459e exercice d’écriture créative créé par Pascal Perrat
Un canapé éventré reconsidère sa vie.
Racontez
Ces exercices inédits d’écriture créative n’apprennent pas à écrire, ils enflamment l’imagination. Le but est de vous conduire vers les ressources imaginatives qui somnolent en vous. Après quoi, vous décidez de mener le projet d’écriture qui vous convient : nouvelles, roman, etc.
Découvrir l’exercice n° 50 proposé en 2011 (Nous sommes Fauteuils de père en fils)
La plaie n’était pas béante, mais une fois le tissus ouvert il y avait peu de chance qu’il se referme. La déchéance serait peut être longue, un mois ou deux. Inévitablement sa fin arriverait. Quelle déchirure! Il avait pensé pouvoir échapper à son destin. Perdre un pied ou craquer son accoudoir aurait eu le même effet, mais il aurait triomphé du sort. Il ne s’était jamais résolu à la fatalité, mais il avait toujours su qu’il faudrait bien s’y rendre un jour.
Son père l’avait laissé dans l’ignorance, longtemps. Il avait du finalement se résoudre a lui transmettre l’histoire maudite. Yvan se rappelait du jour ou on le retrouva, la bouche dégoulinante de mousse. Ce souvenir le hantait. Le jour suivant il n’était plus. Son arrière grand-pépé lui, avait pu vivre 5 années pleines après son estafilade. Yvan savait que le siècle avait changé, ses jours étaient comptés.
Un sofa plein d’ambition prendrait bientôt sa place. Il avait été ce sofa, boursouflé, neuf, pompeux. Il ignorait alors qu’il avait été acheté en trois échéances, que sa vie se situait en milieu de gamme. La seule chose qui lui donnait de la noblesse était sa tragédie. L’éventrement, lent et pitoyable poison, était son blason.
Cela avait commencé comme une tension et c’était prolongé, doucement, en une ouverture. Il avait mis 5 jours à comprendre. Il avait imaginé le sort comme foudroyant. Le destin était en fait pernicieux, il s’insinuait sans laisser garde.
Tout s’enchaina très vite, soulevé, brinquebalé, posé. Cahoté, tiré, posé. Broyé? Il ne savait pas ou il était, il y avait de nombreux autres objets. Une chaise à trois pieds? Il ne vit plus rien, retourné. Réparé?
Dès les entrées, je les repère. Je m’empresse vers elles.
Hélène, l’Edentée, exècre les crevettes même excellentes, même étêtées ; Estelle, l’Echevelée, déteste les cervelles de cerf et préfère la semence de prêtre ; Perrette, l’Enténébrée espère des têtes et crêtes des bêtes, perles de Bresse ; Eve, l’Eternelle empesée, préfère les germes et les mets secs,
En dessert, Hélène, l’Emêchée, vénère les crèmes et les entremets ; Bette, l’Écervelée, et Berthe, l’Emmerderesse, les crêpes les débectent
Elles m’encerclent et je m’empêtre, me rejettent et je me vexe. Elles révèrent Ph.Etchebest, l’Exégète.
Elle m’excèdent et me prennent la tête. Sept pestes Des regrets éternels.
De l’effervescente. Une Seltzer !
Un canapé éventré reconsidère sa vie. Racontez
C’était la fin de l’été et Marlène et Victor commençaient enfin leurs vacances. Ils avaient trouvé une jolie petite maison sur la plage.
Ce matin, la table du petit déjeuner à peine débarrassée, Victor s’était affalé dans le hamac, avec un désir irrépressible : dévorer le roman de son rival de plume, dans un silence absolu. Enfin, si l’on faisait abstraction du ressac des mini vagues sur le galets dorés.
Il venait de terminer le troisième chapitre lorsqu’un vacarme le sortit de son monde fantastique.
Marlène venait de déposer une masse étrange sur la table de bois délavé.
– Voilà, dit-elle, d’une voix haut perché, j’ai trouvé !
– Mais qu’est-ce que c’est ce truc ? demanda Victor en faisant émerger sa tête hors du hamac.
– C’est une machine à écrire.
– Et que vas-tu écrire ?
– Mon premier roman, claironna Marlène avec un sourire triomphant.
– Un roman ? Toi ? Écrire un roman ?
– Et pourquoi pas, répliqua Marlène en tirant sur son corsage un peu trop ajusté. N’en serais-je pas capable ?
– Hum… répondit Victor en replongeant dans le hamac et dans son roman.
Vrrrrrrr.
– Mais c’est quoi, ce truc ?
– Ne te tracasse pas, Victor, c’est toujours comme ça quand on place une feuille entre les rouleaux de la machine à écrire. N’oublie pas, Victor, j’ai été la secrétaire du grand…
– Oui, je sais…
Bzzzzzzzzzz
– Retour du chariot. El apostrophe, e, ix, té, er, a, o, er, dé, i, en, a, i, er, e…
– Oh, Marlène, tu ne vas pas écrire tout ton roman en épelant les lettres…
– Mais Victor, je ne dois pas faire de fautes ! Tu sais, le papier coûte cher, il en faut pas le gaspiller, déclara Marlène en prenant de grands airs.
Tchak, tchack, tchack…. Les lettres continuèrent de crépiter avec une lenteur exaspérante.
– Marlène, où en es-tu ?
– J’écris le titre, Victor. J’ai une excellente idée. Enfin, je crois ! Veux-tu que je lise ?
– Je t’écoute.
– Alors, voilà, le titre c’est : L’extraordinaire voyage du canapé qui était resté coincé…
– Marlène, Marlène, arrête, ce titre est déjà pris, ou presque. Ce que tu fais, c’est du plagiat. Du pillage d’auteur…
– Mais non, écoute…C’est l’extraordinaire voyage du canapé qui était resté coincé dans un stand à la Braderie de Lille…
– Marlène, non. Tu ne peux pas choisir cet endroit. Ton canapé exhalerait des odeurs de frites, de moules et de bière à la puissance 10…
– Ah, bon, Victor, tu es sûr ? Bon, je vais réfléchir…
Les minutes s’écoulaient au gré du murmures des vagues. Victor souriait d’aise et Marlène mordillait le bout d’un crayon en quête d’inspiration.
– J’ai trouvé ! s’exclama tout à coup Marlène, qui enchaîna d’une seule traite : L’extraordinaire voyage du canapé qui fut retrouvé coincé au fond de la cour d’un immeuble Haussmannien dans le deuxième arrondissement de Paris !
– Marlène, voyons… qui serait intéressé par les aventures d’un canapé coincé au fond d’une cour obscure et froide.. Marlène ? Au fond d’une cour…
Marlène perdit tout d’un coup son sourire éclatant et minauda…
– Mais Victor, tu détruis tout ce que j’essaie de construire , ce n’est pas très élégant de ta part…
– Mais non, mais non, Marlène, si tu veux que ton roman marche, il te faut un titre accrocheur ! Un titre que l’on croque à pleine dents, comme un fruit défendu… tu vois ce que je veux dire ?
– Oui, euh… non… sois plus explicite, veux-tu ?
Victor bascula le hamac et s’en extirpa comme une félin quitterait la plus haute branche d’un arbre décharné pour plonger sur sa proie. Il s’approcha de Marlène en bombant le torse.
