Exercice inédit d’écriture créative 231

plante-des-piedsElle était née avec,
imprimée sous la plante des pieds,
une date de péremption.

Jusqu’à sa puberté cela ne la dérangea pas. 

24 réponses

  1. A Beautreillis dit :

    Désolé, mais je suis incapable de voir quel est le rapport avec le sujet proposé.

    • MARBOT dit :

      Bonsoir,

      Je vous livre ce que m’inspire les propositions
      C’est un exercice pour moi de transformation

      Je ne sais écrire que de la poésie
      Et son essence est de rester insaisissable
      Tout en restant sensible
      Aux imaginations

      Le propre de l’art n’est-il pas de se laisser guider
      Par l’esprit des règles
      Puis de s’en affranchir ?

      Si ça vous dérange, vous me le dites 😉
      Merci de votre message

      Bien cordialement

      Thibault

      • Perrat Pascal dit :

        Bonjour Thibault
        Cela ne me dérange pas du tout.
        Très cordialement. Pascal

      • ourcqs dit :

        Détourner règles et contraintes, se laisser porter, emporter, par un mot, une image, une association, consonance, dissonance, être au bord du monde,
        le rêve ……
        Amicalement et bravo ,

  2. MARBOT dit :

    Aux premiers frimas
    Du printemps,
    Vint éclore la fleur
    S’ouvrant,
    A l’impermanence

    De racines profondes
    Explorant la terre,
    Jusqu’au stigmate
    S’étirant vers le ciel,
    Offerte à la nature
    Elle accueillit
    Un pollen

    Sentant
    Grossir le fruit
    Elle délivra
    De sa chair
    Les graines
    Conscientes
    De l’être
    Se fanant

  3. Regis dit :

    A la maternelle puis à l’école primaire, Mado avait bien remarqué que les maitresses ou les professeurs d’éducation physique la regardaient bizarrement si par hasard, leur regard s’égarait sur ses pieds nus.
    Elle devait apprendre que la Directrice s’était inquiétée auprès d’un médecin scolaire. Celui-ci avait hoché la tête et avait fini par lâcher :
    — Ce n’est rien ! j’en ai déjà vu des bizarres en matière de tatouage. Et puis, au moins, à cet endroit, c’est discret.
    Et de fait, c’était tout rose, presque effacée. A la naissance, les médecins avaient cru à une petite tâche sans importance.
    Le problème était que ça grandissait en même temps qu’elle et soudain, le jour auquel pensent toutes les filles, l’inscription avait viré au rouge vif.
    En larmes, elle s’était précipitée dans les bras de sa mère en lui disant qu’elle voulait aller chez le docteur. Celle-ci avait souri, l’avait pris dans ses bras et lui avait murmuré :
    — Bienvenue au club, ma chérie ! Tu verras, ce n’est pas grave du tout.
    Tout de même, quand elle partait à la plage, elle se tartinait plus le pied que le reste du corps. Et puis, elle n’y pensa plus…
    Enfin, il y avait eu ce jour où Arnaud, ce petit blondinet qui ressemblait à un chanteur à la mode commença à lui lancer des regards énamourés.
    Elle sentit alors son cœur battre avec force, sa transpiration augmenter. Tout s‘accéléra ensuite avec ses mains qui se frôlent et ce baiser, un soir de Mai où elle se sentît fondre.
    Le soir, l’inscription était d’un rouge vif qui virait au carmin. Tout semblait lui rappeler l’imminence de la date fatidique..
    Affolée, elle se rendit chez le médecin de famille :
    — Docteur, est ce que je vais mourir ?
    Le vieux médecin se mît à rire
    — Mais non voyons, ma petite Mado, ce n’est rien d’autre qu’une drôle de faute de fabrication, une petite farce pour ta naissance.
    Mado s’enferma dans le travail, mais elle ne parvenait pas à oublier et restait parfois un long moment les yeux fixées sur le calendrier où une date était cerclée de rouge.
    N’empêche les garçons lui faisaient toujours battre le cœur.
    Un jour de juin, c’était juste après l’épreuve du bac de français, elle se mit à pleurer de toutes les larmes de sa vie. C’était aujourd’hui.
    Elle pensait ne plus pouvoir s’arrêter jusqu’à ce qu’une voix lui parvînt :
    — Qu’est ce qu’il ya Mado, ça n’a pas marché ?
    C’était Gustave, un garçon de sa classe qui traînait une réputation de »gentil », passeport pas toujours agréable ou nécessaire aux yeux des jeunes filles…
    Alors, sans même savoir pourquoi, elle se jeta dans ses bras et se remît à sangloter sans retenue. Elle déversa toute son inquiétude et de peur. Le garçon lui tapotait l’épaule et lui caressait le cou en lui murmurent de jolis mots d’apaisement et d’amitié. Puis, de fut bien plus que la tendresse..
    Cela avait commencé comme ainsi. Il se mît à l’embrasser d’abord avec maladresse, puis avec une fougue à laquelle elle répondît avec une vigueur qui la surprenait sans la lasser.
    Elle ne parvînt pas à savoir qui avait entraîné l’autre dans un lit. Sans doute les deux et cela arriva dans un mélange de gaucherie, de plaisir, de rires et de douceur partagée.
    Soudain alors qu’ils se serraient dans leurs bras pour se reposer un peu, Gustave se mît à rire.
    — Dis-moi, ma puce c’est quoi ce drôle de tatouage, on dirait qu’il clignote !
    Ebahi, les deux tourtereaux fixèrent le pied de Mado dans le miroir. L’inscription s’était mise à clignoter de plus en plus vite, puis tout à coup elle s’éteignit.
    — Alors, ça c’est fort ! Ton tatouage a totalement disparu.
    Gustave était complètement ahuri.
    Quand à Mado, un sourire lui vînt aux lèvres.
    Elle finit par tout raconter à un Gustave qui, nourri aux romans fantastiques de tout poil goba le tout.
    Au bout d’un moment, regardant à nouveau le miroir, il ânonna :
    — Non, regardes, ce n’est pas possible !
    Sur les pieds droits des deux amoureux venait d’apparaître un petit cœur rouge percée d’une flèche.
    On raconte qu’ils se marièrent, furent heureux et que le seul étonnement de leurs amis était l’obsession qu’ils avaient pour les pieds des nourrissons

