43 réponses

  1. iris79 dit :

    Une moquette se chamaille avec un parquet à propos du droit des sols

    M: moquette
    P: parquet

    M: Ah mais cessez votre suffisance ! On le sait que vous étiez là bien avant et que vous êtes fait de matière noble…
    P: cessez votre insolence ! Vos couleurs criardes ne vous honorent pas et rien qu’à l’idée que vous me recouvriez, j’en ai la nausée…
    M: et puis quoi ? Vous allez craquer encore ! De toute façon, vous ne faites plus que ça ! Vous devriez plutôt me remercier, avec ma trame posée sur vos lattes, espérons que j’étouffe vos borborygmes qui réveillent tout le monde quand quelqu’un s’attarde sur vos platebandes.
    P: hum…Si vous étiez en laine encore, vous pourriez me réchauffer, et cette belle pièce gagnerait en chaleur. Mais je crains que vos fibres ne soient que des dérivés de pétrole.
    M: Ah c’est reparti ! Bla bla bla, bla bla bla, c’était bien mieux avant ! Comment balayer ces relents passéistes et toutes ces remarques désobligeantes et tellement fausses ! Vous trouvez vraiment que tout était bien mieux avant ? J’ai du mal à le croire !
    P: Et bien tout de même…
    M: tout de même ! Et bien voyons ! Les courants d’air, les pièces non chauffées, les semelles des chaussures crottées des habitants de cette grande bâtisse vous ont malmené me semble t-il ! J’ai mes sources et depuis que je suis là, j’ai déjà appris bien des choses ! D’ailleurs, si j’osais, je vous demanderais des nouvelles de la cicatrice qui barre l’angle de ce salon.
    P: certes, il est vrai que ma vie ne fut pas qu’un long fleuve tranquille. J’ai craqué bien des fois sous les assauts des uns et des autres.
    M: et puis vous savez, je ne suis pas là pour vous nuire.
    P: Comment cela ? Comment croyez vous que je vais respirer sous votre fameuse triple épaisseur ! Mes rides font aussi mon charme et je sais que j’ai encore du chien !
    M: tout à fait, je dois bien le reconnaître…Mais je ne suis pas là pour vous cacher !
    P: comment cela ?
    M: je suis certes plus jeune que vous mais plus petite aussi ! Je ne suis pas là pour vous faire oublier mais pour que nous nous sublimions l’un l’autre ! C’est du moins ce que j’ai compris lors de mon acquisition par le propriétaire de cette maison !
    P: Ah bon ! Il est vrai qu’enroulée dans votre bâche en plastique, je n’ai guère qu’une vision très parcellaire de celle que vous êtes vraiment. Je vous demande pardon. Je juge parfois trop rapidement. On a sûrement quelque chose à s’apporter l’un l’autre.
    M; Et oui ! Je n’en peux plus de ce carcan! Depuis deux jours que je vous reluque et que je vous entends vous plaindre, je n’ai qu’une envie, dérouler mes charmes pour vous bluffer !
    Vous allez vous voir, tous les deux on va en jeter !

  2. Urso dit :

    Une moquette se chamaille avec un parquet à propos du droit des sols

    – Où sont les 60 euros que je t’ai prêtés il y a deux semaines lança dame moquette.
    – Je ne sais pas, je ne sais plus ne cessait de répéter sieur parquet.
    – Je connais ton manège petit filou. La nuit tu cours les filles. C’est pour ça que tu claques tout mon argent.
    – Que veux-tu la moquette. À mon âge j’ai bien le droit de m’amuser.
    Ensuite j’ai lu quelque part que nous le peuple des sols nous avons beaucoup de droits et celui de faire la fête en fait partie.
    – Ah des droits, des droits, monsieur se prend pour un avocat.
    Avec un sourire peu sincère, le parquet ajouta :
    – Vois-tu moi je suis honnête et généreux, en tendant à dame moquette un billet lumineux de 200 euros.

    – Quoi quoi fit dame moquette. Ce billet m’a l’air d’un faux. On dirait du plastique.
    De plus, il a un trou en forme de triangle en son milieu.
    Tu te f. vraiment de moi petit vaurien continua la dame, avec une colère qui grandissait de plus en plus.
    Eh le vieux parquet ça ne peut plus durer cette comédie. Je veux de vrais billets.
    Donne-moi maintenant mes 60 euros avec en plus 30 euros d’intérêt.
    Sinon je vais voir la police et tu croupiras en prison jusqu’à la fin de tes jours.
    Moi également, en qualité de citoyenne des sols, je revendique mon droit à ce que justice soit faite.

    Monsieur parquet avait décroché.
    Depuis quelques minutes, il ne faisait plus attention à ce que disait son acolyte.
    Il semblait rêver aux prochaines vacances. Aimant voyager il devait penser à ses jeunes et belles copines qu’il allait retrouver sur les plages du Brésil ou d’un autre pays du Sud.

    Tout à coup il sortit de sa torpeur.
    Il venait de recevoir de l’urine du chien de la patronne du château : celle-ci rentrait du marché du village chargée de victuailles.
    – Ah ah fit dame moquette c’est bien fait pour toi ce jet d’urine.

    Malgré ce désagrément, tous deux eurent une grande surprise.
    Ils virent qu’une petite tête dépassait du panier de la ménagère.
    C’était celle d’une sole meunière qui lança en direction de nos deux compères.
    – Oh que je suis triste.
    Petite sole, je pensais naïvement qu’il y avait un système juridique et des juges impartiaux pour me protéger.
    Or, dans une ou deux heures je vais très certainement cuire dans une poêle, avant d’être engloutie au fond d’un estomac affamé.

    – Non cela n’arrivera pas lui cria sieur parquet. Tu as le droit à la défense d’un avocat du … parquet.
    Allez ouste la sole saute de ton habitacle et rejoins-nous vite.

    Mère sole n’eut pas le temps de faire ouf.
    En effet, comme par magie, la grande fenêtre de la salle à manger s’ouvrit aussitôt avec fracas et la sole fut rapidement happée dans le ciel.
    Dame moquette et sieur parquet la regardèrent partir avec regret.

    Ceux-ci sont toujours ensemble dans leur château.
    De temps en temps ils se remémorent cette drôle d’histoire et évoquent à l’occasion ce « fameux » droit des sol(e)s.

