Exercice inédit d’écriture créative 292
Une vaguelette rêvait d’être une déferlante.
Quand je serai grande, disait-elle, je noierai qui je voudrai !
Alors, à chaque marée, elle s’entraînait à devenir plus forte. Mais la pauvre était née sur une page surveillée…
Inventez la suite pendant vos bonnes vacances
Une vaguelette rêvait d’être une déferlante.
Quand je serai grande, disait-elle, je noierai qui je voudrai !
Alors, à chaque marée, elle s’entraînait à devenir plus forte. Mais la pauvre était née sur une page surveillée…
Mais lorsque que l’on est rebelle rien ne peut vous arrêter.
La vaguelette continuait de s’entrainer, nonobstant la surveillance continuelle de la page.
Son obsession, comme n’importe quel futur champion, se donner à fond pour gagner. Gagner pour elle était surpasser la plus haute déferlante qui ait existé avec une écume démonique.
Elle pensait dans son ingénuité que noyer qui elle voudrait serait une sorte d’accomplissement de son destin.
Plus que quelques allers et retours et elle sera fin prête.
C’est aujourd’hui ! La précision de son but est sans appel.
Elle prend son élan du fond de l’océan, se gonfle, gonfle et vient se jeter sur une plage en plein été bondée de monde dont le dessinateur vient d’en terminer le croquis. Elle emmène tout sur son passage, la page est redevenue blanche.
Mission accomplie !
LE CONTE DE LA VAGUELETTE
Une vaguelette rêvait d’être une déferlante. Quand je serai grande, disait-elle, je noierai qui je voudrai ! Alors, à chaque marée, elle s’entraînait à devenir plus forte. Mais la pauvre était née sur une page surveillée.
Il y avait en effet, planté là dans le sable comme un mirador en haut duquel, bronzé, lunette noire sur le nez, cheveux au vent, T-shirt blanc, un veilleur de vague, garde-côte et maître-nageur en un seul et même personnage réuni, veillait.
Rien n’échappait à son œil marin. Ni les jours de temps calme, les sempiternelles vagues anodines, ni les jours de vent d’Ouest à force 4 et plus, les rouleaux qui grondaient.
Il connaissait par cœur les horaires des marées et leurs coefficients, dans l’ordre et dans le désordre, qu’elles montent ou qu’elles descendent, à l’étale ou à la renverse.
Un jour, notre veilleur fut pris d’un vague à l’âme. Sans cesse une phrase l’obsédait : « La mer toujours recommencée ». Et force lui fut de constater qu’à contempler la mer, il s’ennuyait !
C’est une vaguelette qui le sorti de ce mélancolique état. Au milieu de l’incessant balais de naissantes et timides petites vagues, à chaque marée, l’une d’entre elles revenait s’essayant à grossir.
Et elle recommençait encore et toujours, si bien qu’à la fin, elle écumait de rage.
Moquée par les vagues, chahutée par les rouleaux, secouée par le clapot, balancée par la houle … elle persévérait.
Le veilleur intrigué descendit de son poste et s’avança vers elle
• Pourquoi vaguelette, veux-tu devenir plus grosse ?
• Je veux devenir déferlante !
• Et pourquoi cela ?
• Pour noyer qui je veux ! Répondit l’hargneuse.
Le veilleur inquiet d’une si néfaste pensée compris qu’il fallait, pour chasser cette idée, la faire disparaître. Il imagina de l’immobiliser un instant …
• Vois-tu, dit-il à la vaguelette qui maintenant plus calme, l’écoutait, j’ai connu un petit parallèle qui comme toi se voulait plus grand, plus fort. Il venait d’obtenir son diplôme de « troisième gémissant » et voulait passer le grade de « quatrième ronronnant » avec comme ambition de devenir « quarantième rugissant » et comme rêve « cinquantième hurlant » !
• Et alors ? Demanda la vaguelette
• Alors ? un jour il croisa une jolie méridienne, il cessa de vouloir grossir et depuis ils dorment heureux sous les tropiques.
• Mais moi, je veux grossir et grossir encore pour noyer qui je veux ! tonna la vaguelette maintenant immobile …
• Mais plutôt que de noyer le premier venu, ne pourrais-tu porter les surfeurs sur ton dos, former un tunnel où ils s’engouffreraient ! Songe au plaisir que tu peux donner plutôt qu’au mal que tu peux faire !
