Exercice inédit d’écriture créative 134
Inventez une histoire dans laquelle on trouvera,
dans l’ordre où ils sont classés,
les termes suivants :
dans un bouchon Lyonnais
« C’est mon petit bouchon ! »
nul doute, il avait un petit goût de bouchon
bouchon doseur
roula sa serviette en bouchon
ne quittait pas des yeux le bouchon de sa ligne
Bison Futé annonçait des bouchons à l’entrée des grandes villes
on allait enfin faire sauter le bouchon !
Inventez une histoire de « bouchons »…
Sylvain: Homme bien de sa personne cherche JF pétillante pour sorties agréables et plus si affinité.
Fontette : JF pétillante cherche JH posé pour sorties culturelles, promenades et autres loisirs.
De nombreux échanges suivirent ces deux demandes, qui, un jour, se trouvèrent des affinités virtuelles. Tant et si bien qu’il fallut envisager une rencontre bien réelle. D’un commun accord, ils décidèrent qu’elle aurait lieu à Lyon.
Vendredi soir, après une première balade, Sylvain et Fontette demandèrent aux « locaux » la meilleure adresse pour se restaurer.
– Vous êtes à Lyon, c’est dans un bouchon lyonnais qu’il faut aller !
– Un bouchon ? Mais encore ?
– Vous régaler d’un tablier de sapeur ou d’une cervelle de canut !
Une heure plus tard, la cuisine locale donnait de jolies couleurs aux joues et aux mots. Sylvain, un peu éméché, demanda la carte des desserts. Lorsque ceux-ci arrivèrent, Sylvain clama haut et fort, en regardant le serveur et posant sa main sur celle de Fontette :
– C’est mon petit bouchon !
Arriva l’instant de la douloureuse. Sylvain se tâta la poitrine et d’un air confit avoua …avoir oublié son chéquier. Discrètement Fontette glissa sa carte bleue dans le petit seau.
Le lendemain, la journée s’annonçait riche de visites : le vieux Lyon, les traboules, Fourvière, les musées, la Croix Rousse, la chasse aux « trompe l’oeil » et bien sûr, la maison des Canuts.
Après cette dernière visite, Fontette fut éblouie par les soieries et les foulards proposés dans la boutique. Elle s’émerveilla, tantôt sur les coloris, tantôt sur les motifs et la texture sensuelle. Elle choisit un foulard et plongea sa main dans son sac. Sylvain approuva son choix.
Le coucher de soleil enflamma ND de Fourvière et réveilla leur appétit. D’un pas tranquille, ils partirent à la découverte d’un autre bouchon.
Le vin aidant, Sylvain se livrait de plus en plus. Sa conversation prenait des méandres qui surprenaient Fontette. Sur un ton plus que gaulois, il appela le serveur, en levant son verre.
Le serveur pensa qu’il n’y avait nul doute possible, son client lui dirait que ce vin avait un petit goût de bouchon.
Fontette pensait qu’il faudrait peut-être, mettre un bouchon doseur aux propos et à la conduite de Sylvain.
Allez savoir pour quel mot ou pour quelle réflexion indue, Sylvain roula sa serviette en bouchon et entraîna Fontette hors de ce bouchon. Celle-ci, tous les sens en éveil se fit un cinéma intérieur. Elle voyait une ligne rouge et ne quittait pas des yeux le bouchon de sa ligne. Une image qui représentait au plus juste un signal d’alarme.
Retour à l’hôtel.
Dans sa chambre, Sylvain était allongé sur le lit, et passait en revue les heures qu’ils venaient de vivre. Il se dit que le poisson était bien ferré.
Dans sa chambre, Fontette écoutait distraitement la radio. Bison Futé annonçait des bouchons à l’entrée des grandes villes. Cela ne l’empêcha pas de quitter sa chambre sans bruit, de descendre à la réception et régler sa note.
Elle entendait déjà Sylvain dire qu’on allait enfin faire sauter le bouchon ! »
Fontette riait au volant de sa voiture. Pour sûr qu’on allait enfin faire sauter le bouchon, et comment !