– Oh, Victor, tu me troubles, mon imagination va s’emmêler les pinceaux….
Victor passa derrière Marlène, se pencha doucement et l’enlaça. Et d’un seul coup, en feulant, il lui mordilla le lobe de l’oreille.
– Victor, arêêêêête… j’ai trouvé le titre de mon roman, cria Marlène en repoussant sa chaise et les bras vigoureux qui se glissaient sous son….
Victor la regarda, il ne l’avait jamais vue aussi rayonnante.
– Alors voilà. Mon roman, se passe à Dubaï. Il raconte l’extraordinaire aventure du canapé au caviar servi au cocktail de fiançailles, enfin, … comment dire, l’extraordinaire aventure du canapé rescapé des coups de dents en or de l’émir Kiboufedetrop et de la princesse Kiskroyèsibel et qui….
– Marlène arrête, tu te fourvoies, c’est d’un canapé qu’il s’agit. C’est d’un canapé…
– Mais, oui, Victor, j’ai bien compris, c’est bien d’un canapé qu’on parle…
© Clémence.
Quoi! Je ne suis plus bon à rien et pourquoi cela hein? Ils étaient si heureux lorsque je suis arriver…Je m’en souviens comme si c’était hier…Beau, blanc,liseré noir, pieds bronze, une splendeur ( ben oui,c’est vraiment ce qu’ils ont dit.).
Les enfants s’avachirent direct dès mes pieds posés sur le sol. Ce jour là, une pub passait à la télévision …Vous savez celle qui montre un phoque qui s’étale de tous son long sans modération, fier d’être en cocooning ,prenant place tel un pacha sans considération pour mon standing.
Eh oui, j’étais cela,moi un pur produit made in Italie, là-bas, ils parlent avec leurs mains, le sourire dans la voix dès le matin…
Un plaisir d’être fourré par des mains certes autoritaire mais, si compétente, le cuir travaillé, taillé, ajusté,fixé. La parure ajouté, les pieds bien enfoncés, le travail fini, se sentir enfin entier et prêt à m’envolé pour la France.
Quel plaisir de trôné sur une place dans l’un des plus beau magasin français, se voir choisis, caressé, se sentir apprécier,ah le bonheur ultime. Le voyage là encore, enrubanné, placé de façon à ce que rien ne me blesse si l’on peut dire.
Quand enfin la vie nous prend et que chaque jour l’on se sent faire partie d’une vie et se dire, que rien ne pourra nous séparé. Ah étais-je trop naïf?
Une vie courte. Au bout de cinq années de bons et loyaux service, se voir remplacer par un truc étrange,tout dur, pas classe du tout,là franchement!Mon cuir en frisonne d’horreur! Vivant je le suis encore un peu perdu certes, abandonné sur le trottoir, des chats se frottent contre moi, ils m’aiment et !!!! C’est quoi ça?
Un gros camion, des hommes qui me soulèvent,me jettent dans une bene malpropre c’est tout ce que je vaux? Quelle désillusion! Le camion freine, des hommes de nouveaux me soulèvent,ils prennent soin de moi…enfin quoi! Ils me posent sur une vieille moquette, de leurs mains calleuses,ils ôtent les épingles, les clous, les parures, je suis mis à nu!
Mon cuir est nettoyé, nourrie, frotté, lustré, un vrai parfum de propreté m’enivre. De nouveau on me vêt de mes atours, de nouveau je suis placé sur un plateau . Des regards, des attouchements, des cuisses,des derrières prennent place sur moi,me testant,m’appréciant,me caressant,humant mon odeur et des enfants se vautrent dans mon coeur,un doux plaisir puis…c’est fini.
Une note est placé sur mon dossier. Une main fine l’ôte. Voila,je vais vivre une autre vie chez une jeune femme sans enfant mais ayant deux chats…Ah les ronrons seront pour moi, une vraie vie de pacha à l’abri des taches, des coups de pieds, des roulades, des avachissements désagréables, des bouts de gâteaux oubliés, des glaces coulantes et collantes.
Rhâaaa les chats ont des griffes,non? Pourvu qu’ils soient de parfait gentlemans et ma vie sera magnifique…venez donc en passant posé votre céans vous comprendrez l’amour que mes chats ont pour moi! Canapé pour vous servir.
y.l
Sur une idée de Pascal Perrat.
Au moment du bilan et vu mon grand âge , je sais que mon passé est mon histoire et que je ne peux rien changer , peut-être l’accepter et pardonner .
Inutile de ruminer . Avec des j’aurais pu , j’aurais dû , j’aurais voulu , j’aurais aimé et si … comme dit le proverbe .
Ma vie a été celle qu’elle devait-être .
Et puis , je n’ai pas choisi , d’autres ont décidé pour moi , je ne suis qu’un canapé !
Qui pouvait imaginer qu’après avoir été tant désiré , je finirai seul , éventré par une énorme bombe , dans un appartement Syrien , à cause d’une folie ? Personne , et surtout ni moi ni mon créateur et encore moins mes acquéreurs .
Cette machine infernale est toujours en moi et je suis toujours grand ouvert . Je vais m’habituer , obligé , nul ne viendra l’enlever , tout le monde s’est sauvé.
Tel était mon destin : Avoir une « bombe sur canapé » .
Dans une vie, il y a un style, une durée, une intensité, une liberté, une philosophie.
J’ai été conçu par un artisan de renom spécialisé dans l’ameublement dit anglais, il y a plus d’un siècle et il était usuel de m’appeler Chesterfield.
Le type qui m’acheta, le premier, était une sorte de nouveau riche qui s’entoura d’un intérieur en accord avec le monde des affaires qu’il souhaitait conquérir. Je me suis retrouvé dans un salon parisien où je recevais les fessiers de gros bonshommes satisfaits d’eux-mêmes. Je garde de cette période le souvenir d’invités installés au plus profond de mon assise, cherchant à étaler leur corps le plus possible sur ma peau. Assez fréquemment, j’ai subi des douches de scotch malté qui collaient lamentablement sur la fleur de cuir capitonnée de mon revêtement fauve.
J’ai changé d’intérieurs, de propriétaires mais globalement, pendant soixante dix ans, j’ai vu défiler les mêmes postérieurs masculins affublés de pantalons d’étoffes diverses suivant les saisons, les régions, les modes.
J’ai été embarqué un beau jour par l’homme de main d’un huissier qui est venu saisir les biens de l’escroc qui avait oublié de régler quelques factures conséquentes.
J’ai été racheté pour une bouchée de pain dans une salle de vente peu reluisante.
La femme qui m’embarqua, m’installa dans son atelier de sculptrice. Cette partie de ma vie m’a bien plu. Il y avait de jolies femmes qui s’asseyaient sur moi, laissant parfois leur parfum sur ma peau. J’ai vu aussi des corps désirables venir s’allonger nus sur moi. C’était vraiment une période sympa.
Un jour, j’ai quitté les lieux et me suis retrouvée dans le salon d’un vieux monsieur à qui, mon style, rappelait les colonies britanniques. Il recevait sa grande famille pour les évènements usuels d’anniversaire ou de fêtes religieuses. Les enfants ne se gênaient guère avec moi et je dus endurer les changes mouillés de jeunes enfants, les yaourts renversés au creux de mon capitonnage sans parler des jouets qui rayaient mes accoudoirs.
