569e exercice d’écriture créative créé par Pascal Perrat
Vivre côte à côte avec un séduisant sèche-linge, la machine à laver en rêvait depuis des cycles. Il vient d’arriver…
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– Mais que se passe-t-il dans cette baraque ? La semaine dernière, le réfrigérateur se révoltait. Il ne voulait plus faire du froid. Boudeur, il s’est mis à faire du chaud. Je ne sais pas, vous, mais moi je ne comprends pas.
– C’est peut-être à cause du réchauffement climatique !
– C’est fort possible ! Et hier, mon micro-ondes a explosé !
– A cause aussi des canicules ?
– Sûr que non ; je l’ai mis en route sans rien mettre à l’intérieur ! Dix minutes ! Il a pété un plomb !
– Etourdi, va ! Mais, je vois que vous êtes en train d’installer un sèche-linge flambant neuf !
– C’est à cause du lave-linge qui rêvait de vivre côte à côte avec un séduisant sèche-linge. Un fantasme exprimé depuis des cycles et des cycles !
– Amen !
– Que le Dieu des appareils à ménager soit avec vous !
– Et avec vos outils !
– Ainsi soient-ils !
– Je me permets de vous dire que votre lave-linge semble dater de Mathusalem.
– Ça, je ne sais pas ! Je ne le connais pas ce Salem.
– Pas grave ! Mais vous pensez qu’ils vont s’entendre ces deux-là ! Deux, voire, trois générations les séparent.
– Ils vont apprendre à vivre ensemble. Et si cela ne fonctionne pas, je vous offrirai le jeunot.
– C’est généreux de votre part. Mais pourquoi ne pas vous débarrasser du plus ancien.
– Depuis le temps qu’elle prend soin de mes affaires, j’y tiens à ma vieille.
Vivre côte à côte avec un séduisant sèche-linge, la machine à laver en rêvait depuis des cycles. Il vient d’arriver…La machine à laver toute intimidée osait à peine lever les yeux vers lui. Sa présence à ses côtés l’avait déjà toute émoustillée. Ses parois luisantes et neuves dégageaient une odeur de fraicheur et en même temps de musc envoutant. Et puis très vite leurs parfums se mêlèrent à l’unisson du linge propre et sec. Leurs hôtes ne faisaient jamais l’impasse sur les gouttes d’huile essentielle dans leur tambour. Ils s’accordèrent très vite et firent une très bonne équipe. Toute la famille était contente d’eux et ils n’étaient pas peu fiers de contribuer à faire tourner la maisonnée.
Ils aimaient les retours de vacances. Ils savaient qu’ils allaient marcher à l’unisson pendant plusieurs heures. La machine à laver ouvrait le bal, rejointe au cycle suivant par le sèche-linge qui prenait le relais. Le sèche-linge aimait bien les récits de la machine sur les lessives qu’il ne connaitrait pas. Elle lui parlait de la douceur de la laine et des tissus délicats. Le sèche-linge lui parlait de ses cycles longs avec les serviettes et contait avec douceur le moelleux qu’il s’appliquait à donner aux draps de bain que les enfants adoraient venir chercher dans son tambour.
Le seul point délicat qu’ils n’abordaient que rarement était le temps qu’il leur restait à partager. Les proprios avaient opté pour deux appareils de la même marque mais personne ne pouvait garantir de leur durée de vie. Avec les rumeurs d’obsolescence programmée, la machine avait parfois de véritables crises de panique dès qu’elle ressentait quelques signes de fatigue. Surtout quand il lui fallait essorer à 1300 tours par minute. Le sèche-linge la rassurait en lui racontant qu’avant d’être choisi en magasin il avait entendu parler d’un mouvement de fond qui réhabilitait les machines et sèche-linges en remplaçant les pièces défectueuses et qu’une véritable prise de conscience amenait de plus en plus de gens à garder leur appareil le plus longtemps possible.
Cela redonna du baume au cœur à la machine à laver. Les deux appareils formaient une très bonne équipe, un partenariat hors pair, tout en harmonie ! Et si vous tendez l’oreille, il est possible que vous les entendiez encore, s’appliquer à désincruster les bavoirs des enfants de la deuxième génération !
Vivre côte à côte avec un séduisant sèche-linge, la machine à laver en rêvait depuis des cycles. Il vient d’arriver, habillé d’une camisole en carton beige, et fermement encadré par deux mecs en bleu.
La machine soupirait. Quand elle les a vus, elle pensait que c’était un délinquant que les flics ramenaient chez elle pour remplacer l’ancien amant de Madame qui avait été embarqué l’autre jour à six heures du matin par d’autres mecs en bleu.
La police préférait sans doute voir ce type laver son linge sale en famille plutôt que d’encombrer des prisons surchargées.
« Encore du boulot pour moi, se désola la machine. Bizarre quand-même, l’amant de Madame a bien changé. Il est beaucoup plus petit et plus carré que l’autre, et il ne se débat pas. De plus, les deux mecs en bleu sont très polis : rien à voir avec les flics que j’avais vus l’autre jour.
Je ne suis qu’une modeste machine à laver très très myope avec un seul œil au milieu du front.
Et malgré un énorme verre correcteur qui occupe presque tout mon visage blanc comme un linge, je vois très mal. »
— Ton compagnon arrive, me dit Madame en passant la main sur mon joli dessus blanc qu’elle avait nettoyé ce matin même.
C’était donc mon futur compagnon engoncé dans une camisole en carton, pas très seyante il faut bien dire, mais ce n’est pas une raison pour que les deux types la lacèrent au cutter et l’arrachent violemment en poussant force jurons.
Après avoir été complètement déshabillé, le nouveau venu m’a regardé fixement à travers son grand hublot carré, et mon tambour s’est mis à battre comme un cœur.
— Mettez-le à-côté de la machine à laver, dit Madame.
— Il vaudrait mieux le poser dessus, dit un des mecs, ça sera plus pratique pour vous et ça dégagera de la place pour les balais
— D’accord !
