Plus un texte est long, plus il est dissuasif

Dessin de Dusan Petricic

Plus un écrit est long, plus il est dissuasif. Notamment sur Internet ! 

Au-delà de 300 mots, soit environ 85 secondes de lecture, un texte a peu de chance d’être lu jusqu’au bout. (fréquence moyenne à laquelle lit le grand public : 200 mots par minute).
Sur Internet, les visiteurs accordent 8 secondes en moyenne aux premières lignes, puis décident de poursuivre ou non. C’est pour cette raison que les articles sont souvent accompagnés d’une estimation de temps de lecture.
Cette information est affichée le plus tôt possible pour rassurer les lecteurs, c’est dire…

Faites ce test : Offrez un roman de 400/500 pages à une personne et observez ses réactions. Certaines le soupèsent, mine de rien…
Sinon, quand l’occasion se présente, observez les gens dans une salle d’attente, voyez comme ils sont tous captivés par l’écran de leurs téléphones. Au point de leur faire oublier toute autre moyen d’évasion pour patienter en ces lieux : livre, journaux, voisins…
Si un écran de TV s’y trouve il y a une petite chance qu’on lui jette un œil de temps en temps, surtout si on a oublié de prendre son téléphone.

 » J’aime l’économie de la nouvelle. Dans la Bible, la création du monde tient en une page. Si elle en avait occupé cinquante, rien n’aurait été pareil ”

Arthur Miller, auteur.

La qualité et non la quantité  

Au XVIIIe siècle, pour séduire une jeune fille, il fallait écrire une lettre de dix pages. Aujourd’hui deux personnes peuvent se regarder dans les yeux et vite se comprendre. Pareillement sur Internet. Ce n’est pas la quantité des lignes qui fait la qualité d’un texte, c’est la force qu’il exerce sur une personne pour l’entraîner à vivre la suite.

Quelques conseils pour écrire court

Quand vous rédigez 1 paragraphe pour décrire un lieu, pensez que sur un smartphone, on voit ça en 3 secondes…

Retenez que la première ligne d’un texte est lue attentivement. La deuxième est lue plus rapidement, puis l’attention du lecteur se perd peu à peu selon le contenu des suivantes.

Privilégiez l’action plutôt que la description.

Bannissez les introductions et les redondances.

Choisissez la voix active dans la tournure des phrases. Elle présente le sujet comme agent de l’action.
Voix active : Mon ami écrit un roman.
Voix passive : Un roman est écrit par mon ami

Employez des verbes connus du plus grand nombres, l’adverbe affaiblit le verbe et l’adjectif affadit le substantif

Illustrez avec des comparaisons, des images, des formules, des jeux de mots.

Le moins possible de : « En tout cas, par ailleurs, soudain, bref, enfin, en effet, autrement dit, etc. »

Ne maintenez que les adverbes ou adjectifs importants.

Des paragraphes de 7 à 8 lignes

Des phrases courtes 15/20 mots maxi par phrases

Des mots courts et connus : 1, 2, 3 syllabes

« Je me suis aperçu que les mactionots qui servent à exprimer le plus concret, le plus immédiat, étaient formés en monosyllabes : la vie, la mort, la paix, l’air, l’eau, Dieu, le jeu, le feu, le coeur, la main, le cul, la peau, le lit, le corps, le bois… Je me suis constitué un dictionnaire de 1753 mots. » Gilles Vigneault

Pour l’exemple

« Sur la place du village on voit : les papys-pétanques, les mémés-tricoteuses et les immanquables. Ceux qu’on retrouve tous les jours, à la même heure, la même place, avec fauteuils, chapeau, crème et cancans. Ils tiennent à leur place. À côté des connaissances. »

Essayez de rédiger un texte comme dans l’exemple ci-dessus, en employant, chaque fois que vous le pouvez, une formule concise, nette et frappante. Un raccourci « faisant image », facile à lire en raison de sa brièveté et qui frappe l’esprit. C’est contraignant, mais ça paye !

Pourquoi cet article ?