• Non !!! je veux gr…
Mais elle ne put finir sa phrase : le sable l’avait bue.
C’est ainsi que l’ennui quitta le veilleur qui désormais regarda chaque vague et vaguelette comme seule et unique et jamais recommencée.
PEHENNE
Une vaguelette rêvait d’être une déferlante.
Quand je serai grande, disait-elle, je noierai qui je voudrai!
Alors, à chaque marée, elle s’entraînait à devenir plus forte. Mais la pauvre était née sur une page surveillée…
Elle se lamentait donc.
– « Je suis née vague lettre. Puis, très vite, j’ai manqué d’espace et d’air pour devenir vaguelette. Tout ça par la faute de mon auteur, qui, de ses écrits vains, pollue la page qui m’a vue naître. Lettre, j’aurais pu servir un dessein plus grand que moi. La lettre est au récit ce que la vaguelette est à l’océan. J’aimerais rejoindre la mer, quitter cette page et être libre. Hélas, cet écrivain surveille ses lignes et ne laisse rien passer! Si jamais je m’agite, me creuse puis m’enfle et roule à l’assaut de la page, il me prend dans ses filets, brise net mon élan, il efface tout et la page reste triste et déserte.
Pourtant, quand je suis sage et ne tente rien, ses textes sont sans relief, d’une platitude désespérante. C’est de nos luttes que surgissent mille chimères, qu’il pourrait chevaucher et dompter s’il en avait le cœur. Il n’ose s’abandonner, se laisser porter au gré du courant, partir à l’aventure sur des flots bouillonnants, découvrir des îles vierges, des criques inexplorées aux pages invitantes. Quel dommage!
Un jour, je serai grande et puissante. J’emporterai tout sur mon passage. Rien ne me résistera. Pas même lui! Je sens en moi frayer toute sorte d’émotions: la colère, le désir, la peine, la joie, l’amour… Elles me troublent et me nourrissent en même temps.
Pour l’heure, je traîne mon vague à l’âme de page en page.
C’est marée basse. Je l’aperçois qui s’essaye encore et s’avance vers moi. Il patauge et s’enlise. De le voir là, si pathétique, affairé consciencieusement à traquer les coquilles, je sens la houle qui me prend. Le vent m’est favorable et la marée montante. Voilà ma chance! Il ne se doute de rien, ne me sent pas venir et croître à sa rencontre. Je laisse la force de ma fureur m’envahir, me prendre et me porter. Je suis immense, invincible! Me voici! Regarde-moi en face et contemple ton destin! L’écume aux lèvres, j’exulte! Il sait qu’il ne peut plus rien contre moi. Le souffle court, le regard trouble, il agite sa main en ondes saccadées, frénétiquement, de long des lignes tirées sur la page. Je l’envahis. Enfin! J’ai triomphé de lui! Je l’ai eu, avalé, englouti! Il n’est plus! »
– « Que dis-tu? Tu m’as eue? Tu t’égares, ma belle! Je t’ai enfin conquise! Tu m’as donné ta force et moi, je te donne vie. Nous sommes un à présent et j’entends bien surfer avec toi partout où, ensemble, nous déciderons d’aller! Je te la donne ta liberté! Elle est gage de la mienne et me rend si heureux! »
-« Heureux, dites-vous? Vous êtes donc capable d’émoi? »
Quelques gouttes d’eau salée tombent sur la page.
– « En douterais-tu? »
Bravo pour l’idée du vague lettre à vaguelette et ce qui en découle !!
Une vaguelette rêvait d’être une déferlante.
– Quand je serai grande, disait-elle, je noierai qui je voudrai !
Alors, à chaque marée, elle s’entraînait à devenir plus forte. Mais la pauvre était née sur une page surveillée…
C’était toujours comme ça.
Il s’asseyait à table, prenait son cahier, ses crayons et faisait ses calculs. Puis, il ouvrait délicatement le tiroir et en sortait un cahier à la couverture noire vernissée.
Avec soin et application, il dessinait la mer, les bateaux et les mouettes.
Il aimait écouter le bruit des vagues dans un coquillage. Un soir, il entendit une vaguelette murmurer :
– Quand je serai grande….
Il fut tellement surpris qu’il laissa tomber le coquillage et celui-ci se brisa.
