Exercice inédit d’écriture créative 161

Un rire a encore été étranglé dans un coupe gorge,
la victime hoquetait encore quand…

Racontez ce fait divers

9 réponses

  1. Clémence dit :

    Un rire a encore été étranglé dans un coupe gorge, la victime hoquetait encore quand…

    Quand …. ? Oh, il y a très longtemps….

    En début de soirée, des dindons, des pigeons, des poules et des canards s’étaient réunis pour une partie de cartes dans un tripot mal famé. Ils affichaient des mines patibulaires et il valait mieux ne pas les croiser une nuit de nouvelle lune.

    Les quinquets et bougeoirs posés sur les tables tachetées observaient les parties acharnées car les mises étaient exorbitantes. Sous le poids de la concentration, la sueur suintait de dessous les plumes. Les odeurs de vinasse imprégnaient d’un halo glauque les cous, les têtes et les pattes aux doigts crochus et rapaces.

    Le dindon emporta la mise au grand dam des autres joueurs. Pourtant, contrairement à son habitude, il n’avait pas eu la moindre velléité de tricher. Cela rendait ses adversaires encore plus dépités car ils se seraient réjouis de lui passer une bonne raclée… Mais non, même pas…
    Fort de cette victoire honnête, il gloussait à qui mieux mieux, se riant et se moquant de la basse-cour qui avait été proprement plumée !

    Grand duc, il offrit une dernière tournée. Après les dernières lampées et les ultimes hoquets, il prit, pour regagner son poulailler, une rue sinueuse entre des maisons à encorbellement . L’aube allait poindre et éteindre les dernières lueurs des réverbères miteux. Il se dandinait, se poussait du col et se pavanait tout en riant à gorge déployée ! On aurait dit le rire hystérique de Méphisto venant de décrocher la promesse de Faust…

    Le boucan de ce rire diabolique réveilla une brave servante qui ouvrit doucement la porte, happa le volatile qui s’apprêtait déjà à lui conter sa bonne fortune. La servante le cala d’abord sous son bras, le serra un peu….un peu plus fort . Il ne vit rien venir et il hoquetait encore quand la servante lui tordit le cou.

    « Dindon farci de rire jaune en sauce coupe-jarrets » annonça la servante en apportant le plat à la table de ses maîtres….

  2. Halima BELGHITI dit :

    Un rire a encore été étranglé dans un coupe gorge, la victime hoquetait encore quand la brigade des sanglots est intervenue. Les brigadiers de cette unité d’élite ont tout tenté pour sauver les éclats de rire qui pouvaient encore l’être. Ils ont sollicités l’aide du Groupe d’Intervention de la Langue ( le GIL) pour essayer de réanimer la victime avant de la faire admettre aux urgences de l’hôpital De la Sainte-Glotte, le centre de soins le plus proche du lieu de l’incident. Son pronostic vital est engagé et il lutte désormais contre la grimace de la mort. Vraisemblablement, ce rire joyeux rentrait chez lui après une soirée arrosée chez des amis lorsque l’incident est survenu. Plusieurs riverains témoignent avoir aperçu le rire déambuler d’un « pas incertain » dans les rues de ce quartier malfamé de la ville. D’après les premiers éléments de l’enquête, le rire aurait sans doute croisé le chemin d’un funeste pince-sans rire qui aurait essayé de le séquestrer, puis se serait ravisé au dernier moment devant les oppositions de sa victime. C’en serait suivi un rire à gorge déployée, semble-t-il, ce qui aurait inciter son agresseur à l’étrangler. Le rire est actuellement sous perfusion, et pas même un ricanement ne filtre. Les enquêteurs devront attendre plusieurs jours avant de pouvoir l’interroger. Un rictus accompagné de sa compagne, une jolie fossette, se trouvaient à proximité du lieu de l’incident. Le couple, confirme la version de la mauvaise rencontre. Cet incident n’est pas sans rappeler celui survenu la semaine dernière dans ce même quartier. Un autre rire serait mort étouffé, si personne n’était arrivé à temps pour lui prêter main-forte. Heureusement pour lui, un groupe de sourires forcés passait par là et a pu intervenir à temps pour le libérer Sans parler de cette larme qui aurait pu s’écraser si un nez compatissant ne l’avait pas secouru. Notre dernière victime, la malheureuse, n’a pas eu cette chance. On s’interroge toujours sur les raisons possibles qui pourraient pousser quelqu’un à s’en prendre à un rire et sur ses motivations. Est-ce l’œuvre d’un sérial rabat-joie ? Cette piste n’est pas écartée. Il faut dire qu’il ne fait pas bon sortir dans le coin, en pleine nuit. Des rires carnassiers, des crocs et autres dents pointues, bien connus des services de police, sévissent dans cette zone de la ville et ont élu domicile dans les rues les plus sombres. Il pourrait donc également s’agir d’un règlement de comptes entre deux bandes fratricides. Or selon la police, la victime, un rire tranquille, n’entretiendrait vraisemblablement aucun lien connu avec un groupuscule quelconque ou une bande organisée. Un portrait-robot du présumé agresseur a pu être établit par les fonctionnaires de police en se basant sur les descriptions concomitantes des témoins. Espérons que le rire survivra à ses blessures et pourra bientôt témoigner de sa mésaventure. Le fait que les secours soient intervenus rapidement augmente ses chances de survie, mais pour le moment, les médecins ne se prononcent pas. Ce serait vraiment triste qu’un rire meurt, à une époque, où le rire devrait être déclaré d’utilité publique.
    Halima BELGHITI, pour PIPO-PRESS