  3. Sabrina P. dit :

    Une moquette se chamaille avec un parquet à propos du droit des sols.
    — Non mais oh dites donc, pour qui vous prenez-vous pour vous parquer ainsi sur mon territoire ? s’insurge Dame Moquette.
    — Comment ça, sur votre territoire ? s’exclame Père Parquet.
    — Exactement ! Mon territoire ! De l’évier de la cuisine au bidet de la baignoire !
    — Votre cher propriétaire ne vous a rien dit ? La moquette, c’est has been depuis belle lurette !
    — Mais vous êtes revêtement fou ? Je réchauffe les pieds et les cœurs depuis des centaines d’années moi ! Et ce n’est pas parce que je ne parle pas anglais que je suis démodée ! se vexe Dame Moquette, qui aurait rêvé être aussi polyglotte que polyester.
    — Et voilà, encore un vieux tapis, qui vit dans le passé, et la poussière ! soupire Père Parquet, mielleusement, mi-amusé, mi-agacé.
    — Vieux tapis, vieux tapis, qui m’a refourgué un poseur pareil ??! Je suis une moquette, je vous signale ! Je suis ici depuis le 17ème siècle, on peut dire que j’en ai côtoyé de la chaussette !
    — Ben voyons… Encore une qui en a trop fumé, de sa moquette… murmure Père Parquet.
    — Mais… mais… quel goujat ! Je ne me laisserais pas parler ainsi par le premier parquet en pin venu !
    — Excusez-moi Dame Moquette, mais c’est qu’au 17ème, j’en avais fait déjà valser des paires de gambettes !
    — La belle affaire ! Rien de tel qu’un parquet pour glisser et tomber ! Avec moi, au moins, on ne risque pas la chute, et si elle arrive tout de même, le choc est moins rude que sur votre sol en bois brut !
    — Danser sur de la moquette ! Vous êtes touchante… et un brin salissante… Que faites-vous, quand c’est du vin qui tombe sur vous ? Je brise peut-être des genoux, mais au moins je n’entache pas le bon goût !
    — Avez-vous déjà entendu parler de cette brillante invention, qui fait des bulles, des grosses bulles de savon ?
    — Que croyez-vous donc ? Moi aussi, je me suis déjà fait lessiver ! marmonne Père Parquet. Il n’empêche qu’il y a déjà un bail qu’on m’admire à Versailles ! reprend-il, car il n’aimait pas qu’on le contrecolle.
    — Vous faites peut-être partie du patrimoine français, mais on ne vous utilise pas dans une expression idiomatique que je sache ! s’énorgueillit Dame Moquette, qui ne se rappelle jamais si elle orne le palais de l’Élysée ou bien du Ritz, et vice-Versailles.
    — Je ne le « sache » pas mais serais honoré d’être moins idiot, donnez donc votre idiome ! se moque Père Parquet, persuadé qu’il n’existe rien de tel.
    — Faire des clans sur la moquette, ça ne vous dit rien peut-être ?! rugit avec une certaine fierté Dame Moquette.
    — Des clans sur… Mais, enfin, ce sont des plans sur la COMÈTE !
    — Non, non, des clans sur la moquette ! Je suis on ne peut plus sûre de soie ! assure Dame Moquette, qui perd tout de même un peu de sa superbe.
    — Mais… ça n’a aucun sens… c’est complètement futile… insiste Père Parquet, décidément persécuteur de la première heure.
    — C’est vous qui êtes textile !!!! VOUS CRAMEZ !!! hurle soudain Dame Moquette.
    — Moi ?? Crâner !? Mais c’est vous qui jouez la razmoket depuis tout à l’heure !
    — NON, VOUS ÊTES EN TRAIN DE CRAMER ! DE PRENDRE FEU ! panique Dame Moquette.
    — Mon dieu !! Mais faut qu’on débarrasse le plancher tout de suite !!! s’écrie Père Parquet en sentant les flammes le chatouiller.
    — À qui le dites-vous ??? Mais j’peux pas, je suis tissée jusqu’au bout ! s’époumone Dame Moquette, sentant la chaleur la titiller.
    — Oh, et moi qui ne peux pas flotter !!!
    — Partir en fumée, pour une moquette !
    — Plus jamais je ne prendrai des moquettes pour des tapis !
    — Plus jamais je ne rendrai injustice aux parquets !
    Hélas pour ces repentards,
    Remords venus sur le tard,
    L’incendie fit rage dans le bâtiment,
    Emportant tout massivement,
    Mais que le lecteur se console,
    Plus jamais on n’évoqua le droit des sols.

    • Merci Sabrina pour ce « rutilant » petit texte qui se devait de l’être tant Dame moquette et père Parquet se vantent d’être bien « shampouiner ». Vous ne vous avez pas dit, si de là où ils se trouvent désormais, après avoir pris feu l’un et l’autre, ils font ensemble un « clan sur la comète ».

    • mijoroy dit :

      Ah Sabrina, je reconnais bien là ton style enlevé, percutant et saupoudrer d’humour. Razmoket, fallait le placer celui-là. Idem pour polyglotte et polyester.

  4. Francoise dit :

    Une moquette se chamaille avec un parquet à propos du droit des sols.
    Réveillée brusquement par leurs cris, je leur demandai de se taire
    et dans leur langage je leur précisais que je n’avais jamais entendu parler du droit des sols et vous « La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, née à l’été 1789 » ça vous dit quelque chose ?
    Je pris leur silence pour une négation.
    On sonna à la porte, c’était sans doute l’entreprise qui allait rénover les sols.
    Le parquet mécontent grinça, les poils de la moquette se hérissèrent, mais ils ne pouvaient qu’accepter leur sort.
    Quelques heures plus tard, chargés dans un camion, ils roulaient vers une décharge, pensèrent-ils, mais à leur grande joie, on les déchargea dans le garage d’un pavillon. Ouf se dirent-ils « on a quelques bonnes années devant nous »
    Huit jours après, ils recouvraient l’un le sol d’une salle à manger, l’autre d’un salon.
    Les habitants étaient super sympas, ils faisaient souvent des fêtes, les filles avaient des mini-jupes sexy, on se rinçait l’oeil. Moi la moquette on me shampouinait fréquemment ,-les acariens avaient une courte vie – quant au parquet, on le nettoyait avec un produit adéquat et on le cirait. Tout le monde s’extasiait sur notre beauté.
    Et puis un jour les choses se gâtèrent,la maison hypothéquée fut mise en vente, les meubles vendus, le chauffage coupé et depuis quelques mois La maison est ouverte à tous vents.