Dans un bouchon Lyonnais, on peut y trouver des quenelles, du saucisson, un tablier de sapeur, de la cervelle de canut, …. Le tout arrosé d’un pot de Beaujolais. C’est ce que j’avais décidé d’offrir à ma femme pour notre anniversaire de mariage ! Lorsque le serveur est arrivé, je ne pu m’empêcher de sortir cette phrase idiote :
« C’est mon petit bouchon ! »
Le sommelier se décida enfin à s’occuper de nous… Il nous fit goûter un vin de son meilleur cru paraît-il : du château Talbot de 68 apparemment un grand cru sauf que… nul doute, il avait un petit goût de bouchon ! L’expert en vin se confondit en excuses et nous proposa en fin de service un cocktail spécial jeunes mariés !
Tel Tom Cruse, il prit son shaker, son bouchon doseur, notre Fair bartender, nous prépara une mixture merveilleuse puis roula sa serviette en bouchon.
Dans cette euphorie, et l’alcool aidant, nous discutâmes de nos jeunesses respectives et Juliette, comme à chaque fois qu’elle est mi figue, mi raisin, se mit à me parler de son père, décédé il y a quelques années. Elle repensait à ses journées de pêche interminable où elle ne cessait de courir de gauche à droite pendant que mon beau père ne quittait pas des yeux le bouchon de sa ligne ! La fin de repas s’annonçait tristounette, et j’en profitais pour lui glisser une petite enveloppe dans laquelle se trouvait…. Deux billets allez pour la Martinique ! Elle était radieuse, son sourire d’une blancheur étincelante, ses yeux d’un vert si léger et cette petite larme qui perle… Pour éviter de prolonger ce moment d’émotion, je l’informais que Bison Futé annonçait des bouchons à l’entrée des grandes villes et qu’il fallait partir au plus tôt !
Notre voyage se passa sans encombre et… pour entrer dans notre paillote réservée pour 15 jours, à l’abri des regards, des enfants, des parents… je ne pu m’empêcher de la prendre dans les bras pour la faire entrer… telle ma sirène… je comptais bien en profiter et maintenant…
on allait enfin faire sauter le bouchon !
Les p’tits bouchons
Chapitre I
Dans un bouchon lyonnais, sur la belle nappe blanche où règnent encore les reliefs du repas, on entendit crier :
« – C’est mon p’tit bouchon ! »
Le petit bouchon de vin rouge sursauta. Cette voix. Cette voix qu’il n’a jamais oubliée.
« -Ma p’tite bouchonne de vin blanc… »
Vingt ans. Vingt ans déjà qu’il s’est entendu dire :
« -Une bouchonne de vin blanc ? Tu veux la mort de ta mère ? Tu ne l’épouseras jamais. »
Vingt ans qu’elle s’est entendu dire :
« -De vin rouge ? Es-tu devenue folle, ma fille ? Jamais. »
Le p’tit bouchon et la p’tite bouchonne, la mort dans l’âme, ont alors regagné chacun leur bouteille, et chacun a suivi sa route, de cave en cave.
La p’tite bouchonne a bien tenté l’aventure avec un bouchon de vin blanc, mais nul doute, il avait un petit goût de bouchon amer. Quant au p’tit bouchon de vin rouge, l’année dernière, il s’était amouraché d’un bouchon doseur. Mais un soir qu’ils dînaient ensemble, le bouchon doseur reposa lentement son verre de bière sur la table, roula sa serviette en bouchon, et dans un soupir, annonça :
« – Je te quitte. »
Lors de leur dernière partie de pêche, notre petit bouchon avait bien remarqué que son bouchon doseur ne quittait pas des yeux le bouchon de sa ligne. Mais il n’aurait jamais pensé que cela irait au-delà. Etre trompé par un vulgaire bouchon en plastique qui trempe le cul dans l’eau …
Chapitre II
Dans un bouchon lyonnais, sur la belle nappe blanche où règnent encore les reliefs du repas, Alain et Inès dégustent en silence un dernier café avant de reprendre la route. Ils ont fêté aujourd’hui leurs vingt ans de mariage. Les invités sont partis tôt, Bison Futé annonçait des bouchons à l’entrée des grandes villes, mais la fête a été très réussie. Maintenant, les serveurs s’affairent à débarrasser la vaisselle qui jonche la belle nappe. Inès joue avec les miettes, quand soudain elle sursaute, se met à rire et secoue la tête :
« – Je crois que j’ai trop bu. J’ai entendu parler un bouchon de vin !
-Qu’est-ce qu’il racontait, ton bouchon ?
-Il criait : c’est ma p’tite bouchonne, c’est ma p’tite bouchonne !
