Exercice inédit d’écriture créative 46

Exercice d'écriture très créative
© S.Mouton-Perrat

La veille au soir, il avait rasé barbe et moustache.
« Parce qu’elles le vieillissaient » pensait-il.
Le lendemain, il ne s’exprimait plus qu’avec le charmant babil d’un enfant.
Quand il voulu…

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6 réponses

  1. Clémence dit :

    La veille au soir, il avait rasé barbe et moustache.
    « Parce qu’elles le vieillissaient » pensait-il.
    Le lendemain, il ne s’exprimait plus qu’avec le charmant babil d’un enfant. Quand il voulu…

    Dès les premiers jours de printemps, une envie irrésistible de paraître jeune le tarauda. Une idée folle vint à son secours et lui fournit discrètement le sésame idéal : un visage vierge de tout poil. Lorsqu’il fit part de son souhait, chacun l’en avait dissuadé !
    – Mais non, tu ne fais pas vieux !
    – Ta moustache fait ton charme !
    – Tu ne peux pas trahir ta famille pour des raisons personnelles…
    – Je t’ai toujours connu ainsi…

    Chacun y allait de son petit mot, chacun y allait de son registre, chacun y allait de sa gestuelle ! Et pourtant….

    Un beau matin, le tailleur-toiletteur de service hurla :
    – Non de non, qui a volé mes ciseaux ?
    – Pas moi, répondit la pie !
    – Ni moi répondit le caniche en agitant le pompon qui lui servait de queue !
    – Ni moi, cracha le lama qui passait par là… !
    – Ni moi, ni moi, ni moi…. répétait le perroquet…

    Ce même beau matin, Hector s’époumona en agitant sa baguette de bambou:
    – Mais nom de Zeus, c’est qu’il l’a fait…
    Son visage se zébra de rougeurs et il se lamenta :
    – Ma carrière est fichue je vais me faire virer….

    Le chapiteau trembla de toute part…

    Il avait osé. Il était allé jusqu’au bout de ses rêves de juvénilité. Erignathus, le phoque barbu s’était rasé les poils !

    Lorsque Néophoca, son amie, le vit, elle claqua de mains et se trémoussa.
    – Et bien, il faut le reconnaître, cela te fait quelques piges de moins…

    Soulagé, le phoque voulut la remercier, mais les mots sortirent en un long babil incompréhensible…. L’autre a ri (ce jeu de mot éculé est trop tentant…)

    Le premier jour, artistes et animaux défilaient chez Erignathus, taillaient une petite bavette puis repartaient vaquer à leurs occupations en s’esclaffant. Bonne humeur garantie pour 24 heures !

    Le manège dura une semaine. Une semaine pendant laquelle Erignathus n’avait de cesse d’admirer son look d’adolescent et mettait en sourdine son problème de communication.

    En revanche, il dut bien reconnaître que le langage bébé que ses amis utilisaient à son égard le peinait et le frustrait. Bon sang, ce n’était pas parce qu’il babillait qu’il ne comprenait que dalle ! L’absence de communication devint un handicap dans sa vie quotidienne.

    Sa mine se ternit, son poil perdit son lustre. Il devint grognon, ronchon, l’agressivité le démangeait au bout de son museau et à son tour de rein…

    – C’est assez ! se dit-il en aparté, en imitant la baleine, une cousine lointaine. C’en est fini du museau épilé, je récupère ma barbe et mes moustaches.

    Chaque matin, il scrutait le bas de sa tête. Les quelques pores « pilogènes » restaient désespérément dilatés et vides…

    Ses amis se désolaient, compatissaient et le consolaient en paroles chaleureuses. Ses amies se désolaient, compatissaient et le consolaient à renfort de douceurs et de confitures.
    Le temps passait lentement. Le cirque s’apprêtait à vivre au ralenti sur un nouveau territoire.

    Les premiers frimas de l’automne apportèrent une corbeille de splendeurs.

    Ce matin, la table du petit déjeuner offrait mille saveurs chaudes et sucrées…

    – Mais c’est sûr ! S’écria la trapéziste Églantine , léchant ses doigts confiturés. Elle fila comme le vent…

    Autour de la table, les convives bayaient aux corneilles…

    Églantine revint quelques minutes plus tard. Elle riait aux éclats et déposa une poignée de cynorrhodons.

    – Mon phoque adoré, voilà, tu es sauvé…

    – Tu rêves, s’écrièrent les amis, tu ne peux pas lui faire avaler cela…il va mourir de mille morts…

    – Avaler, non… les ouvrir, oui….