La garce ! Elle m’a trahie.
Au lieu de sentir mon compagnon tout contre moi pour profiter de sa chaleur et lui de mes vibrations, je vais l’avoir sur le dos pendant tout le reste de mon existence.
J’ai essayé de l’éconduire sèchement en prétendant que j’essore ce soir, mais les mecs n’ont rien voulu savoir et nous ont solidement boulonnés ensemble.
Comme toute belle histoire, celle-ci se termine (pour moi) par un mariage et le délinquant dort en prison.
Quant à Madame, je l’ai entendue téléphoner à son ex, probablement pour sécher ses larmes, car l’homme qui avait mis Madame dans des sales draps ne reviendra plus.
Vivre côte à côte avec un séduisant sèche-linge, la machine à laver en rêvait depuis des cycles. Il vient d’arriver…
Oh quelle galère ! J’ai l’impression de n’avoir aucune utilité depuis que je suis ici.
Je sèche du linge toute la journée alors qu’à l’extérieur le soleil chauffe et qu’il fait au moins 45 degrés à l’ombre.
Pour quelle raison m’a-t-on amené ici ? Nom de Dieu.
Et puis cette mamie machine à laver qui ne cesse de me reluquer comme si j’étais un camion tout neuf.
Elle me harcèle et elle me dit des choses que je tairai ici. Parmi vous peut-être il y a des personnes prudes.
Oh la la je n’en peux plus de rester ici. Arrêtez-moi, sinon je vais faire un malheur !
Ouais avec le temps qu’il fait dans ce lieu désertique je ne comprends pas pour quelle raison je sèche du linge à longueur de journée.
C’est certainement pour me faire souffrir comme on fait souffrir tous ceux qui sont ici.
Je suis dans une prison dans laquelle il y a des criminels endurcis. Je n’indiquerai ni son nom ni où elle est, de peur des représailles possibles.
En journée les taulards travaillent ; on les occupe à casser de grosses pierres et à construire des routes qui sont très longues.
La chaleur étant torride, le soir ils sont exténués.
La direction de la prison a consenti un petit effort. Elle lave souvent leur tenue de travail et devinez quoi, c’est Bibi qui fait le reste.
Ouais je repose ma question. Pour quelle raison je sèche du linge alors que, vu la chaleur dehors, il serait plus simple de faire sécher les frusques à l’extérieur de la prison.
Mince je suis bête ! Je n’y avais jamais pensé ! Au lieu de me perturber l’esprit inutilement je pourrais poser cette question à un garde-chiourme. Eux forcément ils ont la réponse.
Alors comme si elle avait lu dans mes pensées, la machine à laver me lança :
– T’aurais pu me le demander beaucoup plus tôt.
Voilà c’est un scoop. Si moi je lave et toi tu sèches et qu’en plus nous vivons côte à côte, c’est que j’en ai décidé ainsi. Car vois-tu dans ce pénitencier, la patronne c’est moi. Ici je fais la pluie et le beau temps même s’il ne pleut presque jamais.
Ensuite, à mon âge – on a besoin d’une présence masculine constante. J’adore les mecs comme toi, sexys, beaux et musclés. D’où le fait qu’on-t-a fait venir ici. Tout cela est simple à comprendre !
Ah non fis-je, sous le coup d’une colère subite et noire. Ça va changer entre toi et moi. Sortant brusquement un piolet que j’ai toujours sur moi – s’il m’arrivait un pépin – j’en profitai pour transpercer le coeur à cette vilaine mamie machine à laver. Étant plus rapide que l’éclair – la pauvre, elle n’a pas eu le temps de faire son dernier signe de croix.
Vous savez quoi ! Depuis ce geste que je dirais involontaire de ma part, on m’a mis au cachot. Cela sans aucun procès. Paraît-il pour une durée qu’on n’a pas réussi à déterminer.
Ah ah elle est bonne cette blague !
Je vais montrer au directeur de ce foutoir qui je suis et comment je m’appelle !
J’ai une idée.
Et si je sautais à pied joint sur une mine, pour m’amputer une partie de moi-même.
Comme cela au lieu d’être un sèche-linge, je ne serai plus qu’un seiche, ou plutôt une seiche.
M’étant métamorphosé en seiche, je pourrais ainsi plus facilement m’échapper de cet endroit maudit.
Puis, une fois sorti de ma prison et comme seiche, je pourrai me jeter dans la mer, pour voyager et voir du pays.
Hi hi elle est pas belle la vie !
(Bon je le reconnais la fin de cette histoire – voire une grande partie – elle est un peu tirée par un sèche-cheveux).
569/Vivre côte à côte avec un séduisant sèche-linge, la machine à laver en rêvait depuis des cycles. Il vient d’arriver.
Il est tel qu’elle l’avait souhaité, certes un peu efféminé à son goût. Mais quand ses boutons croisent langoureusement les siens de manière guillerette, elle a l’impression qu’il en faudrait peu pour lui faire perdre la tête surtout quand elle marche (si je puis dire) à 1400 rpm.Il paraît qu’on est beaux à voir.
Madame l’a acheté parce qu’elle attend un heureux événement, un enfant si vous préférez. Entre les couchettes, les langes, les draps les vêtements on ne va pas chômer. Le plus moche, pour ne pas changer ce sera pour moi : l’odeur de pipi !
D’un autre côté elle ne m’appuiera plus dessus avec son gros ventre d’autant que j’ai l’impression qu’il grossit de jour en jour. Si je pouvais lui parler je lui dirai qu’elle se fasse faire une césarienne au plus tôt sans quoi çà va mal finir et son sèche-linge ne lui sera plus utile.
Soudain dans la nuit on entend un départ d’ambulance.
Est-ce à dire que l’on va bientôt entrer en fonction ?
Je me sens fébrile;le sèche-linge semble inflexible .
8 jours après environ Madame est revenue, un bébé dans les bras (un garçon semble-t-il) le sèche-linge est content, moi aussi que Madame ait retrouvé sa jolie silhouette.