-Ho lala, c’est vrai que tu as trop bu ! »
Et main dans la main, Alain et Inès sortirent en riant.
Pourtant, Inès aurait dû rester un peu plus longtemps. Elle aurait vu un p’tit bouchon de vin rouge et une p’tite bouchonne de vin blanc sauter main dans la main en bas de la table, se projetant déjà dans l’avenir : on allait se marier, faire des enfants tout roses, vieillir ensemble… On allait enfin faire sauter le bouchon de champagne !
©Margine
Il avait tant entendu parler, et depuis si longtemps, de la cuisine française, de sa richesse et de son raffinement qu’il décida, à la sortie de l’école hôtelière, d’entreprendre un tour de France gastronomique.
Il débuta son périple dans le plus fameux bouchon lyonnais réputé, fleuron de la ville de Lyon, considérée comme la capitale de la gastronomie française, elle-même réputée la meilleure cuisine au monde, autant dire qu’il était convaincu de pénétrer dans le saint de saints.
Pour tout dire, il trouva le repas, composé de tripes, de saucisses farineuses, d’os et de fromage grumeleux, lourd, gras et finalement très indigeste.
« C’est tout de même, ma Daisy, mon petit bouchon du Wisconsin, qui cuisine la meilleure cuisine au monde » se dit-il
Et ce n’est certes pas le Beaujolais, un Juliénas grand cru, qui aurait la prétention de sauver ces piètres agapes. Nul doute, il avait un petit goût de bouchon. Il est vrai que le sommelier s’était escrimé, lui avait-il semblé, sur le tire-bouchon pour finalement expulser un bouchon de liège et lui servir une quantité de vin qu’il jugea ladre, lui qui était convaincu depuis toujours de l’utilité du bouchon-doseur
Dire q’il avait dû subir des bouchons de près de deux heures sous le tunnel de Fourvière pour subir cet alignement de médiocrités. Pas de quoi faire sauter le bouchon de Champagne !
Il roula sa serviette en boule qu’il jeta de mauvaise humeur, conclut qu’il connaissait désormais suffisamment la cuisine française et décida de rentrer au pays.
Pousserai-je le bouchon un peu loin si j’affirmais que c’est la gastronomie française, et l’image désastreuse qu’il en conserva, qui incitèrent Richard Mac Donald à créer le concept de de l’alimentation rapide ?
Dans un bouchon Lyonnais
« C’est mon petit bouchon ! »
J’avais donné rendez-vous à ma toute nouvelle « fiancée », dans un bouchon Lyonnais, un vrai de vrai. Il avait même, accroché au-dessus de sa porte, la botte de rameaux emblématique.
Sans doute, briqué au Coca-cola, le zinc brillait comme un sous neuf. Des pots de Beaujolais, tous disparates, encombraient le comptoir. Pendues au-dessus du bar des cochonnailles que j’imaginais savoureuses me chatouillaient le nez. Un verre de vin blanc à la main je bavardais avec le patron.
– Je pense que votre label « Authentique bouchon Lyonnais » a dû être un sacré atout !
– Oui, car il y a trop de faux bouchons qui servent même des pizzas ! Maintenant, c’est un peu comme les cocktails dans les Harris Bars.
– Ah tiens voilà ! C’est mon petit bouchon à moi qui arrive.
Zelda entra rejetant une mèche folle dans un cliquetis de bracelets en argent.
– Bonjour ma chérie (mot inhabituel dans ma bouche, qui sortit involontairement).
Sourire épanoui de la belle, qui lança un « bonjour » de sa voix chaude et sensuelle.
Des regards, plein de….convivialité ……dirais-je, se tournèrent vers la jeune femme.
– Je vous ai préparé cette table près de la fenêtre, ça vous va ? dit le patron
Oui cela m’allait très bien car les rideaux de fausse dentelle nous cachait des passants. Vu ma réputation de « croqueur de femmes », je n’avais pas envie d’être vu avec ma nouvelle conquête
Le patron, peut-être sous le charme de Zelda, nous offrit un pot de Beaujolais qu’il posa sur l’inévitable nappe à carreaux rouges et blancs :
– C ‘est pour moi. Dit-il à la façon des aubergistes.
Dès la première gorgée nous fîmes la moue. Nul doute, il avait un petit goût de bouchon, très léger, mais aucun de nous ne se sentait d’en faire la remarque au généreux restaurateur. Tant pis cela ne nuira pas à l’excellente cuisine de ce Bouchon si réputé.
