754e exercice d’écriture très créative créé par Pascal Perrat

Exercice d'écriture très créative

Racontez les mésaventures de ce mot qui connaît souvent des problèmes de voisinage.


Vous appréciez mes propositions d’écriture ?
Parlez-en autour de vous, transmettez à vos amis les coordonnées de ce blogue.
Plus nous serons nombreux, plus mon imagination fera tout pour stimuler la vôtre.

45 réponses

  1. Kyoto dit :

    – Comment tu t’appelles, demande l’homme assis devant nous dans le train.
    – Euh…j’ai…ni…, répond ma petite-fille.
    – Je n’ai rien compris, dit l’individu en me regardant intensément.
    – Elle est timide ! Laissez-la tranquille !
    – Alors, vous, Madame, quel est votre prénom ?
    – Je vous le dirai peut-être si vous me donnez le vôtre.
    – Votre ruse me plaît. Alors jouons.
    – Je vous écoute.
    – Lucien.
    – Enchantée.
    – Et vous, alors ?
    – Anne !
    – Joli prénom qui vous va à ravir.
    – C’est un prénom que je détestais ! Les sales gamins du primaire se moquaient toujours de moi, surtout quand, pour cause d’indiscipline, l’instit me punissait en m’obligeant à porter son affreux bonnet d’âne. Quand ils me croisaient dans le village, ils ricanaient, riaient. Leurs « Hihan, hihan, hihan » ont longtemps résonné en moi. Si j’avais le malheur de dire « Ah non ! », ils le transformaient en « ânon » et les quolibets reprenaient ! Alors je me rebellais, je me battais.
    – Vous avez dit que vous le détestiez ce prénom… plus maintenant donc ?
    – En effet. A l’époque, mes parents me disaient que je devais les ignorer. Cela n’a pas été facile. J’ai réussi grâce à l’humour ! Un bon remède !
    – Et si maintenant j’ose « vous dire « Ah Non ! », quelle est votre réaction ?
    – Que je suis bien assez vieille pour faire une ânesse !
    – Joli ! Puis-je réitérer ma première question ?
    – Laquelle ?
    – Le prénom de la petite ?
    – Elle vous l’a dit !
    – Euh…non…
    – Repensez à ce qu’elle vous a dit !
    – Elle peut répéter ?
    – Euh…non…
    – E… G… Ni…..
    – Et ?
    – Euréka ! EUGENIE !
    – Bravo !
    – Oh ! Eugénie ! Je te demande pardon ! Je n’avais pas compris ! Vu ce magnifique prénom, tu en seras sûrement un !
    – Un quoi ?
    – Un Génie !!!

  2. Nadine Remond dit :

    Racontez les mésaventures de ce mot qui connaît souvent des problèmes de voisinage.

    La majuscule commença à se plaindre de toujours devoir venir sur lui. Elle fut rejointe très vite par la virgule, lasse d’être sans cesse amenée à le suivre. Puis, ce fut le tour du point d’exclamation de réclamer. Son collègue des trois petits points n’avait pas tenu en haleine assez longtemps ; il avait fallu qu’il ajoute sa majesté à ce maudit double mot ! Les parenthèses n’avaient pas réussi à le mettre en retrait. Pas plus que les traits n’avaient pu mettre l’union dans tout ce bazar. Ce maudit double mot s’imposait toujours…Qui plus est, en début de phrase… !
    Devant le tollé général et la révolution annoncée de la ponctuation, le cerveau dut intervenir pour le remplacer automatiquement. Par une expression que tout être normalement constitué renâclerait à en débuter ses phrases : « Des couilles ». Pour le double mot, … ! Coup dur … ! Il disparut.
    Saurez-vous le retrouver ? Il n’est pas loin… Juste avant ! Gommez le r et permutez. Du coup, … ! Vous l’avez ?!

  3. C’était un mot qui parlait à mots couverts de peur que son voisin ne l’accable de tous les maux de la terre… Il avait en effet des problèmes de voisinage car son voisin n’avait pas la même vision d’une coexistence pacifique : il aurait préféré jouxter un monastère de cisterciens, pour jouir d’un silence religieux.
    Las, c’était un mot qui avait élu domicile, et qui plus est un mot croisé qui pour la moindre bagatelle, était prêt à lever toute une armée pour défendre son droit ! Certes, beaucoup disaient qu’il avait une case en moins, ce qui rendait toute solution plus difficile. Mais le voisin, un jour, excédé par ce voisinage, était allé lui dire deux mots. Il n’eut pas le temps de finir sa phrase qu’il reçut un coup de point dans la figure, ce qui l’obligea à quelques points de suture.
    Finalement, après avoir mis les points sur les i, il réussit à convaincre le mot de mettre son verbiage entre parenthèses et il n’y eut pas besoin d’un échange de lettres pour trouver un compromis…

  4. Michel-Denis ROBERT dit :

    Racontez ce mot qui connait des problèmes de voisinage.