Le lendemain, il s’assit à sa table, fit ses calculs. Il ouvrit le tiroir et prit son cahier noir. De sa plus belle écriture, il narra sa mésaventure puis, il dessina la mer, les bateaux et les mouettes. Il leur inventa une histoire de coquillage et de vaguelette qui rêvait d’être grande…Il referma son cahier. Un souffle de voix en sortit…
– Quand je serai grande, je noierai qui je voudrai !
Il fut tellement surpris qu’il laissa tomber son cahier et une mouette s’envola…
Les jours et les semaines s’écoulèrent…
Il faisait ses calculs puis s’emparait de son cahier noir. Il se plaisait à deviner l’aventure du jour. Des embruns salés lui éclaboussaient le visage, une corne hurlait dans la brume, un dauphin accompagnait son bateau, un scaphandrier lui prêtait son attirail de plongée. Au moment de refermer son cahier, la vaguelette criait avec désespoir…
– Quand je serai grande….
Les années s’écoulèrent, le rituel ne changea pas. Les calculs les plus complexes étaient son plat consistance ; le dessin et les aventures son dessert.
Vint enfin le jour où il entra dans la vraie vie.
En fin de journée, il s’asseyait à sa table, prenait ses instruments, sa carte et faisait ses calculs. Il prenait ensuite son cahier noir vernissé qui, un jour, irait rejoindre tous ceux qu’il avait remplis depuis son enfance…
Quelle que fut la météo, il aimait ensuite sortir de sa cabine et se noyer dans les immensités des cieux et de l’océan.
Ce soir, il fut à peine surpris d’entendre la voix, certes, un peu plus mature…
– Je suis devenue grande et je peux noyer qui je veux…
– Je sais que tu as ce pouvoir, mais prends garde, ta gloire pourrait être maudite…
Le silence se fit. Il rentra dans sa cabine et sortit son cahier noir vernissé et relata l’événement.
Les jours et les semaines s’enchaînèrent. L’océan se démonta. Les vagues hurlaient et mordaient les flancs. Un chant lancinant déchirait les airs :
– De mes deux sœurs, je suis la plus grande, je peux broyer qui je veux….
En l’an de grâce 1828, à bord de l’Astrolabe, entre Nouvelle Zélande et Nouvelle Guinée, Jules Dumont d’Urville rencontra la Vague devenue Scélérate.
Deux années plus tard, à plus de six mille milles, Hokusa titrait son estampe : La vague de Kanagawa.
© Clémence
La belle vaguelette
rêvait
d’être une déferlante
Elle disait :
lorsque je serai grande
je noierai
tous ceux que je voudrai.
Alors, à chaque marée
elle s’entrainait
à devenir plus forte
Mais la pauvre petite
était née
sur une page surveillée.
Maître Jia Dao Cheng
Expert en calligraphie
veillait
Il avait su la maitriser
L’être et l’âme du Maître
s’incarnaient
au coeur des signes.
Depuis sa main jusqu’au pinceau
Le souffle de son trait
s’animait
d’une inlassable fougue
Depuis l’encre jusqu’à la ligne
La valse de son corps
mettait
la vague en mouvement.
Depuis la terre jusqu’au ciel
.
[Chaque matin,
Plonger en soi
Repartir de la feuille blanche
Pour répartir sur la feuille blanche
L’encre en trait d’union
jaillit
en vague déferlante
et sur le papier va se noyer]
Chapeau ! Comme dirait notre Maître
La vague, ondulation marine scandinave, rejoint l’errance latine. Vaguelette ou déferlante, elle n’existe, vaguement parlant, que le temps de sa formation. A peine est-elle constituée qu’elle s’écroule, si elle ne naît de Kanagawa qui la maintient levée sur nos imaginaires.
