Exercice inédit d’écriture créative 133
Elle ne s’était exprimée que 4 fois :
à l’âge de raison,
au moment de sa puberté,
le jour de son mariage,
et à l’heure de sa mort.
Voilà, en détail, ce qu’elle voulut bien nous dire à ces quatre occasions.
À vous d’imaginer ces détails
Elle ne s’était exprimée que 4 fois : à l’âge de raison, au moment de sa puberté, le jour de son mariage et, à l’heure de sa mort.
Voilà, en détail, ce qu’elle voulut bien nous dire à ces quatre occasions.
1. A l’âge de raison :
« J’y suis enfin arrivée, à l’âge de raison, où je sais que je fais des bêtises, que je dis des gros mots, que je chipe des bonbons, que j’oublie de dire bonjour et merci et que je m’embarque dans de gros mensonges… »
2. Au moment de sa puberté :
« J’ai dépassé l’âge de raison d’une décennie. A mon tour d’avoir raison. Et aussi mes raisons, de bouder, de claquer la porte, de m’enfermer dans ma chambre, de changer de tenues et d’humeur toutes les dix minutes, d’affirmer mon caractère… »
3. Le jour de son mariage :
« Même en duo sur canapé, je sais que j’ai toujours raison, mais c’est surtout lorsque lui et les autres me disent que j’ai raison que je m’inquiète ! «
4. A l’heure de sa mort :
« Je me tue à vous dire que j’ai raison ! » *
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* Quand quelqu’un dit : Je me tue à vous le dire ! laissez-le mourir.
(Jacques PRÉVERT)
Elle ne s’était exprimé que 4 fois :
à l’âge de raison,
au moment de sa puberté,
le jour de son mariage,
et à l’heure de sa mort.
Voilà, en détail, ce qu’elle voulut bien nous dire à ces quatre occasions.
– je ne veux pas de mari, ni d’enfant… je veux rester avec toi maman
– je n’en peux plus de tout ces gros boutons… il faut trouver un médicament
– je voudrais que tu sois mon mari, un ami, un parent et un amant
– mon enfant chéri, il faut me laisser mourir, arrête là tout tes tourments
Elle ne s’était exprimée que 4 fois :
à l’âge de raison, au moment de sa puberté, le jour de son mariage, et à l’heure de sa mort.
Voilà, en détail, ce qu’elle voulut bien nous dire à ces quatre occasions.
-Ouf ! 7 ans ! J’ai enfin atteint l’âge de raison. Fini le doudou. Et je ne vais plus entendre parler ce langage « bébé » que je ne supporte plus. J’en ai assez de ces « fais bisou à Papy et Tata » « Pas touche le toutou, c’est caca » « Pipi dans le popo » « Fais dodo avec ton nounours» « Oh le dada » « Bois ton lolo » « Pas touche le zizi sinon panpan cucul» etc…
Finis les mots bi-syllabiques. Je peux maintenant envisager les trisyllabiques, voire plus.
– Enfin ! Je suis sortie de l’enfance pleine de frustrations – les mots sont différents mais et d’espérances : je vais pouvoir, sous prétexte de la sacro-sainte et bénie crise d’adolescence, marquer ma révolte à l’encontre de mes parents, professeurs agrégés en lettres classiques, en utilisant la langue de Shakespeare.
Du « Hello, good morning » au « Bye, good night”, je ne m’exprime plus qu’en anglais, juste pour le fun : je suis over-bookée, je surfe non-stop sur le web, je chate sur Facebook, je prévois un voyage aux States en charter, je flashe sur les rappeurs et la presse- people, c’est cool !
– Il était temps ! Le grand jour est enfin arrivé ! Tout à l’heure, à la Mairie, je vais enfin lui « OUI » ce « oui » si longtemps interdit. Depuis mon entrée dans l’adolescence, ma mère prit l’habitude de me seriner « Dis non à tout ce que les garçons te demandent ! ». Dès que j’ai rencontré Kevin, petit voyou aux yeux de velours et aux lèvres de la même étoffe, je n’ai pas oublié le Grand Principe Maternel.
– Cela ne te fait pas peur de monter sur ma moto ?
– Non
– Est-ce que ça te gêne de venir dans ma chambre au 6e étage ?
– Non
– Est-ce que cela t’ennuie si on s’assoit sur mon lit ?
– Non
– Ça te pose un problème si j’enlève ta robe ?
– Non
– Vois-tu un inconvénient à ce que je pose ma main ici ?
– Non
Une longue série de « non » m’a conduite devant Monsieur le Maire, le ventre plein de promesses, pour le grand « OUI » initial. Celui qui précédera tous les autres : le «heu Oui », le « Moui » le « Oui, oui, oui », le « Oui mais », le « Oh oui ! »…
-Pas trop tôt ! L’heure de quitter cette vallée de larmes est enfin proche. Dans cette maison de retraite au doux nom du « Joyeux déclin », mon existence a viré à la guimauve et je suis retombée en enfance. Le personnel use et abuse des mots de 3 syllabes : « donnez-moi votre menotte » « montre-moi vos quenottes » « prenez ce susucre »….
