Exercice inédit d’écriture créative 50
Nous sommes Fauteuils de père en fils, depuis plusieurs générations.
Dans notre arbre généalogique, on trouve deux fauteuils empire et même une bergère.
Mon père était un fauteuil de dentiste, ma mère un fauteuil à bascule.
Il a tout perdu à la roulette, elle l’a quitté pour se jeter dans les bras d’un fauteuil d’orchestre.
Enfant, quand je n’étais encore qu’un pliant, j’en ai beaucoup souffert.
Mais, après quelques séances sur un divan, je suis devenu plutôt relaxe.
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Nous sommes Fauteuils de père en fils, depuis plusieurs générations. Dans notre arbre généalogique, on trouve deux fauteuils empire et même une bergère. Mon père était un fauteuil de dentiste, ma mère un fauteuil à bascule.
Il a tout perdu à la roulette, elle l’a quitté pour se jeter dans les bras d’un fauteuil d’orchestre.
Enfant, quand je n’étais encore qu’un pliant, j’en ai beaucoup souffert. Mais, après quelques séances sur un divan, je suis devenu plutôt relax.
J’en étais là dans mes pensées et dans le cabinet de mon psy préféré lorsqu’une jeune femme entra et s’assit sur un fauteuil en plastique transparent. Je haussai imperceptiblement mes sourcils pour souligner mon agacement.
Il faut que je précise. Chez mon psy, vous ne croisez jamais personne, à part lui ! Le patient entre par la porte d’entrée et il ressort par la porte de sortie. Aussi simple que ça !
Et pourtant, un jour d’automne, nous fûmes deux patients à patienter.
Je regardai discrètement ma montre. Elle aussi. Nous étions chacun à l’heure pour notre rendez-vous. Moi, à l’heure d’hiver, elle, à l’heure d’été. Ou l’inverse. Peu importe…
Bien que plus relax depuis les quelques séances sur un divan, je me demandais si j’allais oser prendre la parole, éclaircir ce mystère, mettre fin au paradoxe : à savoir, qui de nous deux aurait à ressortir par la porte d’entrée.
Je n’eus guère le temps de tergiverser. Une voix suave sembla s’élever de la malle qui servait de table basse.
– Mmmmm, belle généalogie ! Un peu lourde à assumer, j’en conviens…
Je piquai un fard en direction de la belle inconnue. De quoi se mêlait-elle ?
La voix continua.
– Une mère basculant dans des bras mélodiques…
– Je vous interdis d’insulter ma mère !
– Un père dentiste, penché sur des bouches béantes ! Encore heureux qu’il ne fut pas …
– Je vous interdis ! Les parents, pas touche. C’est sacré !
Je commençai à me trémousser sur mon fauteuil-relax. J’aurais voulu me plier en quatre et fuir…Je regardai la patiente. Elle était plongée dans son livre.
– Ce n’est pas elle, ce ne peut être elle qui…
La voix reprit , monocorde et mélancolique :
– Fauteuils de père en fils, depuis des générations ! Quelle coïncidence, chez moi, c’est Malle de mère en fille, depuis des générations…
Je restai bouche bée et toute ouïe !
– Royale, une de mes aïeules , fut du voyage avec François à Marignano ! Quel panache !
– Mmmmmm 1515….
– Une autre, Impéria de nom, alla jusqu’aux portes de Moskva…Elle en revint complètement givrée, mais aucune séquelle sur sa descendance ne fut signalée…
– Prestigieuse ascendance, je le reconnais !
– Je vous remercie. Du côté de mes parentes proches, se distinguèrent quelques malles-poste et leurs courriers aux conséquences épiques ou drôles… Il y eut des malles cabines, des plates et des bombées ..
– Époustouflant…
– Il y eut aussi la Malibran… Mais cela commença à se gâter avec la branche des malles-commodes dont l’une eut maille à partir avec la Mondaine…
– Sans vouloir être malotru, permettez-moi de compatir. Cela a du provoquer un certain…. mal-être
La patiente se cabra…
– Comment avez-vous deviné ?