Arriva le jour où je fus mis sur le trottoir comme un objet de rebut. Des ferrailleurs m’embarquèrent et me déposèrent dans une grange ouverte à tous vents. Là, je servis de couche aux chiens de garde, aux chats et autres soiffards en mal de toit. Ce fut la déchéance. Les chiots se faisaient les dents, les chats leurs griffes et un poivrot, pris de délirium tremens, finit par éventrer mon dossier, une nuit de folie.
Et bien, si c’était à refaire, et si je pouvais donner mon avis, je choisirais de vivre auprès d’une femme. Peu m’importe qu’elle soit ou non artiste mais ma longue vie me permet de généraliser et de vous dire que ces dernières sont sensibles au cuir fin, sensible à mon parfum. Elles aiment se lover sur moi avec un bon bouquin ou, la tête posée sur un coussin, écouter de la musique. J’aurais également bien aimé, avoir quotidiennement une femme nue allongée sur moi regardant les flemmes du feu de bois, éventuellement recouverte d’un plaid si le contexte le nécessite.
Ma longue vie ne m’a pas permis de savoir comment un canapé comme moi peut choisir avec qui partager son existence et ce sera mon plus grand regret…
Un canapé éventré reconsidère sa vie.
Je suis un ex canapé pimpant, recouvert de soie, puis de coton, au rembourrage maintes fois refait, à la belle structure en noyer , au dossier arrondi, à l’assise confortable.
Aujourd’hui, je suis dans un salon exposé à l’ouest, c’est dire les coups de soleil que j’ai eus et qui ont fané mes couleurs.
Je suis à la fois esthétique et fonctionnel, eh oui, ça existe !
On y déposait gants, étoles, bibis ou hauts de forme. On ‘y déposait , que dis-je on y jetait aussi vêtements, sous-vêtements. On y perdait son innocence souvent mais on y était heureux. Que de soupirs, de rires, de fous rires ai-je entendus sur mes coussins rebondis ! Toujours des couples dits illégitimes, mais je les adorais, c’étaient les meilleurs même s’ils lacéraient parfois le rebondi de mes accoudoirs, et défiguraient les angelots du tissu.
Ce temps-là des rendez-vous secrets et ardents s’est achevé lorsque Paul, le propriétaire, a déménagé. Considérant mon état passablement dégradé, la soie éraillée, les coussins plus ou moins éventrés, il m’a regardé et m’a déclaré : « je vais te faire remettre en état ! » J’étais ravi car j’estimais faire partie de la vie , que dis-je l’intimité de Paul et je voyais qu’il le considérait aussi.
Après quelque semaines passées à me faire faire un lifting, non, une remise en beauté et en forme, me voici transporté dans mon nouveau logis. Une jolie pièce en angle de la maison que venait d’acquérir Paul. J’avais vue sur le jardin où rosiers, seringas et chèvrefeuille allaient embaumer les printemps à venir.
Mon nouvel habit de coton beige aux dessins harmonieux de branchages et d’oiseaux allait s’accorder parfaitement avec le décor de cette maison. Paul prenait soin de moi maintenant : il s’asseyait délicatement sur mes coussins, ne faisant plus grincer les ressorts, il croisait ses longues jambes, et prenait un livre dont il tournait les pages avec gourmandise. Tout va bien me disais-je mais trouvais étrange que plus aucune présence féminine n’entrât dans la nouvelle demeure de Paul. Il était devenu un lecteur acharné , laissant à ma bienveillance les marque pages, les livres ouverts. Bref, je menais une vie d’intellectuel, c’était très calme.
Rosiers et chèvrefeuille refleurissaient chaque saison et puis un jour, plus rien, tout avait été vendu. Paul n’avait plus les moyens : la lecture ne nourrit pas son homme.Il vendit tout, sauf moi. Oui, il me gardait en souvenir de tous les bons moments passés ensembles, agités, passionnés, raisonnables et studieux.
Paul avait trouvé un petit appartement dans une HLM, au 3ème étage, exposé au couchant . C’était le déclin complet. J’avais gardé ma tenue beige aux feuillages, tout était un peu passé, terni mais je faisais encore mon petit effet. Donc, je recevais Paul et quelquefois des copains pour les matchs de foot à la télé car, oui, mon Paul avait acheté un vieil écran à Emmaüs. Il vivait de l’aide sociale et son allocation logement doublée de son RSA ne couvraient pas grand-chose. Son train de vie était tombé bien bas et le mien avec. Et pour finir, le soleil grillait tout ce qui avait fait mon charme ; J’étais désespéré.
Un canapé éventré reconsidère sa vie.
Je suis là, au fond d’une cave humide, la mousse à l’air et les ressorts qui rouillent.
Personne ne veut de moi, même les Emmaüs.
Et pourtant, quand j’étais jeune, j’étais beau dans ma splendide livrée de skaï noir et mon assise sous forme d’un judicieux sandwich de polyester doux aux fesses et aux griffes de chat, qui recouvrait un bloc de polyéther beaucoup plus ferme pour éviter de lui donner un air affalé. Ou plus exactement de quatre sandwiches : deux pour les fesses et deux pour le dos.
Posés respectivement sur des sommiers à ressorts merveilleusement élastiques.
Toutefois mon allure banale de meuble moderne et mon prix élevé, promesse d’une marge juteuse, rendait ma vente difficile et aléatoire.
Il fallait trouver un client avant que le côté banal à la mode cette année-là devienne complètement ringard. Par chance, il existe des miracles (ou à la rigueur des coups de chance, voire des clients naïfs) et d’excellents vendeurs.
Un jeune couple entra dans le magasin. La fille était belle et le jeune homme n’avait d’yeux que pour elle. Notre vendeur savait déjà que c’était gagné.
Il fit asseoir les jeunes gens sur des modèles trop mous, façon lit de plumes (qui conviennent plutôt à des vieux pépés fatigués qui ne peuvent dormir que devant une télé allumée).
Puis sur un modèle économique façon blocs de bois recouverts d’un rembourrage style « noyaux de pêches » (destiné aux écolos fauchés ou aux apprentis fakirs).
Et enfin il leur fit éprouver ma merveilleuse élasticité sans les brusquer, en attendant le moment où leur attirance mutuelle était suffisante pour pouvoir leur asséner mon prix élevé sans qu’ils y prêtent attention.
Pour la beauté du geste, et pour les ferrer au cas où le prix les refroidirait, rien de tel qu’une mirifique réduction de dix pour cent arrachée par téléphone à un patron fictif.
Et pour compenser cette perte, un crédit (fort coûteux) par petites mensualités sur de nombreuses années (parce que le banquier accorde au vendeur une commission sur les crédits).
Bingo !
Me voilà chez eux. Devant une télé qu’ils allument rarement car mon élasticité parfaite fait merveille : cela suffit à leur bonheur car ils se foutent des catastrophes ou les idées qui agitent le monde à cet instant.
Un an plus tard, un bébé arrive. La vie est devenue compliquée parce que les parents travaillent, et qu’un enfant coûte beaucoup de temps et d’argent.
Je me sens un peu abandonné. Je ne dirais pas que ma merveilleuse élasticité s’est transformée en relâchement, ça serait exagéré. J’ai maintenant à subir les bêtises et les mauvais traitements d’un enfant devenu turbulent, et j’ai bien failli être revendu sur leboncoin.