  4. Nadine de Bernardy dit :

    Elle était née, comme toutes les filles de la famille Leclerc avec,imprimée sous la plante d’un pied,une date de péremption.
    Jusqu’à sa puberté cela ne la dérangea pas car ce signe d’appartenance à la dynastie paternelle la rendait plutôt fière ainsi que ses parents Charles Edouard et Monique née Fauchon.
    Mais quand elle atteignit l’âge de 12 ans,en même temps que le signe indubitable de son accession au statut de jeune femme elle vit ,sur son autre pied ,un petit dessin noir qui lui fit froid dans le dos.
    Alice Leclerc l’examina avec soin en se contorsionnant un peu, mais oui, pas de doute, c’était un code-barre! Après des générations protégées, la malédiction absolue était tombée sur elle.Avait-elle fait quelque chose de mal ?

    Non ,elle le savait bien,juste une grande injustice,un destin qui frappait aveuglément .

    Maintenant elle allait devoir passer à la caisse et régler les comptes.

  5. Antonio dit :

    Elle était née avec, imprimée sous la plante des pieds, une date de péremption.
    Jusqu’à sa puberté cela ne la dérangea pas.

    Mais dès que Manon commença à prendre son pied, là elle comprit qu’il n’y avait pas de temps à perdre. C’est Tiphaine qui l’alerta la première, en sortie scolaire à Londres. Elles avaient la même date !

    – C’est normal, on a le même âge !
    – Rien à voir !

    Tiphaine, c’était une sacrée nana. Elle s’y connaissait en prise de pied alors que Manon n’en était encore qu’aux prises de tête avec ses parents.

    – Ca dépend de ta libido.

    – Ma quoi ?

    – Ton potentiel de désir, tu vois… Tout le monde ne nait pas avec le même potentiel. Ma mère par exemple, elle est née au rayon fraîcheur, à ses vingt-deux ans déjà elle n’était plus bonne. A deux mois près, je n’aurais jamais pu venir au monde.

    – Han !

    – Ouais, je sais, ça craint. Mais avec mon père ça a été un amour nature, de qualité, genre bio tu vois ? … un coup de foudre, un truc de ouf qui n’arrive qu’une fois dans une vie. D’ailleurs ils n’ont du le faire qu’une fois vraiment dans leur vie. Pour me mettre au monde. Ta Taiiin ! … Et voilà le résultat. Pas mal, hein ! … Le reste du temps, ma mère a du simuler quand mon père ne se rendait même pas compte qu’il bouffait du périmé. Par contre ma tante Josette, elle !