– Pardon ?
– Comment avez-vous deviné mon nom ?
– Mais je ne connais pas votre nom, Mademoiselle, et je l’ai encore moins prononcé….
– Si….mais si….
– Et donc, vous êtes…
– Mademoiselle Allégria Mallettre- Strapuntino ; Mallettre par mon père, Strapontino par ma mère…
– Des points communs nous relieraient-ils donc ?
– Ne sommes-nous pas tous reliés les uns aux autres depuis que le monde est monde ?
Ils regardèrent discrètement leur montre. Il se saisit d’un stylo, elle d’un papier .
Ils rédigèrent un mot courtois au psy-commun.
Ils se levèrent . Bras-dessus, bras dessous, ils sortirent par la porte d’entrée et se firent…. la malle !
J’adore … Merci pour ce petit temps d’intrigue et de rêve.
C’est vous dire si on en a vu des paires de fesses.
Celles de mamie Madeleine. Elles s’entendaient comme chien et chat et se disputaient tout le temps, ces deux-là.
Celles de la jolie Marie, qui s’asseyaient toujours sur papa. Papa aimait bien les jolies fesses. Maman a bien rigolé quand, après son quatrième enfant, Marie a pris 20 kilos et que papa soufflait comme un bœuf pour la supporter.
Celles du petit marc. Toute une histoire ! Qu’il a pu nous faire pipi dessus, celui-là… En grandissant il sautait, ado il nous encrassait de pizzas, adulte il nous partageait avec ses copines. Si les fauteuils pouvaient parler…
Celles de la cousine Geneviève. Un cul pincé, la cousine. Malheureusement, la pimbêche avait jeté son dévolu sur moi. Remarquez, elle ne risquait pas de m’user, assise immobile sur le bord de mon coussin. Dommage, elle est bien roulée, Geneviève. Je préfèrerais qu’elle s’installe et qu’elle gigote, comme Marie.
Aïe, je vous laisse. Je file : j’entends l’oncle Albert. Il est sumo.
©Margine
Enfant, quand je n’étais encore qu’un pliant, j’en ai beaucoup souffert.
Mais, après quelques séances sur un divan, je suis devenu plutôt relaxe.
Il me restait à trouver quel genre de fauteuil je souhaitais être dans la vie. J »hésitais entre plusieurd possibilités. Mais il me fallait trouver mon identité propre et à prendre ma place dans l’existence. Quand l’adolescence fut finie, on me somma de me décider. J’étais sûr d’une seule chose : je serais un fauteuil de loisir, un fauteuil de repos, sur lequel on allait choisir de s’assoir pour se reposer, pour reprendre des forces. Je ne serais pas un fauteuil utilitaire, comme mon frère qui était devenu un fauteuil de dentiste à l’image de mon père ou ma soeur, qui elle, avait choisi de rester dans sa version pliable et était devenue une chaise de camping. Non moi, je voulais faire du bien. A l’image de mon cousin qui s’était exilé en Angleterre pour devenir un véritable rockng-chair britannique…Il me racontait qu’il était, parmi tous les autres fauteuils, celui que sa logeuse préférait. Et c’était lui qu’elle avait choisir de d’installer au coin du feu, elle passait ses soirée à tricoter ou à regarder la télévision, confortablement installée sur mon cousin. Soit. Mais alors quel genre de fauteuil décontractant allais-je être ? Et puis un jour que je feuilletais une revue féminine j’eus un déclic. Je serais un transat. Un transat de SPA. Entre deux soins de balnéothérapie, les femmes pourraient venir s’allonger sur ma conforatable assise pour se reposer. Je serais en permanence parfumé par les huiles et autres crèmes dont elles s’enduisent le corps…Je saurais me faire discret quand nécessaire et muet comme une carpe, je serais le témoin privilégié des confidences qu’elles se font dans ce genre d’espace bien-être …Et ma retraite serait assurée ! Parce dans ce genre d’endroit, on soigne le matériel, on ne le laisse pas vieillir ou dépérir…
Bravo et merci pour vos textes, souvent drôles, toujours très imaginatifs.