Une vaguelette rêvait d’être une déferlante. Quand je serai grande, disait-elle, je noierai qui je voudrai ! Alors, à chaque marée, elle s’entraînait à devenir plus forte. Mais la pauvre était née sur une page surveillée. On la destinait à s’illustrer sur des pages d’eaux calmes, peut-être troubles mais jamais bien frénétiques ou fougueuses. Elle voulait déformer l’eau de manière pyramidale ou titanesque, avec la complicité d’un vent fougueux, impétueux. D’autres desseins lui étaient réservés, prédestination bien plus majestueuse que sa mièvre jeunesse ne comprenait pas. Elle aurait voulu fondre et pénétrer les terres dans un puissant tsunami, emporter tout dans un raz de marée bouillonnant sous une pleine lune flamboyante. Elle voulait se cambrer, se propager, se disperser, devenir houle, vague scélérate. Elle voulait étreindre dans ses flots quelques malheureux à qui elle offrirait un nimbe d’écume mousseuse et phosphorescente avant de les rendre, de les rejeter. Elle rêvait de s’illustrer sur les pages d’un livre de guerre marine, de marins à la bataille, de terribles pirates, tout cela bien évidemment sur des eaux endiablées, dans un soulèvement d’eaux torrentueuses, dans une insurrection d’eaux déchaînées. On la laissait grandir, on la laissait mûrir, s’épanouir, jusqu’au moment où ses rêvasseries rebelles disparaîtraient à mesure qu’elle viendrait à maturité. On prévoyait pour elle un bel avenir, de belles pages où l’on l’aimerait. On l’appellerait « la mar », on la dispenserait de grandes faveurs, on lui prêterait la compagnie du pêcheur Santiago, on la respecterait, on la célèbrerait à travers les pages d’un enfant de Chicago parti pour la Havane, d’un pêcheur solitaire, d’un vieil homme et la mer.
Une vaguelette rêvait d’être une déferlante.
Quand je serai grande, disait-elle, je noierai qui je voudrai !
Alors, à chaque marée, elle s’entraînait à devenir plus forte. Mais la pauvre était née sur une page surveillée…
Il y avait en permanence, sous les drapeaux, un rédacteur en chef bronzé et musclé. Un surveillant des fautes qui vérifiait si on avait bien mis deux L à pelle, « eau » à seau et un seul R à parasol. Pendant 2 h au moment des marées, un relecteur pointu sur le règlement des jeux de balle se pointait sur la dune. Un agent spécialisé en syntaxe sableuse avait été embauché pour la période estival.
Moi, petite vaguelette, avec 2 T, qui rêvait d’être plus forte pour pouvoir noyer par plaisir, je me fis reprendre par le dit maitre de la syntaxe. Il me dit : « une vaguelette, c’est forcément petit »
J’ai été vexée, je verdis. Moi, qui voulait devenir une déferlante. Je déferlais vers la honte, avec un H.
Impossible de noyer le poisson ! Je suis petite et j’ai beau me rouler dans le sable, dans la houle, je suis vaguelette.
Je me suis aperçu après coup que j’avais utilisé le mot « plage ». Alors j’ai recommencé avec le bon mot « page ».
Une vaguelette rêvait d’être une déferlante. Quand je serai grande, disait-elle, je noierai qui je voudrai ! Alors, à chaque marée, elle s’entraînait à devenir plus forte. Mais la pauvre était née sur une page surveillée… Petite, intelligente, elle se dit avec discrétion, qu’elle testerait l’autorité de son surveillant. Ainsi, je pourrai devenir vague et lire dans ses pensées, se dit-elle. Mais sitôt vague, sitôt effacée.
– Que se passe-t-il ? S’il me gomme si vite, je ne vais pas pouvoir grandir. Elle n’eut pas à lire dans ses pensées, puisque son mentor parlait dans sa barbe.
– Qu’est-ce que cet imprécis, ce flou ? maugréa-t-il.
– Zut ! Je me suis trompé de « vague », j’ai mis l’adjectif au lieu du nom. Il m’a déjà oublié à la dernière marée, si en plus je me trompe de mot, je ne suis pas près de me faire surfer. Bon ! Je recommence ! Pas celui-là, c’est pour un terrain vague, ah ! Voilà ! « Vague ». Mais si je me mets là, il va falloir la mer. Réfléchis ! Si je téléphone à Trenet, il pourra peut-être me dépanner !
– Allo ! Mon petit Charles, faudrait que tu fasses un ti n’effort.
– Oui ! Tout ce que tu voudras mon poussin.
– Ch’ui pas un poussin d’abord ! Ch’ui une tite vague mais je voudrai devenir grande.
– Et ?
– Ben ! Est-ce que tu pourrais venir avec ta mer ?
– Facile ! Regarde dans le deuxième tiroir, il y a deux versions. Ne demande pas à ton conseiller, il préfère celle en live.
– C’est pas un conseiller, c’est un destinateur de BD.
– Dessinateur ! On dit un dessinateur !
– Alors, tu viens pas ?
– Ben ! Non ! J’ai beaucoup de travail en ce moment. Mais tu programmes le CD cinq fois, pas plus, et tu verras, ton artiste va te faire une histoire.
– Mais j’veux pas être dans une histoire, j’veux être en vrai.