    – Quoi ?

    – Elle a une libido qui peut l’emmener jusqu’à ses quatre-vingt-dix ans au moins. Une espèce rare. Genre cougar mais canon, tu vois. Tu la verrais, elle est super bien conservée. Quand elle l’ouvre, crois-moi tout le monde ferme sa boite. C’est elle qui m’a tout appris. C’est ma marraine. Une vraie ménagère de son corps !

    – Hein ? Une ménagère ?

    – Oui. C’est sa façon imagée de parler. Elle sait le dépoussiérer de fond en comble ! Elle m’a montré. Deux fois par mois dans un grand orgasme de printemps, qu’elle dit. La meilleure manière de garder sa libido intacte.

    – Ca promet. J’ai jamais aimé faire le ménage.

    – T’inquiète que celui-là, c’est un pur plaisir. Plus tu t’appliqueras et plus ton corps retrouvera son amour propre, qu’elle dit Josette. Et on n’a pas de temps à perdre avec des mecs qui n’y connaissent rien, autant leur dire où passer le chiffon.

    – Elle parle comme ça, ta tante ? … On n’est pas des meubles. Moi ça me fait froid dans le dos. Je ne sais pas si je suis prête. Et l’amour avec un grand A ? J’y crois moi.

    – Mais moi aussi. Mais en attendant tu ne vas pas rester frigide tout de même !

    – Frigide ?

    – Bah, mettre ta libido au congèl’ comme mon autre tante, Agathe. Pas un mec ne l’a approchée pendant vingt ans tellement elle était froide, gelée même. Puis un jour elle s’est décidée à le laisser décongeler sur Meetic.

    – Et alors ?

    – Que de la flotte, pas de goût… Rien. L’amour micro-onde qui se consomme en moins d’une minute, qu’elle dit Josette. Tout l’inverse de ma mère, t’imagines.

    Vraiment Manon, il n’y a pas de temps à perdre, on va le prendre notre pied et comme il faut !

  6. Elle était née avec imprimée sous la plante des pieds, une date de péremption
    Jusqu’à la puberté cela ne la dérangea pas.
    Maintenant les pieds lui faisaient mal, et elle savait que c’était le signe que la prophétie allait bientôt se réaliser. Elle les regarda avec tendresse, les caressa.
    Elle avait peur, elle craignait de ne pas supporter le changement.
    Et pourtant,c’était inévitable, elle était née porteuse de cette mission comme toutes les femmes de cette lignée .
    On lui avait dit que ce serait rapide, étrange puis magique.
    Elle faisait partie de ses êtres, destinés à transmettre des messages précieux au monde entier.
    La métamorphose commençait, elle sentait les pieds rétrécir , elle voyait le mouvement.Ce n’était pas douloureux juste déstabilisant.
    depuis 2 ans elle habitait près d’une crique , elle avait la mer dans la peau, elle y passait tout son temps, alors il fallait juste accepter qu’elle ne marcherait plus jamais, plus jamais…..
    Elle sentait les larmes monter, ne plus courir sur la plage, ne plus faire les magasins, ne plus sentir la terre sous…. ses pieds.
    Elle allait devenir une créature de la mer, moitié femme, moitié poisson , une jolie sirène.
    Elle lorsque les toutes jeunes filles se baigneront, elle verra leurs pieds et alors elle inscrira aussi la date de péremption et un jour après la puberté elles viendront la rejoindre, la prophétie était ainsi.