Je ne pensais pas que cet exercice, assez difficile, allait vous aiguillonner pareillement l’esprit.
Cet exercice a une histoire.
Il y a très longtemps, alors que je me rendais en voiture à mon travail, j’aperçu un très vieux fauteuil club abandonné sur le trottoir. Je l’ai ramassé, nettoyé, ciré, et nous l’avons gardé tel quel, pendant des années, dans un coin de notre appartement.
Tout le monde l’aimait, même s’il était très fatigué. Quand une personne nous rendait visite, elle ne pouvait résister à l’envie de s’y asseoir un instant. Le temps de l’apprécier.
Puis nous avons quitté Paris pour la Gironde. Mais dans notre nouvelle maison, il n’avait pas sa place, il était vraiment trop usé. Un jour, des amis sont venus nous voir, ils possédaient une grande maison, avec une pièce pour jouer au billard. Je leur ai donné le fauteuil.
Ils l’ont fait restaurer chez un maroquinier. Il est revenu beau, juste ce qu’il faut.
Depuis, toute notre petite famille le regrette. Surtout ma fille, qui m’en veut un peu de ne pas l’avoir conservé.
L’autre jour, j’ai retrouvé une photo de ce vieux fauteuil club dans lequel je lisais parfois Le Monde. Elle m’a inspiré cet exercice, en sa mémoire…
En grandissant j’ai su m’adapter et suis devenu convertible. Mais une dizaine de couples fauchés plus tard, je finis néanmoins par m’affaler. Jusqu’à ce qu’un jour… Pouf !
Bravo et merci pour vos textes. Souvent drôles, toujours très imaginatifs. Je ne pensais pas que cet exercice, assez difficile, allait vous aiguillonner pareillement l’esprit. Chapeau ! Vos belles contributions m’encouragent à créer d’autres exercices. Affaire à suivre !
Ca fait du bien de parler, de rire même. Pas encore de quoi être plié en quatre quand on a été replié sur soi pendant si longtemps.
Ca m’a fait du bien de m’ouvrir sur cette enfance passée enfermé dans une salle de spectacle à tenter d’oublier que ma mère se tapait tous les acteurs dans la loge royale pendant que mon père prenait son pied à servir dans l’orchestre, au deuxième rang, allée B, poste 23 exactement. C’était une bonne place, me répétait-il. Tu verras, un jour toi aussi, tu serviras aux rangs d’honneur du grand théâtre des Variétés. Il se moquait bien des qu’en dira-t-on provenant de ses collègues qui avaient entendu dire par un autre collègue qui avait entendu dire par l’ouvreuse qui avait entendu dire par la maquilleuse que Jacques Weber aurait dit : « Quel pied ce fauteuil à bascule, rien de tel pour se décontracter avant de monter sur scène ».
Que veux-tu fiston, ils ont ça dans la peau chez les Rocking Chair, c’est plus fort qu’eux, faut que ça saute !
Au théâtre, si tout le monde s’y marre, faut pas croire, c’est pas gai pour tout le monde. En tout cas pas pour les petits pliants comme moi. Plié, déplié, plié, déplié, plié, déplié… des milliers de fois par jour avec relâche le lundi seulement. Aucun égard, aucune pitié pour le gosse que j’étais. On parle des enfants chinois, indiens mais au moins là bas, personne n’a le temps de s’asseoir, alors les gosses de mon genre se tournent les pouces de leurs pieds et ne s’usent jamais.
Pour mon père il fallait passer par là pour former le caractère et devenir un bon fauteuil. Tu parles, tu te fais écraser sans rien dire par des gros qui pouffent au dessus de toi, en tapant du pied parfois.
