Relisez vos écrits d’enfance

Qui ne s’est pas, un jour, replongé dans le vieil album de famille et, tel Narcisse, chercher les photos sur lesquelles se trouvait sa propre image ?

Pour constater, en fin de compte, que contrairement à ce qu’il ou elle pensait
pendant son adolescence, cette jeune fille ou ce jeune homme, n’était pas si moche. Même plutôt beau.

Et pouvait donc séduire…

De même, si vous ou vos parents avez conservé des textes écrits pendant votre adolescence, relisez-les.
Il se peut que vous trouviez quelques fossiles séduisants une fois dégagés de leur gangue.

C’est la raison pour laquelle, périodiquement, tel un archéologue, je recherche et étudie les traces écrites que j’ai laissées dans ma préhistoire d’écrivain.
Mes fouilles me permettent parfois de mettre à jour des vestiges d’idées exploitables.

C’est ainsi, en fourgonnant dans mes livres de jeunnesse,
que j’ai retrouvé un recueil écrit par l’un des maîtres de la nouvelle : John Cheever * 1930, 1940…
Voyez comment, en quelques phrases bien ajustées, il esquisse l’enfance et l’avenir de son héros :

 » Je suis né à Boston en 1869. Ma famille habitait cette ville et ses membres y étaient maîtres d’école ou maîtres de pont depuis aussi longtemps que remontaient nos souvenirs.
Nous étions pauvres et ma mère était veuve. Elle tenait une pension de famille.
Mon frère et ma sœur travaillaient déjà et je me préparais à entrer dans la vie active dès la fin de l’école primaire.
Je choisis la chaussure et voulais devenir voyageur de commerce.
Je décidai de devenir voyageur de commerce comme d’autres décident d’être médecin, général ou président.
À l’âge de douze ans je quittai l’école et trouvai un petit boulot de garçon de bureau dans une grosse usine de bottes et de chaussures. La première année je gagnai cent dollars. Puis je fus promu clerc et l’année suivante je gagnai deux cents dollars. Les boulots n’étaient pas faciles à trouver à l’époque et je devais travailler dur pour garder le mien. Quand je partais au travail les rues étaient vides et quand je rentrais le soir elles étaient vides et sombres. Puis j’eus la chance d’apprendre à fabriquer des chaussures dans une usine de Lynn. Je déménageai là-bas où j’habitais une pension de famille bon marché et j’appris à confectionner des chaussures. Je sais toujours… »

N’est-ce pas un bon modèle pour attaquer un prochain texte ou chapitre ?

* Autobiographie d’un commis voyageur 

2 réponses

  1. Marie-Ange DOAN dit :

    Je n’ai malheureusement gardé aucun écrit de mon enfance… c’est dommage !!!

  2. George Kassabgi dit :

    Un souvenir peut souvent nous mettre, pour ainsi dire, devant le début d’une journée dans le passé. On se laisse attirer par une suite d’images et de sons. Ici et là, la journée ainsi remise en vie dans notre imagination nous redonne un sens réel de ce que l’on a vécu mais parfois, dans ce même processus de regénération, on se retrouve avec des pensées ou observations qui nous étonnent ou interrompent la promenade virtuelle. Ces nouveautés, si l’on veut bien les nommer ainsi, peuvent être d’origine subconsciente ou avoir une cause liée aux évènements qui suivirent la journée du souvenir. Et j’ai donc l’impression que c’est cela qui peut donner une nouvelle richesse ou, comme nous dit Pascal, trouver de la séduction dans des fossiles de notre passé.

    Je me laise aller dans le passé et… je repense à mon premier professeur d’histoire. J’avais douze ans. Dès la première heure de classe, il insista surtout, tout en se promenant entre les bancs, que se qui importe dans l’étude de l’Histoire est de comprendre aussi bien que possible le pourquoi et le comment des évènements qui s’enchaïnent ou se suivent dans la vie d’un individu ou d’une nation. Autrement dit, pour lui, se rappeler des dates et réciter par coeur noms de personnes ou de villes ou de pays n’a qu’une importance secondaire. Chaque fois que ce souvenir me revient à l’esprit, c’est comme si je découvre, des années plus tard, le pourquoi je me retrouvais fortement intéressé par le cours d’histoire. En ces jours là, je n’étais certainement pas capable de m’expliquer cet intérêt et, en fait, je disais toujours à mes parents que mon cours préféré était celui des mathématiques. Mais il y avait un aspect indéchiffrable qui m’attirait vers le cours d’histoire ; et maintenant je sais que la philosophie du prof était faite pour me
    plaire. Un autre détail de ce même souvenir est lié au fait que ce prof mourut vers la fin de l’année scolaire. Tous les élèves avec leurs parents participèrent, comme il se doit, aux funérailles. Six ans plus tard, donc au terme des études secondaires, je demandais si quelqu’un avait des nouvelles de la famille du cher prof d’histoire et ce fut comme si je parlais une autre languie. Moi, je n’oublierai pas la mise en valeur acquise durant les cours d’histoire quand j’avais douze ans…

    George Kassabgi

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