740e exercice d’écriture très créative créé par Pascal Perrat.


Jamais sa petite voix intérieure ne l’avait vouvoyé (e). Ils se tutoyaient depuis leur enfance. Pourquoi ce changement soudainement ? Cette distance, subitement ?
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Monsieur Martin MARTIN souffrait de plusieurs névroses avec des appréhensions pas banales et des manies, le tout accompagné de différents TICS et de cinq TOCS.
Les jours pairs, il fallait qu’il mesure tout. La dimension des trottoirs, la longueur des nuages, la taille de tous les caddies de Carrefour, etc… etc…
Mais ça encore, ce n’était pas le plus grave.
La plupart des jours impairs, il devait absolument se disputer avec trois fonctionnaires de trois administrations différentes, sinon sa journée n’avait aucun sens.
Mais ça encore, ce n’était pas le plus inquiétant.
Les jours qui n’étaient ni pairs, ni impairs (ce qui était rarissime), il ressentait la nécessité absolue de se rendre dans un lieu où l’on disait qu’un meurtre avait été commis.
Mais ça encore, ce n’était pas le plus angoissant.
Non, ce qui était le plus grave, le plus inquiétant et le plus angoissant, c’était cette petite voix dans sa tête. Cette voix qu’il ne connaissait pas et qui lui disait des phrases complètement incohérentes :
« Jeanne, vous êtes l’Elue. En cette année 1427, votre mission divine est de bouter les anglais hors de France pour sauver le royaume ! »
Jamais sa petite voix intérieure ne l’avait vouvoyé (e). Ils se tutoyaient depuis leur enfance. Pourquoi ce changement soudainement ? Cette distance, subitement ?
Ah madame fait la maligne depuis qu’elle a trouvé de l’or dans son jardin.
Elle vouvoie maintenant tout le monde même ses chats et ses chiens.
Et avec moi qui suis si proche elle a également pris ses distances. Et n’ayant pas un sou elle m’ignore complètement.
Ah tout cet or dans son jardin. Elle s’est bien enrichie la petite voix intérieure.
Je le sais, elle me l’a murmuré l’autre jour : son projet est de s’en aller loin d’ici. Quitter ses proches, son village et aussi l’ami éternel que je suis.
Et moi sans ma petite voix intérieure que vais-je devenir !
Oh je m’y habituerais certainement à vivre sans elle. Alors qu’elle s’en aille ! Elle qui me dit vous maintenant.
Et si avec elle je faisais le méchant. En lui volant son or. Oh elle a dû prendre ses dispositions. Son or il doit être bien confiné dans une ou plusieurs banques. C’est sûr il n’est plus dans son jardin. Alors il faudrait que j’aille voler son or à la banque.
Ouais lui montrer aussi à petite voix intérieure que dans la vie il n’y a pas que la richesse qui compte !
Quoi ! quoi ! que dit-elle à l’instant la télé !
Elle dit que madame … n’a plus d’or.
Que les banques où il est entreposé elles ont toutes fait faillite.
Je suis certain que ces informations qu’on nous balance ce sont du vent. Du pipi de chat.
Que c’est un tour de petite voix intérieure. Qui certainement doit avoir plus d’un tour dans son sac à main.
Et puis c’est drôle. Voilà déjà quelque jours que je n’ai plus de nouvelles d’elle.
D’elle qui ?
Ben voyons le lecteur de ce texte !
Elle c’est ma petite voix intérieure.
J’ai comme l’impression qu’elle a pris la poudre d’escampette. Pouf pouf volatilisée dans le yaourt nature.
Je l’appelle jour et nuit et elle ne me répond pas.
Oh oh c’est quoi ce traquenard !
La petite voix disparue. Ainsi que son or trouvé dans le jardin.
Il y a là dessous quelque chose de bizarre !
Et puis moi aussi j’ai soudainement le désir de partir en vacances. Le soleil, la plage, la chaleur.
De plus, j’oublierai tout ça : cette histoire de petite voix intérieure remplie d’or et qui ne me tutoie plus.
Je pars oui. Je pars à Rio ou à Bornéo. Par un vol de nuit.
Vais-je prendre une ou deux places ?
Voilà la question que je me pose.
La seconde place est bien entendu pour ma petite voix ; si bien sûr elle revient.
– Oh oh que vois-je – cui cui cui, il y a en ce moment un petit moineau qui est en train de voler dans la salle à manger.
Qui subitement se pose en douceur sur cette page blanche.
– Bonjour bonjour monsieur N … je voudrais venir en vacances avec vous !
Vous savez c’est la madame d’avant qui m’a dit de venir.
Paraît-il que c’est dorénavant moi votre nouvelle petite voix intérieure.
Oh n’ayez crainte ! Je suis un petit moineau bien poli pour vous servir.
C’est moi qui remplace l’ancienne petite voix qui a préféré partir.
De ma vie, c’est bien la première fois que je vois un moineau qui parle le français presque sans accent !
Alors voulant dire quelque chose, je me lance et je dis au petit oiseau :
– Ah bon dis-je un peu surpris.
C’est bien toi petit moineau ma nouvelle petite voix intérieure. Je pensais que …
– Ben oui monsieur dit-il avec autorité et en bombant un peu le torse.
Bien sûr, elle eut un choc, lorsque pour la première fois, sa petite voix l’avait vouvoyée !
Vous imaginez, elles se connaissaient depuis tant d’années et un tout petit mot, d’une seule syllabe, les relègue au stade de presque étrangères. Si c’était possible, les larmes lui seraient venues aux yeux et auraient sans doute débordé, mais la question n’était pas là. Pourquoi ce revirement ? Voulait-elle le savoir ou au fond n’avait-elle pas une petite idée ?
Son endophasie représentait une sorte de bouclier. Elle la protégeait des faux pas, bien que la plupart du temps c’était « une machine à blabla », en général sympa. D’accord, elle avait été moche moche en prenant le chéri de sa meilleure amie. Et pour rien, puisqu’il l’avait laissée tomber peu après.
En analysant l’histoire, il se pourrait que petite voix ait été furieuse de son comportement et qu’elle veuille la punir.
Après avoir fouillé sur Internet pour trouver une solution, il semblerait qu’il faille dialoguer avec sa petite voix intérieure comme on le ferait avec une amie ou un proche, et surtout garder le sens de l’humour !