Les années ont passé, le garçon a eu deux sœurs et nous avons tourné pratiquement tous les jours, sans jour férié mais nous avons été très heureux tant on s’est senti indispensables.
Cette assassinat de la mamie lave-linge était en perdition dans les spams. Je pense que vous avez certainement changer quelque chose dans vos coordonnées pour que la censure parviennent. J’ai évidemment publié votre texte qui le mérite bien. Cette histoire rocambolesque est un probable et captivant. Amicalement. Pascal
Bonjour Pascal,
Pour les modifications que j’ai pu faire, apparemment il me semble que ce n’est pas le cas : j’ai repris le même nom ainsi que la même adresse mail.
Merci pour la publication.
Vivre côte à côte avec un séduisant sèche-linge, la machine à laver en rêvait depuis des cycles. Il vient d’arriver. Tout de suite, l’ambiance devient électrique, à la maison. Et aussi sec, sur la machine à laver, le nouvel arrivant est monté. Roulement de tambour. Quelle émotion ! Pour célébrer son arrivée, elle réalise un cycle automatique gratuit, son programme est tout tracé. Grâce aux algorithmes, les machines sont maintenant dotées de sentiments. J’ai pu le constater lors d’une expo sur les robots. Une déesse à la plastique irréprochable. Elle me dit bonjour, je la snobe pour tester sa réaction mais s’est mise à pleurer. Des regards réprobateurs, je ne pus les assumer, me suis excusé auprès de la belle. Ca va pour cette fois-ci, qu’elle me dit, mais la prochaine fois, gare à vous ! J’eus froid dans le dos où elle passa la main. Je m’en souviendrais toujours.
Elle me fut prêté pour un contrat d’un an, au moment de conclure, de sa voix câline, elle me dit ; « je suis douée d’obsolescence programmée ! »
Ici, le salon de la bagnole où on élit celle de l’année. Les voitures vous parlent. Elles se rechargent au soleil, comme vous. Elles vous aguichent avec une belle poupée aux mensurations proportionnées. Attention ! si vous dépassez le 80, un radar à 2 km, elle vous fait baliser. A 120, le champignon devient vénéneux.
Les ascenseurs vous ouvrent leurs portes, vous montent la tête si vous ne dites pas bonjour. Ils vous donnent l’étage seulement si vous respectez la distanciation. Ne vous inquiétez pas, ils sont autonomes et se renvoient tout seuls.
Votre smartphone vous demande si vous êtes sûr de vouloir effacer. Pour en être vraiment sûr, il vous le demande deux fois, vous installe de nouveaux programmes sans votre avis, vous suggère de nouveaux amis même si vous en n’avez pas envie et vous en fait une liste à vous abîmer les yeux, c’est pas grave, les ophtalmos sont saturés.
Le chat est devenu technicien de surface, il s’amuse à passer l’aspirateur. Vous admirez le progrès. Minou, la classe ! Il voyage à l’oeil. Cela ne vous est pas facturé. Quelle chance !
Mais la tondeuse, elle tond, elle tond toute seule, ça tond sur tout ce qui bouge. Ca me hérisse le poil quand un hérisson passe à la casserole.
Tout à coup, l’étendoir orphelin s’est réveillé au grenier. Il est devenu triste parce qu’il n’a plus rien à faire. Il réfléchit sur son avenir. Il a encore plusieurs masques à sécher pour éviter de polluer la planète. Ouf ! il est encore utile à ça. Les nouvelles technologies ont le vent en poupe. Les éoliennes se vendent à prix d’or. Je me demande ce que mon ordinateur pense de tout ça.
Vivre côte à côte avec un séduisant sèche-linge, la machine à laver en rêvait depuis des cycles. Il vient d’arriver…
Elle en rêvait, la folle ! Elle ne se rendait compte de rien ! Toute à sa fierté de rendre service.
Elle paradait depuis des années dans la buanderie.
Il faut dire qu’on l’avait attendue, espérée, fêtée ! …
La première machine à laver de la famille Dusal.
Elle était énorme et peu pratique. Il fallait ouvrir et fermer le robinet, allumer le chauffage au moyen d’une allumette (toujours trop courte !) chronométrer le temps de lavage, de rinçage, d’essorage.
Arrêter le remplissage juste avant que ça ne déborde ; pour cela, il y avait une sorte de jauge qui montait et descendait selon la quantité d’eau brassée.
Et ne pas oublier de s’asseoir dessus au moment de l’essorage sinon elle traversait la pièce dans une cacophonie de soubresauts.
Bref, c’était une usine à elle toute seule !
Mais quelle usine ! Quel bonheur quand elle avait été livrée …. En ….1960, je crois !
Finis les bacs à laver, finie la panière de linge déposée chez la blanchisseuse, finis les tours à la teinturerie pour un malheureux rideau !
On pouvait tout laver à la maison !
Les années ont passé.
La Mère Denis s’en est allée.
Et un beau jour (enfin, si on peut dire !) un sèche linge a été livré.
Pimpant, le bougre ! Tout blanc ! Hublot chromé ! Jantes alliage (ah là ! non, je m’égare ! mais ça aurait pu ! ) des programmes à n’en plus finir, des départs différés, des minuteries …
La Rolls des sèche linge !
Où ça a coincé, c’est quand la famille Dusal a réalisé que la vieille machine n’essorait qu’à 900 tours/minutes !!!! ah la la ! ….
La décision n’a pas tardé ! allez ouste : on vire la vieille machine to-ta-le-ment in-com-pa-ti-ble avec les prouesses attendues !
Elle n’a pas biché longtemps croyez-moi !
Et hop, la déchetterie !
Tous les changements ne sont pas des progrès !
Ils sont tous les deux en émoi et depuis ce matin ils s’agitent dans la buanderie, poussent les vieux meubles, font place nette pour le nouvel arrivant et se sont même donnés la peine de me refaire une beauté.
Ils m’ont dépoussiérée, décapée de fond en comble et surtout remise à ma place, à tous les sens du terme.