Lorsque je serai passée de l’autre côté en supposant qu’il existe, j’espère que je pourrai y emporter le doudou de mon enfance.
Journal d’une rose
J’étais l’enfant terrible
D’un couple de rosiers grimpants
Rouge pimpant
Je poussais dans tous les sens
Curieuse des autres essences
Mais quelques tailles
Un tuteur
Redresseur
Et quelques gouttes d’engrais
Ont su m’amener, dit-on
À l’âge de raison
Ce printemps
C’est étrange
Les feuilles me démangent
Mes voisins bourgeons
Et le bosquet d’iris du fond
Me donnent un drôle de frisson
Je suis couverte de boutons !
Aujourd’hui,
J’ai été unie pour la vie
A un bel iris bleu nuit
Nous venons de nous rencontrer
Serrés
Dans le bouquet d’une mariée.
Destinée !
Ma vie de bleu s’est colorée
Irisée
Ensemble nous fleurirons
Ensemble nous fanerons
Ce soir
Mes pétales
Me font mal
Leur velours rouge est usé
Je suis fanée
Je suffoque
Heureusement mon iris est là
Tout contre moi
Lui aussi dans un piteux état
Mais… voilà qu’on nous retourne
Aïe, on a la tête en bas
C’est sans doute le passage
Vers l’éternité
Un bouquet de fleurs séchées
Pour immortaliser
Bonheur d’un jour
Et de toujours
Elle avait très vite compris l’importance du silence. Pas besoin de chercher à s’exprimer, on venait sans cesse à elle en lui ânonnant des petites phrases ridicules. Quand on lui serina qu’elle avait, enfin, l’âge de raison elle ne vit pas la nécessité de changer, elle écouta religieusement, comme toujours, tous les pr^chi-prêcha, et continua à n’en faire qu’à sa t^te.
Elle évolua, changea, mua, et réalisa que toutes ces paroles plus ou moins grandiloquentes étaient très loin de ses émotions profondes, que l’essentiel ne pouvait pas être dans ce fatras de mots
Un grande et tendre complicité l’amena à se marier, et, ce jour-là, elle murmura à son compagnon des poèmes choisis, très intimes. Elle créa un formidable duo et composa un trio, et un harmonieux quatuor !
Après de longues années, elle s’exprima sobrement, car elle pensait toujours que savoir écouter rendait la vie encore plus passionnante ….
Elle ne s’était exprimé que 4 fois :
A l’âge de raison : « Non, maman, ce n’est pas moi. »
Au moment de sa puberté : « Non, papa, ce n’est pas lui. »
Le jour de son mariage : « Non, mon chéri, tu te fais des idées. »
Et à l’heure de sa mort : « A l’âge de raison, j’ai poussé mon petit frère dans la rivière. Quand les gens du village l’on retrouvé mort, maman s’est doutée. Mais sans preuves…A ma puberté, le grand Jean m’a engrossée. Papa eut beau me harceler des jours et des nuits, je n’ai jamais trahi Jean. De toute façon une faiseuse d’anges était passée par là. Le jour de mon mariage, mon époux s’est aperçu que je n’étais plus vierge. Mais une petite fiole de sang de lapin a fait l’affaire aussitôt.
Maintenant je vais mourir, Monsieur le Curé. Alors c’est à votre tour de garder le silence… »
©Margine
Elle ne s’était exprimé que 4 fois :
à l’âge de raison,
au moment de sa puberté,
le jour de son mariage,
et à l’heure de sa mort.
Aurore était quasi muette, du moins avare de ses mots.
La 1ere fois, surprise d’avoir si vite grandie, elle s’exclama « OUI ! » Oui à la vie. Oui à l’aventure. Elle était enthousiaste.
La 2e fois, la vie la surprit encore blottie entre son nounours et ses rêves d’enfant. Elle lui dit « Quitte l’enfance. Va ! » Elle lui chuchota, confiante : « OUI »
La 3e fois, le jour de son mariage, à peine prête à quitter sa jeunesse, son insouciance, elle balbutia timidement devant l’assemblée : « OUI »
Au 3e temps de sa vie, Aurore n’avait prononcé que 3 mots mais avec tout son coeur. Au fil des ans, elle avait appris à dompter le temps. Le temps de l’allégresse, le temps d’enfanter, le temps de la patience. Elle était, là, sereine à profiter d’un rayon de lune, quand la mort vint la cueillir. Elle se dit « déjà » ! » et elle prononça un « OUI » résigné.
Magnifique
je suis au centre du monde
je vois, j’entends, je parle, je sens
j’ai des projets
j’ai confiance, espoir, et force
il y a de la magie dans l’air
et de belles vibrations dans le corps
je vais me lancer pour en avoir plus
je ne peux que suivre la bonne direction
nous voici donc bien ensemble
je m’y associe si bien
nous sommes heureux
tout se fera pour le mieux
que de chemins mal parcourus
car ils m’ont rarement comprise
et elles ont diminue’ mes chances
mais le corbeau m’a encore fait signe ce matin…