    J’étais dubitatif, car cette fois-ci l’aventure était audacieuse. En effet, débusquer ce qui du départ a des problèmes de voisinage, c’était risqué. Il me fallait donc m’armer d’une arme efficace comme pour aller à la chasse. Au voisin indélicat, me direz-vous, là, c’était spécial.
    A mon tour je pouvais avoir des problèmes avec le voisinage. Alors, attention ! Je devais faire gaffe, me planquer d’abord pour espionner les mots dits par mont et par vaux, en toutes occasions. Il y en a des tonnes. Le domaine est tellement vaste que je pouvais m’y perdre. Cela pouvait être aussi bien un voisin proche qu’un éloigné, n’est-ce-pas !
    Est-ce que ma lorgnette me suffirait ou devrais-je me procurer une paire de jumelles ?
    Là était la question cruciale qui rajoutait à la difficulté. Parce que les jumelles c’était déjà une paire.
    Je ne pouvais m’arrêter en si bon chemin. Je continuais à chercher, à farfouiller. C’est de cela dont il était question. Justement, à propos de question. Une venait de s’imposer instamment afin que j’y réponde. Valait-il mieux dire, c’est de cela dont il est question ou bien dire c’est de cela qu’il est question ?
    Voilà que je m’arrêtais en cours de route, en plein milieu de ma recherche. Je tombais en arrêt, butant sur un tout petit obstacle. Si je me posais des embûches, je ralentirais mes recherches.
    L’essentiel était de ne pas se décourager.
    Après avoir inventorié une multitude de mots, il y en a combien en tout ? Ca non plus ce n’était pas une bonne question, d’autant que des mots, il s’en crée presque tous les jours. Il me fallut donc me fixer un objectif précis. Surtout ne pas m’égarer ni me perdre, sinon je ne pourrais ni aboutir ni terminer.
    A force de lire et de relire, de regarder, d’examiner, je me suis dit que par auto-persuasion j’allais enfin le découvrir ce pléonasme.

  5. Maguelonne dit :

    – Racontez les mésaventures de ce mot qui connaît souvent des problèmes de voisinage…Qu’est ce que je vais bien pouvoir faire avec cette consigne ?
    – Ben, raisonne. Fais marcher tes neurones.
    – Non, lâche-toi. Sois totalement irraisonnée. Laisse-toi aller.
    – Encore mieux. Déraisonne à fond la caisse. Plus de frein, plus de logique. Fantaisie, folie et vogue la galère.
    – Reprend le pouvoir. Garde raison. Ne te laisse pas faire par ces absurdes mots soi-disant tes amis.
    – C’est trop triste d’être toujours dans les rails. Tu as largement dépassé l’âge de raison. Pour une fois vois les choses par l’autre bout de la lorgnette. Sois irraisonnée. Quel beau mot !
    – Délire, divague. Laisse l’araignée s’égarer au plafond. Perds la tête, perds la raison. Déraisonne quoi !
    – Taisez vous. Je réfléchis.
    – T’es en rade ma copine, tra la la la lère..
    – C’est insupportable. Je vais vous assaisonner tous les deux et bien piquant encore !
    – Hi, hi, elle commence à perdre la boule.

  6. CATHERINE M.S dit :

    Je n’en peux plus
    De cet adjectif saugrenu
    Qui me colle à la peau
    En sempiternel écho
    Bel, bel, bel, bel
    Deux consonnes et une voyelle
    Qu’on m’attribue tout le temps
    Chaud devant !
    Je sais moi ce qu’il en est
    Vraiment
    De cette vérité suspecte
    Que subtilement on m’injecte
    Comme pour me flatter
    M’amadouer
    Ou me berner …

    Me croit-on si puéril
    Infantile
    Me prend-on pour un vrai naïf
    Un idiot primitif
    Comme si je ne connaissais pas
    La vérité
    Comme si je ne savais pas
    De la vie la cruauté
    Ah le « bel âge »
    Mais savent-ils
    Tous ces imbéciles
    Combien de temps dure-t-il ?

    Qu’ils cessent donc sans ambages
    Leurs ridicules enfantillages
    Et qu’on me change de domicile
    Et surtout de voisinage …

  7. Coriandre dit :

    A une conférence de l’Université populaire dirigée par un éminent Professeur, la salle était comble. Son thème : la formation des mots.

