504e exercice d’écriture créative créé par Pascal Perrat

Exercice d'écriture très créative
© S.Mouton-Perrat

À tous les étages on ne parlait que de ça !
Le vieux balcon du 5e s’était entiché d’une petite étagère.
Il en avait même perdu son garde-corps..

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20 réponses

  1. Kyoto dit :

    A tous les étages de ce vieil immeuble lézardé, on ne parlait que du vieux balcon du cinquième qui s’était entiché d’une petite étagère simple et modeste, sur laquelle on n’avait rien posé.
    Ce dénuement avait séduit ce balcon au garde-corps rouillé qui vibrait au moindre courant d’air.
    L’étagère était en admiration devant cet encorbellement qu’elle trouvait si magnifiquement forgé : « Comme vous êtes beau, lui susurra-t-elle. »
    Le balcon, tourneboulé par ce sentiment inespéré en a perdu son garde-fou. Il se sentit idiot ainsi amputé. Il espérait un grand secours de l’étagère pour surmonter cette épreuve, mais elle ne le regardait plus. On l’avait habillée de beaux atours qui la comblaient de fierté et le balcon fut vite oublié.

    A tous les étages de ce vieil immeuble maintenant rénové, on ne parlait que du vieux monsieur du cinquième qui s’était entiché d’une jeune ménagère qui époussetait avec gaieté tous les coins et recoins de l’appartement. Elle n’avait que du mépris pour ce baveux personnage, et se débrouilla pour le dépouiller de tous ses trésors. Le vieux, désargenté, franchit le garde-corps du balcon vers un autre voyage.

    A ce jour, le vieil immeuble n’existe plus. Un jardin sauvage a été créé et sur les bancs publics se murmurent de tendres mots magiques.

  2. iris79 dit :

    À tous les étages on ne parlait que de ça !
    Le vieux balcon du 5e s’était entiché d’une petite étagère.
    Il en avait même perdu son garde-corps. Il n’y croyait plus depuis longtemps. Vivre un dernier amour aussi étrange soit-il, il n’avait même pas osé l’imaginer ! Il se savait condamné. Il n’était pas dupe. Tous ceux venus à son chevet s’en retournait avec une moue gênée. Ils caressaient ses flancs si abîmés et repartaient en disant au propriétaire qu’ils ne pouvaient plus rien faire.
    Alors quand au printemps la belle arriva, ornée de pots de fleurs aux couleurs éclatantes, il ne bouda pas son plaisir de profiter encore un peu des surprises de la vie. Elle trouva naturellement sa place à l’ombre du vieux balcon. Leurs différences évidentes faisaient tout le charme de cette union disait-on. La noblesse de la pierre, aussi éreintée fut-elle, mettait en valeur la jeunesse insolente de l’étagère. Ils savouraient ensemble chaque caresse du soleil qui les illuminait ensemble, lui et elle. Les passants touchés par tant de beauté, s’arrêtaient commenter cette beauté évidente, l’harmonie des nuances, l’éclat du charme champêtre, un brin désuet mais tellement tendance. Il ne regrettait plus une seconde la chute de son garde-corps dans l’ombre duquel il n’avait jamais vraiment pu s’exprimer. Il se montrait désormais tel qu’il était, il n’avait plus rien à cacher, à prouver. Cette liberté assumée lui donnait une présence naturelle qui forçait le respect. Il savait que l’étagère continuerait sa vie dans les bras d’un autre. Pour le moment, tout était suspendu, le temps, le balcon qui ne tenait quasiment plus qu’à une pierre, la lumière éblouissante qui dansaient sur les fleurs posées sur l’étagère.
    Le propriétaire ne s’y trompa pas et saisit le moment. Avant que les travaux effacent à jamais ce bonheur révolu, il prit et encadra la photo de cet instant qu’il avait saisi alors de son vieux balcon et de son étagère…
    Ils ornaient désormais ensemble et à tout jamais des cartes postales ou des cadres solidement accrochés aux murs des maisons.