  3. Sabine dit :

    Un rire a encore été étranglé dans un coupe-gorge, la victime hoquetait encore quand je suis arrivée. La police, les secours, les badauds, tout le monde s’affairait autour du rire. Discrètement, je me suis faufilée, j’ai pris délicatement le rire agonisant au creux de ma main, l’ai mis bien au chaud au fond de ma poche, et ensemble nous sommes rentrés à la maison. Installé confortablement au bord de mes lèvres, à force de soins et d’amour, il entama sa guérison.
    Les premières semaines il s’exprimait au travers d’un timide sourire sur mes lèvres. Au fil de son rétablissement, il devint plus hardi, et je me surprenais parfois à rire doucement. Trois mois après, je ne cessais de me regarder dans le miroir : mon visage avait changé. Il était devenu vivant, gai. Rieur, en somme. Le rire, qui avait migré au fond de ma gorge, était rétabli ; moi j’avais retrouvé le goût de la vie.
    Mais un dimanche matin, pour la première fois, il me parla : je suis entièrement guéri, désormais. Je te remercie, je vais poursuivre mon chemin.
    Il partit. Comme ça. Sans préavis. Ne me laissant que des larmes au bord des lèvres.
    Depuis, quand je croise des rires, je les prends dans le creux de ma main, mais je serre le poing très fort. Je les épingle au mur, comme des papillons, pour ne plus qu’ils s’envolent. Et je les laisse mourir.
    Sauf les rires ironiques. Je les place sur mes lèvres.

    ©Margine

  4. Françoise - Gare du nord dit :

    Un rire a encore été étranglé dans un coupe gorge, la victime hoquetait encore quand les secours sont arrivés sur place. La victime, un rire jaune originaire de Chine, n’a pu que révéler, avant d’expirer, que son assassin était une femme à « l’émotivité débordante» (sic) qui lui avait déclaré, qu’elle avait :

    – étouffé un rire trop bruyant
    – achevé un rire sardonique
    – remis à sa place – cinq pieds sous terre – un rire déplacé et égrillard
    – piqué un rire contagieux
    – éclaté un fou rire échappé d’un asile
    – tordu le coup d’un rire moqueur et méprisant

    Malgré tous ces renseignements, les enquêteurs demeurent dans l’expectative et les avis, parmi les riverains de la rue de la Gaité, sont partagés : cette meurtrière agit-elle dans un souci de salubrité publique ou contribue-t-elle au contraire à amplifier la morosité ambiante ?

    Flash de dernière minute : « Nous venons d‘apprendre qu’une jeune femme aurait été interpellée dans le cadre des assassinats en série commis rue de la Gaité à Paris. Il s’agirait de Susceptibilité, fille adoptive d’Amour Propre et de Sensibilité mais, selon une source proche des enquêteurs, enfant naturelle de Manque d‘Humour et de Vanité. »

  5. lservano dit :

    Un rire a encore été étranglé dans un coupe gorge, la victime hoquetait encore quand des rigolos tentèrent de lui venir en aide.
    Par sa bouche grande ouverte ils aperçurent le fond de son slip, il y avait un message en petits caractères sur le coton : Entrée réservée aux artistes…
    Ils lui signèrent un autographe et déguerpirent en se poilant comme des velus

  6. smoreau dit :

    Un rire a encore été étranglé dans un coupe gorge.
    La victime hoquetait encore quand un rouge-gorge survola la rue sans issue sombre, rouge sombre.
    Quelques minutes plus tôt, il avait entendu rire à gorge déployée. Ce son l’avait attiré. C’était un fou rire. Pas du tout un rire d’arrière-gorge. Ou plutôt le rire d’un fou ! Pourquoi rire quand on est dans une impasse ? Le drôle d’oiseau voyant ce rire mourir, s’agenouilla pour recueillir ses dernières notes. Hi hi hi hi… s’amenuisant petit à petit. Le souffle s’épuisait le hi hi hi aussi. C’était triste à mourir. Coupons le cou à nos idées toutes faites, pleurer de rire, non, ce n’est pas risible. Dans ce larynx, ce passage aussi étroit que la ruelle, un rire perdait pied, étranglé par une mauvaise plaisanterie, par une vilaine moquerie. Il s’était déclenché automatiquement en écoutant la raillerie puis avait viré au jaune. Le rire jaune n’avait pu reprendre son souffle. il s’était étranglé !
    Le rire est mort !