    L’intervenant rappelant les différents stades de la genèse des mots posa à l’auditoire la question suivante :

    Que l’un(e) d’entre vous, choisisse dans notre vocabulaire, un mot qui placé à côté de son voisin ne fait pas bon ménage !

    Les participants surpris ne comprenaient pas très bien cette requête, l’un d’entre eux prit néanmoins la parole pour se faire le relais de l’ étonnement quasi-général.

    Professeur, je suis au regret de vous faire savoir que votre question nous bouscule car comme dans toute conférence digne de ce nom, des questions sont posées après la présentation des sachants, mais là, voyez-vous c’est un NON-SENS !

    Bravo, Monsieur, vous en avez trouvé un ! Il s’agit du mot composé « non-sens », à présent nous allons le disséquer.

    Y aurait-il une objection dans la salle ?

    Un lourd silence se répandit dans l’amphithéâtre.

    Le conférencier chaussa ses lunettes et reprit son analyse avec le plus grand sérieux.

    En effet, l’adjonction d’ une négation (non) au mot « sens » crée un mot composé qui ne récolte aucun succès auprès de nous, c’est même la cata  car le non-sens ne flirte t-il pas avec l’absurde ? La vérité du non-sens est l’ABSURDE mais à y regarder de plus près, quelque chose qui se résout par l’absurde revient à prétendre qu’elle a du sens.

    Une jeune femme, certainement encore étudiante l’interrompit avec audace en répliquant avec véhémence :

    Tout ceci est bien contrariant d’affirmer que le non-sens est une notion voisine de l’absurde ! Lorsqu’en philo, je remets ma copie et que je lis en marge,dans un cercle rouge « non-sens », cela me blesse car je ne pense pas que j’ai écrit une absurdité, tout de même !

    Nous avons tous ici un rapport au « sens » très personnel, répliqua le Professeur. D’ailleurs, Albert CAMUS faisait référence à l’absurdité de la condition humaine. En revanche, les anglais y donnent une signification plus nuancée en évoquant une situation comique, c’est le cas du roman d’« Alice au Pays des Merveilles » par exemple, la situation devient vite burlesque, les personnages sont décalés.
    Je déclare que le mot « non-sens » fricote avec l’absurde pour constituer une théorie philosophique appelée l’« Absurdisme » selon laquelle l’univers est individuel et dénué de sens.

    Un homme âgé se leva en s’appuyant sur sa canne et prit la parole avec gravité :

    Ne perdons pas de vue le thème de cet évènement qui est la formation des mots. Avoir choisi le mot composé « non-sens » est fort intéressant car le terme part d’un présupposé – celui du sens- et la fonction de ce mot revient à se poser la question car elle oscille entre le sens et la possibilité du non-sens.

    Un adolescent rétorqua :

    Mais tout çà pour çà, alors qu’il y a un autre mot qui veut dire la même chose, il s’agit du mot « insensé » !

    D’un seul coup, une émulation se répandit à grand bruit, les exclamations fusèrent :

    Et que dire du sens de l’insensé ?

    Que faisons-nous des « faux sens », des « contresens » et des « non-sens » ?

    La signification de tous ces mots ne contiendrait-elle pas une notion de faute ?

    Soudain, le Professeur n’arrivant plus à contenir la salle chercha à composer avec son auditoire en se contentant de déclamer une citation du joueur de hockey sur glace canadien Jacques Caron :

    « C’est un non-sens d’aller à contresens dans le bon sens ».

    Après tout, en qualité d’observatrice, je trouve que cette conférence est loin d’être kafkaïenne !

    • Béatrice Dassonville dit :

      Passionnante cette conférence et si bien raconté ! Cela donne à réfléchir.
      De mon point de vue, sens ou non-sens est surtout question de perception. Quant à l’absurde, il me semble nécessaire, car il ne fige rien. Il est ouverture vers d’autres mondes — imaginaires ou à découvrir — où les lois qui les régissent ne sont pas forcément les nôtres. Merci Coriandre pour ce casse-tête très agréable ! 🙂

    • 🐻 Luron'Ours dit :

      Un peu a sens unique mais pas interdit !🤗🐻

    • 🐻 Luron'Ours dit :

      Un peu a sens unique mais pas interdit !🤗🐻

  8. Gilaber de Florates dit :

    C’est la fête… la fête !