La semaine dernière ils parlaient de me jeter dans une déchetterie, mais la petite dernière, écologiste jusqu’au bout des ongles les a convaincus de me donner une dernière chance.
« Allez, on va jouer les écolos responsables sinon Julie est bien capable d’entamer une grève de la faim pour mauvais traitement. Par contre, à partir d’aujourd’hui, on respecte les programmes imposés et interdiction de traverser la pièce dans un vacarme étourdissant à chaque tournée ! »
Si je pouvais parler et n’étais pas clouée par une crise de calcaire, je leur sauterais au cou.
L’objet est donc déballé, branché tout près de moi et mon coeur s’emballe. Un grand blanc à la peau lisse. C’est sûr, il a de l’allure !
Nous sommes désormais tous les deux dans la buanderie, côte à côte. Je n’ai pas le temps de dire ouf qu’on me gave de vêtements en tous genres, on me programme et c’est parti pour un cycle long, essorage 1000 tours minute. Je ne suis pas dans mon assiette aujourd’hui. Par expérience je sais bien que ce genre de programme me met dans tous mes états. Au début, dans la phase de mise en eau, je garde mon calme, et puis roulements de tambours, je commence à être prise de convulsions, je tremble, m’emballe et ne me contrôle plus. Je fais des sauts de cabri comme à l’accoutumée, sauf que cette fois ci, sur ma gauche quelqu’un pose la main sur moi et cherche à me calmer en amortissant chacun de mes spasmes. « Tout doux la belle, calme toi, tu vas y arriver… tu vas finir toute essorée et épuisée si tu te mets dans cet état. Allez, respire ».
Pendant une heure il m’a parlé, apaisé, empêché de m’emballer au delà du raisonnable et j’ai fini par me poser, laisser place au silence.
J’étais toute blottie contre lui… je n’osais plus bouger.
« A moi de jouer maintenant, changement de mains ».
On m’extrait le linge humide et chiffonné pour le lui confier.
« Reste là, ne bouge pas, c’est ma première mission, ta chaleur me rassure, je sens que dans cette famille on n’a pas trop le droit à l’erreur… »
L’un contre l’autre, on retient notre souffle. Penchée sur l’appareil, elle étudie le tableau de bord pour finalement choisir un séchage délicat d’une vingtaine de minutes.
Une fois le programme lancé, un léger sifflement se fait entendre, rassurant, maîtrisé. Nos deux corps se réchauffent et je me surprends à humer son parfum cajolant… Un vrai moment de bonheur et de douceur. Quelle présence réconfortante !
Une nouvelle complicité était née, évidente, intuitive, enveloppante et karmique.
Elle contemplait la nouvelle allure de sa salle de bains. Bien sûr il y avait moins de place pour se mouvoir, mais sèche-linge et lave-linge côte à côte, cela faisait un joli plan de travail. Elle pourrait poser dessus une corbeille pour le linge propre de chacun. Une bonne occasion de réorganiser cet espace et le fonctionnement du linge de la maison. La semaine précédente, en étendant le linge pour la troisième fois, Marilyne avait fait quelques calculs. Un mari, trois garçons, plus elle… 5x2x7 = 70 par semaine, soit près de 300 chaussettes par mois, 150 slips, autant de tee-shirts, les pantalons, les draps, les housses de couette, qu’il fallait repasser car ils sortaient tout froissés, les serviettes de bain, les torchons, etc. Combien d’heures pour sortir, trier, accrocher, décrocher, ranger, sans compter le reste du linge ? « Ras le bol, je change ma vieille machine et j’achète en plus un sèche-linge, chacun rangera son linge propre ! ». Une heure sur internet, quelques comparaisons, et la commande était partie. Elle venait d’être livrée. C’était vendredi soir, elle sortit une lessive, en enfourna une autre, dans la foulée mit en route le sèche-linge. Ils vibraient ensemble ces deux-là, séduisants, bien assortis dans leur blanc immaculé. On aurait dit qu’ils se faisaient la conversation, rigolaient de hublot à hublot Ils avaient un air complice qui lui plaisait bien. Elle, elle allait pouvoir faire autre chose, aller finir cette nouvelle qui attendait depuis des lustres, se plonger dans le dernier roman qu’elle venait d’acheter…
La porte grinça, Charles rentrait de sa partie de tennis. Elle le rejoignit.
– Tu as bien joué ?
– Pas trop mal ! Qu’est-ce que c’est que ce ronronnement ?
– Le nouveau sèche-linge.
– Un sèche-linge ? dans notre région ? Pas très écolo avec un jardin aussi ensoleillé !
– Écoute, si au lieu d’aller faire tes matchs, tu es prêt à prendre ma place et à accrocher, décrocher, trier chaque année plus de 3000 chaussettes, 1800 slips, autant de tee-shirts, 500 jeans, sans compter le reste …
– Bon, bon, je capitule ma chérie, tu as eu raison!
Elle en rêvait depuis des cycles..Et voilà qu’un beau matin, on installa à côté d’elle un séduisant sèche-linge. Il fallait voir la tête de ses copines, alignées le long du mur ! Elle était la dernière de la rangée, et un emplacement était resté libre à sa droite.Elle avait d’abord souhaité la présence d’une amie avec qui partager bons et mauvais moments, et puis, comme l’unique sèche-linge de la laverie, un mastodonte planté au milieu du mur d’en face, commençait à se faire vieux, elle avait espéré un nouveau venu, flambant neuf, plein de charme et d’esprit. Et son rêve était en train de se réaliser ! Une carrure d’athlète moulée dans un costume gris acier, des petites touches discrètes, des voyants qui clignotaient joliment. Pour le charme, il en avait à revendre ; pour l’esprit, elle ne savait pas encore. Il n’était pas très loquace le nouveau venu ; même quand il fonctionnait, il était plutôt silencieux. Au début, elle le crut timide et tenta quelques avances polies, mais le sèche-linge resta impassible. Elle profita des essorages les plus rapides pour se dandiner et le frôler, comme par inadvertance. Aucune réaction !