Ma mère, elle, se désolait de me voir dans cet état. En fait, elle s’en balançait royalement ! Tous ce qu’elle a trouvé de bon à me dire c’est : « Ah si seulement tu avais basculé du côté de ta mère tu aurais pu faire un joli cheval à bascule, pour le petit du directeur que j’ai parfois sur les genoux… il est si mignon ! ». Causes toujours tu m’intéresses. C’est à mon tour de parler et de me marrer !
A dix huit mois (c’est l’âge mûr pour une chaise), j’ai commencé par grincer des dents pour montrer mon mécontentement. J’ai pourri la soirée de chaque heureux spectateur qui avait hérité d’un billet sur mes genoux. Ah, il riait au début, jusqu’au moment où il bougeait, chaque fois qu’il respirait même, j’émettais un petit cri strident. Il ne savait plus où se mettre et comment se mettre surtout ! Des chut dans la salle lui pourrissait son spectacle dont il ne voyait jamais rien de la chute justement, obligé de sortir. J’étais fier de moi et prêt à franchir le pas.
Au bout d’une dizaine de plaintes, le directeur du théâtre a fini par céder et m’a fait remplacer. Mon père était hors de lui. Une honte pour la famille. Ma mère, elle, pour une fois m’a écouté et a usé de ses relations.
J’avais, plus qu’une envie, un destin à accomplir… Je voulais voyager, à l’air libre !
On a, parait-il, étudié mon dossier et avec un tampon du directeur du théâtre, j’ai pris un taxi, puis un avion pour atterrir enfin en Argentine. On m’a nettoyé, brossé, lustré, vissé et quand j’ai ouvert les yeux j’ai pleuré pour la première fois d’une joie immense. J’étais embauché à la Real Santa Cruz Lineas au poste de « siège côté fenêtre », au 9ème rang du bus qui sillonnait chaque semaine la route de Patagonie, entre Rio Gallegos et Punta Arenas.
Personne ne riait dans l’autocar. Et pour cause, ils en prenaient plein les yeux quand moi je jubilais du cul bordé de nouilles que j’avais enfin pour moi !
Nous sommes Fauteuils de père en fils, depuis plusieurs générations.
Dans notre arbre généalogique, on trouve deux fauteuils empire et même une bergère.
Mon père était un fauteuil de dentiste, ma mère un fauteuil à bascule.
Il a tout perdu à la roulette, elle l’a quitté pour se jeter dans les bras d’un fauteuil d’orchestre.
Enfant, quand je n’étais encore qu’un pliant, j’en ai beaucoup souffert.
Mais, après quelques séances sur un divan, je suis devenu plutôt relaxe.
Relaxe à un tel point que, lors de la dernière séance en question, je me suis profondément endormi.
Je me suis retrouvé dans un magnifique salon où la première chose qui me surprend ce sont
deux immenses fenêtres grandes ouvertes qui donnent sur un jardin magnifique dont l’ordonnance ne m’est
pas totalement inconnue. De lourds rideaux en velours rouge pourpre habillent le mur tapissé
d’étranges fresques représentant une chasse à courre. Autour de moi, tout est brillant,
somptueux, magnifique. Un très vieux parquet dégage une odeur de cire d’abeille.
Et surtout, trônant en plein milieu de la pièce, je découvre un immense fauteuil empire à travers
lequel je reconnais immédiatement mon propre trisaïeul.
Et je me souviens brusquement de cette histoire que mon père, fauteuil de dentiste,
m’avait longuement raconté :
il s’agissait des péripéties et frasques subies par notre trisaïeul fauteuil empire dans les salons
d’un personnage célèbre dont, malgré tous mes efforts, en ce moment précis,
je ne parviens pas à me rappeler le nom !