    Tout a commencé à l’instant où j’ai relevé mon courrier. Mon voisin avait déposé dans ma boite à lettres un mot par lequel il m’informait que pour fêter les vingt ans de son fils, il organisait, le soir même, une grande réunion familiale, et, il me présentait d’ores et déjà, ses excuses pour le dérangement que cela pourrait me causer… mais cet avertissement n’était qu’un euphémisme.

    À vingt heures, une musique timide, presque timorée, a commencé à onduler dans l’air en passant par-dessus la clôture mitoyenne — c’était une rythmique douce, quelques accords de guitare, un vieux tube des années 80 qu’on aurait pu croire sur le point de rendre l’âme. Je me suis dit : ils lancent doucement, ça va, ça reste civilisé. J’ai même esquissé un sourire indulgent.

    Mais dès vingt heures trente, la situation a basculé. D’autres enceintes ont été déployées, à en juger par la saturation nouvelle des basses qui faisaient vibrer les vitres de ma maison. Il y eut des applaudissements, des cris d’enthousiasme, puis une voix féminine, aiguë et perçante, entonna une chanson populaire — « Libérée, délivrée » — reprise aussitôt par une foule mal accordée, galvanisée par sa propre énergie.

    Je tentai alors de lire, mais chaque mot que je déchiffrais se faisait éclipser par des éclats de voix :
    — Allez, papi, lève-toi !
    — Où il est, l’ouvre-bière ?
    — Tu sais pas chanter, Kevin, ferme-la !

    Et le fameux Kevin, manifestement imperméable à la critique, entama une improvisation vocale qui tenait du loup qu’on étrangle.

    Vers vingt et une heures, un ballon vint heurter ma haie avec une régularité métronomique. Des enfants hurlaient de joie. Puis ce furent les grands qui crièrent, sans doute à cause du jeu de fléchettes ou d’une chute au karaoké. L’un d’eux, manifestement en pleine crise existentielle ou en possession d’un mégaphone, hurlait à intervalles réguliers :

    — C’EST MES VINGT ANS BORDEL, ON S’EN FOUT DES VOISINS !

    J’aurais voulu m’en foutre aussi, mais chaque tentative d’évasion mentale échouait. Même la musique semblait me poursuivre : une compilation insensée enchaînait techno martiale, zouk sucré, reggae fumeux, tout cela entrecoupé de tubes des années 2000 poussés au volume maximum, jusqu’à ce que les enceintes crachent comme des chats furieux.

    À vingt-trois heures, j’étais assis dans le noir, un coussin pressé sur chaque oreille, notant méthodiquement les bruits que je percevais — un ricanement rauque, un rot d’anthologie, une reprise inintelligible de « L’envie d’aimer », scandée comme un rituel païen. On frappait dans les mains, on traînait des chaises sur la terrasse, on faisait tomber des verres en poussant des cris de théâtre antique. À un moment, j’ai cru entendre un cochon, ou bien c’était peut-être le papi un peu trop joyeux à cause de tout l’alcool qu’il avait ingurgité.

    La nuit avançait, mais la fête ne déclinait pas. Vers une heure, un silence bref, trompeur, s’abattit. J’envisageai d’ouvrir ma fenêtre pour respirer, mais c’est alors qu’un cri isolé fendit l’air — un « WOUHOUUUUU » si long et si aigu qu’il sembla venir de l’au-delà.

    Je crois que j’ai commencé à délirer vers deux heures. Les voix se mêlaient aux battements de mon cœur, les rires devenaient stridulations d’insectes, les basses se transformaient en tremblements de terre miniatures. Il y avait là quelque chose de tribal, d’incontrôlé, une célébration dionysiaque échappée du temps. Et moi, reclus dans mon antre, j’observais ce désordre sonore avec une fascination mêlée d’effroi.

    À trois heures du matin, j’ai cessé de faire la distinction entre l’intérieur et l’extérieur. Le mur de la clôture mitoyenne semblait respirer, tout comme ceux de ma maison. Chaque pulsation des basses faisait vibrer ma colonne vertébrale, comme si ma moelle elle-même avait décidé de se joindre à la fête. Je crus un instant que les enceintes avaient été installées directement dans mon jardin ; je suis même allé vérifier, vacillant, fouillant l’espace sombre du faisceau d’une lampe torche.
    Rien… … Seulement mon salon de jardin, avec sa table basse, le canapé trois places et les deux fauteuils… personne en train de danser sur ma terrasse… Et pourtant, les voix continuaient. Elles se rapprochaient. Un groupe chantait désormais a cappella, mais d’une voix rauque, voilée par l’alcool ou l’éternité. On aurait dit une chorale de damnés entonnant un cantique païen. Une autre voix, celle d’une femme, répétait en boucle une phrase absurde :
    — On veut le gâteau ! On veut le gâteau !