  5. françoise dit :

    Une moquette se chamaille avec un parquet à propos du droit des sols.
    Réveillée brusquement par leurs cris, je leur demandai de se taire
    et dans leur langage je leur précisais que je n’avais jamais entendu parler du droit des sols et vous « La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, née à l’été 1789 » ça vous dit quelque chose ?
    Je pris leur silence pour une négation.
    On sonna à la porte, c’était sans doute l’entreprise qui allait rénover les sols.
    Le parquet mécontent grinça, les poils de la moquette se hérissèrent, mais ils ne pouvaient qu’accepter leur sort.
    Quelques heures plus tard, chargés dans un camion, ils roulaient vers une décharge, pensèrent-ils, mais à leur grande joie, on les déchargea dans le garage d’un pavillon. Ouf se dirent-ils « on a quelques bonnes années devant nous »
    Huit jours après, ils recouvraient l’un le sol d’une salle à manger, l’autre d’un salon.
    Les habitants étaient super sympas, ils faisaient souvent des fêtes, les filles avaient des mini-jupes sexy, on se rinçait l’oeil. Moi la moquette on me shampouinait fréquemment ,-les acariens avaient une courte vie – quant au parquet, on le nettoyait avec un produit adéquat et on le cirait. Tout le monde s’extasiait sur notre beauté.
    Et puis un jour les choses se gâtèrent,la maison hypothéquée fut mise en vente, les meubles vendus, le chauffage coupé et depuis quelques mois La maison est ouverte à tous vents.

  6. Dominique PORHIEL dit :

    Une moquette se chamaille avec un parquet à propos du droit des sols
    – moi, je te dis qu’il faut que ce soit droit. Point.
    – Mais c’est quoi « droit » ? … pas gauche ? c’est ça ?
    – Mais non ! rien à voir !
    – Ben « voir » justement ! c’est important !
    – Non, ce n’est pas une question de « droite » ou de « gauche » c’est une question d’es-thé-ti-que !
    – D’es-té-quoi ?
    – De faire joli ! beau, quoi !
    – Mais, moi, je sais faire joli-bo ! je m’adapte, moi ! Je ne suis pas rigide, moi ! Je n’en ai que faire du point de HONGRIE.
    – Tu n’as en fait aucun mérite !
    – Le « mérite » ah parlons-en ! du mérite ! Sais-tu au moins de quoi tu parles ?
    – Ben oui, forcément ! Le mérite c’est ce qu’il y a de plus beau ; ce pour quoi nous oeuvrons cherchant toujours à faire mieux, plus haut, plus fort !
    – Ah ! parce que tu as besoin de reconnaissance, toi ? Ta propre satisfaction ne te suffit pas ?
    – Bien sûr que si ! enfin …
    – C’est bien ce que je dis ! Il te faut en baver, souffrir … pour qu’enfin tu penses mériter ta position ! et quelle position !!!! foulé aux pieds des riches, des monarques de tous temps !
    – Oui, c’est un honneur ! j’ai subi les assauts des plus brillants, des plus illustres ! Je saurais reconnaître entre tous, les pas d’un Louis quelque chose ou d’un Robespierre, ou encore d’un Charles …
    – Moi, je me moque bien de tout cela ! et tu sais pourquoi ? Parce que je descends tout droit des tapis volants ! Et que, certes j’ai atterri dans les palais luxueux comme toi ! Mais moi, personne ne me foule aux pieds …. Je suis une moquette murale !!! et paf !

    • Sabrina P. dit :

      Paf, la vengeance de la moquette murale, qui ne se laissera pas marcher dessus, non mais ! Illustres personnages ou pas ! Belle journée, Sabrina.

  7. Françoise Rousseaux dit :

    Du plus loin qu’elle se souvienne, la petite fille passait toutes les vacances scolaires chez ses grands-parents, dans la Vieille Maison. Elle s’y plaisait beaucoup, même si, parfois, il lui arrivait de s’y ennuyer, notamment quand les enfants de la ferme voisine n’étaient pas disponibles pour jouer. Mais finalement, ces moments d’ennui n’étaient pas si désagréables ; elle avait pris l’habitude, quand elle ne savait que faire, de passer un moment dans le grenier de la Vieille Maison. C’était un vaste espace , bien éclairé, grâce aux fenêtres situées sur chaque pignon. Un parquet lisse et doré couvrait tout le sol ; des vieux meubles et des cartons étaient alignés proprement le long des murs et un tapis rouge s’étalait sur une grande partie du parquet.C’était un vaste rectangle de moquette rase, qui, après quelques années de bons et loyaux services, avait été relégué au grenier. La petite fille, quand elle arrivait , enlevait ses chaussures et se couchait sur la moquette ; puis elle écoutait.
    – Mais qu’est-ce qu’elle écoutait ?
    – Eh bien, la moquette et le parquet qui se chamaillaient .
    – … ?
    – Eh oui, ils en profitaient ! Enfin une oreille attentive pour y déverser leurs griefs respectifs !
    – Et ..heu..qu’est-ce qu’ils racontaient ?
    – Ils ne racontaient rien, ils se chamaillaient ! Par exemple, en été, quand la chaleur du soleil sur les tuiles écrasait le grenier, le parquet reprochait à la moquette de lui tenir chaud ; il n’en pouvait plus, il étouffait !
    – Et la moquette ?
    – Elle , elle se plaignait qu’il craquait toute la nuit ; ça l’importunait , ça l’empêchait de dormir ! Mais le parquet rétorquait que ses craquements faisaient peur aux souris et que ça l’arrangeait bien , la moquette, car ces petits rongeurs impénitents n’osaient pas s’approcher d’elle pour la goûter ! Tandis que lui, à moitié asphyxié, il n’en pouvait plus de ce poids mort!Et en plus, elle amassait la poussière !
    – Quoi, s’étranglait la moquette, la poussière est coincée entre tes lattes et c’est moi qu’elle envahit !
    – Et patati et patata !……
    La petite fille se délectait de leurs querelles, mais un jour, elle finit par se lasser. Alors elle décida de rouler la moquette pour libérer le parquet de son poids. Seulement Dame Moquette fut tellement vexée qu’elle bouda pendant un mois ! Un après-midi d’hiver alors qu’elle s’ennuyait dans le grenier, l’enfant eut une idée ; elle ouvrit une des fenêtres, s’assit en tailleur au milieu de la moquette et déclara : «  Abracadabri abracadabra ! Envole-toi par la fenêtre et nous irons explorer le vaste monde !  »
    Et, aussi incroyable que cela paraisse, la vieille moquette, promue tapis volant, put quitter le parquet et partir au-dessus de la campagne enneigée. La nuit tombait quand elle revint avec sa conductrice et s’étala à sa place habituelle avec un soupir d’aise.
    – Ah enfin, marmonna le parquet, je commençais à me faire du souci !
    Et c’est ainsi que cessèrent les chamailleries, car au fond, ils étaient trop habitués l’un à l’autre pour supporter de rester séparés trop longtemps. La moquette, après chaque expédition, lui racontait tout ce qu’elle avait vu et le parquet, ravi, l’écoutait avec attention.
    Les mois passèrent, puis les années. La petite fille grandit et cessa de croire aux tapis volants. Les grands-parents déménagèrent, la Vieille Maison fut vendue et je ne sais pas ce qu’il advint des occupants du grenier. Mais que j’aimerais parfois y revenir et écouter de nouveau les chamailleries du parquet doré et de la moquette rouge, dans le pays magique de mon enfance, à présent si lointain !