Ai-je brusquement opéré un voyage dans le temps qui m’a conduit dans je ne sais
quelle période du passé ? Suis-je endormi ou éveillé ? Un doute me traverse l’esprit.
Il me faut bien vite abandonner cette réflexion lorsque brusquement,
du coin de la pièce où je me trouve, je vois bondir de fauteuil empire un étrange petit personnage,
ma foi, pas beau du tout, qui vitupère en faisant de grands gestes vers un interlocuteur inconnu que
je ne peux apercevoir de l’endroit où je me trouve. Curieusement, seule sa main gauche opère dans l’espace
des mouvements assez violents, alors que la droite, invisible au bout d’un bras fixe et rigide,
se trouve enfoncée à hauteur de poitrine dans les replis d’un pourpoint vert à boutons dorés.
Ce personnage me rappelle vaguement quelqu’un, mais je ne parviens décidément pas à mettre un nom
sur ce visage aux traits ingrats et que parcourent de nombreux tics nerveux.
Un fauteuil pliant entre brusquement dans la pièce ! Au même moment fauteuil empire parait recevoir une
fantastique décharge électrique et se met à tournoyer à toute vitesse – et dans tous les sens- dans cet endroit que je ne connais pas
.
Dans le même temps, le petit personnage au pourpoint vert semble se rapetisser jusqu’à ce qu’il se transforme
en une sorte de nain de jardin -ce qui ne l’empêche nullement de continuer à crier- en faisant de plus
en plus de moulinets avec son bras gauche. Un fauteuil d’orchestre vole bas dans la pièce,
comme précipité du dehors à travers l’une des grandes fenêtres.
Brusquement, des dizaines de fauteuils envahissent l’espace où se déroule cette scène pour le moins étrange.
Je reconnais ma mère fauteuil à bascule, ma sœur aînée chaise de cuisine,
mon frère cadet, fauteuil télé. Fauteuil d’orchestre se met brusquement à étreindre ma mère dont le fauteuil
bascule de plus en plus vite. Une roulette de casino tourne à l’envers au plafond. Mon père y perce des trous
à la fraiseuse de dentiste.
Personne, et moi en premier, ne semble étonné par le caractère insolite de ce qui se passe là.
Le fauteuil d’orchestre s’est transformé en musicien. Il saisit le hautbois qu’il tient à la main et le porte à ses lèvres. Une mélodie très douce s’élève.
A cet instant, tous les fauteuils s’immobilisent, tels des serpents figés par la flute d’un magicien. Et brusquement, en un instant, ils éclatent tous en mille étoiles.
Mon père, le visage serein et fier, apparait en blouse blanche de dentiste, une fraise à la main !
Et dans cette femme blonde aux seins provocants, je reconnais immédiatement ma mère. Et voici mon frère, et ma sœur, et tous les autres !
Enfin, bien vivants, là devant moi, je découvre toute ma famille réunie jusqu’à la quatrième génération…
FINAL
Un petit homme au visage finalement détendu, mais avec un drôle de chapeau et le bras droit en écharpe, s’approche de moi et me dit :
« Patou » (c’est moi !), « ne t’endort plus jamais le soir dans le divan de papa après avoir bu ce vin là »,
(il me montre un jéroboam de Bordeaux qu’il me plante sous le nez) « car tu pourrais te réveiller dans un drôle de fauteuil
dans le salon de Napoléon ! »
En réalité, je me suis réveillé en sursaut, tout en sueur, dans le magnifique divan de papa.
Alors vraiment, ce n’était qu’un rêve ? Dommage, car je me suis bien amusé.
Nous sommes Fauteuils de père en fils, depuis plusieurs générations.
Dans notre arbre généalogique, on trouve deux fauteuils empire et même une bergère.
Mon père était un fauteuil de dentiste, ma mère un fauteuil à bascule.
Il a tout perdu à la roulette, elle l’a quitté pour se jeter dans les bras d’un fauteuil d’orchestre.