    J’en ris. Oui, franchement, j’ai ri. C’était grotesque. Incongru. Comme si la demande de dessert avait pris valeur de revendication politique. Puis le gâteau est arrivé. Je ne sais pas comment. Il y avait une portion de fraisier sur la table basse de mon salon extérieur. Une petite assiette en carton, posée là comme une offrande. C’est alors que j’ai compris. Ils savaient. Ils savaient que j’étais éveillé, que je guettais. Que je les écoutais, malgré moi, par-dessus la clôture, à travers le temps ! Que je n’étais plus tout à fait dehors ! J’ai refermé la porte. Lentement. Le silence, enfin, a commencé à tomber vers quatre heures. Un silence étrange, instable, zébré de derniers rires étouffés, de chaises repliées, de voix assourdies. Un silence qui n’était pas absence, mais suspension, comme si la fête se retirait momentanément pour mieux renaître ailleurs, plus tard, plus forte.

    Je me suis couché vers cinq heures, les oreilles encore bourdonnantes, le cœur battant d’un rythme qui n’était plus le mien. Dans le rêve qui m’a saisi aussitôt, j’étais au centre du jardin voisin, couronné de guirlandes, debout sur une table. On me tendait un micro. Et je chantais…

    Mon réveil fût douloureux. Mais depuis ce jour-là, à chaque fois que je relève le courrier, je marque un temps d’hésitation avant l’ouverture de ma boîte à lettres…

    • Béatrice Dassonville dit :

      Cher Gilaber, la vendalisation — furieusement sonore — de votre petit havre de paix est source d’une très jolie inspiration. L’écriture est belle. 🙂

      • Gilaber de Florates dit :

        Merci chère Béatrice. J’aurais pu également développer sur le mot FÊTE… qui représente la joie, le bonheur, les retrouvailles…
        Bien à vous.

  9. mijoroy dit :

    ─ Dictionnaire, dictionnaire mon ami, je n’ai plus, de sens à ma vie. Ainsi se lamente un mot.
    ─ Allons donc, tu es un mot tout plein d’élan. lui répond le dictionnaire.
    ─ Hélas mon vieil ami, la perte de maîtrise de l’orthographe et le manque de lecture, font que je me retrouve un jour en très bon voisinage et le lendemain je suis jeté dans des propos vulgaires.
    ─ Pourrais-tu être plus clair ?
    ─ J’étais POÊLE, source de chaleur ou promesse de régal de papilles, quand près de À je suis devenu exhibitionniste. Et ce n’est pas tout, sur la portée de Mozart, près DO FASILA à jouer je procure le plaisir du mélomane, et je deviens robotisée près de USB. J’ai même plus su qui j’étais lorsque je suis entré dans une serrure, avec un plombier qui m’avait confondu avec une clé de 8. Vraiment selon comment le vent me pousse je passe d’un sens à l’autre, c’est éreintant. Sans parler, des contresens de ceux qui veulent se donner des airs littéraires. Quand je pense que je voulais voler en toute liberté, dans l’azur du firmament, sans cage ni chaîne, et que j’ai déclenché la haine, dans les cités où je vol à main armée.
    ─ Entre Homographie et Polysémie, tel est ton destin, mon brave mot. Tu seras toujours tributaire des autres pour changer d’habit ou de chemin. Moi, je dois bien accueillir des incongruités comme celle du verlan : « Chelou » (louche), « ouf » (fou), ou encore « teuf » (fête). Pire je dois plier l’échine devant les anglicismes, les mots valises comme « infox » « adulescent » « intagrammable » « ghoster ». Moi aussi je suis las. La langue française n’est pas une ligne droite mais une piste de danse. Elle trébuche, se rattrape, invente des pas, et parfois se remet à l’endroit… à condition que moi dictionnaire je garde la mémoire de ces lubies linguistiques

    • Béatrice Dassonville dit :

      Une piste de danse où, désormais, on se marche sur les pieds et ça fait mal pour les amoureux des mots et de la langue française.
      Bravo Mijoroy pour ce récit très pertinent. 🙂

  10. RENATA dit :

    Depuis très longtemps , un vieux mot logeait dans un dico .
    Il y passait des jours paisibles , tranquille .
    Un matin , des dizaines de mots nouveaux emménagèrent dans son dico .
    De sms en réseaux sociaux
    Le vieux mot se sent dépassé et fort rejeté .
    Pour échapper à ce voisinage étranger , de sa page , il s’esbigne .
    Il se retrouve affalé sur le plancher
    En grand danger d’être écrabouillé
    Par tous ces « followers » ou plutôt ces abonnés .
    Il veut crier , mais ne sait plus s’exprimer ,
    Depuis trop longtemps inusité .
    Où se réfugier ?
    Entre les lattes du plancher il se laisse glisser .
    Là , il découvre tous ses vieux copains expulsés d’années en années .
    Ses anciens amis oubliés , les mots d’avant , les démodés .
    Ils se sont regroupés espérant ressusciter .