Jamais sa petite voix intérieure ne l’avait vouvoyé (e). Ils se tutoyaient depuis leur enfance. Pourquoi ce changement soudainement ? Cette distance, subitement ? Il avait bien essayé de lui faire cracher le morceau : « Avoue ! Pourquoi ne me tutoies-tu plus ? » Mais, elle se taisait. Elle ne daignait même pas répondre aux rendez-vous qu’il lui fixait régulièrement. Et lui ne savait plus à quel saint se vouer.
C’est alors qu’il osa : « Veux-tu que je te tue ? » Elle resta sans voix… Comment pouvait-il avoir cette audace. « Sans moi, vous ne pouvez rien faire ! » lui répondit-elle. Sans blague, dit-il, voilà que tu te prends pour Dieu ! » Il comprit alors qu’elle avait un ego surdimensionné, qu’elle s’était prise au je. Il préféra donc ne plus l’écouter, de peur de s’égarer et de se retrouver sur une voix de garage.
Qu’est ce qui était arrivé depuis que Angèle, sa petite voix intérieure le vouvoyait ?
C’avait été très soudain, depuis un ou deux jours au grand maximum.
André essayait de se remémorer les évènements majeurs qui s’étaient produits depuis son anniversaire.
Il avait été gâté, comme à l’accoutumée, tous ses amis avaient répondu présent à l’invitation qu’il avait lancé sur le web sur son blog.
Même des Gameurs qu’il n’avait jamais vu s’étaient rendus chez lui, il ne savait comment.
Ils avaient échangé avec lui sur ses dernières parties préférées de donjon et dragons nouvelle formule.
André était passionné de ce jeu en ligne qui mêlait aventures, batailles sanguinolentes avec des armes abracabrantesques à souhait.
Les dragons maléfiques l’emportaient toujours face aux princesses qu’il avait à délivrer.
La soirée anniversaire s’était déroulée dans l’habitation de ses parents qui lui avaient laissé carte blanche et étaient partis pour l’occasion en week-end en Normandie se gorger de fruits de mer et de balade endiablées sur les plages du débarquement.
Il avait eu un flirt avec Christine qu’il avait repéré depuis longtemps à la Fac, il voulait croire que ses sentiments pour elle étaient réciproques.
Rien n’était fait, juste un petit baiser appuyé sur ses lèvres fines au contour ourlé de rose au gout de bonbon à la guimauve l’avait ravi et fait monté au septième ciel en compagnie d’anges.
A y réfléchir de façon plus approfondie, c’est à partir de ce moment là qu’Angèle l’avait vouvoyé.
Troublé par ses émotions il n’y avait pas prêté attention plus que ça à ce moment là.
Mais maintenant qu’il se le disait, l’évidence était bien là, il y croyait dur comme fer, la venue de sa majorité avait fait de lui un autre homme, un vrai, puisqu’Angèle le vouvoyait, c’est le signe qu’il n’était plus un enfant.
A partir de ce moment là, il se força à réfléchir à deux fois avant de tenter quelque chose, il était responsable de sa vie maintenant et agir à la légère, il n’en était plus question.
Dix-huit ans, il n’était plus un enfant…
Nouchka lit un article d’Alexandre Piquard dans Le Monde sur AI Act.
Jusqu’à présent, elle s’intéresse peu aux apports de ces techniques en plein développement. Néanmoins, elle tente de récupérer un peu de son retard d’information avec cette lecture. Voici ce qu’elle retient de l’article :
[Concrètement, ce dimanche 2 février 2025 seront interdites certaines utilisations de l’IA jugées inacceptables par l’AI Act : parmi elles, les logiciels de « notation sociale », privés ou publics, comme ceux utilisés par la Chine, et les IA de « police prédictive individuelle » visant à « profiler » des personnes en estimant leur propension à commettre des infractions. Mais aussi la « reconnaissance des émotions » au travail ou à l’école, pour analyser le comportement d’un employé ou d’un élève.
De même sont bannies « l’exploitation des vulnérabilités des personnes, la manipulation ou les techniques subliminales ». Et, enfin, l’identification des personnes par reconnaissance faciale en temps réel dans l’espace public, ainsi que la catégorisation biométrique des personnes pour déduire « leur race, leurs opinions politiques, religieuses, leur orientation sexuelle ou leur appartenance syndicale », énumère le site de la Commission européenne. Certaines exceptions sont toutefois prévues pour les forces de l’ordre.
En 2027 seront réglementés les usages des IA jugés « à haut risque » : dans les infrastructures électriques, d’eau ou les routes, dans l’éducation et la formation, dans l’emploi et dans l’entreprise (notamment le management algorithmique), dans la banque ou l’assurance (notamment pour l’octroi de prêts ou de contrats), dans la justice, la police, la gestion de l’immigration ou les processus démocratiques… Les déployeurs de ces logiciels seront tenus de réaliser des évaluations des risques, notamment sur les erreurs et les biais].
Ilma est abasourdie. Elle avait perçu que la propriété intellectuelle était menacée par ces outils mais elle sort de cette lecture comme d’un roman de science-fiction inimaginable… dans le réel. Or, il s’agir bien d’un réel imminent. Elle se sent fragile, dépassée et furieuse.
– Alors comme ça, on va pouvoir explorer nos sentiments, nos goûts, nos choix de vie ? Pense-t-elle éberluée.
Sa petite voix intérieure, qu’elle tutoie depuis l’enfance, l’interpelle :
– Vous ne vous doutiez pas de ces avancées ? Ne seriez-vous pas un peu naïve ? Tout le monde a déjà entendu parler de la reconnaissance faciale, non ?
– Attends, tu ne va pas toi aussi, prendre tes distances et me vouvoyer ?
– Ecoutez ma Chère, en fonction de ce que nous découvrons aujourd’hui, je crois utile de vous réserver. Moi qui connais tout de vos penchants, désirs et aversions, je préfère que nous nous éloignions un peu par la forme de notre communication. Ainsi me sera-t-il plus facile de « tirer la sonnette d’alarme » quand vous vous laisserez aller à dénigrer ceci ou celui-ci.
– Tu penses vraiment que ce simple subterfuge trompera les outils de l’AI ?
– Peut-être pas mais, il me sera plus aisé de vous signaler vos excès !