    • mijoroy dit :

      Belle histoire comme seuls les enfants peuvent en inventer. Je partage avec vous l’idée que c’est une période , lorsque l’on devient adulte qui est source de regrets bien souvent 🙂

    • Sabrina P. dit :

      Jolie histoire, où finalement la chamaillerie est un synonyme de camaraderie. J’ai beaucoup apprécié cette balade dans les souvenirs de cette maison (et mince, moi aussi, j’ai utilisé l’expression Dame Moquette 😉 ). Belle journée, Sabrina.

    • Françoise Rousseaux, merci pour ce petit conte. Trop de proximité génère souvent des querelles. Il suffit parfois de se quitter un peu pour mieux se retrouver.

  8. Le bougre tempêtait ; de toutes ses fibres de bois émanaient de sinistres craquements. Un accueil à « la paille de fer » ! Les planchers d’autrefois en ont gardé la mémoire dans leur ADN et ils vous la ressortent quand ils sont mal lunés.

    Elle considéra le malotru : son aspect négligé, les failles entre les lamelles, les rayures à sa surface, telles de douloureuses balafres. De toute évidence, il était encore sous le choc de siècles d’oubli. D’où cet état de dégénérescence avancée alors qu’un plancher à la peau dure, comme on le sait.

    Après avoir scanné la situation, la moquette ouvrit le dialogue.

    — Que me vaut votre mauvaise humeur ? Croyez que je ne suis là que contre mon gré et je crains bien, à vous voir, que je ne sois pas davantage respectée que vous ne l’avez été.

    Cette remarque « à vous voir » vexa le plancher qui répliqua :

    — Qu’en savez-vous ? Votre élégante présence, ici, a un coût. Et même si à mes yeux elle n’a aucune valeur, il n’en reste pas moins que, dans un premier temps, nos occupants prendront soin de vous !

    La moquette encaissa le coup qui venait de lui être porté. Il y avait là quelque chose de l’ordre de la goujaterie. Elle le lui fit remarquer.

    Le plancher se fâcha.

    — J’ai bien compris, Madame, que sous votre regard, j’ai triste figure. Et que la raison de votre visite n’a d’autre but que de masquer ma laideur.

    Le dialogue prit feu.

    — De quelle laideur parlez-vous enfin !

    — N’avez-vous pas évoqué mon état ?

    — Trêve de coquetterie, Monsieur ! Dans ces mauvais traitements qui vous sont faits, je ne voyais que vos blessures !

    — Ah ah, Madame, verse dans l’analyse !

    — Celle qui vous manque précisément. Je ne suis pas votre ennemie.

    — Tiens donc ! Vous allez me passer sur le corps et je n’aurais pas mon mot à dire !

    — D’autres que vous s’en réjouiraient !

    — Je crains que ce soit vous la coquette, Madame. Tous les charmes que vous déployez ne vaudront jamais la lumière dont vous allez me priver.

    Cette objection fit mouche et la moquette s’en trouva toute retournée. Sur son envers, elle avait moins fière allure que sur sa surface, mais cela eut pour mérite de toucher le plancher qui, d’un coup, songea qu’il ne fallait pas se fier aux apparences.

    — Madame, ne vous mettez pas dans cet état. Je vous fais mes excuses. À bien y réfléchir, la pièce dans laquelle nous sommes reçoit très peu de lumière. Et votre présence, tout compte fait, pourrait m’apporter un peu de cette chaleur qui me fait tristement défaut.

    À ces mots pour le moins renversants, la moquette balbutia :

    — Que de civilités Monsieur, mais au fond, je n’en attendais pas moins de vous.

    Malicieusement, et pour cacher son trouble, le plancher ajouta :

    — Il le faut bien, Madame, puisque nous voici promis à une cruelle proximité.

    • Sabrina P. dit :

      Dialogue joliment construit, la dernière phrase n’en est que plus fameuse 😉 ! Finalement, parquet et moquette ont l’air de bien s’acoquiner. Belle journée, Sabrina.

      • Merci Sabrina pour l’intérêt que vous avez manifesté à mon texte et à ceux des autres. Une belle posture d’esprit que j’aime beaucoup car, chacun, ici, a son propre mérite à relever le défi d’un nouvel exercice. Et son propre imaginaire.

  9. Opaline34 dit :

    Cela faisait longtemps que madame moquette et monsieur parquet se chamaillaient sans cesse.
    Monsieur Parquet voulait reprendre possession de l’ensemble de la maison
    Madame Moquette résistait, tant bien que mal.
    Elle savait que petit à petit, son territoire allait se réduire.
    Mr « Dis donc, pourquoi luttes-tu ainsi, alors que tu sais que je vais finir par gagner ? »
    Mme « Parce ce que, toute ma vie durant, j’ai lutté »
    Mr « Peuf ! Abandonne l’affaire… »
    Mme « Non vraiment, je ne peux… »
    Mr « Tu es vraiment coriace, toi ! »
    Mme « Pourquoi, tu en doutais ? J’ai bien plus de courage et de force que tu ne l’imagines. Et arrêtes un peu avec tes airs arrogants »
    Mr « Quelle susceptibilité !!! »
    Mme « Fous moi la paix et surtout ne crois pas que c’est parce que tu étais là avant moi que tu as tous les droits »
    Mr « Tu sais, moi, pendant toutes ces années où tu me recouvrais, j’étouffais, littéralement, alors maintenant ce n’est que le juste retour des choses »
    Mme « Pardon, le juste retour des choses ? »
    Mr « Oui, me voici de retour en conquérant, tu vas bientôt disparaître »
    Mme « Ce n’est que pour un temps. Garde bien à l’esprit que je serai vite de retour !»