  7. waryam dit :

    – « Chérie, nous partons ! »
    – « D’accord Maman. »
    – « Tu es sûre de ne pas vouloir venir ? »
    – « Maman, je dois terminer mon exposé. »
    – « Tu n’ouvres à personne alors ! »
    – « Promis Papa. »
    Il y avait du vrai dans son mensonge. Elle allait effectivement consacrer son samedi à un exposé, mais qui n’avait aucun rapport avec son lycée. Elle voulait en finir avec ce secret qu’elle traînait depuis qu’elle savait que deux et deux font quatre. Elle était née avec, imprimée sous la plante des pieds, une date de péremption.
    Jusqu’à sa puberté cela ne la dérangeait pas. Certes, elle était obligée de garder les chaussettes en plein été, de cacher ses pieds dans d’horribles sandales en caoutchouc à la piscine ou à la plage, mais elle n’était pas encore harcelée par ces douloureuses questions qu’elle n’arrêtait plus de se poser depuis quelques temps.
    Que signifiaient ces chiffres sur la plante des pieds ? S’il s’agissait d’une date de péremption comme le lui avait expliqué sa mère, cela voulait dire que ses pieds allaient sentir mauvais, puis ils deviendraient incapables de la conduire là où elle désirait !
    Et si cette date concernait un autre organe comme le cœur, les poumons, le foie, le cerveau ? Ce serait la mort assurée.
    Sans plus tarder, elle s’était emparée de son ordinateur pour mettre au clair tous ces points. Elle avait écrit les mots clef « péremption » et « pied » et en un clin d’œil, était apparue devant ses yeux, une liste de blogs aux noms bizarres. Elle avait cliqué sur l’un d’eux et tomba sur une discussion qui traitait d’un problème similaire au sien. Un des pseudos avait même posté une photo de son pied.
    Ironiquement, elle s’était dite : « Il faut vraiment avoir beaucoup d’imagination pour voir en ces tâches à la disposition abracadabrante, des chiffres, et encore moins une date ! »
    C’est alors, qu’en jetant un coup d’œil nouveau à la plante de ses pied, elle avait compris que toute son enfance avait été chamboulée par l’imagination florissante de sa maman.

  8. Sylvie dit :

    Elle était née avec, imprimée sous la plante des pieds, une date de péremption. Jusqu’à sa puberté cela ne la dérangea pas. Elle coulait des jours paisibles, allongée près de ses sœurs, dans une atmosphère humide et tempérée, à l’abri du bruit et de la lumière.

    Un jour, le maître des lieux troubla leur quiétude. La fratrie née en 1978 approchait de sa maturité, pensa-t-il. Il s’empara de l’une d’elles, au grand désespoir des autres sœurs qui séjournaient, toutes minutieusement alignées, dans le sous-sol voûté du château. La petite revint, vidée de son sang, à l’état de cadavre, et fut jetée dans une grande caisse en bois. Quelques années plus tard, ce fut le tour d’une autre sœur, et d’une autre, etc., etc. Elles se retrouvèrent toutes quelques jours plus tard dans la caisse, vidées de leur sang jusqu’à la dernière goutte.

    La dernière de la rangée, celle qui avait une date imprimée sous ses pieds, un petit morceau de papier collé par le maître le jour où il leur avait donné naissance et portant la date du 17 avril 2008, vit toutes ses sœurs partir. Peu à peu, elle devina que son heure allait sonner. Elle sentait monter en elle les parfums des profondeurs de ses origines, sa sève arrivait à maturité, elle était dans un état d’épanouissement total et entamait un vieillissement bienfaiteur. Une fine couverture de poussière avait recouvert ses courbes extérieures. Elle était parfaite pour le grand jour.

    Un matin, le maître la prit délicatement entre ses mains et lui réserva un soin digne d’une grande dame. Le soir, elle fit son entrée sur un plateau d’argent. Dans le plus pur cérémonial, il libéra sa gorge et goûta le contenu tant attendu. Les deux convives s’émerveillèrent d’abord de ses parfums, puis de ses jambes, du velours de la robe, de sa tenue, de ses rondeurs, de sa force. L’étoile de la Côte de Nuits, mariée à un gibier aux airelles, sema une pluie d’étincelles sur les noces de perle. Une fois vidée de son nectar, la divine bouteille ne connut pas le triste sort de ses sœurs. Elle eut une place d’honneur dans la vitrine des souvenirs et s’y trouve encore.

    ©Sylvie Wojcik

    • Miel dit :

      Récit adroitement mené, pétri d’une imagination débordante et déroutante puisque que d’une atmosphère glauque, carnage présumé et conduit par un barbe-bleu sanguinaire dans les caves d’ un château, on « débouche » sur l’anniversaire de mariage de deux œnophiles au palais délicat ! bravo !

      • Sylvie dit :

        Merci pour ce commentaire tout aussi adroitement mené ! Votre imagination a dépassé la mienne. Rien de Barbe Bleue ni de glauque dans mes intentions 🙂 Je voulais juste personnifier la bouteille (cadavre, vidée de son sang, fratrie du même millésime, etc.).