– C’est un comble, toi, ma petite voix intérieure, tu veux prendre tes distances avec ce que je pense et ressens ? Mais c’est de l’auto-censure ? Permets-moi de te dire que c’est illusoire et ridicule. Je pense ce que je veux et me fiche que les Chinois ou d’autres me donnent une mauvaise note pour cela.
– Faites comme bon vous semble. J’espère honnêtement vous aider. Je connais votre caractère résolu et sans doute resterez-vous la même, quoi qu’il arrive. Néanmoins, vous devrez accepter ce vouvoiement de ma part. C’est non négociable. Pour le moment sont évoquées les interdictions mais vous savez très bien que nombre de mesures ne sont pas respectées. Alors partons du principe que le risque est réel que vos sentiments, attirances et goûts seront détectés et utilisés à dieu sait quelles sélections futures ! Limitons-en si possible les risques…
Le salon du Pavillon Gabriel était déjà plein quand il arriva. Une soirée de fin d’année en un tel lieu pour célébrer les bons résultats de l’entreprise, ce n’était plus si courant. Alors, tous les collaborateurs s’étaient présentés dès l’heure d’ouverture du cocktail. Costume de rigueur pour les hommes. Robe habillée pour les femmes. Tous avaient encore suivi ce code vestimentaire sans déroger. Il l’aperçut au fond de la salle, en un coup d’œil. Son cerveau et son regard étaient entrainés depuis des années à cet exercice. Déjà sur les bancs de l’école, il était fou amoureux d’elle. Et quand il arrivait le matin dans la cour, ses yeux la parcouraient tels un scanner pour lui donner son objectif. Et il allait tout droit la saluer. Et invariablement, elle l’accueillait avec son sourire mi-moqueur, mi-charmé. Des années plus tard, ils avaient été séparés, chacun admis dans une école de commerce différente. Mais le destin avait fait son œuvre. Ils s’étaient retrouvés à travailler dans cette même banque à La Défense. Dans des services différents certes, mais chaque matin à la cafétéria, chaque midi à la cantine, son regard à lui scrutait l’espace et savait toujours retrouver au plus vite la silhouette de son amie de toujours. Ce soir, elle était là, dans une petite robe noire. Ses mèches de cheveux rose, encadrant son visage au teint pâle, n’en ressortaient que mieux. Il fendit la foule qui se pressait avec plus ou moins de tenue et d’élégance autour des serveurs. Arrivé plus près, il aperçut l’homme avec lequel elle conversait. Il ne l’avait jamais vu parmi ses collègues. Elle lui souriait. « Bonsoir Audrey ! Toujours aussi élégante ! » lui lança-t-il en s’approchant. « Ah ! Benoit, je vous attendais. Laissez-moi vous présenter… ». Il n’entendit plus la suite. Le temps s’était arrêté pour lui.
Jamais sa petite voix intérieure à lui ne l’avait vouvoyée. Ils se tutoyaient depuis leur enfance. Pourquoi ce changement soudain ? Cette distance, subitement ?
Cherchait-elle à dissimuler leur relation ? Était-ce pour cacher à son interlocuteur leur complicité ? Ou bien son trouble ? Il ne pouvait en être autrement. Et il entendit là comme l’aveu d’un sentiment pour lui, qu’elle-même ne lui avait encore jamais avoué. Oh…ce « vous », comme il l’aimait déjà ! Comme il chantait à ses oreilles. Car alors, si cette proximité n’était pas avouable… Peut-être, sûrement… y avait-il autre chose ? Et si ses sentiments envers elle se doublaient de sentiments encore plus profonds qu’elle aurait eu pour lui ?
« Ça y est ! » lui murmura petite une voix douce. « Un nouvel indice de son inclination pour toi… N’êtes-vous pas aussi romantiques l’un que l’autre ? Comme c’est charmant. Réponds-lui vite, reprends-toi ! ».
« Que tu es… benêt ! » lui lança une autre voix cruelle. « Tu m’as tenue bâillonnée jusqu’ici. Tu vas devoir m’écouter. Et ouvrir les yeux, gros nigaud. Ta prétendue nana, elle se sert de toi depuis des années. A l’école, tu étais meilleur partout. Et tu lui refilais les solutions. Ici, tu bosses à la DRH. Avec la gueule que tu as, elle sortirait avec toi ? Tu y cois, gros minable ? T’es sérieux ? En plus, tu te ridiculises là ! »
Les idées se bousculaient dans son cerveau, un pas en avant, un pas en arrière. Non, il ne pouvait en être autrement. Il se remémora en un flash les derniers dimanches passés ensemble en randonnée et en escalade à Fontainebleau, leurs fous rires, leurs taquineries incessantes. Jamais il ne s’était inquiété vraiment de ses indisponibilités, de plus en plus fréquentes. Jamais encore il n’avait osé lui avouer son amour. Ni faire un geste. Tellement peur de sa réponse. Il avait préféré jusque-là mener une vie de célibataire plutôt que de risquer de gâcher cette belle relation. Eh oui, cette situation durait depuis des années. Elle-même ne lui avait jamais parlé d’une relation plus intime avec une autre personne. Alors, pourquoi se presser ? Pourquoi s’inquiéter ? Ses parents, ses amis, son psy lui avait bien tous donné leurs avis. Au bout d’un moment, il faut faire le premier pas. Mais plutôt rêver encore et toujours d’un amour hypothétique sans le vivre que de risquer de perdre une si belle « amitié ». Il reprit enfin ses esprits. Il était là, seul, un verre à la main. Encore sonné.
« Confiance ! Réjouis-toi et avance… Les chemins de l’Amour sont inattendus » lui murmurait la petite voix douce.
« Laisse tomber, gros balourd, elle est pour un autre, ta meuf ! » insistait la grosse voix cruelle.
Un groupe animé s’était formé autour d’Audrey et de son compagnon. A cet instant, le grand patron prononça les premiers mots de son discours. Benoit n’entendit pas ceux qu’une collègue d’Audrey lui lançait. « Alors, Audrey, il paraît que…..».
La voix s’éteignit dans la lueur naissante de son rêve. Il souriait. Benoitement.
─ Hé la p’tite voix, bin t’avais raison. Me suggérer de ne pas faire amie, amie avec la Marie-Gisèle était une vision d’une grande pertinence sur le long terme. J’aurais fini au gniouf en la fréquentant.
─ Madame Humaine est trop aimable. Je suis ravie que vous accordiez du crédit à mes mises en garde, malgré tout. Vous m’en voyez fort aise.