  10. Coriandre dit :

    Dans une demeure bourgeoise classée du 18ème siècle, une violente dispute éclata entre Sieur Parquet et Damoiselle Moquette récemment installée dans les chambres.
    Parquet invectiva Moquette en lui déniant le droit de partager le sol avec lui, lui dont l’existence avait traversé les âges.
    – Moquette, avez-vous au moins un tantinet de respect pour notre législation ?
    – Quelle législation ? répondit la jeune moquette interloquée.
    – Eh bien, je considère, voyez-vous que je me trouve spolié dans mes droits depuis que l’on vous a installée dans les chambres de cette honorable bâtisse. Vous n’êtes pas née ici.
    – Relisez la constitution, Parquet, nous sommes tous libres et égaux en droit, que je sache ! lui rétorqua-t-elle avec véhémence.
    – Que faîtes-vous enfin de mon ancienneté ? J’ai été fabriqué sur cette terre non loin d’ici et les parquets jonchent le sol depuis la construction de ce bâtiment, mes ancêtres l’agrémentaient déjà !
    – Oh là là je n’en reviens pas ! Cà ne va pas tourner à la crise identitaire tout de même ! Pour tout vous dire, Parquet, l’on m’a préféré à vous dans les chambres car les propriétaires pensent que je suis plus confortable pour décorer les chambres, plus chaleureuse aussi. D’ailleurs, j’ai surpris une conversation des occupants qui disaient : j’opterai pour cette moquette car elle donne une ambiance plus « cosy » que ce parquet qui fait un peu vieillot! En effet, sur vous, on glisse surtout lorsqu’on vous maquille de cire. D’ailleurs, votre dureté n’a d’égale que votre mauvaise foi ! dit-elle avec aplomb.
    – Vous êtes insolente, Moquette, votre attitude est tout simplement incongrue ! Je suis d’accord avec vous sur un seul point, je reconnais que vous avez un droit, lequel me direz-vous ? Le droit de vous taire et de repartir d’où vous venez ! Vous êtes vulgaire et vous avez l’outrecuidance de débarquer avec vos fibres qui retiennent la poussière au point de déclencher une allergie générale dans cette maison. De plus, je disparais sous vous, vous m’étouffez et cela m’est insupportable ! Je vais vous dire une chose, vous n’êtes qu’une usurpatrice en mal d’identité si bien que vous mendiez un statut auquel vous n’accèderez jamais car je suis le fier et illustre fondateur de la Ligue des Parquets et je vous assure que nos revendications font déjà grand bruit dans tout le pays ! Même les valeureux tapis soutiennent notre mouvement et nous ne vous accorderons jamais le pouvoir de dénaturer nos maisons et répandre vos nuisances et odeurs nauséabondes ! lui asséna-t-il.
    – Vieux réac ! la tolérance, l’humanisme çà s’apprend. Vous m’interpellez parce-que j’ai commis un délit de faciès peut-être, vous êtes tout simplement sectaire ! Faites attention, vous avez un égo à rayer tous les parquets ! Rester dans l’entre-soi ne permet pas de faire progresser le monde, prônez l’ouverture Parquet !
    Sieur Parquet piqué au vif et très courroucé est sur le point de violenter la moquette.
    Damoiselle Moquette s’en aperçut et fit marcher à cent à l’heure ses neurones pour sortir de ce dialogue de sourds.
    – Ecoutez-moi, Parquet, le monde s’étripe outre frontières, il est préférable de mettre un terme à notre discorde. Comme vous avez, à vous en croire, beaucoup de relations parmi les élus, je vous propose de les sensibiliser à lancer un référendum sur le sujet. Comme cela il sera statué définitivement sur la liberté des propriétaires de demeures anciennes à procéder à la pose de moquettes.
    – Damoiselle Moquette, j’accepterai bien volontiers votre proposition avec tous les risques qu’elle comporte mais il y a un autre problème auquel vous ne songez pas.
    – Lequel Sieur Parquet ?
    – Cette maison est classée et au regard de la législation, ce qui signifie qu’au regard du cahier des charges, les propriétaires ne peuvent pas jouir d’une liberté absolue… Comprenez-vous ?
    – Ah je vois ! Somme toute c’est encore une affaire de classe sociale comme si les pieds des propriétaires devaient subir le diktat de cette réglementation ! Que faites-vous de la liberté des propriétaires, décidément, c’est une négation du droit de propriété. Laissez tomber ma proposition de référendum, je pars ester en justice au nom de toutes les moquettes qui semblent avoir l’impudence de s’implanter dans les demeures classées !

    Ainsi pour reprendre la citation de Tahar Ben Jelloun : « La nature crée des différences, la société en fait des inégalités ».

    • mijoroy dit :

      Je retiens « un ego à rayer le parquet ». Bien écrit avec un vocabulaire ad hoc en matière juridique.

       

       

    • Sabrina P. dit :

      Décidément, les deux se tiennent tête et la citation de Tahar Ben Jelloum est fort bien trouvée pour terminer cette dispute qui finit en consensus ne satisfaisant personne ! Belle journée, Sabrina.