    On peut toujours les retrouver dans les vieux livres abandonnés .
    Ouvrez-les ,
    Ils vous feront rêver du temps où ils étaient aimés .

  11. Rose Marie Huguet dit :

    Racontez les mésaventures de ce mot qui connaît souvent des problèmes de voisinage.

    Je sais bien que je stresse, agace et empoisonne quelque peu mon voisinage. J’excite. Je suis l’empêcheur de tourner en rond. Parfois j’aimerais être différent. Si cela était le cas, sûr que les choses seraient plus apaisées. Plus de prises de tête. Quiétude ennuyeuse à mes yeux.
    Si nous étions tous sur la même longueur d’onde, nous serions des bénis oui-oui. Que pourrions-nous exprimer ?

    J’aime malicieusement provoquer. Mes voisins se rebellent à mon grand bonheur, même s’il m’arrive de me trouver dans une grande tourmente. Parfois j’y laisse des plumes, mais l’échange est vivifiant. Les discussions s’animent, le ton monte. Il arrive même que les échanges soient constructifs et débouchent sur un happy end, malheureusement éphémère.

    Les voisins me fuient comme la peste. Je chamboule leur état d’esprit. Je les irrite. Je suis un mascaret. Une tornade. Un vent de sable. Je déstabilise l’ordre des choses, le plan-plan.

    Très souvent houspillé, il advient malgré tout que je sois attendu avec impatience. J’en conviens, c’est assez rare, mais ça se produit. Il suffit qu’un trublion s’exprime avec emphase et cherche à s’imposer pour que mon apparition envahisse d’espoir mes voisins.
    En effet, j’ai deux casquettes. Une qui rebute et fait grincer les dents, l’autre moins courante qui sert de baume apaisant et dont je me sers avec parcimonie.

    Ce que je préfère c’est ma polyvalence. Je peux me trouver n’importe où, dans n’importe quelle situation. Je trouve toujours une place. Mes voisins peuvent ronchonner, manifester, crier, pleurer, m’envoyer sur les roses, ma présence est incontournable, indispensable.

    Je suis redouté, car tous les voisins le savent, je ne suis jamais seul. Après mon passage, la joie ou la grogne s’installent pour quelque temps.

    J’affectionne particulièrement être l’invité des GRANDS de tous poils. Eux m’adorent. Tout est bien orchestré. Petit temps mort et je fais mon entrée :

    Oui, mais…

  12. iris79 dit :

    « MAIS que fait-il là ? »
    Il n’en peut plus d’entendre ça ; Plus personne ne veut faire partie de son voisinage. Tout le monde l’accuse d’être terne, un empêcheur de tourner en rond, fade, rabat-joie et j’en passe. MAIS n’en peut plus d’être le bouc-émissaire du dictionnaire. Il sait que dès qu’il arrive à se poser sur une ligne ou avec ses pairs, les autres vont faire la tête, lui tourner le dos ou exiger des points, des virgules, des sauts de lignes. Impossible ! Il en perd alors sa raison d’être. Ce n’est pas de sa faute et il est fort utile bon sang ! Il faut nuancer, atténuer, argumenter ! Non, il ne peut être amis avec les « certitudes », les « sûrs d’eux », « les arrogants », les « j’affirme », les « je revendique », et « j’ai-toujours-raison ».
    On ne parle pas des « évidemment », « certainement » et « sans-aucun-doute » qui ne doutent jamais de rien ! Tiens, encore un ! « Raison » ! Il préfère et de loin, son cousin « raisonner ». Lui au moins est ouvert à la discussion, pondéré.
    Malgré son statut inconfortable, il aime sa fonction qui lui octroie une certaine sagesse. Il n’est pas radical et toujours ouvert à la discussion. Il sait écouter, et offre de prendre du recul, ce qui n’est pas une mince affaire avec tous ces radicaux qu’il faut combattre ! Il sait au fond qu’il est indispensable, parce ce qu’il peut même se payer le luxe d’être ami avec NON et OUI. N’est-ce pas ?
    MAIS oui !