─ Hein ? C’est quoi ce vouvoiement ? Tu t’entraînes pour un concours d’éloquence ?
─ Vous n’y êtes point. Je n’ai d’existence que pour vous servir, donc chacun à sa place. Vous pour fanfaronner et moi pour vous servir.
─ Mais qu’est ce que tu me chantes là ? Nous avons toujours été depuis mon enfance copine comme cochon.
─ je vous en prie Humaine, surveillez votre langage. Jamais vous ne vous seriez rabaissée à venir garder les cochons avec moi.
─ Nom d’un chien, quelle mouche t’as piquée ?
─ Comment ? Vous ne lui avez pas demandé à votre Madame Irma, ce que je pourrais ressentir moi face au peu de confiance que subitement vous m’accordiez ?
─ De quoi tu parles ?
─ Depuis toujours vous me consultiez toujours moi, pour les grandes décisions de votre vie. Je n’ai jamais manqué à mon devoir et j’ai chaque fois fais en sorte de vous guider le plus juste possible ou de toujours vous tirer vers le haut. Et là, vous vous mettez à consulter une diseuse de bonne aventure pour vous guider. Je me demande ce qu’il y voit dans sa boule de verre.
─ Alors c’est une crise de jalousie ce vouvoiement ? Désolée, je n’ai pas imaginé que tu pourrais prendre cela pour une trahison. Finalement, elle m’a prévenue que je serais déçue d’une personne que j’aimais profondément, j’ai pensé à Marie-Gisèle…mais va savoir.
La réponse de la petite voix, dans la chute du récit, est tout à fait inattendue et originale. 🙂
La petite voix intérieure de mon enfance, il y a déjà quelques années que je l’ai fait taire.
Aux « fais pas ci, fais pas ça, tiens toi droit, dis bonjour, dis merci, ta main devant la bouche ect, ect… », ma petite voix intérieure répondait « ferme ta gueule, bouffe et que ça t’étouffe, disparais dans les chiottes ect, ect… ». Pas vraiment sympa tout ça. En plus la petite voix pouvait devenir une grosse voix qui hurlait si fort que je pensais qu’on pouvait l’entendre. La frousse que j’avais ! Je me bouchais les oreilles, fermais mes lèvres très fort, serrais mes paupières avec l’idée de disparaître.
Mes parents me regardaient en soupirant, qu’avait il fait au bon dieu ? On disait que j’étais à moitié dingo.
Alors à vingt ans j’ai fait un gros travail sur moi. Relaxation, méditation, sophrologie, hypnothérapie, psychothérapie, naturopathie….j’en passe et des meilleurs. Ça coûte cher tout ça. Je passais mon temps chez les thérapeutes et au travail. Plus le temps d’écouter tout mon fatras intérieur.
Pourtant, à force, une seule petite voix a réussi à occuper la place. J’avais le sentiment qu’on me l’avait enfoncée dans le crâne à coups de marteau mais elle me reposait. Elle me disait « allez mon grand, tout va bien. Respire, respire, lâche, lâche tout ». Enfin, lâche tout, y a des limites. Je ne maîtrisais pas toujours et les gens s’enfuyaient en se bouchant le nez. Et j’étais toujours le mec à moitié dingo, mais j’avais l’habitude.
Depuis hier matin, la petite voix me vouvoie pour mieux me brutaliser. « respirez, respirez, c’est quand même pas compliqué. Faut pas sortir de Saint Cyr. Et quand je dis de lâcher, c’est juste les épaules, espèce de flatuleur. Je ne supporte plus. C’est le dieu Crépitus qui devrait être dans ta tête. Tu serai un excellent sujet ».
Moi je ne comprends rien. Crépitus, qui c’est celui là ? Flatuleur, ça existe ça ? Je me torture l’esprit pour piger. J’en deviens complètement dingo. Un dingo bienheureux, je dis oui-oui mais je suis un dingo torturé des pieds à la tête et de la cave au grenier. Je devrais aller consulter un gastro-entérologue. Comme chacun sait : intestin plat = encéphalogramme plat
Jamais sa petite voix intérieure ne l’avait vouvoyée. Ils se tutoyaient depuis l’enfance. Pourquoi de changement soudain ? Cette distance subitement ?
Depuis les bancs de l’école, Jess se laissait distraire par sa copine, pas celle assise à ses côtés, mais par celle qu’elle avait adoptée, dès le premier jour de sa rentrée au CP. Cette maîtresse qui enfermait les cancres dans le placard à fournitures et qui donnait des fessées cul-nul à ses élèves pas sages, ne lui disait rien qui vaille pour apprendre à lire, à écrire et à compter. Alors, son amie lui racontait des histoires pendant qu’elle regardait un carré de ciel à travers la fenêtre trop haute. S’il était bleu, elle écoutait des contes de princesses et s’il était gris, d’affreux ogres entraient dans la danse. Il en fut bien longtemps ainsi. Mais, un jour, lasse de ces interminables conciliabules, Jess en eut assez du tutoiement de ce langage intérieur trop intime à son goût. À force de persévérance, elle avait appris à cueillir ses propres émotions, à débrancher son mental. Dès que cette importune tentait de se faufiler par quelques fissures, elle lui disait » Stop ! « . Elle fermait les yeux, inspirait et d’un revers d’expiration lui disait : dégagez de là ! Que je sache, nous n’avons pas gardé les cochons ensemble.
Jamais sa petite voix intérieure ne l’avait vouvoyé. Ils se tutoyaient depuis leur enfance. Pourquoi ce changement ? Cette distance, à présent, ce n’était pas choquant mais plutôt déstabilisant. Comme si elle l’avait convié à ne plus la considérer comme repère. Elle était indispensable à son équilibre. Il ne la comprenait plus..
Pendant une dizaine de jours, Léo se posa la question. Quel signe envoyait-elle par cette nouveauté ? La voix avec qui il avait l’habitude de dialoguer, serait-elle dans la continuité, décidée à le snober ?
Après tout, il pourrait bien se débrouiller sans elle. Quand même, si rapidement, changer d’attitude, elle aurait pu prendre des gants. C’est vrai, en février, elle aurait pu .
Et puis, qui était-elle ?