Finalement, très agacée, elle extirpa son tuyau de vidange et inonda le sol tout autour d’eux. Le sèche-linge ne s’en émut guère ; par contre, le gérant de la laverie qui dut déplacer les machines et éponger le sol, n’apprécia pas son initiative et la menaça d’un licenciement immédiat si pareil incident se reproduisait. Du coup, elle se tint à carreau et se renfrogna dans son coin, ignorant ostensiblement son voisin.
Quelques jours passèrent, et puis un beau matin, un chat pénétra dans la laverie. Après avoir essayé
les capots de quelques machines à laver, il leur préféra le dessus du sèche-linge qui avait l’avantage de rester à chaleur constante. Et c’est alors que le bel athlète soudain s’anima, fit clignoter frénétiquement tous ses voyants et se mit à …ronronner ! La machine à laver n’en revenait pas : le sèche-linge préférait les chats ! Outrée par ces goûts contre -nature, elle décida de piéger l’animal. Elle l’attirerait dans son tambour et puis clac ! elle fermerait le hublot et se remplirait. Mais elle n’eut pas le temps de réaliser son projet criminel, car dans l’après-midi, on vint la chercher et on l’emmena chez le propriétaire de la laverie.
On l’installa dans une buanderie à côté d’un lave-linge un peu usagé, mais qui n’avait pas la langue dans sa poche. Il sut la charmer avec de beaux discours et la machine s’installa dans sa nouvelle vie sans réticence. Le couple fonctionna en duo pendant plusieurs années et nulle panne ne vint assombrir leur routine paisible. De temps à autre, le chat de la maison se glissait dans la buanderie, mais dès que la machine l’apercevait, elle fermait son hublot et lui envoyait des ondes hostiles jusqu’à ce qu’il déguerpisse. « Pas de ça chez nous ! » proclamait-elle. Son compagnon l’approuvait, même si, parfois,tandis qu’ils dormaient côte à côte ,il sentait,au plus profond de ses rêves, un doux pelage l’effleurer…
569e/Vivre côte à côte avec un séduisant sèche-linge, la machine à laver en rêvait depuis des cycles. Il vient d’arriver
🐀 MACHINE À LAVER LES RÊVES
Monsieur, j’ai commandé une machine à laver les rêves…
Ma chauve-souris dans le beffroi, la nuit elle se cogne aux coins de ma caboche provoquant des évocations sinistres. Des frappes de bâtons sur les chaudrons, les corbeaux qui croassent des prédictions catastrophiques, des lumières qui clignotent, c’est Halloween toutes les nuits et je me réveille en larmes…
La lessive sous forme de disque que vous m’avez envoyée a bien changé les choses.
Je constate que ce monsieur Johan Strauss et moi sommes au prise avec la même bestiole.
Je me passe la sienne en boucle et maintenant elles font la ribouldingue, dansent du soir au matin vêtues de robes de princesses dans des salles de marbre blanc qui résonnent…
Pour tout vous dire je suis rincée… Je pleure de fatigue !
Auriez-vous une machine à sécher les lames ?
J’attends votre proposition.
Proprement vôtre
🐀
Vivre côte à côte avec un séduisant sèche-linge, la machine à laver en rêvait depuis des cycles. « Il vient d’arriver après tous ces nombreux et exaspérants reports dans la livraison » s’écria-t-elle exaltée. Ce matin, l’excitation est à son comble dans la cuisine
« Hum. Son emballage volumineux laisse augurer de belles dimensions » songea-t-elle rêveuse. Trop belles hélas car la maîtresse de maison décida, la largeur de l’engin ne lui permettant pas d’être installé à côté de la machine à laver le linge, de le poser sur la machine à laver la vaisselle.
Ces deux-là se détestent depuis qu’une fuite d’eau, dont curieusement on ne découvrit jamais la fautive, gâcha à jamais les relations de la famille avec leurs voisins du dessous. Les deux machines se rejetèrent la responsabilité et plus jamais ne fonctionnèrent en même temps.
Ce matin, l’acrimonie atteint des sommets, la raillerie narquoise de l’une le disputant à la franche jalousie de l’autre
– « Hé machine ! » amorça la machine à laver la vaisselle
– « Machine toi-même ! » riposta la machine à laver le linge
– Tu m’a rebattu les oreilles pendant des semaines avec Ton futur voisin, le roi de l’électroménager. Tu dois être bien déçue. Si tu n’avais pas choisi le chargement par le haut, c’est sur toi qu’il serait posé
– Heureusement pour lui, il ne verra pas ta face pleine de boutons
– N’empêche, c’est avec moi qu’il va former le duo d’enfer
– Je me demande bien ce que vous pouvez faire ensemble. Tu lui seras inutile, comme un congélateur dans un igloo, un radiateur dans un pressing à Dubaï, un hachoir à viande chez un végétarien, un sèche-cheveux chez un chauve..
– Ne t’inquiète pas pour nous. Nous n’allons pas nous ennuyer. J’ai un large choix de programmes à lui offrir
– Mais c’est moi seule qui suis faite pour lui. Il ne va pas tarder à s’en apercevoir.
– Toi ? Tu n’es qu’une mijaurée qui exige parfums et adoucissants. Il se lassera vite de toi
– Parce que toi, tu n’as pas tes petit caprices ? Et je veux du gel ! Et je veux du sel !
– Et tes humeurs ! Souvent bourrée, toujours déréglée, toujours tambour
– N’empêche, le 1000 tours/minute, ce n’est pas pour toi.
Cet échange aurait pu durer des heures lorsque le déballage réconcilia les deux mégères, pardon, les deux ménagères qui pourtant ont tant de points communs.
Car, après l’ouverture fastidieuse du carton, l’enlèvement empoisonnant des billes de polystyrène, le retrait rebutant du papier-carton et l’arrachage agaçant du plastique, ce ne fut pas un appareil muni de toutes ses fonctionnalités qui fait son apparition.