    – Mais ça va me faire mal, hurla Erignathus, retrouvant sa voix d’origine….

    – Les ouvrir oui, puis implanter…

    © Clémence

  2. Pascal Perrat dit :

    C’est un joli texte. Totalement dans notre esprit.
    Notre créativité, c’est l’enfant qui existe toujours en nous.
    Cet enfant, la plupart du temps, se laisse endormir par le conformisme et la routine.

    Seul l’enfant qui est en nous a la capacité de s’émerveiller, s’étonner, rêver, jouer, s’enthousiasmer.

    S’enthousiasmer (réveille le Dieu en nous).

    Votre texte, en le lisant, donne la parole à l’enfant joueur qui existe en nous.

    Comme le disait à 81 ans, Nicolas G. Hayek fondateur et PDG de Swatch : « Il faut savoir garder sa fantaisie, l’esprit de ses 6 ans. Continuer de croire au Père Noël. Oser avancer ses idées, même saugrenues »

  3. Gwenaëlle dit :

    La veille au soir, il avait rasé  barbe et moustache. « Parce qu’elles le
    vieillissaient » pensait-il. Le lendemain, il ne s’exprimait plus qu’avec le
    charmant babil d’un enfant. Quand il voulut démarrer sa journée, il comprit qu’il était redevenu l’enfant qui vivait en lui, ce petit être qui avait grandi et qui avait progressivement laissé au placard ses découvertes, ses peurs, ses rires, ses larmes, ses passions de chaque âge. Il était enfant dans son corps d’adulte. Étrange sensation.. il ouvrait de grands yeux et semblait tout redécouvrir autour de lui, tout lui paraissait immense.. Il retrouvait le monde avec ses yeux d’enfant, il avait envie de courir partout, ouvrir tous les tiroirs, se cacher dans le placard, cacher les yeux de sa vieille mère et lui dire ‘ c’est qui ?’, puis se serrer contre elle pour un câlin gratuit, juste sentir sa peau douce, son odeur de vanille et ses petits baisers près de son oreille… Y’a longtemps, y’a si longtemps, comment ai-je pu m’en passer.. Et dire qu’entre son boulot, son jogging, son squash du mardi, son ciné avec Angelo, ses ci, ses ça, il oubliait régulièrement de l’appeler.. Son cerveau d’adulte résonnait au son de ses souvenirs d’enfance sans pouvoir réfréner les envies de ses quatre ans, les plaisirs intenses de ses jeunes années, mêlés de l’amertume de les avoir oubliées. S’étonner de tout, n’être surpris de rien, retrouver la fraicheur de ces vertes années.  Cette fraicheur, ou l’ai je laissée, quand l’ai je oubliée, comment la retrouver mais surtout comment ne plus la perdre ? Emerveillement, innocence, insouciance, curiosité, je le sais vous étiez là, cette tombée en enfance me fait vous retrouver !

    Avec la nuit tombante, la barbe naissante lui ramenait ses facultés d’adulte. 
    Ce plongeon inattendu dans sa réalité enfantine lui permettait de regarder sa vie sous un autre angle, d’imaginer les notes de fraicheur qu’il pouvait y  amener. Faire voler en éclats toutes ses belles assurances et en rire… Rire à la barbe de ses quarante ans, a cette barbe perdue qui en le vieillissant lui donnait plus que l’illusion d’être un adulte accompli. Etre lui sans paraitre, retrouver sa spontanéité, son questionnement et l’étincelle de ses yeux d’enfant ! C’est parti, et que plus rien ne le barbe ! 

    © Gwenaëlle Joly

  4. Basciani caroline dit :

    La veille au soir, il avait rasé barbe et moustache « parce qu’elles le vieillissaient » pensait il. Le lendemain il ne s’exprimait plus qu’avec le charmant babil d’un enfant.
    Quand il a voulu franchir le seuil de sa maison, une voix l’a interpellée, et s’il ne s’était pas aperçu lui-même, alors, dans le grand miroir près de la porte de l’entrée et de la sortie, il aurait encore moins compris ce qui lui arrivait.
    Juste derrière lui, dans la glace, surmontée d’un château de bigoudis multicolores….La tête de sa mère !!! « Hors question d’aller jouer dehors » !

    Alors quoi ? Le monde avait tourné à l’envers de la machine à fabriquer des grandes personnes…Voilà que maintenant, « IL », se trouvait repris par l’enfance et qu’en quelques gestes rapides, du même coup, sa mère, affectueusement « tropdecheztrop », avait repositionné son col, « désembourriffés ses cheveux, moucher son nez à sa place en l’asseyant dans un même élan devant la télé.