– Tu ne peux savoir comme j’apprécie les personnes qui ne prennent pas de Coca avec un bon repas. Avouai-je.
– Tiens à ce sujet, j’ai acheté un appareil pour fabriquer mes sodas toute seule. C’est simple, de l’eau du robinet et un bouchon doseur de saveurs concentrées. Et hop ! Je gazéifie comme j’aime.
– Beurk !! M’est sorti spontanément !
Nous venions de finir de déjeuner, j’avais réglé la note. Je n’aime pas me faire inviter par une femme ni partager l’addition.
Avant de se lever pour partir, Jérôme roula sa serviette en bouchon sans y prêter attention, geste que son amie ne manqua pas de relever.
– Ah bon, tu plies ta serviette !! Tu la gardes pour la prochaine fois ? Me dit-elle avec un sourire très moqueur qui me vexa un tantinet. Mais je repris rapidement la balle au bond.
– Bien sûr, avec toi !!!
Zelda donnait l’impression de la bonne élève de la classe. Une sorte de perfection sexy. Opposés très attirants. J’eus peur que ce faux pas ne coupe court à notre idylle.
Le ciel bleu s’assombrissait tout doucement, le soleil virait à l’oranger, promesse d’un crépuscule éblouissant et d’une nuit étoilée.
Elle ne retira pas sa main lorsque je la pris pour traverser le pont qui menait à ma voiture. Ouf !
– Tu vois ce pêcheur, me dit-elle. Il ne quitte pas des yeux le bouchon de sa ligne. Je te parie que dans deux minutes, il part avec lui. On est trop loin pour le prévenir.
Quelques minutes plus tard, le pêcheur tombait effectivement à l’eau.
– Comment as-tu prévu ?
– À force de fixer ce bouchon, il a perdu toute notion de son environnement. Il se balançait au rythme du clapotis fasciné par le ballotement de son appât. Le poisson a mordu, inconsciemment il l’a suivi. J’ai fait une thèse là-dessus. On l’appelle le « »Syndrome du pêcheur ».
Avant de partir nous le vîmes regagner la berge.
Elle m’intriguait un peu plus, je la connaissais à peine, j’avais envie de me persuader comme à chaque nouvelle aventure, que ce serait l’élue de mon cœur.
La musique de l’autoradio s’interrompit Bison Futé annonçait des bouchons à l’entrée des grandes villes, comme chaque dimanche soir, le temps pour un même trajet était multiplié par trois.
– On n’est pas arrivé, soupirai-je
– On a tout le temps…
Que voulait dire cette réponse sibylline ? Qu’on pourrait faire enfin sauter le bouchon de champagne en même temps que les boutons de son ravissant chemisier lavande?
Quelques heures plus tard, lorsque Jérôme voulut « conclure », selon la formule inoubliable de Michel Blanc, Zelda le découragea.
Tu ne crois pas que tu pousses le bouchon un peu loin ? Lui susurra-t-elle à l’oreille.
Cette anecdote se passe dans un bouchon Lyonnais, un petit môme court vers sa maman qui lui tend les bras : « C’est mon petit bouchon ! » s’exclame-t-elle en l’embrassant. « Dis bonjour à papy, tu veux bien lui faire un petit bisou ? »
Le marmot s’approche du vieux, assis devant son verre de Beaujolais et lui tend la joue. Le viel homme se baisse et grimace, nul doute son petit-fils a un petit goût de bouchon, de bouchon doseur, même. Comme si sa mère le frictionnait à l’eau Javel…
Machinalement, il roula sa serviette en bouchon et songea tout à coup, sans savoir pourquoi, au vieux temps, quand au bord de l’eau, son père ne quittait pas des yeux le bouchon de sa ligne. Ses yeux se mouillent
À la radio, Bison Futé annonce des bouchons à l’entrée des grandes villes
Demain, c’est mon anniversaire songe papy, un plus, heureusement on va enfin sauter le bouchon, un vrai, bien en liège, comme avant
Dimanche soir, 20h30, dans un bouchon lyonnais.
Une bouteille de vin blanc râlait : « mais c’est mon petit bouchon ! Je le reconnais ! Pourquoi vous avez pris mon p’tit bouchon ?
– parce que j’ai perdu le mien …… claqua la bouteille de vin rouge.