  11. Alain Granger dit :

    Parquet – J’ai pour moi le droit du sol car je suis bien plus ancien que toi. Du sang bleu a coulé sur mes veines, sur le plancher des châteaux, bien avant que l’industrie te donne naissance.
    Moquette – Tu es certes plus ancien dans l’Histoire, mais la révolution française puis la révolution industrielle m’ont démocratisée. L’ancienneté ne fait rien à l’affaire. J’ai la fibre des gens modestes alors que tu es devenu bien trop élitiste pour couvrir les sols des couches populaires.
    P – Tu te tapis dans l’ombre de ma grandeur. Tu as certes la peau lisse mais je garde la justice, celle du parquet. Mon élégance et ma distinction ne m’empêche point d’être chaleureux. Je le suis dans ma couleur comme dans la matière dont je suis composé, bien plus que le carrelage, qui conserve l’âge de glace du revêtement de sol.
    M – En terme de chaleur je te suis grandement supérieur. Mais parlons-en de ta matière. Tu es un hypocrite qui cherche à te rendre populaire en diminuant ton coût par des malversations. De massif tu deviens contrecollé ou, pire encore, stratifié. De bois il n’y a plus que l’image. Tu te plastifies et t’aplatis devant les percepts du marketing, du parqueting. C’est honteux. Autrefois tu étais posé, à damier. Mais tu t’es damné pour mettre les carrés de Versailles sous les pieds du petit cantonnier. Autrefois cantonné aux figures géométriques, aujourd’hui tu n’es point de Hongrie, tu frises l’importation chinoise comme un géo métreur.
    P – Tu es bien mesquine. Le stratifié reste marginal et ne touche que ceux qui aspirent à devenir plus nobles. Quant à l’aspiration elle est bien plus aisée sur le parquet. Je n’ai point le poil qui retient la poussière. Et pour la respiration je ne suis pas envahi d’acariens, des êtres qui ne servent à rien, si ce n’est favoriser les crises d’asthme.
    M – Tu veux plaisanter ! Mon sol textile capture les poussières et empêchent leur propagation au sein de nos poumons. Des pneumologues le recommandent.
    P – Des charlatans de Marseille, des professeurs en mal de publicité, je suppose.
    M – Oui j’ai obtenu l’avis de Charles à temps, à temps pour confondre tes arguments. Tu n’es qu’un jaloux. Tu envies mes qualités de confort et d’insonorisation. Et dans le domaine de l’élégance je te rattrape en m’étalant à l’Elysée et en recouvrant centaines chambres des députés. Bien sûr tu peux me mépriser parce que je travaille à la chaîne et que je suis bouclé mais le consommateur reste en haleine devant le choix que je lui propose. Il adore ma fibre de laine, de jonc de mer, ou de coco sans être communiste, ou de sisal pour demeurer naturel.
    P – C’est bien ce que je disais peu avant chasser le naturel, tu restes si sale que bien des consommateurs te fuiront.
    M- Tu es de mauvaise fois. Tu rejettes le compromis pour la compromission. Nous renterons donc sur nos positions. Fin de la discussion !

  12. mijoroy dit :

    ─ Apprenez mademoiselle qu’à l’heure où vous sortiez à peine de l’œuf comme simple moucade, ma noble réputation comme revêtement de sol était bien installée depuis le Moyen-Age. Par conséquent, notre légitimité comme référence en matière de couverture des espaces, tant dans les lieux de grande renommée comme les châteaux ou les abbayes n’est plus à démontrer.
    ─ Parlons-en de votre suprématie réservée qu’à l’aristocratie, tant votre exploitation, comme votre finition coûtent au poumon de la terre et au porte-monnaie.
    ─ Contrairement à vous, je suis fait de fines feuilles et lames des bois les plus rares. Je ne donne pas dans le synthétique moi. Je fleure bon l’encaustique. J’offre une ambiance bien plus cosy que vos bouclettes de laine qui accueillent la communauté des acariens. Ceux -ci copulent, et pondent en veux-tu en voilà, soit dit en passant, dans de bonnes bourres faites de particules de poussière et de différents débris qui échappent aux occupants des lieux. Encore une fois vous ne faites que polluer l’ambiance des sols intérieurs. Vous n’êtes qu’une honte pour le revêtement et n’avez pas les qualités pour perpétrer une lignée royale.
    ─ Balivernes, les meilleurs ingénieurs de chez Dyson ont inventé le plus puissant des aspirateurs sans fil, excusez-moi du peu, afin de mes débarrasser au quotidien de toutes impuretés. En un rien de temps, je retrouve tout le velours et l’aspect soyeux de mon manteau. Tout cela bien sûr avec le minimum d’effort pour els ménagères. Pas besoin d’huile de coude pour me lustrer. Tout est dans la légèreté du poignet.
    ─ Vous êtes loin d’avoir une âme aussi patinée, polie, par des maîtres parqueteurs., qui savent mettre en valeur les nervures, et les nœuds des bois qui nous composent. Nous n’avons pas besoin d’être shampooinés d’aérosols de manière intempestive pour nous mettre sur notre trente et un. De plus cela est très nocif pour les poumons des ménagères. Encore une fois, n’ayant pas le label protection de l’environnement, il est hors de question que vous puissiez figurer parmi le gratin des sols les plus tendances. Vous n’êtes que souillures pour le bien être des pieds que vous accueillez. Vous n’accueillerez jamais les grands danseurs, n’entendrez jamais le frou-frou des crinolines.
    Miss Moquette, n’eut pas la répartie, car à cet instant Judith rejoignait ses parents qui choisissait la couverture de sol la plus adéquate pour leur nouvelle maison, qu’elle fut bousculée par Nathan son intrépide frère, qui essayait dans les travées du salon d’exposition sa nouvelle trottinette. En moins de temps qu’il ne faut pour le dire, la boule de glace de son cornet, atterri sur belle carpette et que son frère déséquilibré fit un vol plané, rayant au passage Monsieur Parquet qui en resta coi.
    ─ Tu vois mon chéri c’est pour ce genre d’incidents que je préfère du béton ciré.

    • Sabrina P. dit :

      Coucou Mijo !! C’est rigolo, j’avais opté pour la même sortie où finalement à force de se chamailler, il n’y aurait plus moquette ni parquet ;), mais j’ai changé en route ! Bref, comme d’habitude, j’ai bien aimé ta dispute entre les 2, chacun défendant son bout de gras (ou de sol) avec cette fin très ironique qui balaie ainsi tous les soucis ! (PS : des « coquillettes » ici et là, des fautes de frappe j’imagine que tu enlèveras sur ta page FB de textes hihi) Belle journée à toi, Sabrina.

  13. Nadine de Bernardy dit :

    Pousse toi d’là que j’m’y mette
    Dit le parquet à la moquette
    Je ne vois pas pourquoi,répond celle-ci
    J’ai le droit d’être là aussi
    Oui mais tu débordes sur mon salon
    Avec tes poils vraiment trop longs
    Poils trop longs,j’ten ficherai
    Espèce de vieux ronchon de parquet
    Tu t’es bien regardée, t’es toute raplapla
    On s’demande ce que tu fais encore là
    J’accueille avec douceur les pieds nus
    Sans risque d’échardes pointues
    On entendit alors un bruit de moteur
    C’était celui de l’aspirateur
    Les deux ennemis cessèrent
    Leur vaine querelle dans la poussière
    Chacun cherchant des arguments
    Pour un nouvel affrontement.

