, c’est de s’en être sorti comme ça. Pas fou, pas déprimé, oeuvrant pour des « pointures », tandis que ses bouquins s’alignent tranquillement à la Bibliothèque nationale. Cette réussite, c’était pas gagné. « Quand j’ai raconté mon enfance devant une assemblée de sois-disant défavorisés, ils n’en revenaient pas ». Petit, Pascal souffre de dyslexie avancée. « Dès le départ, mes parents ont réglé la chose de façon définitive : j’étais débile. Un point c’est tout . Vexations, humiliations, brimades, l’enfance a un goût amer. Cinquante ans plus tard, Pascal garde une sale rancune envers sa « vieille », un côté macho, une tendance à l’égoïsme et un goût immodéré pour. . . la parole ! 

Quand il commence à parler, on ne peut plus l’arrêter. En vrac, il raconte ses études catastrophiques, ses expériences en communication, son prix de l’Académie française pour un recueil de poésie, sa vie de scénariste pour entreprises et collectivités locales. Un amalgame d’autodidacte, mêlé d’anecdotes, de rencontres, de hasards. Tout ça pour finir « éveilleur d’idées ® ». 

Vous m’en direz tant. En fait, Pascal bénéficie depuis quelques années d’un nouvel engouement pour « l’épanouissement personnel » . Il « réveille les imaginations » , « libère les écritures », vous fait « sortir du cadre ». Et ça marche. Ca cartonne même. Conférences, stages, formations en entreprise, en école… Son agenda 2003 est déjà booké. 

Plus de 55 ans, cheveux gris, un poil bedonnant, Pascal assure avoir aujourd’hui le sens de l’engagement. Mais après trois mariages et la capacité à tout envoyer paître en cinq minutes, même les travaux de longue date, on dira plutôt qu’il est fidèle en amitié… 
Son look nous rappelle quelque chose, Pablo Picasso ? Non, impossible, ce rire-là. 

Pascal Perrat, l’ouvreur de boulevards

Pascal Perrat, l’ouvreur de boulevards

Réputé cancre et dénigré par ses propres parents, Pascal Perrat a trouvé sa voie dans l’écriture et la formation des professionnels de la presse et de la communication d’entreprise. Un beau parcours atypique d’un autodidacte complet.

 » La poésie m’a enchanté immédiatement, car ça sonnait bien pour moi. Je glissais des passages entiers dans mes premières rédactions. J’ai écrit mes premières nouvelles pour mes copains de lycée professionnel. À 30 ans, j’ai remporté un concours régional de poésie… avant d’être couronné par un prix de l’Académie française. Autant dire que ça m’a ouvert des boulevards. Aujourd’hui, c’est moi qui ouvre des boulevards pour les autres. »

Parisien pour sa vie professionnelle mais Bordelais pour la qualité de vie, Pascal Perrat n’a pas connu une enfance heureuse. Ballotté par ses parents d’un pensionnat à un centre d’apprentissage et qui le traitaient de bon à rien à longueur d’années, Pascal Perrat a tourné la page de sa jeunesse où il était  » battu psychologiquement  » pour se lancer dans l’écriture, en Seine-et-Marne.  » Je n’y croyais pas. Moi qui n’étais qu’un petit aide pompiste. J’ai dû donner des interviews à la presse, puis conférencier sur la poésie pour le compte de l’Éducation nationale. »

La suite est venue très rapidement : un premier recueil de poésie, « Un regard peut-être », tiré à 2 000 exemplaires, puis un second, « Bleu cérébral ». La gloire retombée, une réception officielle à l’Académie française- Pascal Perrat n’en est pas moins resté les pieds sur terre, travaillant pour le compte de banques et de groupes industriels.