Regardez ; je l’ai avalé ; il flotte dans mon ventre et bientôt, si je ne me dépêche pas de séduire les derniers clients, même les plus éméchés vont jouer les fins connaisseurs, trop fiers d’avoir perçu un faible goût glissé sur leurs papilles saturées d’alcool, clamant, imbus d’eux-mêmes et d’alcool, portant leur verre et le verbe hauts : « oh nul doute, il avait un petit goût de bouchon celui-là… ». Cela ne les empêchera de me vider entièrement… Le bouchon doseur, ils ne connaissent pas ceux-là…..
– SILENCE ! leur intima la table, vous allez effrayer les clients à papoter ainsi ! Voyez, les derniers clients se préparent déjà à nous quitter… ATTENTION, un des gourmets va se lever».
Ce gourmet semblait pourtant calme : il roula sa serviette en bouchon, étira ses bras, lissa la toile de son pantalon sur ses cuisses… mais il ne quittait pas des yeux le bouchon de sa ligne de flottaison, là, au beau milieu du ventre goulu de la bouteille de vin rouge.
Même la radio, jetant à qui voulait l’entendre ses nouvelles sombres de fin de journée, ne parvint à détourner son attention : « Bison Futé annonçait des bouchons à l’entrée des grandes villes, Météo France se chargeait des orages violents dans le centre ville, la Police prévenait d’une hausse du nombre d’agressions violentes, et le gouvernement assurait qu’il fallait travailler jusqu’à plus soif ni faim. »
Mais le gourmet était captivé par ce bouchon. Une seule idée trottait dans sa tête : le faire sortir sans casser la bouteille, l’extirper par ruse.
Soudain, le gourmet monta sur la table et lança le défi aux derniers clients : qui réussira ? Qui ose ?
Le gourmet devenu tribun tirait les clients par la manche ; déjà un groupe se formait autour de la bouteille.
« Qui parie ? A combien le pari ? » Le tribun s’époumonait qu’on allait s’offrir un peu de joie, on allait enfin faire sauter le bouchon ! « Je vous le promets ! ». Puis, d’un tour de passe- passe, il fit glisser le bouchon le long du goulot trop étroit, jusqu’à sa sortie.
Et je perdis mon pari.
Mais sa promesse était tenue : la journée morose s’achevait sur une nuit joyeuse où les rires et les tintements des verres résonnent encore dans mon souvenir.
Il lui avait promis depuis si longtemps ! il invita enfin sa Madelon dans un « bouchon lyonnais ». Ils en avaient assez, confinés dans leur castelet, à amuser les petits et grands, envie de sortir, comme tout le monde, à terminer la journée entr’eux, avec un bon dîner . Vous comprenez, dit-il en entrant dans un des plus connus, c’est « mon petit bouchon », que j’adore, alors vous nous apportez ce que vous avez de meilleur, une très, très bonne bouteille pour commencer, avec une grande assiette de cochonailles ! Bien installés , ambiance chaleureuse, fumets appétissants de la cuisine, nappe à carreaux et beaux verres … Mais horreur, dès la première gorgée, aucun doute, « un petit goût de bouchon », très vexé, il appelle, il hurle, (il connaît parfaitement ce registre) réclame réparation, et après maintes tergiversations pour changer de cépage, on lui propose, pour calmer les hostilités, un trou lyonnais servi au « bouchon doseur ». Alors là, il voit rouge, il éructe, « roule sa serviette en bouchon », et la jette rageusement dans le bar, prenant sa Madelon par le bras, déçus, mais dignes, ils quittent les lieux, riant sous cape, se promettant l’utilisation de la scène dans leur prochain spectacle ! Alors ils déambulent, flânent au bord du fleuve, et s’installent pour une partie de p^che, au calme, douce soirée de rêveries, de projets. « Il ne quittait pas des yeux le bouchon de sa ligne », tout en racontant des souvenirs d’enfance qui enthousiasmaient sa belle. Des voisins s’installent près d’eux, et écoutent la radio trop fort, (pourquoi les voisins ont-ils toujours besoin de faire écouter leurs programmes à tous?) mais entendant que « bison futé annonçait des bouchons à l’entrée des grandes villes », ils apprécièrent davantage leur escapade, leur plaisir fût décuplé en pensant à tous ces citadins, bloqués, enfermés, peut-être même affamés ? Alors, pour tous ces malheureux de la route, il sortit la précieuse bouteille emportée discrètement, et s’écria « on va enfin faire sauter le bouchon » !