  14. Grumpy dit :

    Vous savez pourquoi Nonette et Nono vont ce samedi à l’Entrepôt du Bricolage ? Parce que la vieille, elle est morte, celle à qui ils payaient un viager depuis 25 ans. Ça faisait une paye … alors évidemment, l’appart, il avait besoin d’un sacré coup de jeune. Pour commencer : tous les sols à refaire.

    Les voilà au rayon adéquat : moquettes en gros rouleaux, parquets en plaques échantillons. Du choix à s’en tourner la tête, de l’uni, des motifs, des couleurs, du classique, du style …

    Ils réfléchissent en silence: parquet pour le salon et les couloirs, moquette pour les chambres. Ils testent hauteur et douceur des poils de l’un, poli et le chevrons de l’autre. Ils sont presque décidés quand, stupéfaits …

    Voilà que moquette et parquet se mettent à s’engueuler. Du jamais ni vu ni entendu, ça alors. On dirait que ça commence à tourner au vinaigre.

    – Sale jaloux ! Avec 3 chambres, sûr ils vont m’acheter bien plus de surface qu’à toi

    – T’en sais rien, le salon il est vaste et il y a les couloirs, ça fait un paquet de mètres carrés, et puis, ma pauvre vieille, si ça se trouve ils vont changer d’avis, la moquette ça ne se fait plus depuis les années 80, ils étaient cinglés les gens à l’époque, ils en collaient même sur les murs, comme malsain, depuis, on n’a pas fait mieux

    – Et toi, t’es pas vieux peut-être, tu pues le vieux palais, le musée rasoir, le vieux patrimoine, d’abord si t’es pas au courant, c’est le lino façon parquet qui est à la mode maintenant

    – Possible mais je suis fier de mes ancêtres, parce que j’en ai moi, le chêne lui, il dure des siècles, j’ai même été raboté par Caillebotte, na ! … les valses de ma cireuse ne font qu’embellir ma patine, alors que ton aspirateur n’avale que des saletés

    – Peut-être mais moi on m’aime parce que je suis douce aux plantes des pieds, c’est pas comme toi avec tes échardes

    – h ouais, toi à la longue tu puerais pas des pieds ? Espèce de synthétique, va !

    – Parquet taré

    – Moquette carpette

    et gna et gna ….

    Nonette et Nono sont interloqués :

    – Ben, dis-donc, ces deux-là c’est du « Je t’aime, moi non plus »

    S’ils doivent continuer ce cirque à la maison, ça va pas aller du tout, du tout, celui des gosses est déjà bien suffisant. Tu sais quoi Nonette ? Non Nono. Eh ben je te le dis moi : viens, on file au rayon des carrelages.

  15. 🐻 Luron'Ours dit :

    🐻 LES ENTRETIENS D’UN PARQUET ET D’UNE MOQUETTE SUR LE DROIT DU SOL

    Madeleine
    Reçu au conseil de révision tu feras tes 3 jours. Tu seras apte à tout arrivé en gare de Commercy, passer le gâteau célèbre en effigie et en parfum, te voilà incorporé. Biffin ! À pied. Ici, ne déroule pas le tapis rouge, on adhère au plancher des vaches ! Pour la plupart, ça ne change rien.
    Madame Laverdure elle, avait changé ses tapis d’Orient pour de la moquette, affirmant qu’ainsi elle votait avec ses pieds. L’époux haussait les épaulettes, il était du bois qu’on fait les flèches et on savait au quartier duquel il se chauffait. Pourtant, il ne fréquentait guère nos baraquements qui dataient d’avant-guerre. Un jeune poète lisait Nadia, personne ne connaissait Courteline, et pourtant… Si cet auteur revenait de nos jours il nous aiderait à nous ébattre par sa justesse, sa fantaisie, son à- propos.🐻

  16. FANNY DUMOND dit :

    – Ôte-toi de là, tu me bouches la vue ! s’agace Parquet.

    – Oh la ! pour qui tu te prends, vieux chnoque, répond Moquette.

    – Vieux chnoque, vieux chnoque, s’émeut Parquet. C’est pas la politesse qui t’étouffe-toi. Mais ça ne m’étonne pas, les jeunes sont si mal élevés de nos jours, de mon temps on…

    – Ouais, vous les vieux vous n’arrêtez pas avec votre bon vieux temps. J’ai autant le droit de vivre et de travailler que toi.

    – Moi, ça fait cinquante ans que je vis dans cette maison et toi tu viens d’arriver et tu veux déjà faire ta loi. Prends garde à toi, je vais te pourrir la vie.

    – Ah, ah ! ne trouve qu’à répondre Moquette. Je vois, je ne suis même pas étonnée de ton ostracisme.

    – Moi, je suis en chêne et je viens d’une forêt bien de chez nous, tandis que toi tu arrives de Chine, c’est marqué sur ton étiquette.

    – Je crois bien que ça ne va pas le faire nous deux ! s’écrie-t-elle. C’est pas ma faute à moi, si elle m’a posée sur toi devant son canapé pour avoir chaud aux pieds. Toi, t’es froid comme un glaçon, c’est le cas de le dire. Tu as tout le reste de la pièce pour toi, alors de quoi tu te plains ?

    – …

    – Tu sais plus quoi répondre, se marre Moquette. Je suis plus belle que toi avec mes couleurs qui ravivent ce salon.

    – Moi, je lui donne du cachet à cette maison, tandis que toi, je ne te donne même pas deux ans pour être expulsée.

    – Je me demande si j’ai bien fait de mettre ce bout de moquette ici, s’interroge la maîtresse de maison. Elle est difficile à entretenir et, en plus, Réglisse se fait les griffes dessus.