Mais un vulgaire séchoir à linge, un trivial étendoir à l’alias pompeux : un tancarville
Vivre côte à côte avec un séduisant sèche linge, la machine à laver en rêvait depuis des cycles. Il vient d’arriver…
– Qu’est ce que j’ai fait au bon dieu pour subir un tel sort ! Six ans que je suis au service de cette famille nombreuse. Si vous saviez ce qu’ils font sur mon dos alors que je vrombis vaillamment. Je suis sûre que je ne suis pas étrangère à la conception d’au moins la moitié de leurs six enfants. Sont un peu tordus Jean et Janette. Enfin tout ceci ne nous regarde pas mais les lessives, c’est moi qui me les tape. Pas de repos, pas de samedi, pas de dimanche pour moi. Je suis gavée à bloc jour et nuit. C’est de l’esclavage. Faudrait monter une CGT défense de la machine à laver.
– Dure vie de labeur ma pauvre amie. Comment fais tu pour être toujours aussi fringante ?
– Pendant que Jean et Janette hoquettent, hurlent, râlent sur mon dos, je rêve. Tout en trempant, brassant, lavant, essorant, je rêve au Prince Charmant. Un beau sèche linge, dernier cri, blanc immaculé se tiendra tendrement à mes côtés, me rendant la tâche légère. Un jour mon Prince viendra.
– T’as tout gagné ma cocotte. Si j’ai bien compris le sèche linge ne devrait pas tarder.
– Sûr ! Ne me fais pas de fausse joie. Je n’y résisterai pas.
DRING, DRING .
– Alors ma petite dame, je l’installe où ce beau sèche linge ? Je suppose à côté de la machine à laver. C’est le plus logique. Allez je vous règle ça en deux temps trois mouvements.
Et sèche linge de se rengorger, de fanfaronner. Et je suis le plus beau par ci, et je suis le plus blanc par là….
– Oh mon Prince, mais oui, c’est toi le plus beau. Il y a longtemps que je t’attends. C’est le plus beau jour de ma vie.
– Quoi, t’as vu ta gueule de vieille caisse pourrie. Dégage !!
La machine à laver suffoque, suffoque et claque. Clap de fin.
Vivre côte à côte avec un séduisant sèche-linge, la machine à laver en rêvait depuis des cycles. Il vient d’arriver et s’installe tranquillou sans lui jeter un regard, tandis qu’elle en tombe raide dingue amoureuse. Il est si beau avec son grand hublot et tous ses boutons étincelants ! De sa voix chevrotante, elle tente d’engager la conversation. En vain ! Pourquoi me snobe-t-il ce malotru ? s’interroge-t-elle durant un essorage trépidant. Lorsque son amoureux est branché, il ouvre enfin sa bouche en s’exclamant :
– Ah, je suis content de vivre ! Tiens, t’es qui toi ? Je ne t’avais pas remarquée.
– Je suis ta collègue et tu vas terminer le boulot que j’ai commencé. Tu vas voir on va bien s’entendre nous deux.
– Ah ouais ! T’es pas encore à la retraite ? Tu n’as pas l’air d’être très en forme.
– Si tu savais ! Ça fait douze ans que je me prends des douches froides, puis tièdes et parfois brûlantes et que je tourne à en avoir la nausée. Je m’ennuie dans cette buanderie et je suis bien contente d’avoir de la compagnie.
– Ben moi, j’aurais préféré avoir une consœur de mon âge, pouffe le jeunot.
– Quel gougeât ! s’écrie-t-elle en fermant sa porte.
Après qu’il a été rempli de linge encore dégoulinant, ne voilà-t-il pas qu’il jette des étincelles. La maîtresse de maison pousse des cris d’effroi qui alertent son mari.
– Je te l’avais bien dit que je pouvais écarter le linge dans le jardin.
– Tu sais bien que c’était pour t’éviter de te fatiguer que je te l’ai offert.
– J’aurais préféré une nouvelle machine à laver, car celle-ci n’essore plus assez.
– Il est garanti, on va l’échanger contre un lave-linge dernier cri.
Et voilà comment se termine cette histoire de linge sale, propre et pas séché !
Il vient d’arriver, imposant et paisible, une véritable armoire avec ses larges épaules qui la domine. La maîtresse de maison venait de le faire livrer et installer. Elle avait décidé de laisser choir un vieil étendoir qui pendouillait sa corde distendue tout au long du séchoir-garde-manger. La machine à laver ne peut rester insensible à sa présence. Elle monte en température, se met à la tache jusqu’à jouer du tambour afin de bien l’accueillir. Celui-ci reste de marbre. Elle a peur de l’avoir froissé. Alors elle décide faire repasser son programme en mode lavage long sans essorage. Elle a bien fait. Lorsque la maîtresse ouvre sa trappe pour prendre le linge humide et le glisser dans le ventre rebondi du sèche-linge, elle remarque quelque buée de contentement sur son large hublot dès ses premiers tours, amples et silencieux. Les chemises déplient leurs bras et les soutiens gorges gonflent leur poitrine. On dirait une danse langoureuse qui libère les inhibitions. La machine à laver ressent déjà la chaleureuse présence de son imposant voisin tout au long de sa peau métallique. Elle est heureuse de l’avoir à son côté. Il la complète et la rassure par sa force tranquille. Il est bien là, loin du mite errant de son imaginaire. En plus, il sent la rose. Elle frissonne de plaisir. Elle vibre lorsque le tuyau de son partenaire évacue les effluves d’humidité qu’il a puisée au plus profond de ses fibres. Après quelques années d’un programme commun, ils partiront ensemble à la déchèterie lorsque la maitresse vieillissantes les remplacera tous deux par une machine lavante et sèchante qui prendra moins de place et nécessitera moins de manipulation.
ivre côte à côte avec un séduisant sèche-linge, la machine à laver en rêvait depuis des cycles. Il vient d’arriver…
…Ah ! Ce cher Pascal, il ne changera donc jamais, toujours aussi romantique, à ce que je vois en lisant sa proposition ! Il s’imagine encore qu’une machine à laver attend impatiemment, au XXIème siècle, son complément, le sèche-linge !