Se côtoyer depuis l’enfance n’implique pas obligatoirement de bien se connaître. Elle a évolué. Comment était-elle apparue et pourquoi ? Est-ce qu’elle en avait visité d’autres avant lui ? Quel pouvait bien être son milieu d’origine ?
Soudain, je vais sortir, se dit-il. Avec le vent en bord de mer, je ne l’entendrai pas. Si elle s’adresse à moi, à mon tour je vais la snober. Si elle me parle, je ne lui répondrai pas. Et toc ! Elle sera bien eue.
Il prit son écharpe, son imper, il ouvrit la porte pour affronter les bourrasques. Il se mit à marcher en courbant le dos. Puis, se redressant, il regarda au loin et se concentra sur un point lumineux qui flottait sur l’eau. C’était juste les vagues qui reflétaient le soleil. Marcher lentement en bord de mer lui vida la tête. Il retrouva son zen. Il oublia tous ses soucis. Une belle journée sans elle. Il se sentit orphelin. En même temps libéré. Peut-être voulait-elle que je m’émancipe ?
Quand il rentra chez lui, après un bol d’air, le vent et le ressac de la mer lui parlaient encore.
– L’Europe mon vieux.
Elle était revenue. Elle avait changé. Elle avait mué. Peut-être qu’elle avait besoin de grandir !
– Quoi l’Europe ! Qu’est-ce que l’Europe vient faire entre nous ?
– Vous ne voyez donc pas que l’individu est seul face à l’Europe entière maintenant ?
– Justement, pourquoi me vouvoyer maintenant ?
– Avec ton smartphone, tes applications, ta télé, ta radio, ton code Qr, ton GPS, ton AI, tes infos et que sais-je encore ? Vous êtes plusieurs ! Quand je vous parle, vous êtes trop préoccupés, vous ne répondez pas.
– Mais qui êtes-vous ?
– Ton intelligence naturelle, mon pote. Je ne te lâcherai pas. A moins que tu deviennes zinzin. Mais si vous êtes trop préoccupés vous ne m’entendrez plus. Tu dois t’occupé à quelque chose de précis et ne pas t’éparpiller. Et toc !
J’aime beaucoup votre récit. Pour ce petit bol d’air, le vent et le ressac de la mer, et cette petite voix qui peut enfin se délivrer, dans un esprit posé, pour fournir une réponse pertinente. 🙂
Jamais sa petite voix intérieure ne l’avait vouvoyé (e). Ils se tutoyaient depuis leur enfance. Pourquoi ce changement soudainement ? Cette distance, subitement ?
J’ai l’impression qu’un intrus a pris possession de mon corps, genre symbiote Goa’uld. Vous connaissez ? C’est cet espèce de reptile qui hérisse le poil de l’équipe Stargate SG1.
En effet, j’ai toujours partagé mes joies, mes peines, mes doutes, mes fous rires, enfin tout avec la petite voix intérieure que je porte en moi depuis ma naissance. Tantôt la voix de la sagesse, tantôt la voix de la hardiesse. Il arrive que quelquefois on entre en conflit, mais on trouve toujours un compromis.
On est potes comme cochons. Normal, non ? Elle est moi et je suis elle, l’une sans l’autre nous ne pouvons exister.
Mais un beau matin, je me réveille quelque peu terne. Quelque chose manque en moi, quelque chose cloche. Brutalement ma petite voie s’exprime :
Ça y est, Monsieur est enfin sorti des bras de Morphée ? Vous semblez avoir oublié que votre journée est chargée. Alors dépêchez-vous !
Arrête ton char Ben-Hur ! Je sais que tu es facétieux, mais au saut du lit, ça craint. Tu sais bien que tant que j’ai pas pris mon café j’suis pas très vif d’esprit.
Je ne veux rien savoir. Vous avez des engagements que vous devez tenir. Alors, je me répète : dépêchez-vous.
T’es relou ! Fiche-moi la paix.
Je me dirige vers la cuisine, prépare mon café, mes tartines et m’installe tranquillement pour profiter pleinement de ce premier repas de la journée. Je file sous la douche. D’habitude je pousse la chansonnette, mais ce matin j’ai l’esprit accaparé par le changement de ton de ma petite voix. En y réfléchissant bien, elle était très sérieuse. Ça ne ressemblait pas à une blague.
Elle doit avoir un coup de calgon. Pour lui redonner sa pêche, je me dépêche et hop nous voila partis en avance.
T’as vu, je t’ai obéi et nous allons même arriver en avance.
C’est bien la première fois que cela vous arrive. Heureusement, que j’ai toujours été là pour vous tirer des fâcheuses postures dans lesquelles vous avez si souvent l’habitude de vous mettre.
Oh, purée ! Arrête de faire l’andouille ! Mais qu’est-ce qui te prend ? Pourquoi tu me vouvoies ? C’est un nouveau jeu ? Tu cherches à me déstabiliser ou quoi ?
Écoutez-moi bien. Je suis votre guide ou votre conscience ou ce que vous voulez depuis votre naissance. Je vous ai toujours très bien accompagné. Maintenant vous êtes adulte et vous devez vous montrer responsable sans l’aide de quiconque. Moi j’ai su mûrir, ce qui est loin d’être votre cas. Je vous suggère de vous prendre en main et de grandir. Prenez exemple sur moi.
Elle commence sérieusement à me pomper l’air. Je cherche à comprendre, mais c’est l’incompréhension. A moins que… Hier soir nous avons pris un verre avec un collègue, sympa mais terriblement pompeux. Est-ce que nos petites voix auraient comploté dans notre dos et interchangé leurs esprits ? Allez savoir. Je dois questionner mon collègue. En attendant, pour être tranquille, j’achète un paquet de chewing-gum freedent et le lui enfourne dans la bouche. Ouf ! Un peu de répit.
🐀🐭 Peut importe le Tu ou le Vous… L’ essentiel est de l’ entendre cette petite voix… Mieux vaut ça qu’une voix OFF c’est meilleur signe ! Non ?
Je crois que cette voix-la est celle que les sourds entendent le mieux.
Petite réflexions du dimanche matin après la lecture des textes-réponses. 🐭
Jamais sa petite voix intérieure ne l’avait vouvoyé. Ils se tutoyaient depuis leur enfance, en toute innocence, leur adolescence en toute confiance, et de façon plus intime dans leur vie d’adulte.
Jusqu’au drame.