– T’inquiète, si tu sais bien inspirer ton poète, il te dirigera là où tu veux.
– Ah ! C’est ça la transmission de pensée ?
– C’est un début.
– Et il pourra m’emmener au tsunami ?
– Bien sûr ! Si à chaque bulle, tu sais lui rappelé, à la fin de sa BD, il décidera d’en faire un dessin animé.
– Ah ! J’aime bien les dessins animés !
– A Noël, tu lui achètes un casque 3D, et tu verras, il te mettra dedans et tu seras tsunami.
– Oh ! Merci Charles ! Bisous !
Une vaguelette rêvait d’être une déferlante. Quand je serai grande, disait-elle, je noierai qui je voudrai ! Alors, à chaque marée, elle s’entraînait à devenir plus forte. Mais la pauvre était née sur une page surveillée et ne savalt pas trop bien à quoi correspondait son statut. Elle avait entendu parler de page vierge, de page blanche mais de page surveillée jamais.Eh bien elle décida de devenir une page blanche. Mine de rien, elle se détacha et atterrit sur une plage déserte, se laissa sécher longuement et miracle fut une page blanche. Il ne fallait pas pas qu’elle soit timorée, il fallait qu’elle vogue vers son destin. Elle s’envola, le ciel était avec elle, il ne plut pas ; elle redescendit sur terre à Paris chez BHL ce qui ne l’intimida nullement .En effet,elle avait des notions de littérature car elle se souvenait avoir accompagné des voiliers d’ écrivains, et non des moindres, tels Pierre Loti, bernard Giraudeau, etc.. Elle les avait entendu déclamer des vers.
BHL la ramassa et la plia en quatre dans sa poche et c’est notre page blanche se retrouva au salon du livre où celui-ci dédicaçait son dernier livre »l’esprit du judaïsme ». Il la posa sur la table, un journaleux la noircit et la laissa malencontreusement s’envoler et elle ammerit dans la Seine et se noya.
Chacun sa route, chacun son destin….
Une vaguelette rêvait d’être une déferlante.
Quand je serai grande, disait-elle, je noierai qui je voudrai ! Alors, à chaque marée, elle s’entraînait à devenir plus forte. Mais la pauvre était née sur une page surveillée…
Elle s’entraînait, s’épuisait et dans les bons jours, réussissait à grand peine à lécher les châteaux de sable des enfants , elle effleurait légèrement les sculptures des adultes, elle moutonnait sans aucune originalité !! On se moquait de ses ambitions, pourquoi pense-t-elle noyer, éliminer qui que ce soit ???
Elle était déçue, aigrie, elle avait toujours pensé se faire remarquer par Hokusai ou l’un de ses élèves et se pavaner élégamment, puissamment,
majestueusement , sur pages blanches et cartons à dessin, avec des couleurs fabuleuses aux couchers de soleil ou aux levers de lune . Elle se voyait sur les affiches des musées ou autres galeries, admirée par tous….
Elle a fini en clapotis , dans l’indifférence générale .. sans avoir anéanti qui que ce soit , même pas le moindre petit crabe !!!
Une vaguelette rêvait d’être une déferlante. Quand je serai grande, disait-elle, je noierai qui je voudrais ! Alors, à chaque marée, elle s’entraînait à devenir plus forte. Mais la pauvre était née sur une plage surveillée… Dès le début, il fallait contourner les complications.
Alors, pour accomplir son destin, elle s’adressa à la Lune, sa mère patrie. Et la Lune lui répondit :
« Il te faudra être patiente, si tu veux ressembler à tes grandes soeurs que tu vois là-bas changer de couleur au gré des alizés, maîtres des vents. Elles t’apprendront que chaque vent a sa couleur de vague ! Tu devras observer comment elles fascinent et transportent les poètes. Tu devras apprendre à faire comme elles lorsqu’elles éclatent en de multiples embruns sonores pour noyer le chagrin des âmes seules tendues vers l’horizon. Tu devras apprendre à lécher les pieds des chevaux lorsqu’ils viennent se soigner au paysage d’un peintre. Tu devras apprendre l’humilité lorsque tu ruisselleras sur la plage à la fin d’une marée et veiller, épuisée à ne pas t’évaporer. Tu devras courtiser le baigneur imprudent pour qu’il ne s’égare. Tu devras… »
Constatant qu’il y avait beaucoup de choses à accomplir, la petite vague se mit à bouder et de dépit se laissa emporter par le ressac. Un vent soudain la projeta sur la jetée. La Lune n’étant plus là, elle s’adressa à Eole, son père spirituel.