    Le film -du dimanche 5 heures de l’après midi-, avait sonné comme un glas pour lui, car il était temps d’un point de vue parental, de finir la journée, comme il se doit, pour toutes les raisons du sacro saint repos dominical.

    Finir la journée ? Mais sa vie à lui ne faisait que commencer t à 5heures de l’après midi ! D’ailleurs, chaque instant comptait, oui, tout de suite et pas tout à l’heure…A défaut de pouvoir sortir, il se débrouillait quand même et la vie le prenait par les yeux en faisant se pencher par la fenêtre pour tenter des appels du regard, vers l’ailleurs qui semblait s’élargir quand « IL », lui, regardait par delà les maisons, et qu’il observait aussi,le seul arbre debout, celui là même qui résistait à toutes les invasions que l’on rencontre dans les villes, comme on dit, en pleine expansion…
    L’arbre, résistait et lui, « IL », en prenait d’la graine. « Graine de voyou » !, avait dit sa mère. « Graine de vie », avait-il marmonné, « IL » dans son « toutalintérieur »

    Sur le trottoir, quand « IL » se contentait d’une vue en direct, il pouvait quand même espérer apercevoir un groupe d’enfants qui n’en avaient rien à faire non plus, « du 5 heures de fin d’après midi de tous les dimanches » et tous, pour l’heure, étaient assis sur un morceau de bitume, et se tenaient par les épaules, les uns, les autres, comme s’ils possédaient de très précieuses informations, que dis je ? des informations vitales à la mis en oeuvre d’un projet de la plus haute importance. Quelque chose enfin allait advenir, « IL », oui, le pressentait, de toutes les papilles de tout son corps et de son esprit.
    Par moment, une petite fille se détachait du groupe en question et montait jusqu’au ciel d’une marelle, alors, tous les enfants s’époumonaient en une langue interdite et entamaient une danse comme pour célébrer quelque chose d’incroyable; Une sorte de rituel bien étrange, qui ne ravissait pas du tout les parents de « IL », qui s’empressaient alors, de fermer toutes les fenêtres, en se regroupant autour de la table familiale, à l’écoute des histoires « cinématographiles » du petit écran, qui devenait curieusement, pour l’occasion, de plus en plus grand et encombrant dans le regard d’un enfant en mal de vie.

    Des histoires…Mais quelles histoires ? De celles bien encadrées, des prévues par boutons télécommandé ? Et en plus il ne faudrait pas parler, pas bouger; et comme pour sacraliser l’instant, la mère allumerait des bougies en parlant d’intimité familiale retrouvée. Après, il faudrait manger et se coucher parce que l’on verserait obligatoirement déjà vers demain, lundi, avec tous ces enfermements d’école et de travail, et puis parce que c’était comme ça, voilà c’est tout.

    Alors, c’était pas sa faute à « IL », quand installé devant la boîte à histoires cinématographiles et télévisuelles, ses pieds écrasaient ses chaussons qui se faisaient bateaux sous sa chaise, tout en se laissant glisser vers des mers qui l’entraînaient chaque fois un peu plus en contrebas, dans les profondeurs du parquet trop bien ciré, et au risque de perdre dans l’aventure, de vue, la moustache et la barbe de son père, en s’écroulant de tout son long, au raz de marée des pantoufles de sa soeur et de sa mère.

    Non, c’était pas sa faute si, ses mains devenaient des marionnettes qui maintenant dansaient sur la table de la salle à manger en faisant des ombres (si seulement il n’y avait pas eu les bougies aussi….) en plein dans les images « cinématographilementtélévisuelles » prévues d’avance dans la boîte à histoires « du dimanche 5 heures de l’après midi »…Et ce nétait décidément pas sa faute, si de ses personnages imaginés à cause de l’ennui dominical, émanaient des mots bizarres avec des voix de placard mal huilés qui se ferment et s’entrouvrent, pour venir ponctuer de temps en temps, le discours « filmographique » de la télé….Tout le monde ne peut pas se taire quand même !