  9. ourcqs dit :

    Elle était née avec imprimée sous la plante des pieds une date de péremption. Jusqu’à sa puberté cela ne la dérangea pas.
     
    Enfant, elle était assez fière d’avoir un repère, on ne pourra pas la perdre, rassurante inscription.Génial secret bien gardé !! Mais tout changea quand elle se sentit reléguée au même rang qu’une conserve quelconque. Elle se révolta contre cette société envahie par les chiffres, les codes barres, si seulement c’était un poème, quelques mots bien choisis, même une énigme à résoudre, elle pourrait les arborer et en jouer dans ses approches séductrices. Mais que pouvait signifier cette date limite ?? une étape, une mue, un changement radical ?? Elle plongea dans ces délires existentiels, jusqu’au jour où elle découvrit en regardant son tatouage dans un miroir le signe de l’infini …
    ouf !! elle allait vivre sans appréhension

  10. Clémence dit :

    Elle était née avec, imprimée sous la plante des pieds, une date de péremption.
    Jusqu’à sa puberté cela ne la dérangea pas. 

    Le temps était venu.
    Après avoir mûrement réfléchi, je me sentais enfin prête et me décidai à franchir le cap.

    Quelques jours plus tard, je rentrai chez moi avec une petite boule dont je prenais un soin infini. Je l’appelai Irena. Je trouvais ce prénom très impérial, cela nous convenait à toutes les deux !
    Lorsque je la changeai pour la première fois, j’aperçus sous la plante de ses pieds, un minuscule code barre et une date qui semblait être une date de péremption. Pas de quoi s’alarmer ! De nos jours, des puces électroniques sont insérées un peu partout. Cela ne me dérangeait pas car cela pouvait parfois s’avérer bien utile. Bon nombre de chiens avaient ainsi retrouvé leur maître ! Alors, pourquoi pas une traçabilité pour tout être vivant?

    Trêve de digression.
    Je consacrai à Irena les plus belles places de la maison: de la lumière, mais pas de trop, de la chaleur, mais pas de trop. Je n’aimais pas la laisser seule. Ainsi, au gré de mes occupations, elle était près moi à la cuisine, au salon, dans ma chambre.
    Je veillais à la nourrir selon ses besoins spécifiques et je respectais scrupuleusement ses rythmes biologiques. Je ressentais un plaisir indescriptible à la voir s’épanouir de jour en jour.

    Elle a vécu une petite enfance sans aucun problème, ni pour elle, ni pour moi. Je me demandais comment et pourquoi d’autres éprouvaient tant de difficultés au point de se plaindre en quasi permanence !
    Elle a vécu une enfance modèle : pas d’excès, pas de colères, pas de caprices. Cette sagesse incarnée me rendait particulièrement fière !

    Puberté , J – 3
    Je regardais Irena et il me sembla qu’elle changeait. Son teint était toujours aussi lisse et pourtant, je lui trouvais un air un peu boudeur. Je pensai immédiatement à la date de péremption. En effet, celle-ci approchait à grands pas.

    Puberté, J – 2
    Certains détails confirmaient qu’Irena changeait. Quelques petites rondeurs gonflaient près de son cœur, un léger duvet blondissait sur ses membres et …
    – Irena, ma douce, mon enfant, serait-ce possible qu’avec ta puberté, tu perdes ta douceur pacifique ? Serait-ce possible que tu deviennes pareille aux autres ?

    Puberté, J – 1
    Nous nous observâmes toutes les deux en un silence pesant. Je me décidai à lui faire part – enfin- de ses titres nobiliaires : à savoir, sa particule : un petit « Do ». Ses yeux avides semblaient me crier : « Do » … pas « De » ?

    Puberté, Jour J
    Un trait rouge écarlate déchira la fine membrane…

    Irena perdit son « R » et s’appellerait désormais DIONAEA.
    Irena était prête à vivre son destin de plante carnivore.

