Quand le rangement efface la mémoire spatiale

Je suis dyslexique. Neuroatypique aussi. Ce sont des mots qu’on place en introduction comme un étendard. Mais ce sont surtout des faits. Parmi les symptômes les plus visibles de ma particularité, le rangement

Mes tiroirs ? Un entassement des choses disparates : papiers, enveloppes, chéquiers, stylos, et de multiples bricoles, peut-être utiles un jour…
Mes placards à vêtements ? Un champ de bataille textile.
Mon atelier-garage ? Un tas d’outils et d’engins à usages incertains. Le tout, dans un ordre que personne ne voit, à part moi.

Un jour, influencé par mon épouse, j’ai commencé a trier et a étiqueter. J’ai rangé mes outils de jardinage avec une logique rationnelle. Mais, quelque temps après, impossible de remettre la main sur cette cisaille que je trouvais habituellement les yeux fermés.

Ce rangement avait effacé ma mémoire spatiale.

Chez moi, le désordre est une carte. Mon fouillis, une structure. Je sais que la pince coupante que je cherche est quelque part sous une pile, à côté des serre-joints, à gauche de la boîte aux rondelles et aux écrous. Si je la range dans une caisse à outils « logique », elle disparaît de mon détecteur mental.

Je ne suis pas seul dans ce cas. Beaucoup de personnes neuroatypiques, dyslexiques, TDAH ou simplement originales dans leur façon d’appréhender l’espace, développent des logiques propres, des écosystèmes d’objets qui ont leur place selon une grammaire intuitive, non linéaire, souvent invisible aux autres.

Et si ce n’était pas un défaut ? Et si, au lieu de « ne pas savoir ranger », nous savions organiser autrement ?
Une organisation associative plus fondée sur le vécu que sur l’étiquetage. Alors, oui, mon tiroir est un bazar. Mais il parle ma langue. La prochaine fois que j’envisagerai de le ranger, je laisserai plutôt un petit mot pour moi-même : « Attention !, tu vas perdre ta singularité. Garde ton chaos mental. C’est là, dans ce bazar neuronal, que s’ébauchent les exercices proposés chaque samedi sur ce blogue. »


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11 réponses

  1. Christophe dit :

    Je suis moi aussi bordélique. Quand he bricole, on pourrait croire que je pose la perceuse, glisse la cheville dans l’orifice, prend le tournevis, visse la patère au mur … Rien de tout cela.

    Dans mon esprit, je fixe une étagère.

    En résulte un chemin d’objets et de poussière que je réunis en tas vaguement thématiques et fourre dans le garage.

    L’étagère est au mur, dehors il fait beau, mon fils veut jouer, on rangera demain.

  2. Sylvianne Perrat dit :

    Un peu dérangé ? Pas grave…

  3. Gilaber de Florates dit :

    Cher Pascal,
    La sœur de ma compagne dit qu’une maison en désordre, au rangement dont le principe échappe à certains… c’est une mais qui vit…
    Autrement dit, à chacun son style, le principal c’est d’être bien.
    Prenez bien soin de vous et à bientôt.

  4. ACHILLE Dominique dit :

    Peut-être êtes-vous tout simplement un artiste !

  5. Jean Marc Durand dit :

    Quand je visualise ma boîte à outils d’écriture, quel bon bazar! J’adore d’ailleurs les limes râpées, les marteaux sans manche et les scies édentées.

  6. Nouchka dit :

    Oui Pascal, à chacun son mode dé repérage spatial. Pour le repérage temporel c’est encore plus personnel. Vous ne l’évoquez pas… en tout cas, pas aujourd’hui.
    Merci de nous faire partager vos « particularités », elles ne sont peut-être pas uniquement représentatives des « Dis » ?

  7. Marynote dit :

    Bonjour Pascal
    C’est justement parce que vous ne pensez pas comme les autres que vos idées font la singularité de mon atelier jeux 2 mots.
    Rangez ou pas elles sont si riches et bien rangées dans mon cahier et les partager avec mes amies.
    Pour le rangement moi on me reproche de l’être trop. Est ce que je suis normale ? A vos yeux certainement pas mais peu importe. On est comme on est. Trop ou pas assez chacun doit aller du côté où il se sent le mieux.
    Merci pour ce que vous êtes.
    Bonne journée.

  8. MICHEL-DENIS ROBERT dit :

    Bonjour Pascal !
    En tout cas, le désordre n’apparaît pas dans ce que vous écrivez.
    Lorsque j’ai acheté ma voiture, la garagiste m’a expliqué qu’elle avait deux enfants dyslexiques et donc que ses enfants étaient obligés de créer leur propre monde pour s’adapter à celui que nous vivons.
    Comme ce monde est lui-même désordonné, je pense que c’est à chaque personne de réfléchir sur ce que l’on peut apporter pour que ce monde se réordonne dans le bon sens.
    Bonne journée !

  9. 🐭 Souris verte dit :

    D’habitude il est dans le tiroir à Jean c’est a dire a tout en compagnie de la clé serre écrous et du tulle gras pour les brûlures. J’ai commencé a me poser des questions quand je l’ai retrouvé, ce marteau, dans le frigo… Mais rassurée car la crème n’était pas dans le boîte à outils ! Donc… Ça gaze !🐭 Les choses ont leur vie qui parfois nous échappe… On ne peut pas tout contrôler !!!

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