Mes propriétaires, quels ingrats !
Après tout ce que j’ai fait pour soutenir et encourager leurs amours !
Ils n’ont pas réussi à me vendre. Trop cher et problèmes de transport. Bien fait pour eux !
Alors, ils m’ont gardé. Mon élasticité ne les intéresse plus beaucoup et je sers plutôt de punching-ball ou de trampoline pour un garnement muni de souliers crottés.
Bref, j’ai perdu le moral car le gamin devient de plus en plus violent avec moi, et les parents laissent faire.
C’est d’ailleurs ce salopard qui leur avait donné l’idée de me vendre parce que je ne l’amuse plus.
Il veut quelque chose de vivant. Un animal.
Le joli poisson rouge que ses parents ont adopté ne l’intéresse pas. Il veut un gros chien.
Après d’âpres négociations et moult supplications, il a fini par obtenir un chat donné par la mère d’un de ses camarades.
Enfin un être vivant qui s’intéresse à ma douce élasticité ! Et qui ronronne de plaisir. Un peu comme mes propriétaires pendant la première année.
Par malheur, ce chat a des griffes, et j’ai été victime d’un skaïcide par imprudence du minet : son coup de patte m’a fait une petite déchirure qui s’est envenimée et qui a rapidement pris les proportions d’une balafre de vingt centimètres d’où ont jailli des morceaux de polyester qui se sont répandus dans la pièce et qui ont servi de nourriture aux deuxième bébé, ce qui l’a conduit aux urgences.
Et c’est pour ça que je me morfonds au fond de la cave humide.
Toutefois, je n’ai pas perdu tout contact avec des êtres vivants : le chat vient me voir régulièrement. Il me fait patte de velours, me réchauffe, et me débarrasse des rats qui nichent dans mon polyester et rongent mon squelette en bois. Cette sollicitude n’est pas désintéressée : je le soupçonne de préférer un bon rat sur canapé aux croquettes de sa gamelle.
Joli texte, j’adore la fin, les chats ont toujours le dernier mot !
Objets inanimés avez-vous donc une âme ?
Ça y est, il a fini par m’ crever
le fou avec sa canne épée
qu’il a sortie d’son parapluie
pour impressionner ma p’tite psy …
S’est pas laissée impressionner
d’ son taser l’a neutralisé
mais m’ voilà bel et bien crevé
mes tripes n’ont pas résisté
M’avait ach’té aux Emmaüs
après avoir chiné aux puces
pour en trouver un dans ses prix
du premier coup je l’ai séduit
Avec mon beau cuir patiné
dans les ton fauve et bien ciré
je produisais un bel effet
et tout les patients s’y vautraient
Ah ! j’en ai essuyé des pleurs
j’ai entendu bien des malheurs
mais souvent ils se redressaient
vidés d’leur stress ils guerissaient
droits dans leurs bottes ils repartaient
et moi, j’en étais bien heureux
d’avoir participé un peu
à ces ultimes relevailles
Elle a app’lé les Emmaüs
ma petite psy, ma p’tite compagne
pensant qu’j’aurais une nouvelle vie
après quelques raccomodages
elle a bien versé quelques pleurs
voyant l’copain des premières heures
partir sur un autre aiguillage
après tant d’heures de copinage
Mais qu’est-ce qu’ils ont dans l’atelier
à tous venir se réfugier
entre mes bras pour raconter
leurs p’tites misères et leurs soucis
Au lieu de réparer mes plaies
sur mes accros, ils ont jeté
un plaid en mohair écosssais
Mais ça, c’est la petite Marie
qui ressemble un peu à ma psy
qui a eu c’t’ incroyable idée
et quand elle vient se réfugier
entre mes bras et me parler
comme à un véritable ami
âgé, même à moitié crevé
je suis au paradis
Lecrilibriste
Un canapé éventré reconsidère sa vie.
Je me souviens de ma naissance quand le dernier clou a été planté dans ma structure
et qu’enveloppé dans un plastique on m’a hissé sans précaution dans une estafette qui m’a livré dans une maison de maître sise 8 rue des Ecrivains.On m’a installé dans une pièce spacieuse où siégeaient déjà un canapé ottoman aux pieds Louis XV, un fauteuil Voltaire,un fauteil à la reine, un fauteil crapaud, etc, etc.J’eus l’impression d’être chez un antiquaire. Mais non j’étais dans la maison d’une famille-type bourgeois comme ils disent . Un peu en retrait il y avait une chaise percée. Je n’ai pu m’empêcher de penser que les humains ne savaient plus quoi inventer.
Chaque soir,un homme allumait les lampes et chacun prenait « sa place », un gamin de 6 ans environ se vautrait sur moi et j’entendais son père crier « arrête de t’affaler sur ce putain de canapé et de te lobotomiser aux jeux télé en te bourrant de MacDo » tout en s’asseyant sur le fauteuil Voltaire où il se mettait à lire une revue que je n’ai jamais pu identifier vu la façon dont il la tenait. Bien sûr, tout de suite, je pensai à mal, c’était certainement une revue porno. Madame arrivait, s’asseyait dans le fauteuil à la reine (elle en avait la majesté) et se mettait à faire des mots croisés . On ne voyait pas souvent la grand’Mère : sans doute était-elle fatiguée et préférait aller se reposer dans sa chambre.
Les années ont passé, le père est devenu chauve, la mère a pris de l’embonpoint, la grand’mère est partie dans une maison de retraite ; quant au gamin c’est maintenant un homme et depuis quelque temps il a une copine et tous deux régulièrement font grincer mes ressorts tant et si bien qu’ils se sont cassés.
J’ai entendu hier soir les parents téléphoner à Emmaüs pour qu’ils veuillent bien venir me chercher mais vu mon état il leur a été conseillé de me déposer à la fourrière.
Je n’ai pas éprouvé de tristesse, peut-être un petit pincement au cœur. J’avais eu une belle vie avec cette famille et il était temps maintenant d’y mettre fin…
Tout seul dans ce bazar … enfin seul pas vraiment mal fréquenté des vases cassés, de la vaisselle dépareillée ah si mes copains me voyaient … la honte … j’étais le luxe, la Rolls de catégorie, dans un grand appartement du 16eme, sur la place … enfin c’était une autre vie, la gloire, j’ai côtoyé les plus grandes vedettes et maintenant quelle dégringolade ! Des bicyclettes sans selle, des pots de chambre … certes je ne suis plus au mieux de ma forme mais en prenant la peine de m’accorder une seconde vie… mais non on préfère acheter, le neuf, le pas cher, le vite jeté. Il n’y a que ça pour les jeunes, quelle époque … une antiquité moi ? Ah non contemporain. Bon arrêtons de nous lamenter voyons le côté positif … mon passé glorieux mais à qui en parler ? Une recyclerie ils appellent ça … une seconde chance une seconde vie …
Chut, des pas.
Ah lui-là mais ce qu’il est moche, vert pisseux et pelucheux … les ressorts et le trou … on va le jeter ? Direction le container tout venant ?
Pas d’accord Arthur, années 50 un Steiner ou un Knoll … un passage chez le tapissier et … vente aux enchères de décembre il pourrait nous réserver une belle surprise … un antiquaire ou un amateur … petit …confortable ..