Enfant, quand je n’étais encore qu’un pliant, j’en ai beaucoup souffert.
Mais, après quelques séances sur un divan, je suis devenu plutôt relaxe.
Mon dossier était désespéré. Mon assise complètement crevée.
Le cul entre deux chaises, je songeais à me reconvertir en canapé-lit ou même, dans mes périodes les plus optimistes, en gai-ridon.
Le divan, c’est divin ! J’ai compris que ma mère n’était qu’une pouf et que mon père manquait de ressort.
Aujourd’hui je fais transat en double avec une chilienne dotée de superbes nattes. Dans ses bras, c’est le pied. On se tanne le cuir au soleil quelque part en Afrique. Dans le berceau de l’humanité, nous avons mis au monde un petit crapaud au cou fin prénommé Moïse. Un diamant sur canapé.
Au tribunal des fauteuils
Nous sommes Fauteuils de père en fils, depuis plusieurs générations.
Dans notre arbre généalogique, on trouve deux fauteuils empire et même une bergère.
Mon grand père était un fauteuil de dentiste, ma mère un fauteuil à bascule.
Il a tout perdu à la roulette, elle l’a quitté pour se jeter dans les bras d’un fauteuil d’orchestre.
Enfant, quand je fus admis dans le salon, j’eus la terrible impression d’être l’accusé face au tribunal de l’Histoire. Dans la famille Fauteuils, Médicis, Voltaire et Windsor me considéraient d’un oeil torve. Aucune indulgence à attendre de leur part : Des dossiers droits comme la justice, de solides assises et des accoudoirs si droits qu’ils semblaient me pointer du doigt. Légèrement en retrait, mes tantes Marie Antoinette et Pompadour m’apparurent au contraire comme de tendres bergères. Je voyais bien à leurs formes arrondies et leurs damasseries fleuries qu’elles étaient prêtes à tous les pardons et enclines aux cajoleries. En voilà au moins deux, m’étais-je dit, qui ne me feraient pas reproche de ma jeunesse et de ma maladresse. Le verdict fut clément. Moi, le tabouret tripode mal dégrossi, fut cantonné au boudoir. Reclus dans ce sombre office, j’eus tout le loisir d’élaborer mes projets d’avenir.
Sur l’aire d’autoroute de Vaison La Romaine, je masse désormais les dos endoloris des conducteurs au long cours. Une fée s’était penchée sur mon berceau : la fée électricité!
Alain Lafaurie
Nous sommes Fauteuils de père en fils, depuis plusieurs générations. […] Mais, après quelques séances sur un divan, je suis devenu plutôt relaxe.
Finis les mots croisés et les salles d’attente de chaises froides et usées. Finis la sellerie bon marché, car mon thérapeute m’a embauché ! De moi, non ! Il ne peut plus se passer ! Il m’a vêtu de velours doux et calfeutré, rouge parsemé de coutures de fils dorés (je crois bien qu’il se prendrait pour un marquis ! ) et à force, je suis devenu son plus grand confident…
Ma valeur, je l’ai acquise non pas de ce tissu, mais du travail que l’on a fait. De savoir que mon passé avait valu le coup d’être vécu ! Eh oui, c’en est pliant ! M’y replonger, en le faisant en quatre séances seulement, dépliant mes souvenirs décevants d’une mère éjectable au vu des considérations de mon père carié par le jeu, a été, croyez le ou non salutaire et m’a enlevé le leste du stress. Enfin libéré de mes passages et tendances autodestructrices plus noirs que le cuir du me cousin cherterfield (partie en fumée lors d’un incendie, que ses ressorts reposent en paix). Exorcisés, ces virées en club où j’ai failli être la proie d’un indiscret et perdre ma garniture au bridge, comme pour imiter mon père démissionnaire ! Maintenant, je m’emplis des sérénades des patients et de doux airs commandés par Louis XVI. Et comme le disait un de ces compositeurs : « vivre bien et vivre heureux, voilà deux choses différentes. Et sans un peu de magie, il est certain que je ne connaîtrai pas la seconde. » (W.A. Mozart), alors, j’espère bien trouvé un jour sur le divan d’en face, une bergère à gondole ou une belle méridienne que je saurai séduire si j’ai de la veine. Nous irons (j’en rêve) au-delà des tropiques en cabriolé, à Venise en gondole, ou parcourir les cieux en montgolfière pour finir en inclinable prêt d’une cheminé et d’une peau de bête bien tannée ;).