Sache, cher pascal que tu es un peu en retard car, moi qui te parle aujourd’hui, je suis celle qui a exigé de son fabricant l’incorporation d’un sèche-linge dans sa mécanique sophistiquée.
Je me présente : je suis une machine à laver séchante, de la marque DEUZAN- NAIN, (maison fondée en 1949), modèle Fuzion, fabriquée à Seyche-lez-Eaux. C’est moi qui suis aux commandes, enfin c’est Madeleine qui me touche et moi je fais le travail. Le sèche-linge intervient en fin de parcours et n’a pas son mot à dire.
J’ai lu avec beaucoup d’intérêt les mémoires de mes ancêtres, parues aux éditions de La Lavandière et suis heureuse de constater le chemin parcouru depuis. Je passe sur les premières d’entre nous, actionnées à la main… Épuisées par les retours de manivelle, les ménagères de tout âge ont fini par avoir des machines qui lavaient aussi bien que possible avec des lessives anti re -déposition, si, si .. En même temps apparurent les armoires sèche-linge qui faisaient la grève pour un oui ou pour un non. Puis, ce fut le tour des sèche-linge, semblables à des machines à laver, tellement ressemblants que les ménagères de tout âge nous confondaient et enfournaient le linge sale dans ces trompe-l’œil. Bref, un vrai désastre…
Enfin, je fis mon entrée et sensation pour avoir fusionné avec ces adjoints qui prenaient de la place dans des appartements devenus trop petits.
Donc, et c’est là mon cher Pascal, que je reviens vers toi, je ne vis pas à côté d’un séduisant lave-linge (au fait, pourquoi « séduisant » ? ) mais lui et moi avons fusionné. Plus de cohabitation douteuse, nous formons bloc et nous nous tenons chaud. Si nous avons des choses à nous dire, cela reste entre nous. Madeleine est très contente et a même initié son mari et son fils aîné pour nous mettre en route.
Depuis deux ans déjà, je vis dans cette salle de bain refaite à neuf. À neuf, soit, mais dans la pénombre de cette pièce sans ouverture vers la lumière du jour.
Heureusement, les occupants des lieux passent souvent se laver les mains, prendre une douche, se coiffer ou mettre du linge sale dans le sac prévu à cet usage.
Moi, la machine a laver, je fais de l’exercice deux à trois fois par semaine. Tantôt pour le linge de maison, tantôt pour les vêtements.
Ce matin, j’ai compris que la famille s’équipait d’un sèche-linge. Quel bonheur ! Je rêve depuis des cycles de vivre aux côtés d’un séduisant sèche-linge…
J’entends que les livreurs sont à proximité à déballer le colis. L’un d’eux entre dans la salle de bain et ressort en grognant : « Ça ne rentrera pas, c’est trop juste…. »
La maîtresse de maison passe le nez à la porte, embarque la clayette posée sur moi, puis indique: « Mettez-le sur la machine à laver ».
Les installateurs soulèvent le gros rectangle de tôle vernissé blanc et le pose sur moi.
Ouah ! il est un peu lourd, mais il sent bon le neuf.
– Bienvenue bel objet
– Merci et toutes mes excuses pour cette installation sur votre séant
– Je pense que je vais m’y habituer…
Quelques heures après cette arrivée, une lessive est mise en route. Je tente de limiter les couinements de ma carcasse et à l’essorage secoue, de mes 1600 tours/minute, le sèche-linge qui émet quelques miaulements de plaisir pour ce massage intégral.
Le linge passe de ma cuve dans la sienne et son premier cycle démarre. Il est vraiment lourd ainsi chargé. Je suis à mon tour secouée par ses rotations alternatives. C’est déroutant ; je trouve ses ronflements associés aux « splatchs » du linge qui tombe du haut de sa cuve dans le fond du tambour… assez troublant.
J’ai hâte que nous tournions en même temps pour expérimenter les sensations que produira ce double mouvement simultané. Ce devrait être l’extase !
Vivre côte à côte avec un séduisant sèche linge,la machine à laver en rêvait depuis des cycles.
Il vient d’arriver sauf que dans ce cas c’est du dessous dessus,faute de place dans la buanderie exigüe.
Le bel appareil à la carrosserie aérodynamique, qu’elle eu à peine le temps d’admirer, fut hissé sur son propre dos,solidement maintenu par des équerres et autres prothèses indispensables.
Aussitôt elle le vécut comme un fardeau,d’autant plus qu’elle ne pouvait le voir,juste sentir les vibrations et la chaleur qu’il dégageait.
La machine à laver continuait donc à brasser,rincer,essorer soigneusement comme toujours,étouffant toutefois sous cette présence qui lui prenait la vedette.On ne voyait que lui,perché à hauteur d’yeux.Ce prétentieux doté de fonctions inutiles,elle en était sûre.
Un jour qu’elle essorait des draps en coton extra bio,60°,cycle long,1000 tours minute,elle crut entendre soupirer au dessus.
Quand son tambour se fut arrêté,elle s’adressa au lave linge:
– C’est vous qui avez laissé échapper un signe de gêne à l’instant?
– Plait il? répondit une voix douce
– Je vous demande si c’est vous qui manifestez votre insatisfaction
– Heu,oui,c’est bien moi.Veuillez m’excuser,cela m’a échappé mais j’ai bien du mal avec vos rotations,j’ai peur de tomber,et puis ce bruit qui m’incommode
– Vous ne risquez rien,vous êtes solidement fixé,quand au bruit,nous n’avons rien à nous envier mon cher ami
– En effet,mais » mon « cher ami?
– N’êtes vous pas un sèche linge?
– Vous retardez un peu voisine,je suis une sécheuse pour linge dernière génération,pourvue de toute la technologie nécessaire
– Mille excuses alors.