Faut aimer moi j’aime pas …
Arthur … Arthur… y a pas qu‘Ikea pour un canapé…
On me soulève on ne palpe et je me retrouve dans une camionnette … nouvelle station … un atelier. Des mains douces une voix aimable
Alors un Steiner… un vrai eh bien on va te refaire une beauté…
Ouf je l’ai échappé bel
Alors qu’il se rendait à son travail, un jour il m’aperçut moi le vieux fauteuil club abandonné sur le trottoir. Il m’a ramassé, nettoyé, ciré, et il m’a gardé tel quel, pendant des années, dans un coin de son appartement. Tout le monde m’aimait, même si j’étais très fatigué. Quand une personne lui rendait visite, elle ne pouvait résister à l’envie de s’asseoir un instant, le temps de m’apprécier.
Puis, vint le moment où il déménagea et je n’avais plus ma place dans sa nouvelle maison, j’étais vraiment trop usé, presque éventré. Un jour, des amis sont venus lui rendre visite, ils possédaient une grande maison, avec une pièce pour jouer au billard. Et c’est ainsi que je me suis installé chez eux après qu’ils m’ont fait restaurer chez un maroquinier ; je suis revenu beau, juste ce qu’il faut.
Depuis, il me regrette. Il se souvient qu’il lisait « Le Monde » peut-être pas trop bien assis, mais peu lui importait. Rien n’est jamais perdu tant que l’on se souvient avec nostalgie de ce qui nous a accompagnés quelque temps dans notre vie.
Et quoi de plus beau que d’avoir l’idée de deux exercices en ma mémoire !
Georges écrase sa gauloise et appelle … Bibiche, Bibiche !
Moi, celle-là je ne peux pas l’encadrer. Ce, depuis qu’elle a ordonné que l’on me ramène, manu militari, dans le mouroir du Mobilier National et que l’on m’y mette au placard.
Tout ça pour me remplacer par du ‘design’, j’ai dû me renseigner auprès d’un jeune huissier pour savoir ce que pouvait bien vouloir dire cet étrange mot.
Pourtant, des étrangers, Dieu sait que j’en ai vu passer, de toutes les couleurs, et dont j’ai supporté le poids lorsque je trônais depuis le XVIIème dans le salon des Ambassadeurs. Depuis la République, c’était sur mon assise dorée que s’asseyaient côte à côte le Président et son hôte prestigieux.
Je percevais leurs chuchotis mais, motus bouche cousue, discrétion, secret d’État, je savais tenir ma langue, je veillais jalousement à ma soie, et bien malin l’espion si subtil soit-il qui eût réussi à coller un micro contre une de mes lattes. Plus patriote que moi ?
Et tout à coup, comme ça, me voilà catalogué de ringard ! Quel manque de respect à l’égard de mon maître Boulle qui m’a dessiné, pour mes assemblages en queue d’aronde, mon bois précieux doré à la feuille d’or, ma soie lyonnaise rebrodée.
Vrai, mon assise est devenue un peu creuse, aplatie, parfumée (?) depuis plus de 3 siècles par des fessiers plus renommés les uns que les autres, chacun ayant laissé sa trace autant sur mes ressorts que dans l’Histoire de France.
Et j’en ai vu défiler des popotins illustres me concentrant en particulier sur ceux des premières Dames, parmi les plus marquants :
La Pompadour : le plus beau cul, et je l’ai vu de près
Joséphine : teint sublime de partout
Yvonne : toujours fourrée à la chapelle
Claude : la fameuse Bibiche qui voulait ma peau
Anne-Aymone : adorait mon style, ma protectrice
Danielle: n’en avait rien à secouer
Bernadette : gonflait grave le maître queux et le jardinier
Carla : me cassait les oreilles, ses clebs ont failli me bouffer
Valérie : scandale dans la salle-de-bain entendu jusqu’en bas
Et puis voilà la dernière, je ne vous dirai pas ce que je pense, mais me voilà grâce à elle sorti du placard et retapissé, fort bien placé dans la salle des Fêtes restaurée, je suis revenu dans mon temps jadis.
Par charité, je n’ai esquissé qu’un petit sourire en coin lorsque j’ai vu que l’on chargeait le salon design dans le camion.
P.S. Entre-nous, Félix Faure, c’est pas dans son lit que ça s’est passé, je suis bien placé pour le savoir.
Bien avant d’être percé, j’étais persan. J’étais divan et « lieu de pouvoir ». Les sages traitaient des dossiers en s’appuyant sur le mien. Au bout de plusieurs Croisades, le divin s’empara du divan pour le faire convertible. On me vit peu à « peu plier » mais ce fut un sacré « boulot ». J’en perdais tout mon « charme ». « Si tu te « loupes », on te mettra à la « chaîne », puis on te mettra des « pins » avant que tu finisses « noyé » », me menaçait-on. Le BZ devenait mon B.A.-BA. Bientôt, je dus prendre mes clic et mes clac pour rejoindre l’occident. D’Orientale je devins méridienne sous le 1er l’Empire. Les Françaises aimaient converser et s’alanguir sur mon dos tout en conservant leur délicate féminité. Quant à mes coussins germains, ils se montraient plus fermes avec une assise bien droite. Ils se donnaient plus de ressort afin d’éviter la sieste. Mon dos droit allait bientôt s’incurver pour décorer les salons. On allait même y mettre des oreilles pour la discrétion et des bras pour s’y accouder. Toute la vie s’organisait autour de moi. On faisait salon autour de mes courbes plus ou moins confortables. Puis, à côté de moi, on mit une table pour boire l’apéritif et y poser des canapés. Plus ses derniers étaient goûteux, plus je devais moelleux. On me dessinait en gondole pour mieux s’y amuser. Aujourd’hui, si les liaisons dangereuses ne s’y nouent plus sur des toiles de Jouy, l’amour vache s’y cravache encore sur un revêtement de cuir. Mais après avoir supporté l’étalon de madame et les talons des gamins voilà qu’on me jette à la décharge pour un accroc à la marge.
Pièce. Acte unique.
– F. (Faust Œil) : Comment te sens-tu ?
– K. (K.Napey) : Eventré. Et toi ?
– F. : Ecœuré ! Une telle violence !
– K. : Je suis sous le choc. Je n’ai pas tout compris. Raconte.
– F. : Souviens-toi. Lui et L’autre, vautrés sur toi, après t’avoir bien secoué.
– K. : M’en parle pas, j’en ai encore mal à mes lattes.
– F. : Et ? Qui arrive à l’improviste ?
– K. : Sopha !
– F. : A leur vue, elle a hurlé comme un cochon qu’on va égorger. Une colère satanique lui a fait péter un ressort. Elle s’est précipitée dans la cuisine. A farfouillé dans les tiroirs. Est revenue en brandissant le couteau de boucher de Madame Ottomann. S’est ruée vers toi et…
– K. : Alors, en plus d’être éventré, je suis hémoglobiné.
– F. : Non, t’inquiète ! Tandis que Sopha était dans la cuisine, Lui et L’autre ont filé comme des rats. Qu’ils sont !
– K. : Ouf ! Je suis rassuré.
– F. : Donc, Sopha s’est acharnée sur toi. Une vrai Harpie ! J’ai compté 88 coups de couteau. Enfin, à bout de souffle, elle t’a contemplé. A versé une larme. Est partie sans un mot.