  17. Nouchka dit :

    – Dis donc Moquette, tu ne pourrais pas te taire un peu. Je suis excédé de t’entendre vociférer depuis des heures.
    – Désolée Parquet ; je ne suis pas ici de mon plein gré et je ne demanderai pas mieux que de m’envoler vers d’autres horizons.
    – Qu’est ce qui t’en empêche ?
    – Tu n’as peut-être pas remarqué mais je suis attachée et tenue d’attirer d’autres oiseaux ici.
    – C’est quoi ce délire ? Tu me dis qu’il va y avoir d’autres oiseaux que toi à venir sur mon herbe ?
    – Et oui Parquet, c’est la règle du jeu. Il faut bien que je sois posée dans la nature, là où vivent les oiseaux afin qu’ils soient attirés par mon chant, viennent voir ce qui se passe et pousser par la curiosité, se fassent prendre au piège qui les attend à côté.
    – Mais tu n’as jamais entendu parler du droit des sols ?
    – Oh Parquet, le droit des sols n’est pas plus important pour moi que le droit de l’air ou de l’eau.
    – Et cela ne te chagrine pas de faire le jeu de ceux qui en veulent à la vie des oiseaux ?
    – Je n’ai pas le choix. Si je ne chante pas je serai remise en cage plus rapidement car les hommes percevront mon inutilité. Alors que là Parquet, sur ta terre bien grasse, je trouve les vers dont je raffole pour me nourrir. Cela me change des graines dures que l’on me donne d’habitude comme nourriture.
    – Je ne peux donc rien faire pour te chasser de mon pâturage.
    – Si tu en as la volonté, trouve le moyen de me détacher.
    – C’est un comble. Tu m’embêtes, tu ne respectes pas le droit de propriété et tu voudrais que je te rende service. – Tu fais ce que tu veux Parquet.
    Toi, tu m’embêtes également avec tes considérations administratives. Tu me gâches un moment de bonheur dans les parfums d’herbe, de fleurs sauvages, de bouses de vaches et du vent qui ploie les graminées. Elles me chatouillent agréablement et leurs épis m’offrent un dessert de choix.
    Bon, c’est pas tout çà mais tu m’empêches de chanter avec tes tracasseries.
    – A çà alors ! Je vais me faire enguirlander alors que je suis sur Mes terres et dans Mon droit.
    – Tu fais ce que tu veux mais considère que tu as devant toi une condamnée et que la moindre des choses serait de ne pas lui gâcher ses derniers moments pour des broutilles auxquelles elle ne peut rien.
    – Alors, je crois que je vais attendre l’arrivée des hommes et tenter de m’expliquer avec eux.
    Bonne chance Moquette, je ferme mes écoutilles et espère que tes chants n’amèneront pas ici trop de volatiles piailleurs.

  18. Laurence Noyer dit :

    Moquette et Parquet s’ennuyaient ferme
    Dans les rayons de Bricocorico
    En attendant que quelqu’un vienne
    Adopter leurs rouleaux et tasseaux

    Je suis de bonne souche dit Parquet
    Je descends des plus grandes forêts
    Mon père, de culture agraire
    Fait autorité en la matière

    Je suis née d’un mélange dit Moquette
    D’une chaine tissée de fibres à bouclette
    Assortie de couleurs panachées
    Et de représentations variées

    Droit du sol, droit du sang…
    Depuis la nuit des temps
    Nous sommes tous les enfants
    D’un ADN en tapis volant

    D’une Marqueterie bariolée
    Tissu social de nos diversités
    A travers nos racines, toutefois
    Nous sommes tous faits du même bois.

  19. Antonio dit :

    — Forcément, parce que monsieur a été une fine lame de la salle de justice il faudrait que je te laisse le dernier mot. Non, les sols n’ont pas tous les droits. S’il est ancré de souche sur notre terre-mère, je dis pas. Mais le sol d’un appartement étranger à nos racines, ne peut pas faire le ciment de notre état de la même façon. Encore, s’il était franc maçon, je dis pas.

    — C’est que tu en tiens une sacrée couche, toi ! Je le répète, c’est dans leur constitution. Tous les sols naissent libres et égaux en droit, au même niveau, quoi ! Tous traités sur le même plan, sinon le monde ne marcherait pas droit dessus non plus. Mais à la fin, tu as peur de quoi ?

    — Qu’on nous enfume, encore ! Tous les acariens qui migrent chez nous, nourris, logés à nos frais, ce n’est plus possible ! Toi t’en as rien à cirer, c’est pas chez toi qu’ils s’installent en colonie de vacances, à agresser mamie qui glisse en patins.

    — Tu mélanges tout. Si tu hérissais un peu moins tes poils à la laine fétide, peut-être qu’ils changeraient de crémerie. Un peu plus d’hygiène, tu sais, ça fait pas de mal pour une bonne intégration. Tu as essayé le bicarbonate de soude ?

    — À coup de karcher de fongicide, je vais te les dessouder, moi. Ces sols ont besoin d’un bon ménage pour éradiquer ces moisissures et champignons qui rendent notre parterre insalubre.

    — Tu sais, quoi ? Tu me déssoles… Je ne sais pas pourquoi je discute avec toi.

    — Peut-être parce que madame a pris mon parti pour recouvrir nos sols. C’est son droit d’essayer, non ?

    — Mouais, peut-être… Depuis le temps que ses dents rayent mon parquet, elle pourrait bien réussir à exécuter son plan sous le tapis.

  20. LAFAURIE Alain dit :

    – Le problème avec vos poils frisés c’est que vous ne vivez pas seule. Vous êtes comme qui dirait habitée. Alors je dis halte au regroupement familial et à la pullulation des poussières et autres acariens.
    – Tu n’es pas mieux avec ton élevage de moutons à croire que tu en as pris leur caractère casanier et replié sur eux-mêmes.
    – Je vois, Madame veut qu’on la brosse dans le sens du poil. Mais Madame sait-elle qu’elle est une fraîche parvenue ? Que son histoire ne date de quelques années ? Moi, Madame j’ai fait valser toute la Cour de Versailles dans la Galerie des Glaces au temps du Roi Soleil.
    – Oh l’aristo, un ton plus bas. Moi, je ne fais pas de tapage, j’assourdis. Je transforme une cavalcade en un léger murmure.
    – La belle affaire ! Ma pauvre, vous êtes d’une uniformité désolante alors que moi je croise et entrecroise mes chevrons. Et parlons de la matière. Je suis fait des plus belles essences, rien à voir avec vos produits de synthèse.
    – Produits de synthèse qui sont d’une modernité inégalée et le fruit d’une imagination qui vous fait défaut.

    A trois pas de là, le carrelage excédé par la dispute :
    – Vous aurez beau dire, vous n’avez pas le monopole des sols.

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