  7. ourcqs dit :

    Un rire a encore été étranglé dans un coupe gorge,la victime hoquetait encore quand..
    il vira au jaune. Il avait rencontré plus sarcastique que lui ! Quand il avait aperçu des gorges déployées, des larmes, son ego explosa, avant de réaliser sa méprise. Imbu de sa petite personne, il ne pouvait tolérer que l’on ose s’esclaffer à ses dépens, à s’en décrocher les mâchoires . Depuis toujours, gloussant dans sa barbe, pouffant sous cape, il se permettait d’ironiser en coin, méprisant le monde entier. Facile de déclencher des éclats au nez de quelques naïfs. Avait-il étudié pour bien connaître les processus déclencheurs ?Le cours sur la mesure avait sans doute été goûté du bout des lèvres . L’humour, étranger pour lui, avait tenté de lui suggérer l’auto dérision, mais sans succès, beaucoup trop subtil … trop tard .

  8. Antonio dit :

    Un rire a encore été étranglé dans un coupe gorge, la victime hoquetait encore quand un couple de mots qui passait par là a tenté de venir à son aide.

    « Au secours ! »

    Seulement l’assassin était encore sur les lieux de son crime nous font écho les témoins qui ont pu s’échapper in extrémis sans malheureusement pouvoir sauver la victime.

    « Il n’était pas très grand, mais assez lourd, vous voyez, plutôt noir avec de grosses ficelles aux mains et une drôle de pince. On ne l’a pas vu venir, il sortait du Merle-Moqueur je crois, il nous a sauté dessus, nous prenant à la gorge à notre tour, on s’est débattu comme on a pu, je lui ai mis mon point d’exclamation à la figure et nous avons détalé jusqu’à la première bouche de métro comme je vous ai dit. Nous n’avons pas eu le temps de voir son visage, juste ses grandes mains noires, sans le moindre gant. C’est clair qu’il n’était ni belge ni anglais ! »

    L’humour rôde toujours, il est activement recherché par la brigade de la comédie française. Il s’agit d’un sérial-blagueur des plus mortels qui en est à son quarante troisième coup de théâtre et qui n’en finit pas de provoquer les forces de l’ordre et de l’austérité en répandant son sens dans toute la ville, sans jamais montré son vrai visage.

    Tous les rires sont priés de ne pas faire d’éclat, et encore moins se pisser dessus ou imiter les baleines. Merci de rester bien cachés derrière vos mâchoires et de ne sortir sous aucun prétexte, même au bout des lèvres.

    S’il vous plaît, l’heure est grave !

  9. durand dit :

    La Franc Comtoise!

    Un rire a encore été étranglé dans un coupe gorge, la victime hoquetait encore quand la peau lisse est arrivée.

    C’était une jeune fille, une bouille de coeur sur un corps de lait. Elle se pencha sur le rire, ôta la cordelette: » Respire… Monsieur…. respire…la vie n’est pas encore tout à fait loin! »

    Le rire gargouillait, il n’exprimait rien de limpide. Ca gloussait comme au poulailler. Elle tenta un bec à bec comme elle avait vu les pigeons faire et les actrices, dans les films à mâcher.

    Mais le rire ne bougeait pas. Il laissait couler son ketchup. Ca baignait les pavés et elle avait tâché sa robe: » Ah vraiment…la vie, t’es pas drôle! »

    Elle lui aurait bien collé une baffe, enfin, pas une vraie à ce con de rire. Mais il était vraiment trop vieux. Les plis sur son front recouvraient presque tout son regard. Ca risquait de casser sous le choc émotionnel. Les baffes, c’est dur à doser, comme les mots.

    Pourtant, elle aurait aimer le dérider.

    Elle lui chanta une berceuse dans le creux de l’oreille. Les paroles dégringolèrent par delà la conque: » Pis non…dit elle, s’il s’endort…c’est foutu! »

    Elle tenta de se rappeler une histoire drôle, un truc à vous secouer les côtelettes, à vous extasier les maxillaires.

    Mais non, elle n’avait de mémoire que pour les listes de courses et les fables de Robinet.

    C’était la veille de Noël. Elle sortit de son panier un saucisson, bien emmailloté.

    « Allez petit Jésus…toi qui a eu la chance de naître au milieu d’autres mammifères, toi qui était de paille avec des rois pour recevoir des cadeaux, dès ta naissance… fais quelque chose pour ce pauvre rire…s’il te plaît…! »

    Alors elle vit le saucisson se lever. Là où elle avait hésité à secouer la poitrine du rire, de peur de lui briser l’élan vital, le petit Jésus n’eut pas de scrupules.

    Il se débarrassa de sa liquette de ficelles, s’approcha du rire, s’esclaffa.
    Par charité chrétienne, il multiplia les pains jusqu’à ce que le croûton arrête de se la fendre et se la casse.

    Les pavés flottaient sur un coulis d’éternité.

    La mort déambulait avec son grand bâton.

    Elle ricannait.

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