© Hazem A.A.H. 2011
Nous sommes Fauteuils de père en fils, depuis plusieurs générations.
Dans notre arbre généalogique, on trouve deux fauteuils Empire et même une bergère.
Mon grand père était un fauteuil de dentiste, ma mère un fauteuil à bascule.
Il a tout perdu à la roulette, elle l’a quitté pour se jeter dans les bras d’un fauteuil d’orchestre.
Enfant, quand je n’étais encore qu’un pliant, j’en ai beaucoup souffert.
Mais, après quelques séances sur un divan, je suis devenu plutôt relaxe. Et ma parole s’est libérée.
Oubliées les souffrances de mon échec au bac philo où un calamiteux 5/20 sur Zadig m’interdit à jamais de m’incarner en fauteuil Voltaire. Effacée la frustration de ne pouvoir entamer une carrière de fauteuil de jardin après avoir laissé dépérir le philodendron de ma mère faute de l’avoir arrosé. Terminée la dépression nerveuse qui a suivi mon échec au concours de fauteuil de coiffeur pour une mise en plis carbonisée. Enfin débarrassé de cette schizophrénie pour une causeuse et de cette maudite frilosité qui m’aurait condamné à végéter en chauffeuse. Evité cet état maniaco-dépressif auquel m’aurait contraint le métier de vétérinaire et avec lui celui de fauteuil crapaud. Heureusement que mon narcissisme et mon égoïsme forcenés m’ont évité d’œuvre comme fauteuil roulant.
Une psyché saine, épurée de toute névrose, et un rôle humble comme fauteuil plaint n’ont pas altéré néanmoins mon ambition. J’envisage d’écrire ma vie et briguer dans la foulée l’immortalité au sein de la vénérable institution du Quai Conti en obtenant le siège de fauteuil d’académicien.
Françoise Denaules
Quand j’ai eu 18 ans j’ai fait les 400 coups, j’avais une vie de barreau de chaise. J’ai eu souvent le derrière entre 2 chaises. J’ai évité de peu la chaise électrique!
Ma mère m’a dit si tu continues je te déshérite, je suis resté cloué sur ma chaise!!.
Un jour en m’asseyant sur une chaise bancale, j’ai basculé et me suis retrouvé en fauteuil roulant.
Mon meilleur copain m’a dit : pour un peu j’allais te rendre visite au père Lachaise!
Pendant uen période j’ai rempaillé des chaises, dans une fabrique, de sièges. J’aurai bien brigué le fauteuil du Pdg, mais ce fut impossible il pratiquait la politique de la chaise vide!!
J’ai rencontré enfin ma femme, c’était une chaise pliante, j’aimais l’incliner comme une chaise longue ensemble nous avons eu une chaise d’enfant…
Geneviève Tavernier novembre 2011
Que d’heures passées à éliminer de mes tissus ma dépravation. Je déambulais, toujours attiré par les fastes que m’offrait, le temps d’un soir, le géant suédois. Pouffes, chauffeuses dévoilaient le galbe de leurs coutures. Leur peau de velours me démontait. Les quatre pieds en l’air, je me refusais à quitter ce ravissement. Quand j’en avais plein le dos, je rejoignais au second étage les dormeuses. Quant au boulot, j’étais sur un siège éjectable. Le roulant me freinait de plus en plus. Puis un jour, clic-clac j’ai tout quitté ! Aujourd’hui, je pose de nouvelles assises. Grâce à l’analyse, je n’ai plus tendance à être entre deux chaises. J’assois ma nouvelle personnalité. L’innocence de mes tissus laisse peu à peu la place à un cuir plus ferme. Assagi et paisible, je masse en me pliant au gré des envies des dos fragilisés.