  11. Christine Macé dit :

    – Une DLU dites-vous ?…
    – Oui monsieur l’agent, parfaitement : « ma » DLU !
    – Vous pouvez préciser…
    – Je l’avais depuis ma naissance, inscrite là, sous le pied : elle a disparu…
    La fille délaça une de ses baskets et ôta sa chaussette, posant le pied sur le bureau du fonctionnaire pour qu’il constate par lui-même.
    – Vous voyez bien qu’elle n’y est plus …!
    Il voyait surtout un joli petit pied. Mais là n’était pas la question. Il tenta de se rappeler : DLU, DLU… sa femme lui en avait parlé… mais à quel propos ?
    – … On me l’a volée, j’en suis sûre !
    Ah oui… c’était au supermarché, devant les yaourts. DLU : Date limite d’utilisation. Un truc qui la mettait en transe, sa femme, une véritable obsession. Elle répétait à tout bout de champ « Vérifie la DLU !… Attention : si tu la dépasses, ça peut être fatal ! ».
    – Qui aurait eu intérêt à faire une chose pareille, mademoiselle ?…
    Il fallait à tout prix la dissuader de porter plainte. « Vol de DLU » : le divisionnaire risquait de ne pas apprécier la plaisanterie !
    – Vous avez bien cherché ? Peut-être s’est-elle accrochée à une de vos socquettes, elle sera tombée au fond de la machine à laver. C’est fou ce qu’on peut y retrouver parfois : des clés, une pince à cheveux… Pourquoi pas une DLU ?…
    – Impossible, je les lave à la main mes socquettes !
    C’était bien sa veine ! Après tout, elle n’avait qu’à s’en racheter, une DLU : puisqu’on en trouvait partout maintenant, ça ne devait pas être bien compliqué.
    – Elle me venait de mes parents, j’y tenais beaucoup ! Je l’avais toujours sur moi. Maintenant, impossible de savoir quand… quand…
    – Quand… ?
    – Quand je devrai faire mon bagage, dégager, laisser la place quoi ! Si ça se trouve, ça ne s’arrêtera jamais. Je continuerai à vivre, longtemps, jusqu’à cent ans, et plus, qui sait ?! Je me suis pourtant entraînée à tirer ma révérence, rendre l’âme, succomber, trépasser. J’étais fin prête pour une sortie en beauté, raccord sur la date : et voilà qu’on me l’a raflée ! Dites, monsieur l’agent, vous allez m’aider, hein ?!
    Il soupira, promit et tapa le pv.
    Bizarre tout de même que sa femme n’ait jamais évoqué ce genre de DLU : il n’y avait donc pas que les yaourts…