Après une nuit cauchemardesque, sa petite voix se manifesta :
« Je dois vous dire la vérité : TOI et MOI, c’est du passé. Vous êtes un être abject ! Ainsi, à partir de cet instant, vous devenez un inconnu. Vous n’avez jamais voulu m’écouter. Désormais, vous serez seul «
Tromperie, trahison.
Déchirement, Anéantissement.
Questionnement.
Pourquoi cette voix si douce, si compréhensive s’est-elle éteinte ?
Serait-elle morte à cause de lui ?
Qu’a-t-il donc fait pour mériter ce rejet ?
Que peut-il donc se reprocher ?
RIEN, bien sûr !
Son extravagance ?
Sa vie de patachon ?
Son égoïsme ?
Son arrogance ?
Son indifférence ?
Destruction.
Décadence.
Pour chasser le bourdon, il s’abreuva au bourbon qui s’est incrusté dans chacune de ses cellules.
Pour anéantir la douleur, un jour de beuverie, il décida de déposer les armes.
Il était là, sur le quai, les bras ballants.
Il attendait le rapide Paris-Lyon.
Enfin la délivrance !
Au moment où il s’élançait vers la voie, la voix intérieure lui cria :
« Stop ! Ne fait pas ça ! Je t’en prie ! TOI et MOI, nous faisons UN ! Je vais t’aider ! »
Il s’arrêta net !
Elle était toujours là !
Vivante !
Bienveillante !
Renaissance !
Jamais sa petite voix intérieure ne l’avait vouvoyé (e). Ils se tutoyaient depuis leur enfance. Pourquoi ce changement soudainement ? Cette distance, subitement ?
— Bonjour !
La lumière filtrée par les interstices à claire-voie des persiennes inonde sa chambre de la douce lumière dorée des rayons de soleil…
— Avez-vous bien dormi ?
Il reconnaît cette voix qui trotte dans sa tête… mais il se demande pour quelle raison, prendre autant de distance avec ce vouvoiement !
— Ho ! Je vous prie de vouloir bien excuser mon manque de courtoisie et de politesse… insiste la voix… je vous souhaite un très bon et heureux anniversaire !
D’un mouvement énergique, il secoue la tête et se frotte les yeux. Repoussant drap et couverture, puis s’asseyant sur son lit, il s’ébroue de nouveau pour tenter de se réveiller davantage… Mais qu’est-ce donc cette histoire ? Se demande-t-il dans sa tête…
— Ho ! Doucement, ne me bousculez pas de la sorte… lui lance sa petite voix intérieure.
— C’est donc bien toi qui me parles ! Mais pour quelle raison emploies-tu ce vouvoiement ?
— Oui, c’est bien moi. Vous avez raison de poser cette question. C’est parce qu’aujourd’hui vous avez atteint votre majorité et qu’il est plus conventionnel de marquer votre entrée dans le monde des adultes… en adoptant désormais le vouvoiement…
— Mais enfin ! C’est complètement absurde… je suis toujours le même… et… et j’ai besoin de te sentir proche de moi. Comme tu le fais depuis mon enfance…
— L’un n’empêche pas l’autre ! Mais, le tutoiement introduit nécessairement une certaine familiarité qui peut être à double tranchant… et dans certains cas, j’aurais l’impression de perdre en autorité et le tutoiement pourrait même m’entraîner à un manque de respect… Le respect, auquel vous avez droit maintenant que vous êtes devenu un homme !
— Mais j’ai besoin que tu me bouscules… que tu me traites de tous les noms d’oiseaux que parfois je mérite… et tes coups de pied au cul me sont aussi nécessaires… Non ! Non ! Non et non ! Ne me dis pas que ça aussi… je n’y aurais plus jamais droit !
— Je retiendrai désormais mon geste…
— Non ce n’est pas possible ! C’est quoi toutes ces conneries ? Je crois être réveillé, mais en réalité, j’évolue dans un mauvais rêve… c’est ça !
— Pas du tout mon jeune ami…
— Ah ! Parce que je suis toujours ton ami… tu prends tes distances… mais je reste ton ami…
— Oui et pour toujours… et si nous profitions de ce moment pour faire le bilan de nos rapports… en toute objectivité… je dois plutôt dire… en toute sincérité… ne vous êtes-vous jamais demandé si mon tutoiement ne pouvait pas aussi être interprété comme une pratique manipulatoire sous forme d’une convivialité forcée, voire d’une amitié factice ?
— Maintenant que tu le dis… c’est vrai qu’il m’est arrivé quelquefois de me poser cette question… parce que tu avais réussi à me faire changer d’avis à l’insu de mon plein gré… Oh ! Comme c’est drôle… tu arrives encore à me faire dire des bêtises, en paraphrasant un célèbre coureur cycliste qui avait répondu à un journaliste qui lui posait une question sur le dopage dont il était soupçonné… Pourtant, je perçois des contradictions dans mes pensées… cette situation est un mélange d’envie de rire et de pleurer… j’ai toujours imaginé que, par l’intermédiaire de cette petite voix, c’était mon ange gardien qui guidait mes choix…
— L’Ange Gardien ou la conscience… n’est-ce pas la même chose ?
— Je ne sais plus… il me semble que de devenir un homme c’est compliqué…
— Cela n’empêche pas de conserver son âme d’enfant…
— Tu crois que si je me rendors, tout ce que nous venons de dire aura disparu de ma mémoire…
— Non, j’en suis certain, même si vous pensez l’avoir oublié, cela restera gravé au fond de vous à tout jamais… mais pourquoi pleurez-vous ?
— Notre complicité me manque déjà… avec cette pensée, peut-être d’une manière inconsciente, il tire sur lui le drap et la couverture… puis, se sentant à l’abri, se recroquevillant dans la position du fœtus, il s’adresse à sa petite voix intérieure : je pourrais toujours m’endormir aux creux de tes bras !
— Oui bien sûr… autant de fois que vous en éprouverez le besoin et même lorsque vous serez un très vieux monsieur… Rassuré par cette dernière pensée, il replonge dans les bras de Morphée…
OVALIE
Ma petite voix me vouvoie, pourquoi cette distance ? Elle a changé. Ce passage au pluriel soudain me gêne. N’est-ce pas une autre ? Et la première, je crois qu’elle s’est lovée dans le couffin du chat. Tranquille, lui.
La nouvelle me morigène déjà : paresseux, vous n’avez pas… Si… Ça, toute une litanie. Je le sais, pas la peine d’en remettre. Tu peux mieux faire devient : vous devez, ou, insidieux, vous auriez dû !