  13. Nadine de Bernardy dit :

    Dans le volume 1 du Grand Larousse Illustré, entre couplé et couplet, coupler s’ennuyait ferme. Bien qu’ayant leur définition propre, leur consonance prêtait à confusion, donnant lieu à d’interminables discussions entre eux sur l’accent à mettre à la fin du dit mot.
    Couplé ( fermé ), coupler ( demi fermé ), couplet ( franchement ouvert ), chacun se vantant de l’intérêt de son usage.
    Ainsi le couplet se gaussait des deux autres que l’on pouvait confondre à l’oreille, alors qu’un couplêt , il n’y en avait qu’un ironisait il en appuyant sur ce E avec une joie maligne.
    Lassé, agacé, coupler réussi à s’effacer de la page 832 pour aller tenter l’aventure ailleurs. Personne ne remarqua sa disparition.
    Il erra sur les chemins de la connaissance, les sentiers du savoir et chut sous la plume d’un poète rêveur qui le mit de côté en attendant de lui trouver la place qu’il méritait.

  14. camomille dit :

    C’est l’histoire du mot « CACA » qui connaît d’importants problèmes de voisinage !
    Personne ne veut se placer à côté de lui.
    Il vit donc isolé.
    C’est un mot qui existe mais que l’on ne prononce pas.
    Même dans les laboratoires on le place dans des contenants stériles.
    Pas de voisinage avec lui… Pire que le covid.
    Seuls les enfants ont encore le droit de l’évoquer tout naturellement. Mais ça ne durera pas !
    D’ailleurs, des plaintes ont été déposées.
    Il se dit en coulisse qu’il est question de le supprimer officiellement du langage pour cause de voisinage impossible.
    A méditer…
    Mais méditer sur le mot « CACA » ça ne tente personne.
    C’est donc la bien triste histoire du mot « CACA » qui connaît de sérieux problèmes de discrimination.

    • Béatrice Dassonville dit :

      Le supprimer ? Pas sûr, son champ lexical est vaste et il se représentera sous d’autres habits tels que – pour ne nommer que les plus corrects : excrément, popo, crotte, étron, bouse… Quelle cacade !

  15. Béatrice Dassonville dit :

    Un OUI solaire à ce texte qui ne saurait trop longtemps vous dire non. Merci souris verte. 🙂

  16. Antonio dit :

    C’est l’histoire d’un Coup qui s’est retrouvé en liberté surveillé dans un hameau couvert de belles phrases tarabiscotées, telles des glycines, la grappe bien pendante pour ne rien dire, tant que cela orne les jolies discussions alentours et leur donne du cachet sur la place du marché.

    C’est là justement que notre Coup était employé pour alimenter la conversation des habitants du hameau-dit. Jusque-là correct et discret, il se contentait de servir des petites expressions fraîchement cueillis dans les bois du langage et évitait ainsi de répondre à toute question embarrassante sur son passé malheureux. Seulement, certains avaient été mis au courant et accusaient le Coup d’être bas et malhonnête.

    — Alors, comme ça, tu viens de Jarnac, à ce que j’ai entendu dire !

    — Est-ce que je vous sers un coup d’épée dans l’eau, mot-sieur ?

    — Garde tes friandises pour les verbeux, moi je veux la vérité sur tes origines. T’es de Trafalgar, c’est ça ? Je m’en doutais.

    — Peut-être mot-sieur tirerait une livre de coups francs. Ils viennent d’Espagne justement.

    — Du coup, tu en as à revendre à ce que je vois, sans férir, mais moi je vais t’en donner qui vont te faire pleurer, tu vas voir, une fois que je t’aurais mis le poing dessus !

    Tout le voisinage assistait à la scène et, dès lors, s’inquiéta du danger de ce Coup venu de nulle part et qui pourrait frapper chez eux, sans prévenir. Alors tous les mots se réunirent en conversations secrètes avec un seul sujet, à chaque coin de phrase, tentant de percer le mystère de ce malvenu.

    — Du coup, c’est peut-être lui qui a tué Mademoiselle Rose, dans la véranda, avec le chandelier ?