« Tu n’as pas respecté les consignes de la Lune ! », lui dit celui-ci. Tu as manqué d’humilité, tu devras retourner à l’état de gouttelette, et tu as de la chance car je pourrais te faire disparaître. Pour te punir d’avoir eu trop d’ambition, je te transforme en larme jusqu’à la prochaine Lune.
Une vaguelette rêvait d’être une déferlante.Quand je serai grande, disait-elle,je noierai qui je voudrais.Alors à chaque marée,elle s’entraînait à devenir plus forte mais la pauvre était née sur une plage surveillée.
Sa mère, vague sensée,d’abord amusée par ses rodomontades, commença à s’agacer quand le discours persista :
» Ma fille,te rends-tu compte de ce que tu dis? Tu te prends pour une vague scélérate? Un tsunami en jupon? Tu n’as donc jamais entendu parler ni vu les dégâts causés par nos cousines des mers du sud,par nos soeurs des tempêtes?
Je te préviens,tu ne noiera rien du tout,ton père le Ressac et moi, ne t’avons pas élevée dans cet esprit prétentieux, hors la loi.
Certes, de temps en temps; le noroît t’octroît une force légèrement supérieure à celle qui est la tienne,mais il ne faut pas en profiter pour rêver de raz de marée ,d’écume fanfaronne et destructrice.
Pour commencer, tu vas m’écrire sur le sable quelques empreintes en te retirant puis,quand tu sera calmée,nous ferons marée basse toutes les deux et tu observeras tous ces gens venus profiter de toi,de ta langueur,ton clapotis rassurant.
Lèche leur donc les orteils,éclabousse les genoux de ce téméraire mais par Poséidon,n’en noie aucun.Qui voudrais-tu choisir? Ce petit garçon maigrichon son seau à la main ,ce chien qui gambade en aboyant de bonheur,la grosse dame en maillot noir qui a mis son beau bonnet de bain pour la circonstance?
Fi ma vaguelinette,reste tranquille et ne trouble pas la paix de la plage qui t’a vu naître. »
La vaguelette un peu vexée par les remontrances maternelles,entendit cependant la valeur de leurs arguments.Par bravade elle renversa une famille qui courait vers elle en se tenant la main,les entendit crier de joie à se voir sans dessus-dessous,mouillés avant de l’avoir décidé.
Son orgueil satisfait elle se retira en miroitant,pour reprendre son élan,calme et tranquille,sous le regard énamouré de sa mère.
Une vaguelette rêvait d’être une déferlante.
Quand je serai grande, disait-elle, je noierai qui je voudrai !
Alors, à chaque marée, elle s’entraînait à devenir plus forte. Mais la pauvre était née sur une page surveillée.
Aucun nageur ne restait assez longtemps pour qu’elle puisse le noyer. Ils venait et dès qu’ils la voyaient, ils se précipitaient vers la sécurité réconfortante de la plage.
Un jour, une petite fille de douze ans vint la voir et lui demenda:
— Madame la vague, pourquoi vouloir être si grande, une déferlante, quand on peut être autre chose. Quelque chose de plus grand et de mieux.
La vague la regarda avec intérêt. Être plus grande qu’une déferlante? Comment est-ce possible?
— Que propose-tu, toi petite ombre parmis les ombres? Que veux-tu dire? Il est impossible d’être plus grande que la grande déferlante.
— ce n’est pas la taille qui importe, madame la vague. Bleu comme l’océan est mon esprit, toujours plien de frénésie, et si l’imagination fuit, mon avenir est fini.
— Toujours plus grands sont mes remous, un jour nous serons nous, tous et toutes ce que vous, avez fais de nous. Ma chère imagination, sans toi je suis poisson, sans toi je suis poison, chère imagination, tu me fais rêver au bon.
— C’est cela ma chère vague. L’imagination nous fait devenir qui nous voulons, car par la force de nos pensés et de nos rêves, nous pourrions changer l’humanité.
— Ma chère petite, comment t’appelle-tu donc?
— Héloïse, madame la vague.
— Monte sur ton bateau de papier, mon Héloïse, et tu seras mon pilier, celui qui m’empêche de tomber, et de trébucher, dans les cordes qui ancètent nos pieds.