PS: Aixcuzer lait photes de phrappes, çes là fâûtte amont schat ki fée leu « Kon » deuvan les crans deux mom nordinnateure !
JdM…..et Payo, le chat de coussin!
En fait…je n’avais pas bien compris le jeu du divan…et le toubib ne m’a jamais relaxé. Ils s’y sont même mis à plusieurs pour me garder prisonnier dans la boucle des maudits mots. Je suis redevenu pliant, oublié dans un grenier, je suis resté pliant dans le coffre d’un pêcheur, je me suis pris pour un pliant, seul sous une grande tente familiale, j’étais aussi le pliant fatigué que la grosse dame emmenait toujours au bout de la digue, j’aurai pu être le pliant que Charlie Chaplin emmenait sur ses tournages. En fait je resté souvent plié sous le lit à écrire tout ce que je ne dirai plus jaùmais à haute voix. D’après ma femme…celle qui me rend visite tous les mercedis, il parait que je suis un pliant docile, que je prend bien mes médicaments que j’aime les crottes en chocolat depuis longtemps et que c’est pas grave si je m’en met partout.
… Enfant, quand je n’étais encore qu’un pliant, j’en ai beaucoup souffert.
Mais, après quelques séances sur un divan, je suis devenu plutôt relaxe.
Aujourd’hui, j’ai choisi de m’asseoir sur ces questions et j’ai retrouvé mon ressort. Pourtant, j’avoue que lorsque j’y repense, les bras m’en tombent. Il faut dire que cet héritage m’a beaucoup marqué.
À l’adolescence, la grande époque du rockin’ chair, moi je faisais banquette, uniquement capable de regarder la marquise de mes rêves avec mes yeux de crapaud et lorsque, parfois, ces souvenir m’assiègent, le rouge me monte encore aux oreilles.
Plus tard, j’ai gagné en assurance et c’est en cabriolet que j’ai tenté ma chance auprès d’une duchesse mais j’ai été coiffé au poteau par un windsor, excusez-moi du peu, et une sortie de route a failli me transformer un fauteuil roulant.
J’ai conservé depuis une haine mordante pour les aristocrates pédants.
J’ai gagné en philosophie ce que j’ai perdu en noblesse et me suis rangé à l’avis de mon aïeul voltaire : “La beauté plaît aux yeux, la douceur charme les fesses”.
Dès lors, je me suis concentré sur ma carrière, j’ai soigneusement évité les sièges éjectables et les chaises musicales. J’ai laissé tomber les poufs et me suis uni à une chauffeuse confortable. Ensemble nous avons fait salon, reçu des culs influents et c’est ainsi que malgré tous mes handicaps, j’ai gagné la course à la présidence dans un fauteuil. Me voici doté à vie d’un portefeuille rebondi avec la garantie de finir au musée ! À moins que la folie des grandeurs de mon locataire actuel ne le pousse à vouloir me transformer en trône… Pour moi une vraie révolution.
… Enfant, quand je n’étais encore qu’un pliant, j’en ai beaucoup souffert.
Mais, après quelques séances sur un divan, je suis devenu plutôt relaxe. Après avoir analysé mes attirances oedipiennes pour les rocking chair, mes rejets pour toutes les dents dures. J’ai pris confiance. J’ai accepté que des fesses de tout poil s’assoient sur mon moi. Je me suis affirmé sur mes 4 pieds. Je me suis habillé de croute de cuir, me suis modernisé et électrisé. Altruiste, je me suis reconverti en fauteuil massant. Je suis bénévole à l’aéroport.