La machine à laver, très étonnée par cette annonce,se dit:
moi aussi je changerai bien volontiers de genre,ne serait ce que pour séduire la belle,là haut, qui m’a l’air bien intéressante.Je veux qu’on me donne dorénavant du « lave linge »!
Ce qui fut dit fut fait.
Si vous avez l’occasion d’aller faire un tour dans la buanderie la nuit,vous entendrez les deux appareils échanger en chuchotant des mots propres à faire fondre le coeur de celui qui les ouïrait.
Vivre côte à côte avec un séduisant sèche-linge, la machine à laver en rêvait depuis des cycles. Elle avait tourné en rond tellement longtemps sans lui donner signe de vie que le jour où elle exhala un premier soupir, elle éveilla la flamme en lui. Depuis, elle lui tournait autour, tambour battant, tous les jours, sans relâche, mouillant de désir avant de laver ses péchés à l’eau claire tandis qu’il sécherait ses larmes après s’être rincé l’œil, faisant éclore des parterres de fleurs à ses pieds, jusqu’à la faire rougir au crépuscule alors qu’ils s’embrasseraient ardemment derrière des montagnes de linge. Son amour, son soleil.
Chaque programme était une orgie sens dessus dessous. En quelques cycles, ils étaient passés de 30 à 40, et bientôt, 60 degrés, non sans froisser quelque beau linge grincheux qui alertait au rétrécissement des ressources au fil des lavages. Mais surtout, le séduisant sèche-linge embrasait tout ce qu’il trouvait sur son passage au point que la machine à laver explosa de jalousie à la vue de ses ravages, tambourinant une surexploitation de sa condition, pointant du doigt le mauvais climat qui était en train de s’installer entre eux.
Seulement, il vient d’arriver.
— Ah ! Madame Carter, je suis désolé, mais là, il ne vous reste plus qu’à la changer. Je peux vous la livrer en mars, si vous voulez.
— Si vous le dites, monsieur Baizos.
– Il vient d’arriver, frétille-t-elle, il vient d’arriver !
Elle s’aspergea d’adoucissant textile « magnolia intense » et attendit.
Elle attendit toute la journée.
Solidement installé, le sèche-linge ne bronchait pas.
Rien – pas un regard – pas un sourire – pas un soubresaut – Rien –
Pourtant, ils étaient collés l’un à l’autre sur le judicieux conseil du plombier et par manque de place, faut le dire – Mais rien !
– Quel affront ! pensait-elle tristement.
Puis Jeannette entra dans la pièce, la corbeille de linge sale plein les bras.
Elle programma notre pauvre machine à laver qui s’exécuta avec soumission mais sans enthousiasme.
Elle tourna, elle tourna, elle tourna,
Elle lava,
Elle rinça,
Elle essora.
Tut… Tut.. Tut…
FIN DU BOULOT !
Jeannette revient,
soulage notre pauvre machine à laver sans la remercier pour s’occuper avec excitation du nouveau venu.
Elle le caresse voluptueusement en souriant.
Elle relit le mode d’emploi avec application,
Elle suit les instructions à la lettre et appuie enfin sur « START »
Mais là……. RIEN !
Jeannette s’angoisse,
Notre machine à laver retient son souffle,
Jeannette rappuie sur « START »
– RIEN de RIEN !
« Allô, Allô ! … c’est Jeannette qui appelle affolée le plombier,
Notre machine à laver n’en perd pas une.
Le plombier arrive finalement, pas mal énervé, disons-le.
Il ausculte le sèche-linge puis dévisage Jeannette avec consternation.
Elle l’avait pas branché !
A ce moment là, l’autre qui n’attendait que ça, se met à vrombir :
– Et que je tourne, et que je souffle et que je sèche…
Entre deux efforts, il fait un clin d’œil à notre machine à laver et lui demande :
-c’est quoi ton nom ?
TOUT UN PROGRAMME !!!
PRÉSIDENCE TOURNANTE
Moi, machine à laver le linge, je proclame la charte des aides ménagères à domicile. Tout article utile, voire ustensile, devra avoir son pendant de genre opposé. À chaque casserole, son couvercle. Le travaille de nuit sera reconnu pénible. Le lavage des gilets jaunes sera suivi d’étendage pendant les jours fériés, sur un fil à part du bleu de travail.
À mon nouveau compère le sèche-linge, je l’accueille pour un bout d’essai qui sera filmé. S’il n’est pas trop bruyant, tressautant, bref, si son mouvement rotatif reste discret, sa soufflerie pas scirocco, j’envisagerai ma collaboration, voire plus.
J’exige de ne plus faire qu’un balancement en eau peu profonde pour le respect des matières premières. Pour les synthétiques, elles seront faites à la main, où jetées ou recyclées. Ça ne me regarde plus.
Je veux avoir un entretien par an avec un séduisant technicien afin de me faire démonter. Si je dois disparaître, mes pièces serviront à mes enfants en induction. Mon acte de foi, résistance et collaboration sont les deux mamelles de la France.
Vive elle, vive nous ! 🐻
MENAGER L’ELECTRO
Lave-linge de mon état (civil), je viens d’emménager dans une colocation
J’inspecte les lieux de mon œil hublot
Ils vivent tous en couple ici !
La bouilloire emmêle ses cordons avec le toaster
Le presse-agrume centrifuge devant la cafetière
L’appareil à fondue envoie des piques à l’appareil à raclette
La hotte aspire à l’unisson du cuit-vapeur
La télé hurle pour se faire entendre de l’aspirateur
Pèse- cheveux et sèche- personne forment une famille recomposée
Le fer s’échauffe contre la table à repasser
Sur le mur j’aperçois les photos des ancêtres ; Tonton Lavoir, Mamie Balai, Grande sœur Crémaillère, Papa Chignole
Dans un coin de la maison je découvre enfin mon colocataire
Un sèche-linge qui n’a qu’un seul programme :
L’ OBSOLESCENCE
Finement, joliment et subtilement vu !
merci