  17. Sylvianne Perrat dit :

    Depuis que le monde est monde, plutôt depuis l’invention de l’écriture on me colle à n’importe quoi ! Comme « guerre ». Elle me coupe l’herbe sous le pied. On m’affuble d’adjectifs comme « universelle » ou « impossible ». Un Voisinage bruyant. C’est agaçant ! Je voudrais être au fronton des mairies avec mes amies « liberté, égalité, fraternité ». Point de discours autour de moi, point d’adverbes pompeux. Mon seul mot suffit ! A lui seul, il dit tout. Tout le monde aspire à me connaître. Mes voisins proches comme « Traité de », « sortir du conflit » « armistice » me salissent. Quand le mot « trêve » me côtoie, je bondis. J’aspire au calme, à la tranquillité, comme le dit Wikipedia. Je suis un idéal paraît-il. Je serais un concept, disent certains. Ah ! La concorde ! J’en rêve. Je voudrais avoir comme voisins  « convergence, harmonie, quiétude ». Je les inviterais à ma table. Le seul adjectif que j’aimerais côtoyer c’est « mondiale ».
    Signé La paix, une agréable voisine

  18. M versus N. ?

    Voisins — et même côte à côte dans l’alphabet —, une différence criante les sépare, et pourtant, leur destin semblait lié.

    M — a quelque chose d’aimable. Dans sa majuscule, il a de la majesté. En son centre, il dessine une ouverture, comme s’il était prédestiné à l’accueil, à l’offrande, tout en étant bien campé sur ses deux jambes.

    N — est comme amputé d’une jambe, si bien, qu’en haut, il dessine le V d’une victoire qui vacille, et en bas le V du vertige. Il nous donne le sentiment d’une perte d’équilibre.

    m — en minuscule s’illustre par deux ouvertures, comme les arches d’un pont. Sous lui, beaucoup d’eau pourrait couler, tandis que sur son dos, il peut beaucoup porter. Il nous parle d’amour, d’amitié, d’âme.

    n — est plus économe dans sa forme que son proche voisin ; il ne peut enjamber que de tout petits ruisseaux. Arc-bouté sur lui-même, il ne se duplique pas comme le m. Il nous parle d’individualisme.

    Cependant, comme nous le savons, le M peut se transformer en N, et, inversement, ce dernier peut se métamorphoser en « AIME ».

  19. Nouchka dit :

    Lorsque la chasse à courre rentre ce matin-là, elle trouve un représentant de la cour de justice qui attend dans la cour. Cet homme, court sur patte, les interpelle sur le cours des évènements et leur fait un cours sur le cours du fleuve.
    Cette intrusion les prend de court.
    Les chiens au poil court, qui courent si vite, effraient tout à coup l’homme de loi qui débite un argumentaire un peu court puis, à court d’arguments, court vite à l’abri, laissant la cour aux aboiements et aux accents des cors de la chasse à courre.

  20. 🐻 Luron'Ours dit :

    753/LA FÊTE DES VOISINS
    Une GRENOUILLE à quoi ça rime : tout en haut ou genou hibou et même chou ? Ainsi se plaignait la grenouille : mon têtard ne me tète plus, même au plumard, un fêtard ce bâtard ! Je suis objet de moquerie, une arsouille, une cuisse légère, une drollesse ! Heureusement j’ai mes aises au bord du lac de paladru. J’ai enchanté jadis cette cité lacustre, ah ! En ai-je bouffé des moustiques ! Parfois, on me remerciait d’une goualante sur l’air de à la tienne Etienne, des fois, dans les douves du château, Ademaï battait l’eau pour me faire taire le temps du déduit d’une belle fileuse et de son galant. Je chantais, je dansais, mes sœurs enfarinées, embrochées, aileeés, est-ce ainsi qu’on les aime !
    Ouille ouille ouille ouille !🐻

  21. 🐀 Souris verte dit :

    754/NON C’EST NON !
    Jamais mot ne fut plus isolé..
    Asséné il a pour vocation la rupture surtout s’il est dit deux fois… Vous pouvez vous rhabiller, ça ne marchera pas.
    Son contraire est tout ouvert en voyelles colorées solaires, aimé dans son acquiescement avec opination du bonnet s’il vous plaît, un mot qui sait se faire des amis. Lui, c’est un veto implacable qui sent le grabuge avec son O qui s’enroule sur lui-même centré entre ses deux gardiens de prison. Il est infréquentable et les mots qui l’entourent ne sont là que pour le justifier. Surtout le ‘Parce que ‘ ou le ‘ vous comprenez bien’ qui est une forme diplomatique pour vous faire avaler la pilule et de vous expliquer que justement vous ne comprenez rien. Ils sont ses fidèles gardes du corps. Eh oui , c’est un mot qui a besoin de protection rapprochée. Une fois assèné, suivent des explications vaseuses souvent nauséabondes en tout cas interminables puisqu’elles ne vont pas dans votre sens. Pour sa défense, il est franc et massif malgré sa courte corpulence mais il est comme ça, il tranche et fait mal.
    Alors moi, je préfère un ah non ! Mais celui avec de grandes oreilles et qui braie quand on lui apporte des carottes !🐀

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