    Et, quand, sa chaise avait chaviré en entrainant du coup, la lampe, la nappe, et la télé qui s’était éteinte comme par enchantement dans un très beau feu d’artifice ? Même que sa grande soeur , très sérieuse de chez « biencommyfaut » très en colère, au point de partir en claquant la porte de sa chambre, avait fait tomber le tableau du grand-père qui en avait perdu sa barbe et sa moustache…Et on ne lui avait rien dit à elle, tandis que lui, s’était vu mettre son pyjama à toute allure, traîner de force dans son lit, et son père, comme une grande claque à son destin à lui, « IL », avait fermer la porte et la fenêtre de sa chambre, sans même s’apercevoir de la pauv’e mine défaite du grand-père qui avait fini tout seul, via la corbeille…OH !

    Mais comment s’expliquer , se faire entendre? Il y avait urgence pourtant…

    « IL », imaginez donc, venait en un chavirement magistral de télé familial, d’inventer toute sa vie. Oui, à cet endroit pile, il venait de créer son idée, que dis je ? Son projet pour demain, son A VE NIR ! Mais qui pourrait le croire ? Entre marionnettes, histoires à écrire, le tout arrosé d’un soupçon de Clown pour cause d’aventures « antihéroïques », pas facile de prévenir la maisonnée que l’on ne sera peut être jamais dans une histoire à l’endroit » !…
    Une grande aventure venait de l’accaparer et toute sa vie allait s’en trouver changer, et en pleine famille, on lui demandait de se taire et d’en finir, alors que toute sa vie venait à peine de commencer !

    Mais qui pouvait l’entendre , « IL » ne s’exprimait plus maintenant, qu’avec le charmant babil d’un enfant…Et il devrait tout reprendre de ce qu’avait été sa vie telle que décrite ici, oui, avant qu’il ne se rase barbe et moustache en cette veille au soir, et tandis qu’il avait en fait vraiment réalisé ses rêves d’enfant., sans même s’en apercevoir, trop occupé à se regarder…

    Devant le fait accompli, il eut un arrière goût de souvenirs, de ceux qui vous embarquent par le coeur et font regretter le passé. Il avait vécu sa vie de grand, sans s’en apercevoir…

    Raser sa barbe et sa moustache n’avait décidément pas été, une bonne idée;
    Qui sait, se disait il maintenant, au sommet de la réflexion de tous ses empêchements, si au fond il n’avait pas toute sa vie -discalculé- le monde des chiffres au profit des mots, juste, pour s’obliger à les détester, à les mélanger, pour faire croire que toute une somme de lui ne comptait pour rien…
    Mais allez bon, mine de rien quand même, qui sait si une fois toutes ses opérations d’enfance malmenées il n’avait pas pu, dans sa vie de grand, réussir à s’installer singulièrement et librement dans l’entre les lignes de l’imparfait et du présent réuni, pour vivre en réalité, sa vraie de vraie vie à lui, « IL »i…
    Et voilà que la veille au soir, il avait voulu l’effacer d’un coup de rasoir pour se donner l’air d’avoir l’air !

    Alors oui, qu’elle idée….Toute une opération esthétique malencontreuse qui venait d’effacer chaque sillon, chaque formulation intime et créatives de sa vie, au profit d’une jeunesse retrouvée, lisse à en faire pâlir d’ennui tous les enfants en espoir de devenir….

    La vie reprenant là ou il l’avait remise, il allait devoir tout et tout recommencer…………………………….
    ………………………………………………
    Mais,
    Ne nous désespérons pas trop vite..
    Comme une bêtise n’arrive jamais seule, « IL », allait bien en trouver une autre pour réparer celle là…Il n’en était pas à sa première expérience ratée, et les ratures étaient ses fleurs favorites qu’il s’en irait cueillir à nouveau au jardin des malices.

    Et si je vous disais, qu’aux dernières nouvelles, « IL », se confectionne des ailes pour rejoindre un voyageur de mots afin de lui proposer une histoire qu’il faudra bien à un moment ou à un autre terminer ?…

    Caroline Basciani

  5. Hazem dit :

    (précision, le babil d’un enfant n’est pas forcément une suite de son difficilement articulé. Il qualifie également le langage spontané des enfants, sans retenue et vif, ou un discours futile, sans fin et inintéressant. Autre point de vue, mais pas hors sujet).