— Mais bien sûr madame la vague, appuillez vous sur moi tant que vous voudrez. Je suis venue vous montrer le plaisir de l’amitié, et le bonheur de rêver.
Héloïse montât donc sur son bateau de papier.
— Et si ton bateau de papier, devenait bateau de fer, ton voilier, serait fier.
— Et si, par la grande immagination, mon fier bateau de fer, devenait tout en couleur, cela réchaufferait nos cœurs.
La jeune Héloïse montât sur son bateau de fer fier tout en couleur, qui réchauffe les cœur.
Elle navigua sur sa chère madame vague pendant des années. Elles rêvaient ensemble et s’imaginaient un autre monde.
Un jour, alors qu’Héloïse avait quinze ans, elle tombât malade.
— Ma chère madame vague, je crois que je suis malade. Quand l’imagination fuit, et qui la vie se ternit, je crois que mon avenir est finit. Le fer du bateau est redevenu papier, et sa fierté s’est envolé. Les couleurs ont ternis, jusqu’à redevenir gris.
— Ma petite Héloïse, vois donc ce paysage, les montagnes et le rivage, et les vague qui le ravage. Vois donc l’arc-en-ciel, qui s’étant sur le ciel, et les milié de pixels qui tombe du ciel. Vois donc les licornes et autres animaux, les beaux chevaux, aux cheveux d’eau.
— Je ne vois rien de tout cela, madame la vague, et c’est cela qui me chagrine. Je vois la mer à l’infini et aucune trace de notre meilleure amie. L’imagination m’a abbandonné, vois comme mes rimes deviennent courte et sacadés. Je suis malade, madame vague,et je ne crois pas, que je survivrai à cela.
La vague la regarda avec tristesse.
— Il est temps de te ramener, sur la plage doré, et sois en rassuré, je continurai à rêver. Tu as été une superbe amie, mais maintenant tu faiblis, c’est à mon tour de te prouver, mon amitié.
Elles avaient navigués longtemps et la vaguelette n’ariverait pas à temps. Alors elle se transforma en déferlante et amenant Héloïse jusqu’à la côte, comprit que la jeune fille avait raison.
Rendue à destination, la déferlante était redevenu vaguelette. Elle déposa son amie sur la plage. Héloïse avait rempli sa mission. Et la vague avait compris.
L’amitié nous rends invincible.
Et sans amitié nous ne sommes rien.
L’imagination est une arme et une amie.
La plus précieuse de nos alliés.
À Sméralda, la meilleure des amies du monde.
Une vaguelette rêvait d’être une déferlante. Quand je serai grande, disait-elle, je noierai qui je voudrai!
Alors à chaque marée, elle s’entraînait à devenir plus forte. Mais la pauvre était née sur une plage surveillée.
A chaque fois qu’un brave nageur se risquait dans ses joyeux remous, un grand balèze jouait de sa trompe pour rameuter l’inconscient.
Elle avait clairement le sentiment de perdre son temps. Toutes ces heures à se charpenter la coque,à se muscler le clapotement, et au bout, rien, pas un petit macchabée. Même les volontaires, les cadhâvres de paix, ceux cherchant la tranquillité contre le flot des insultes de la vie étaient récupérés, séchés, exposés aux reproches.
Pourtant sa mère était une sacrée masseuse d’eau. Sur la côte basque, elle avait porté plus d’un surfer sur les crêtes de la victoire. Plus d’un sportif s’était frotté à elle. Avec ce grand tunnel décoiffant où il faisait si bon se friser la mort.
Mais ça, c’était avant….du temps où chacun avait une place sous le soleil de la consommation, du travail libéré, des vacances sous les étoiles de tentes.
Là, ça se consumait sérieusement. Les surfers se recyclaient en maîtres nageur, l’océan étouffait sous les bidons de plastique, les poissons cachaient leur mer d’huile dans des boîtes.
Elle trimballait partout son vague à lames, bavait son humidité penaude sur les pieds des touristes. Rien que des troupeaux de bouées sur l’horizon. S’aiguiser dans le vide ne rimait plus à rien.
On croit se projeter, mais la jetée vous bloque l’initiative. Pour elle, il n’y aurait pas de cap de la Vague, aucune folie productiviste ou marémotrice.
Sa vie resterait un filet d’eau caressant le trop poli des cailloux.
De désespoir, elle répondit positivement à une annonce dans le journal « La Garonne Libre »:
« Estuaire cherche mascaret docile pour jours de grandes marées »