Je vais la planter là. Façon grand siècle. Si Madame daignait enfiler sa combinaison intergalactique et s’installer aux commandes du vaisseau spatial, j’y prendrai un plaisir extrême.
– Eh bien, drôle, qu’attends-tu ?
Comme quoi, on ne peut dire certaines choses quand tutoyant. Je me souviens qu’enfant, je ne parlais que sur le mode il… Mes parents en avaient pris le pli. L’enfant a fait-ci, j’étais »tiersifié » ! Le jeu est devenu pervers narcissique, comme dit le pédopsychiatre. Confuse parole, et dans sa chambre déco, une petite voix intérieure, non, tu n’es pas méchant ! Elle me le répète en boucle, ou façon méthode Coué, tu es bon, car il faut supprimer les négations !🐻
Jamais sa petite voix intérieure ne l’avait vouvoyée. Elles se tutoyaient depuis leur enfance. Pourquoi ce changement soudainement ? Cette distance, subitement ? « Vous êtes encore là pour longtemps ? » me questionna-t-elle, un matin. J’étais encore endormie. Je crus à un rêve qui se prélassait. Je me frottai les yeux, me redressai et entendit cette voix nouvelle. Ma voix intérieure, je la connais depuis mon enfance. Elle me parle depuis tant d’années. Comme une sœur pour moi. Mon alliée ou ma contradictrice selon les jours. Elle commente mes faits et gestes, me conseille, me sermonne. Elle est très bavarde. Seule la méditation nous unit dans le silence. Avec elle, je ne suis jamais seule.
« Vous êtes encore là pour longtemps ? Répète-t-elle de cette voix inconnue. Mais c’est quoi ce vouvoiement ? Et cette question saugrenue ?
Ben ! Tu ne me reconnais pas ? C’est moi ! Lui chuchote-je à mon habitude. « Votre voix intérieure a déménagé. Démissionnée, je crois. »
J’étais stupéfaite. Comment sa voix intérieure ait pu partir sans elle ? Je n’ai jamais vu cela. Hier soir, encore on papotait sur mes états d’âme. Elle ne m’aurait pas prévenue ? On a dû l’enlever, l’assassiner. Sa voix intérieure était une belle voix, mezzo. L’aurait-on enlever pour l’offrir à une cantatrice dépourvue de voix intérieure ? La vendre à l’Opera ? C’est possible, ça ? Et pourquoi cette nouvelle voix me vouvoie pour me demander de partir ?
Je ne peux pas vivre sans ma voix intérieure. Je vais tomber dans le silence, dans cet abîme. Désormais, je vais parler seule. Bougonner, soliloquer.
Une voie sans issue.
Bravo pour la voir sans issue !
Jamais sa petite voix intérieure
Ne l’avait vouvoyée
Pour le pire ou le meilleur
D’ailleurs
Elles se tutoyaient depuis l’enfance
Un privilège, une chance
Alors pourquoi ce changement
Soudainement
Cette distance, subitement
Pourquoi ce froid entre elles deux
Alors que leur complicité sautait aux yeux
Cette « voix in » ne la lâchait pas
Comme son ombre collée à ses pas
Fais pas ci, fais pas ça
Reste ici, ne va pas là-bas
Lui oui mais pas celui-là
Elle adorait leurs conversations
Leurs échanges et même leurs brouilles
Ouille, ouille, ouille
Parfois ça bardait là-haut
Dans son cerveau
Quand miss intuition en faisait trop
Ou pas assez…
C’est arrivé
Pas plus tard qu’hier
Elle l’a laissée se débrouiller
Dans une sale affaire
En mettant des œillères
Maintenant la confiance est rompue
C’est elle qui a décidé de cesser le « tu »
Dorénavant
Ce sera le vouvoiement
Et la petite « voix in » est priée de dégager
Prestement et sans ménagement.
Jamais sa petite voix intérieure ne l’avait vouvoyée. Elles se tutoyaient depuis leur enfance. Pourquoi ce changement soudain, cette distance subitement ?
C’est que la voix ayant grandi, sa mère lui avait dit :
vous êtes adultes maintenant, il est temps de cesser le TU qui est bon pour les enfants.
mais maman…
je sais ce que tu vas me dire, c’est fini les puérilités, les petites bêtises qui vous faisaient rire sottement, ces airs mystérieux qu’elle prenait quand tu lui confiais un secret. Cesse de pleurnicher, sinon je t’envoie chez quelqu’un d’autre.
Et je vous ai à l’oeil, ne cède pas à ses injonctions, reste digne et ferme, on vouvoie un point c’est tout.
Donc sa mère lui demandait de se conduire en adulte tout en la grondant comme une petite fille? Puisque c’était comme ça, elle bouderait et se tairait, na.
Désemparée, son alter ego dut désormais réfléchir par elle même, destin cruel.
Était-ce un sale coup de l’IA ?
L’imitation était parfaite, sauf ce vouvoiement qui me questionnait.
— L’IA s’essaierait-elle à prendre le contrôle de mon cerveau, avec son générateur de voix ?
— Mon réseau neuronal buggerait-il avec mes exercices d’écriture déjantés du samedi ?
— Ma petite voix intérieure avait-elle trouvé ce truc pour attirer mon attention et se faire enfin écouter ?
— La glande pinéale — parabole cosmique — se mettrait-elle à dysfonctionner ?
— Me serai-je arrêtée dans les annales akashiques sur un temps où le vouvoiement — en bonne société — codifiait les échanges ?
Et tandis qu’une série d’hypothèses incongrues m’assaillait, la petite voix gloussait. D’un coup, je l’entendis me dire : « Que nenni mon amie, que nenni. Ha ha, mettre en cause l’IA, quelle imagination ! Vos exercices débridés du samedi y sont assurément pour quelque chose. La réponse est beaucoup plus simple. Il ne s’agit là que d’une mise à jour de la conscience qui ajuste les paramètres, au regard de vos nouvelles connaissances, de vos nouveaux postulats. N’êtes-vous pas en passe de théoriser mon Amie sur l’idée que votre existence est multidimensionnelle, que vous avez certainement de nombreux alter ego sur d’autres plans parallèles ? C’est donc à tout ce beau monde que je m’adresse. »
Et la petite voix partit d’un gros éclat de rire, et cela résonnait, résonnait…dans tous les couloirs du temps, et tous les univers parallèles, où elle se faisait entendre.