Je suis hors-n’homme. Un neuroatypique à dominance dyslexique atteint d’aphantasie : incapable de fabriquer des images mentales et de se représenter un lieu ou un visage. Mes facétieux neurones font des croche-pieds aux mots dans mon cerveau et mon orthographe trébuche souvent quand j’écris. Si vous remarquez une faute, merci de me la signaler : blog.entre2lettres(at)gmail.com

29 réponses

  1. Pascal Perrat dit :

    Sans gluten, sans sucre, sans sel ou graisse ajoutée, sans calorie, sans adjuvant, sans sulfite, sans alcool… et bientôt des textes sans mots ni auteurs…

  2. Anonyme dit :

    L’important, au rugby, ce sont les essayistes. Quand on lit un bon bouquin, c’est pareil, ça vous transforme !

  3. Antonio dit :

    Long, court, peu m’importe, tant que je me laisse embarquer et que le voyage est merveilleux. Mais je me méfie des navigations au long cours qui partent à la dérive et m’obligent à sauter par-dessus bord, au risque de me noyer dans un océan de phrases agité. Magellan, Proust ont fait beaucoup trop long à mon goût, avec talent certes, et leurs récits en détours restent gravés dans l’histoire.

    Comme a écrit court Audiard, je conclurais : « C’est curieux chez les marins, ce besoin de faire des (longues) phrases »

    Vous êtes toujours là ? Ouf, j’ai cru que j’avais fait trop long 🙂

  4. Valérie dit :

    Des conseils précieux, merci Pascal.
    Je partage !

  5. Genevieve T. dit :

    Suite à une remarque concernant la longueur des textes, j’ai demandé à Pascal de nous donner son avis. Il est vrai que mes derniers textes étaient un peu longs. Ceci dit les sujets un peu ardus de Pascal m’entraînent vers des histoires qui finissent par ressembler à des micro-nouvelles…
    Je vais faire des efforts, mais je veux garder le plaisir de l’écriture, alors si je ne suis pas lue, tant pis!
    Quant aux textes courts, ceux qui sont faits d’un amalgame de mots savants et d’expressions toutes faites en lien avec le sujet, sans réelles accroches, personnellement j’arrête ma lecture à la deuxième ligne!.. Le texte a beau être court!
    Reste à trouver le juste milieu!….
    Ceci dit, faut-il vraiment répondre à tous les diktats de notre société?…
    Merci Pascal pour cet article. Bonne semaine à toutes et tous.

  6. Huguet Rose Marie dit :

    Certes, certains textes sont quelque peu longs, mais vouloir les raccourcir à tout va, c’est être d’accord avec le système actuel qui privilégie la vitesse, le manque de concentration, qui fait fi de la curiosité intellectuelle, bref qui met nos neurones en veille. Je suis nouvelle dans ce groupe et je vais essayer de faire plus court, mais je pense que je me sentirai frustrée. Je vais faire au mieux. J’espère que ma réponse n’est pas trop longue.

  7. Françoise - Gare du Nord dit :

    Merci Pascal pour ces conseils
    Et en mùeme temps, peut-on reprocher à Proust, Zola, Flaubert ou Maupassant d’écrire trop long?

  8. Catherine M.S dit :

    Précieux conseils. Merci beaucoup Pascal. J’adhère à 100 %.

  9. durand jean marc dit :

    « Dans mon lit, ya trop de miettes. Trop de livres aussi. Sale habitude de lire au lit. D’y grignoter des pages et des petits gâteaux. Ce matin, aspirateur. Et draps à laver. Quand ce feignant de chat aura fini son éternelle sieste. C’est pas gagné. Dure la vie de célibataire, gros lecteur, amateur de chats et pas trop porté sur le ménage. »

    Extraits du premier chapitre des Mémouares de DURAND (Janvier 2024)

  10. Sylvianne Perrat dit :

    Ce texte est bien long…😉🤣

  11. Alain Granger dit :

    Merci Pascal pour les conseils.

  12. 🐀 Souris verte dit :

    Voilà qui corrobore mes petites réponses sur le blog lors du dernier sujet. (Lapin agile)Je remarque que les textes sont de plus en plus longs et, comme tu dis, soit j’abandonne soit dans le meilleur des cas, je m’endors. 🥱
    Pascal tu n’as pas répondu à mon billet d’humeur sur le sapin crucifié 😪 arrivé un peu tard cause hosto !
    Lapin agile 🐀

    • durand jean marc dit :

      Salut souris verte, tirant sur l’épinard! C’est quoi cette histoire de lapin sacrifié et de sapin agile, je m’y perd dans cette forêt d’expressions ? Bison affûté! 😊

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