– K. : Et que vais-je devenir ?
– F. : Que souhaites-tu ?
– K. : Euh…
– F. : Le dépôt d’ordures de la cité, le lac, la forêt, la déchetterie, la crémation, la…
– K. : Tu es cruel ! Non, je veux qu’on me bricole, qu’on me rafistole, qu’on me cajole…
– F. : T’inquiète ! Je suis là ! Je vais m’occuper de toi. Viens dans mes bras, que je te console, Grande Fofolle !
Le lendemain, ils furent kidnappés. On ne les revit jamais.
Le canap.
Dans un ton vert amande, en velours tendre, j’étais si majestueux lorsque Camille m’a fait entrer dans son salon. Je me souviens de son prénom, Camille, car elle m’a tellement bichonné durant une bonne quinzaine d’années. Il y a presque 75 ans de ça.
À part certains qui m’avaient testé rapidement de leur postérieur, dans l’entrepôt de vente, Camille est le premier fessier qui s’est confortablement installé contre moi, avec amour, car je lui plaisais beaucoup.
Aujourd’hui je ne ressemble plus à rien, mes petits coussins rebondis sont complètement avachis, mes couleurs n’en sont plus et je me sens si sale… J’attends mon diagnostic.
Camille s’est lassé de moi ou plutôt, son nouveau compagnon lui a offert le sien, un tout nouveau canapé noir en simili cuir qui colle aux fesses quand il fait chaud et qui est froid les soirs sans chauffage….« Beurk »… Je suis sûr qu’elle m’a regretté !
C’est une dame d’une cinquantaine bien sonnée qui m’a racheté. Elle voulait un canapé pas trop neuf pour que ses petits-enfants puissent s’amuser sans abîmer son mobilier. J’étais donc relégué dans une salle de jeu. Mais pauvre de moi, que de coups, j’ai pris dans le ventre, sur le flan. Coups de pieds, coups de poings, ils me sautaient dessus sans vergogne. Cela a duré une bonne dizaine d’années jusqu’à ce que mon bras droit me lâche. Son fils m’a remis en place et consolidé, mais c’était comme une prothèse mal construite.
De là, c’est le plus vieux petit fils de ma propriétaire qui m’a emporté dans son studio. Il venait de quitter la cellule familiale pour continuer ses études à Tours Il dormait sur moi jour et nuit quand il n’était pas en cours ou en boite de nuit. Mais combien de corps féminins se sont lovés contre moi ? Ah, il avait la forme le petit étudiant, jusqu’à ce qu’une jeune femme reste là très longtemps. Ils s’aimaient, étudiaient ensemble, ils regardaient des films, parfois jouaient à la space station et ils restaient sur moi pour manger avec leurs plateaux ou leurs plats tout prêts tels pizzas, sushis etc, avant de m’ouvrir pour la nuit. J’étais leur compagnon d’armes, car il y avait peu de mobilier dans le studio lumineux, à part une table, 4 chaises et une grande étagère avec quelques tiroirs.
Il m’a gardé longtemps même après qu’il ait trouvé un travail et une nouvelle petite amie régulière. Il paraît que j’étais encore confortable.
C’est un copain de l’étudiant qui m’a ensuite embarqué. Il venait d’acheter un grand appartement pour le louer en collocation. Mon bras gauche, abîmé, a aussi été doté d’une prothèse beaucoup mieux adaptée que celle de mon bras droit. Mes coussins sont devenus multicolores, 4 coussins en tissus et chacun des premiers colocataires s’asseyaient avec plus ou moins de douceur, mais j’avais une impression de respect.
J’ai rencontré beaucoup de monde durant ce séjour qui a duré 24 ans, je crois. Des fessiers de toutes formes, de toutes odeurs, du plus au moins délicat. Je servais de lit d’appoint lorsque certains étaient trop alcoolisés pour rentrer chez eux.
Je ne me plains pas. Aujourd’hui, au-delà des coussins percés et des dossiers très usés, j’ai encore de la prestance malgré ma présence depuis 3 mois dans un entrepôt d’Emmaüs à côté d’autres canapés bien moins beaux que moi, et encore plus sales… Je ne vous parle même pas de l’odeur fétide qui flotte ici ! Avant d’atterrir parmi mes congénères de moins bonne facture, je me suis retrouvé sur le bon coin pour une éventuelle vente à l’amiable, sans issue.
Deux hommes et une femme sont venus hier m’ausculter et ont décidé de me remettre en état, car ma carcasse est encore très bonne. On n’est pas Roche Bobois pour rien !!!
Il est 9h du matin.le soleil inonde la salle à manger où les restes d’une fête jonchent une grande table.Bouteilles vides,gobelets en carton,serviettes sales roulées en boule.
Des plats,vides eux aussi,sauf celui où gît un petit canapé saumon ,coriandre,aneth entre deux tranches de pain à présent éventrées.
Ses camarades jambon de Parme mayonnaise,guacamol coriandre,crevette citron olive ont disparus hier soir.Lui a été ouvert sans ménagement et remis à sa place.
« Ah! zut,encore du saumon,je pensais que c’était du guacamol. »
Et le canapé est resté,tripes à l’air toute la nuit.
Il s’est revu dans les rayons du magasin,bien installé entre ses semblables,attendant que l’on s’intéresse à eux.Ca y est,une main saisit le paquet.
» Et les pains de mie, combien?
– Il faut bien en prévoir trois. »
Jetés dans le caddy,ils atterrissent sur des avocats,se cognent contre un bocal d’olives.Un petit frisson quand le chariot virevolte dans les allées,d’autres ingrédients viennent les rejoindre.Un tour sur le tapis roulant à la caisse,un voyage dans le noir au fond du coffre d’une voiture,puis stationnement dans uns cuisine où l’on s’affaire déjà.
» Je m’occupe des canapés dit quelqu’un qui tartine,tranche avec dextérité.
Lui et les siens sont destinés au saumon que l’on recouvre d’une deuxième tranche de pain décorée d’une demi rondelle de citron.
Le canapé s’attendrit,s’imprègne,attendant la fête avec impatience .
Ca y est, les invités arrivent,s’embrassent,déposent des bouteilles,des plats.
Au fur et à mesure de la soirée,il voit des mains qui hésitent,choisissent autour de lui mais toujours à côté.Le vin disparaît,les desserts partent sur des assiettes,il reste là,déconfit,seul,depuis l’humiliation ultime de ce:
– Ah zut encore de saumon….
Il se rétrécit,durcit,attendant une fin sans gloire,douloureuse,jeté dans une poubelle déjà remplie de restes de cette soirée signant le fin de ce noble petit canapé.
Un canapé éventré reconsidère sa vie.
Je les ai tout de suite remarqués.