L’AI ne serait qu’un support démontrant que notre petite voix intérieure est notre seul guide à travers les mondes parallèles !
J’approuve !
Pourquoi ? Mais pourquoi ?
Après des décennies de douce intimité, cette mise à distance est énigmatique.
Me voilà isolée – sans échos –
Et lorsque en mal d’inspiration je lui demande :
– T’es où ma mie ?
Elle me répond dédaigneuse et en me vouvoyant :
– Cherchez !
Brrr, ça me fait froid dans le dos…
Alors, je re-tente :
– T’es fâchée ?
– Non !
– Alors pourquoi tu me vouvoies ?
– Pour que vous vous posiez la question… Posiez la question… Posiez la question…
– Oh la la, ça devient grave cette histoire.
Ma petite voix intérieure aurait-elle perdu la tête ?
Bon, je vous laisse là car il faut que je règle ça avec elle, les yeux dans les yeux.
Je vous raconterai la prochaine fois.
Les petites voix ne perdent pas la tête ; mais nous la font perdre, jusqu’à ce que nous trouvions notre voie. Ou notre voix. Elles sont donc un peu têtues. Bon courage ! 🙂
Jamais sa petite voix intérieure ne l’avait vouvoyé (e). Ils se tutoyaient depuis leur enfance. Pourquoi ce changement soudainement ? Cette distance, subitement ?
C’était ça alors devenir adulte ? cela ne pouvait pas être un hasard…Elle s’était mise à le vouvoyer le soir de ses dix-huit ans. Mais pourquoi ? Il n’était pas du tout prêt ! Il avait tellement besoin d’elle ! Il n’avait pas encore trouvé sa voie justement alors pourquoi prendre ses distances à ce moment-là ? La première fois, juste après avoir soufflé ses bougies, il avait cru entendre sa petite voix lui susurrer « n’aies crainte, une autre vie commence » et puis il s’était dit que c’était normal en ce jour si spécial. Il commença à trouver cela étrange quand il entendit ensuite « je vous souhaite le meilleur ». Il avait mis, ce qu’il croyait être une hallucination auditive, sur le dos des bulles de champagne qui lui était un peu monté à la tête. Et puis non. Le lendemain au réveil, c’était le « vous » qui était revenu. « Il est temps maintenant de vous prendre en main ». Non mais je rêve ! Il s’était tout le temps pris en main, il n’avait pas le sentiment d’avoir été frivole et quand bien même, si l’enfance n’est pas le terrain de l’insouciance, qu’est-ce que c’était que ce monde ? Il n’avait pas envie de converser avec cette petite voix qui donnait un ton trop solennel et grave à leurs échanges. Il avait le sentiment d’avoir perdu une complice, une amie de toujours.
Jusqu’à ce qu’il change de point de vue et se dise que peut-être, cette voix voulait lui signifier qu’elle était devenue « Sage », un peu comme un grand maitre qui veillerait sur son protégé maintenant en mesure de recevoir et d’écouter des leçons de vie, des conseils raisonnables.
A partir du moment où il comprit que sa théorie pouvait être la bonne, tout changea. Elle continua de le vouvoyer mais il retrouva de l’humour, de la bienveillance, de la légèreté dans leurs échanges. Car il réalisa en fait, que la voix s’adressait à ce qu’il était vraiment, elle s’adressait à l’enfant qu’il ne devrait jamais cesser d’être et, en même temps à l’adulte qu’il devenait. Il comprit que la voix lui faisait un cadeau, celui de ne jamais oublié toutes ses premières années, celui qu’il avait toujours été.
Bonjour Iris 79, désolé… mais j’ai travaillé sur un texte dans le même ordre d’idée… il est en cours de correction avant sa publication… bien à vous et bon week-end…ici dans le Var ce sera sous la pluie !
Jamais sa petite voix intérieure ne l’avait vouvoyé. Ils se tutoyaient depuis leur enfance. Pourquoi ce changement ? Parce que, pour elle, il était temps de se séparer. Que cette petite voix allait changer de véhicule, fuir ce corps décrépi, habiter d’autres phrases, jouer avec tous les mots stockés dans les valises bien remplies de ta vie.
Toujours surpris par ce qui nous attend n’importe où, n’importe quand…il lui demanda quand même : « Pourquoi tu me tues toi ? »
La petite voix ne tues pas. Elle vous vois. 🙂
Bonjour Pascal.
Bonjour tout le monde.
Pas de publication cette semaine, car quand je n’écris pas, je dessine.
En cette fin de semaine, je vais participer à une exposition-vente de mes dessins.
Pour découvrir mon univers, entre rêve et réalité, il sera possible de me retrouver au « Marché de créateurs » à Saint-Martin-de-Nigelles (28) le 2 février, de 10 h à 18h, où je présenterai mes réalisations.
Bonne écriture à vous, et à bientôt
Laurent
Bonne chance… Cela aurait été un bon départ pour écrire justement sur le sujet… Cette petite voix qui guide votre main, dirige vos choix de couleurs et place vos ombres. J’aurais bien aimé lire ça. 🐀
Bon marché des créateurs et bon et beau temps.
Avez-vous un site Laurent, sur lequel vous exposez, pour que nous puissions apprécier l’écriture de vos pinceaux ?
Bon marché de Créateurs ! 🙂
On se frôlait, se carressait.. enfin je le croyais.
J’étais à tu et à toi serais- je maintenant à tue et à vous ? En serions -nous arrivés aux mains ? Au » ma main droite ignore ce que fait la gauche » ? C’est commode ça non ? Si encore si tu es gaucher… Sinon c’est le jeu de mains jeux de vilains…
Ces mains qui balançaient mon berceau…
Cette petite voix utopique qui me murmurait des chansons douces pour m’endormir…
Un joli rêve ! .. Dors mon p’tit quinquin… Serait-il devenu : dormez ! Je le veux !…
Et après cette injonction ? Partir en lévitation ? Pour aller où ?
Pas d’ça Lisette. Moi c’est le plancher des vaches, les pieds bien à plat sur le chemin de la raison, celui qui mène aux étoiles.
Alors petite voix, tiens -toi le pour dit ! Ou on continue de se tutoyer ou je coupe… bibi…bip !🐀