    La veille au soir, il avait rasé barbe et moustache. « Parce qu’elles le vieillissaient » pensait-il. Le lendemain, il ne s’exprimait plus qu’avec le charmant babil d’un enfant.
    Il s’en aperçut quand il voulut, comme chaque matin, remercier Dieu de se réveiller en vie. Il racla deux ou trois fois sa gorge en se disant que vraiment, c’était bien la première fois, il avait l’habitude d’avoir une voie de caverne le matin. Il en rit à haute voix, mais il secoua de nouveau la tête quand il entendit le rire d’un chérubin. Il s’étira, comme chaque matin, l’esprit vif, mais encore embrumé. Il retira la couette de son dessus et il voulut poser le pied droit à terre en prononçant « Bismilaaaaaaa haaaa »… Il tomba sur son flanc et se heurta la tête contre un de ses haltères. C’est sur le sol qu’il resta un moment. Jusque 10h30, quand le téléphone le tira de sa torpeur. Les yeux à peine ouverts, il prit le combiné, décrocha et une voie amicale lui dit :
    « – Alors Georges ? Pas réveillé ce matin ?
    – Hoooo, Karen, j’ai mal à la tête, j’ai voulu me lever et je ne sais pourquoi je suis tombé, et je me suis assommé, sur un haltère je crois… Pourtant, je m’étais bien réveillé pour une fois, cette nouvelle chanson elle file la pêche, mais hooo… Je crois qu’il voudrait mieux que j’aille à l’hôpital le plus proche. Ce n’est pas bon de perdre conscience quand on tombe sur la tête, j’ai lu ça l’autre fois au sujet des traumas crâniens, mais ça va ! J’ai pas vomi, pas encore, j’ai pas la nausée non plus… (Notre pauvre Georges, la tête de travers, ne se rendit pas compte qu’il parlait d’une vive allure haut perchée.)
    – Heuu, excuse-moi mon petit ! Tu parles beaucoup hein… heu…c’est bien, heu… ton papa ne m’avait pas menti à ton sujet. D’ailleurs il est là ? Tu peux me le passer ?
    – Mais… ho non… ça me fait ça depuis que je suis levé, je te rappelle Karen ! dit Georges en raccrochant. »

    Il ouvrit alors les yeux, regarda vers ses pieds, mais ne vit que le pantalon de son pyjama rayé trainer comme un chiffon par terre. Affolé, il se redressa et se pencha pour le tâter. Quand il tendit les bras, c’est la moitié de ses manches qui se balançaient dans le vide. Son torse, son coup, ses cheveux, il palpait et avait l’impression qu’il touchait quelqu’un d’autre ! Il se leva et quitta ses vêtements, il découvrit un minuscule corps imberbe, à la limite du potelé et doux. Il se rendit au-devant du miroir de son entrée, nu comme à son premier jour.
    « -Oui, c’est ça… On dirait moi à 4 ans ! »
    Il alla jusqu’à la table basse, se roula difficilement une cigarette de ses petites menottes et retourna, armé d’un briquet, d’un cendrier et d’un carnet accompagné de son crayon, se planter devant le miroir.
    « -Bon, j’ai 4 ans… Cool ! Je vais enfin pouvoir recommencer cette vie que j’ai si bien foutue en l’air. Point numéro un, financement…. »
    Il y passa le jour. Quand il s’endormit, il angoissa terriblement.

    Le lendemain matin, il ne tomba pas du lit.

  6. Alain dit :

    De mauvais poil

    La veille au soir, il avait rasé barbe et moustache. « Parce qu’elles le vieillissaient » pensait-il. Le lendemain, il ne s’exprimait plus qu’avec le charmant babil d’un enfant.
    Quand il voulut prendre son petit déjeuner, Georges eut une envie irrépressible de bouillie. Il descendit au Super 8 à deux pas de chez lui et fit une razzia sur le rayon Blédine premier âge.
    La caissière, étonnée par la nature de ses emplettes, lui lança, un brin amusée :
    – Alors, Monsieur Jeunet, on fait du baby-sitting?
    Il allait lui répondre lorsqu’il se souvint des ânonnements qui sortaient de sa bouche. Il mima donc une extinction de voix et opina du chef.

    Lorsque Madame Jeunet rentra, elle trouva son mari en train de ramper dans un parc au milieu du séjour, il jouait au hochet.
    – Alors, mon bébé, on s’amuse bien en mon absence. Et voyez-vous ça, on s’est mis de la Blédine plein la bouche. C’est que ça lui fait des jolies moustaches à mon bébé!
    – Ouztache, ouztache! Lui répondit Georges sur un ton geignard en montrant du doigt ses commissures barbouillées.
    – Guili, guili, guili, lui fit-elle en lui chatouillant le menton.
    – Ouztache, ouztache! Lui babilla Georges derechef.
    – Est-ce qu’il a fait son rototo?
    – Ouztache, ouztache!
    – Bon, maintenant, ça suffit avec tes « Ouztache », tu nous barbes à la fin!

    Alain Lafaurie

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