    Bon dimanche, Christine

  12. Henriette Delascazes dit :

    Elle était née avec, imprimée sous la plante des pieds,
    une date de péremption.
    Jusqu’à sa puberté cela ne la dérangea pas.
    Le 1er mai 2003, Églantine Lafleur mit au monde sa troisième fille, qu’elle prénomma Muguette… ! (dans la famille on ne portait que des noms de fleurs !) Cet évènement n’aurait rien d’extraordinaire si le docteur Lajoie n’avait eu la surprise de découvrir imprimé sous le pied du bébé un code-barre avec ce qui lui semblait être une date de péremption !
    Muguette était si minuscule et son pied si petit que l’on ne pouvait faire aucune lecture sur l’inscription gravée au-dessus du code.
    Sur le moment les parents ravis d’avoir un si joli bébé n’y firent aucune attention, le docteur Lajoie non plus d’ailleurs. Ils pensèrent à une tache de naissance un peu curieuse tout de même, mais on en voit souvent des plus bizarres. Au moins, celle-là était discrète.
    Mais tout de même il y avait eu les prédictions d’une vieille tante de la famille de Narcisse Lafleur qui avait dit « Ce signe-là est une catastrophe, protégez cette enfant des plans d’eau, elle pourrait se noyer »
    Margueritte Lafleur, la grand-mère, avait dit, « mais non, c’est un signe de bonheur ! »
    Hortense Noyer, l’autre grand-mère affirma qu’il valait mieux attendre que son pied ait suffisamment grandi et que l’on puisse lire la date pour faire des prédictions.
    Muguette grandit gentiment dans la joie et la bonne humeur auprès de ses sœurs Capucine et Iris.
    Ce n’est que vers l’âge de 12 ans après une incroyable poussée de croissance, que Muguette réalisa sa particularité en se tortillant pour examiner avec attention la tache sous son pied droit. Elle fit même un selfie de sa plante de pied.
    Il n’y avait plus à discuter on lisait bien au-dessus du code barre :
    1er mai 2021
    Mais il y avait aussi les mots « grand changement à effectuer »
    Elle aurait 18 ans ce jour-là ! Qu’allait-il lui arriver ?
    Oui bien sûr, elle serait majeure, et ce serait la liberté, mais non, car je pense que je devrais réviser mon bac, ce sera la galère comme pour Capucine !
    Marguerite sa grand-mère préférée, toujours très fleur bleue, malgré son âge lui prédit :
    « Le jour des résultats du bac tu rencontreras l’amour, celui avec un grand A, voilà la prédiction ! »
    Mais Hortense Noyer, l’autre grand-mère, plus pragmatique, balaya ce romantisme qui l’agaçait et lui dit :
    « Finis de rêver ma fille, la vie n’est pas faite de romance, mais de travail, tu en as pour 8 ans à réfléchir, alors passe les plutôt à étudier et peut-être dans tes livres tu trouveras la réponse à tes recherches. Moi je pense que tu dois te destiner aux mathématiques et au commerce, d’ailleurs ce n’est pas pour rien qu’un code-barre est inscrit sous ton pied ! »
    Ses parents pensaient que le destin de leur fille se trouvait justement là, elle allait révolutionner le négoce international en inventant un nouveau système de transcription sur les transactions commerciales. Il fallait qu’ils réfléchissent dès maintenant au choix de la meilleure école pour leur fille, et surtout veiller au succès de ses études !
    Pour l’instant, Muguette était satisfaite, enfin elle allait pouvoir apprendre à nager, car la prédiction de la vieille tante ayant angoissé ses parents, elle avait toujours été interdite de piscine, bains de mer, rivière et tout ce qui se rapportait à l’eau…, ils avaient même remplacé leur baignoire par une douche !
    Il nous faudra donc attendre le 1er mai 2021 pour connaître enfin, la suite des aventures de Muguette Lafleur.
    Bon week-end
    Henriette

  13. Elle était née avec,
    imprimée sous la plante des pieds,
    une date de péremption.
    Jusqu’à sa puberté cela ne la dérangea pas.
    Mais un jour, prise de démangeaisons
    elle se pencha sur cette drôle d’impression.
    Et lut avec effroi: « A consommer de préférence avant le début du printemps »
    Immédiatement après elle se pencha sur l’autre pied:
    « Témoin d’usure TWI inférieur à 1,6 mm: changez vos pneumatiques immédiatement »
    La peur la gagna ou plutôt la perdit car elle se mit à explorer tout son corps.
    Elle découvrit sous son genou gauche, un code barre.
    un tampon de traçabilité ornait sa cuisse droite
    Et l’étiquette énergie collée sous son nombril lui indiqua qu’elle consommait trop.
    Elle en perdit brutalement l’usage de la parole.
    Elle continua en tremblant son exploration. Son contrôle biotechnique était bon à refaire
    Sa fesse gauche avait déposé le bilan, et la droite, changé de propriétaire.
    Ses pouces n’étaient pas recyclables, et ses coudes non biodégradables.
    Les jambes nouées et la gorge en coton, ses dents battaient la chamade et son coeur claquait.
    Ne sachant plus où donner de la tête elle décréta finalement une liquidation totale avant fermeture définitive. L’été approchait, et avec lui le début des soldes, on lui accordait sans doute une bonne remise.
    Remise en forme cela va de soi.

  14. Beautreillis dit :

    Vu l’annonce jointe à l’envoi de cet exercice. Ce travail de relecture, est-ce bénévole ou pas ?

  15. Fanny dit :

    Elle était née, avec imprimée sous la plante des pieds, une date de péremption. Jusqu’à sa puberté cela ne la dérangea pas.

    Puis, un peu curieuse malgré tout, elle fit des recherches sur « Doctissimo ».

    Elle apprit qu’elle était consommable, de préférence, pendant environ quarante ans. Comme une biscotte, elle perdrait juste son craquant.

    Un petit paragraphe attira son attention : le créateur ne se risquait pas à imprimer une date sous les pieds des garçons !

    Réconfortée par ses découvertes, elle se dit :

    -Quarante ans c’est si loin ! Est-ce que Maman danse encore le Boogie Woogie avant de faire ses prières du soir ?

    Bonne fin de semaine à tous. Fanny
    (Pardon messieurs !)

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