Ils sont entrés l’air décidé. Ils appartenaient à la catégorie de clients qui savaient précisément ce qu’ils cherchaient. Ils ne m’ont pas vu tout de suite, trop préoccupés par les critères qu’ils avaient établis avant de venir. J’en saisissais des bribes quand ils passaient et repassaient devant moi sans me voir. « haut dossier », « plus de 190 cm » « je veux pouvoir y faire la sieste ! », « convalescence ». Je voyais bien que les passages s’intensifiaient devant moi mais que je ne faisais pas l’unanimité…
La mère les bras croisées s’arrêta définitivement et s’assit. Le père et l’ado en retrait, firent une moue suspecte. Quelques semaines plus tard, je débarquais chez mes propriétaires. Et l’arrivée fut épique…J’étais trop gros et trop large parait-il. Il fallu démonter la baie vitrée. Le père fulminait, la mère se faisait tout petite et l’ado filmait cette triste scène ! Quant à la future convalescente, elle me regarda avec mépris avant de reconnaître tout de même que mon dossier soutenait bien son dos, bientôt endolori et que mon assise était bonne…
Pendant les premiers mois, la mère me bichonna. Chaque premier du mois, elle m’enduisait d’une crème hydratante. J’adorais ce petit rendez-vous. Je n’avais pas le cuir solide. A vrai dire, j’avais la peau fragile, ça le père l’avait bien noté. Il avait même ironisé sur la triste perspective de rester collé sur moi, les cuisses moites, pendant les mois d’été à regarder le tour de France à la télé… Je voyais bien que j’allongeais la liste des corvées pénibles.
Puis un jour arriva où je n’eus plus ma séance de bien-être. La mère baissa les bras. Elle préféra s’occuper de sa fille et de son dos plutôt que de moi. Je comprenais. Mais je souffrais tout comme elle. Alors plus elle allait bien, plus j’allais mal.
Les mois passèrent et ma peau craquela. D’abord sur la têtière où se posait la tête du père. Il faut dire que l’idée qu’il avait derrière la tête me projeta dans une dépression sans fond. Il voulait me remplacer ! Au bout d’à peine trois ans ! Je perdis tout espoir et des lambeaux de peau de plus en plus nombreux. Ils voulurent cacher mon désespoir et mon revêtement avec des plaids. Curieuse-ment ces derniers me permirent de recouvrer une certaine dignité mais quand je les entendis parler de mon remplaçant qu’ils avaient sournoisement acheté sur un coup de tête, je perdis tout contrôle. Je lâchai prise. Mon dossier, mes assises et accoudoirs craquelèrent à une vitesse prodigieuse. Je sa-vais que c’était la fin. Ils estimèrent qu’ils pouvaient même m’épargner un autre foyer tellement j’étais abîmé.
Je repartis dans le vieux camion dans lequel on me hissa sans ménagement. J’eus le temps de croiser le regard de la mère qui eut l’honnêteté et la délicatesse de me remercier pour les services rendus et le confort indéniable qui était malgré tout le mien. Je ne croisai pas mon remplaçant, c’était mieux ainsi. C’est dommage, je l’avais bien aimé, moi, malgré tout, cette petite famille. Cela me fendait le cœur de partir. Ecartelé de toute part comme je l’étais, j’étais pressé qu’on en finisse. J’avais malgré tout bien vécu, peu de temps mais pleinement. A chacun son destin. Je ne reniais pas le mien.
Qu’il me semble loin le temps des privilèges. J’ai vu le séjour dans une famille d’aristocrates. Lui était ouvrier, elle femme de ménage. Pendant vingt ans, je n’ai manqué de rien, j’ai même abusé de tout l’amour qu’elle m’offrait.
Elle, c’était Maria, la maîtresse de maison. Elle me chérissait comme un enfant roi ou un bijou de salon qu’elle lustrait avec une délicatesse d’orfèvre. Je me souviens encore de ses mains douces, de ces massages troublants sous ce linge blanc à la même crème de jour qui illuminait son visage et mettait les sens de mon cuir en émoi. Toute la semaine, il n’y avait qu’elle et moi. Personne n’avait le droit de poser la main, encore moins une fesse, sur moi. Le mari dans le fauteuil, elle sur une chaise et les enfants, par terre conte le mur. Ainsi, nous regardions tous ensemble la télévision, le soir, sans cris, sans heurts, ni agitation. Le canapé était réservé pour les grandes occasions. Je n’ai connu que la flanelle des habits du dimanche et l’émotion palpable des cœurs des enfants grimpant sur moi, comme ils feraient dans un avion, impressionnés et sages devant Jacques Martin et son école des fans. Et puis, il y avait ces instants magiques où Maria se lovait en moi, le temps d’une sieste volée, le linge blanc serré dans un poing qu’elle finissait par lâcher dans les bras de Morphée et moi.
Vingt ans d’un privilège rare, que même les plus illustres fauteuils royaux n’ont pas connu, maltraités durant la monarchie du poids de leurs excès et de leurs folies avant d’être soignés dans les galeries des châteaux et musées, ou dans les EHPAD d’antiquaires plus ou moins bien attentionnés.
Et puis, un jour, une rayure, pour un mauvais geste d’un déménageur, a eu raison de moi. Une première déchirure aussi pour Maria. On lui disait que j’étais démodé bien que « comme neuf », que j’avais fait mon temps. On lui proposait une belle reprise pour un modèle plus récent. Elle a cédé et j’ai été vendu à une famille de dépravés. Lui était assureur, elle directrice du Marketing. Je n’ai manqué de rien, ils ont abusé de tout ce qu’on pouvait faire pour maltraiter, humilier, souiller un dur à cuir comme moi.
Je n’avais encore jamais vu de monstres en vrai, hormis à la télé. Le premier d’entre eux, avait de belles moustaches pourtant, des yeux bleus perçants et un poil doux et lisse qui me rappelait le linge blanc et les massages de Maria. Mais cela ne dura qu’un temps, infime, avant que je ne connaisse sa vraie nature et le malin plaisir qu’il avait à laisser courir ses griffes acérées sur mon flanc. Mais comme si cela ne suffisait pas, deux amours de cruauté, revenus de l’école, des billes pleins les poches et du Nutella plein les mains et la bouche, tiraient le chat par la queue qui s’accrochait alors désespérément à moi à m’en faire hurler de douleur. Du Nutella colmatait les plaies tandis que des billes s’infiltraient dans mon ventre. Quand l’assureur rentrait vers 21 heures, libérant la bonne épuisée à contenir ces monstres dans ma souffrance, sa bière finissait de me retourner l’estomac à en recracher la mousse. Les enfants couchés, le mari attablé sur la table basse devant moi, nous mangions une pizza en attendant le pire. Vers 22 heures, madame arrivait, s’étonnant que ses amours soient déjà couchés, se vautrant sur moi comme si je n’existais pas, se relevant aussi sec, avec un cri d’horreur, me fusillant du regard comme si j’avais la peste, et revenant quelques secondes plus tard avec une bombe qui n’avait rien à envier à celle sur Hiroshima. Tout en moi se contractait, comme si j’allais mourir. Même pas. L’agonie dura dix mois. Que c’est long quand vous n’avez qu’une envie, en finir. Même la bonne, avait des gestes brusques, rapides, bâclant toute affection à mon égard. Parfois, le temps d’un répit, dans l’après-midi où je restais seul, je repensais à Maria et nos siestes crapuleuses, ce temps où j’étais heureux, privilégié. Je ne pouvais pas me plaindre aujourd’hui.
Alors, cette après-midi, j’ai coincé la griffe du chat dans mon ventre, et je me suis fait hara-kiri. Quand ils vont rentrer, sans doute personne ne versera une larme pour moi avant de me jeter dans la fosse commune de la déchetterie. Et c’est très bien comme ça, tant que Maria ne le sait pas.