Nouveau déclic et nouvelle clé du succès pour Pascal Perrat :  » Je me suis trouvé l’âme d’un éveilleur d’idée. Je me suis mis à mon propre compte par la seule puissance des mots. J’ai fait des slogans de pub pour Philips. J’enseigne au Centre de perfectionnement des journalistes à Paris ». Nouveau filon depuis peu : le « coaching dans les prés ». Pascal Perrat organise des bilans de personnalités à domicile, prodigue des conseils d’écriture pour qui veut se faire coacher ou changer d’orientation. « J’ai appris énormément, et je continue à le faire, en observant les gens ». C’est tout l’art du formateur qui a fréquenté des grands noms de la littérature et de la peinture.

La vie de M. Perrat est un vrai scénario à elle toute seule. Elle s’est faite sur des débris, sur une déchirure et sur des échecs. Mais quelle réussite ! J.-P.

Déjouer les paresses de l’esprit

«Ha Ha Ha. Je vous ai eu les gars. Vous avez gobé tout ce que je vous ai raconté sur ma vie! » Ce serait vraiment la meilleure. Mais après tout, pourquoi pas ? Pascal Perrat n’en est pas à une pirouette intellectuelle près. 

Même quand il parle de sa vie, les non avertis peuvent s’attendre à un coup pendable. Car l’homme est né pour surprendre, déjouer les paresses de l’esprit, les imaginations encroutées, les a priori et les idée reçues. Il a de l’imagination à revendre. Et il la vend très cher. A 55 ans, c’est son métier, « éveilleur d’idées ». Un métier qu’il a inventé, pour « bouger la tête des autres ». Sa vie, il vous la raconte comme il écrivait les scénario de film, pour gagner sa croute, au tout début de sa carrière d’autodidacte. L’enfance malheureuse du petit gavroche parisien, mal aimé et brimé. « J’étais nul, dyslexique, mais j’écrivais de la poésie en cachette. Mon père se foutait de moi. Les profs me jetaient de partout. J’en veux encore à mes parents. Mais quand on a un talent, il ne faut pas le galvauder » A coup de volonté, et de passion, Pascal écrit, jusqu’à la récompense de l’Académie Française. 

Sans oublier la petite dose de bluff. « J’ai connu Maudit mais pas Gliani. Et quand j’étais coiffeur… Ha ha ha ! » 

Qu’il ai fait plein de « conneries » , il est difficile d’en douter. Mis au trou pendant son service militaire, viré de plusieurs boîtes… gaffeur en entretien avec tel grand canard. « Aujourd’hui, mes bouquins sont à la B N  ! » Fin de l’histoire.
De pétillant, le regard « pascalien » devient un zeste nostalgique. Non, pour cette fois, ce n’était pas un film. 

Claire

Zapper Toujours

Si Pascal Perrat était une télécommande, il zapperait son enfance. Sa mère en premier : « une conne qui a passé sa vie à se battre contre les tâches et la poussière ». Il zapperait l’école et ses maîtres du pensionnat qui n’ont pas compris sa dyslexie. Qu’avec elle les mots s’inversent naturellement, se transforment, prennent de la couleur. Et qu’assemblés, ils deviennent poésie. Ils n’ont pas voulu voir le virtuose derrière l’oisif.

Il aurait pu être ce cancre de Prévert qui dit : « non avec la tête, mais oui avec le cœur » A 18 ans, sans bac en poche, il raye de sa vie le tableau noir des donneurs de leçons. Et n’aura plus qu’un mot à la bouche : plaisir. Pascal rattrape alors le temps perdu. Se marie une fois, deux fois ou presque, et pour de bon une troisième fois. Enchaîne les rencontres Godart, Truffaut, Guilevic, Soulages, Miotte…   
Et les boulots : commercial,  agent immobilier, créateur de cheminées, rédacteur. Passage éclair à chaque fois. Pascal se lasse et zappe. Dans les années 80, il revient à la seule certitude de sa vie : l’écriture et la poésie. Un prix à l’Académie Française. La reconnaissance du public. Le poète étoffe son égo. Et s’auto-proclame éveilleur d’idées. Désormais, il transmettra son savoir. Du vent. Ou plutôt des grains de poussière qu’il met dans la tête d’étudiants en communication, ou de publicitaires. Pour bloquer les rouages habituels. Leur apprendre à penser autrement. À zapper. Vite !