Superbe.
Merci.
Un canapé éventré reconsidère sa vie.
L’étiquette accrochée au pied
Afin de m’authentifier
Paré pour la crémation
Lumière blanche, tunnel, lévitation
Je vais bientôt torréfier
Ah ! Voir Naples et cramer !
Déplacé, tiré, écorché, éventré
Allongé depuis tant d’années
J’ai fini par baisser les bras
Rendu l’âme au Divan Sofa
Fais taire le tic-tac
De mon Clic-clac, clic-clac
Moi qui avais la peau dure
Prêt pour toutes sortes d’aventures
Je me suis même converti
En canapé-lit
Sans jamais manqué de ressort
Dans ma zone de confort
Est-ce là ma vie qui défile ?
Toute en cuir toilée textile ?
Allez, avant le passage au four
Fêtons dignement mon non-retour
Saisissons l’opportunité :
Petits fours et canapés !
🐀 LES MÉMOIRES D’UNE CAUSEUSE.
Canapé bien placé dans un coin du salon ma forme en $ incitait à la confidence.
On y parlait placement en tous genres, d’argent ou de personnes souvent avec pertinence.
Je suis d’un temps où les gens savaient se tenir.
Que de derrières sur mon assise s’y sont installés.
Les augustes des rombières.
Des gros qui bien au fond se sont calés aussi pour digérer.
Des menus, juste au bord posés.
Mes préférés étaient sans conteste celui chaste et désespéré de l’être de la cadette.
C’est en susurrant qu’elle confiait à sa grand-mère ses craintes de coiffer Sainte Catherine sans avoir de soupirant.
Celle-ci lui donnait, en femme d’expérience, des conseils pour un minois attirant.
– Souris, lui disait-elle, montre leur tes jolies dents !
– Oh oui répondait la vieille-fille, mais justement, lassée de leurs fadaises, je les montre les dents à ce point qu’ils partent en courant !
– Sois patiente, ce n’est pas notre instruction qui les intéresse au contraire elle les met en infériorité.
– Mais Grand-mère je ne vais tout de même pas jouer les dindes pour leur plaire !
– C’est toi qui vois ! Dans certains cas mieux vaut passer pour une bécasse mais entourée !
– De vieux légumes rabougris ! J’en veux un vert, brillant pas un navet !
– Ma fille, rabaisse tes exigences, tu n’es plus un perdreau de l’année.
La chasse est ouverte !
J’assistais impuissant en tant que canapé à ce désarroi.
Ce que je peux vous dire après quelques mois.
Un jeune postérieur ferme et rond a pris place à côté de celui de la cadette.
Lui, parlait parlait à mi-voix. La colombe roucoulait.
Se sont rapprochés.
Je crois même qu’ils ont fini par partager l’accoudoir.
Signe incontestable d’une intimité.
🐀 Souris-Verte
Le fait de passer d’une croyance considérée comme fausse à une vérité présumée, c’était cela ,déjà, le raccourci de ma vie.
Je me croyais installé dans l’éternel rayon solaire de l’été, entre deux baies vitrées aux rideaux fleuris. Je m’imaginais, accueillant les ronrons du chat, les chahuts des enfants à venir, la sieste du père. En digne fils de la déesse Conforama, j’avais planté mes quatre pieds dans le moelleux de la moquette. L’horizon n’était qu’arrondis de brioches et fumeroles de Ricoré. J’étais bien mieux que sur le catalogue, bien moins glacé.
Et puis, l’absence fait des trous. Alors Madame m’a remis à ma juste place. J’allais tomber de ma petite croyance à une nouvelle vérité. Je n’étais que convertible. Et Madame porta fort le message de sa religion avec le facteur, avec le plombier, avec le concierge, avec un meilleur ami.
A son retour, Monsieur ne mit pas longtemps pour découvrir le pot aux roses. Il était tout cassé et bien mal recollé, tout de traviole, le Monsieur comme le pot, ya rien qui pouvait tenir.
Alors, vu qu’il n’avait qu’une suite dans l’ idée et les noisettes brisées dans le kangourou, le Monsieur s’est jeté sur moi avec son couteau suisse. Il m’a lacéré le tissu, il m’a tirebouchonné le rembourrage, il m’a poinçonné le tréfonds du confort. Enfin il m’a achevé à la machette puis balancé dans son break.
Tout le monde le reconnait. En agissant ainsi plutôt qu’autrement, il évitait la prison à vie.
Mais la justice existe quand même, puisqu’il il s’est pris une amende de 200€ pour m’avoir abandonné au bord d’un bois, tu sais, sur la D 115, dans la ligne droite, là où, chaque soir, atterrissent tous les vieux pneus du secteur!
– Trop, c’est trop !
A ce stade là, c’est de la maltraitance.
Mes entrailles sont saillantes et je dis STOP !
Laissez-moi mourir en paix… mais ailleurs !
Eh ! Vous les minots : arrêtez de me sauter dessus et de vous battre sur MOI !,
Eh ! Vous les parents, un peu de respect s’il vous plaît ! Je sais…vous êtes fatigués: les fins de mois… le gouvernement…la tante Arlette, tout y passe et vous ne cessez de geindre sur moi.
Je ne vous supporte plus, SACHEZ-LE !
Eh ! vous la vieille ! Pourquoi vous vous asseyez toujours sur mon milieu ? Juste sur mes pauvres entrailles béantes ? Vous le faites exprès ? En plus vous sentez mauvais et vous êtes méchante. Oui… je vous ai vu tirer les poils du chat chaque fois qu’il dort tranquillement sur moi.
Eh ! vous les djeuns ! Pourquoi vous vous vautrez toujours sur moi tous ensemble ? Vous êtes laids, boutonneux et lourds. Je vous hais… je hais vos tablettes et vos rires débiles !
Pitié ! Je veux changer de maison ! Changer de maison ! Changer de maison ! Sniff ! Sniff !
– Oh là là mon pauvre ami…. te voilà dans un bien triste état ? Tu pleures si fort que je t’ai entendu de là haut.
Mais ton heure n’est pas arrivée vois-tu, et tu n’es pas assez abîmé pour que je te récupère au cimetière des canapés foutus.
– Mais j’en peux plus moi, Mon Dieu, de cette vie ! Si au moins je pouvais changer de maison, je serais plus tranquille. S’il te plaît Mon Dieu…. s’il te plaît !
– Ah ! Tu me fais vraiment de la peine, Canapé Eventré !
Qu’est-ce-que je vais bien pouvoir faire de toi en attendant que tu meures pour de bon ? Voyons… voyons !
– J’ai bien eu une demande la semaine dernière de la part d’Etienne CHATILLIEZ ? Et ça pourrait peut-être te convenir ?… En tout cas ça te changerait les idées.
Et c’est comme ça que notre pauvre canapé éventré, après s’être présenté au casting du film « LA VIE N’EST PAS UN LONG FLEUVE TRANQUILLE », a été retenu pour le rôle du décor du salon de la famille GROSEILLE.
Depuis, il n’arrête pas de tourner.
Ses entrailles saillantes sont devenues célèbres et tous les metteurs en scène se l’arrachent… (si j’ose dire) !
Il est heureux, bichonné et bien considéré, et en plus il gagne bien sa vie !
Ca fait rêver n’est-ce-pas ?