  3. Avoires dit :

    Un pauvre vieux balcon
    Sentant sa mort prochaine
    S’éprit d ‘une étagère
    Et courut au trépas

    Elle était potelée
    Aux ferronneries galbées
    De céramique bleue
    Elle était recouverte

    Tantôt parée de fleurs
    Tantôt garnie de cage
    De canaris bavards
    Qui chantaient à tuer-tête

    L’étagère souriait
    A qui la regardait
    Flattée et enjôleuse
    Elle était très heureuse

    Le balcon vieux et laid
    Se penchant un peu trop
    Ébranla sa rambarde
    Tout s’écroula hélas

    Un branle-bas géant
    Agita tout l’immeuble
    La petite étagère
    Perdit sa céramique

    La cage, les pots de fleurs
    Tout partit en lambeaux
    Le balcon s’abattit
    Sur la pauvre tablette

    Une grande tristesse
    S’empara du quartier
    La passion d’un balcon
    Eut raison des maçons

  4. Agnès P. dit :

    Et bla-bla par ci et bla-bla-bla par là, et patati, et patata…

    Tous les regards étaient tournés sur cette petite étagère,
    aguicheuse, et ce vieux balcon entiché au point d’en perdre son garde-corps.

    Un balcon nommé Nitro, une étagère nommée Glycérine, ça n’avait pas fait que des étincelles.

    Et puis, l’étagère, tant convoitée de loin, avec le balcon, ça ne pouvait pas le faire…lui ce qu’il avait toujours eu et aurait toujours c’était une jardinière à la fois fine, élégante et solide, foisonnante de fleurs et de plantes plus belles et délicates les unes que les autres, un jardin subtil, cultivé, un petit coin de paradis pour ces deux-là, tant il se connaissaient, étaient complices, et avaient partagé une multitudes d événements, d’épreuves, petits et grands, si profonds. De merveilleux moments. Et la vie, en famille.

    Ce balcon aura peut-être eu un moment d’emballement , de déceptions , de blessures, d’orgueil…de colère, et quoi d’autre encore, mystère et boule de gomme : les paroles de. La chanson de Gainsbourg “tu es belle vue de l’extérieur, mais qu’est-ce qui m’a pris d’m’aventurer à l’intérieur “ ???

    Peut-on reprocher à une étagère trop émotive, terrifiée. Obligée de se réfugier dans une tour d’ivoire, nourrie toute sa vie par les histoires des livres, dont l’encre avait envahi ses veines et toute sa matière, de n’être qu’une étagère trop pleine de rêves plus fous les uns que les autres, de délires abracadabrants, n’ayant aucun sens des réalités, d’être totalement inconsciente ?

    Oui, oui, oui, trois fois oui, cela avait été le cas. On avait même mis de l’huile sur le feu et veillé à entretenir et à aggraver cet état.

    Alors que couper les ponts aurait pu se faire avec quelque fermeté. En deux temps, trois mouvements.

    Mais bon, rien n’est immuable, tout change, c’est cela la vie…
    Le balcon, pas si vieux, a encore davantage apprécié les qualités de sa jardinière…

    Quand à l’étagère, elle a été longue à la comprenette et a fait de graves dégâts, certes, mais elle a enfin saisi, fini la Nitro…
    Fini, le manque et la dépendance. Fini la glycérine, bonjour la vie.

    Elle n’est qu’une simple petite étagère de bois solitaire, peut-être un peu trop ordinaire, une planche mal dégrossie, pourtant, dans ses veines et toutes ses fibres, coule à nouveau, la sève vitale et nourricière de ses origines sylvestres.

    Et c’est si bon !

  5. Françoise - Gare du Nord dit :

    À tous les étages on ne parlait que de ça ! Le vieux balcon du 5e s’était entiché d’une petite étagère qui ne voulait pas de lui. Il en avait même perdu son garde-corps, un jour de grande déprime où il avait voulu en finir avec la vie.

    Incapable de séduire une petite étagère plate comme une limande, toute de guingois instable et incapable de se fixer.

    « Il faut bien admettre qu’il n’a pas grand chose pour plaire. Un 5e sans ascenseur » proclama l’escalier qui savait de quoi il parlait

    « Moins de 2m2 de surface au sol, exposé plein nord » renchérit le mesquin et ombrageux palier, tout aussi concerné.

    « De nombreux problèmes d’étanchéité » se plaignit le grenier perpétuellement humide

    « Sans compter un loyer 1948 » conclut la boîte aux lettres éventrée

    Et puis ces rimes à la con qui lui collaient à la peau : ses propos abscons débités avec un accent gascon, son teint mi-chicon mi-rubicond, ses mensonges comme ceux du fanfaron de Tarascon qui auraient valu le gibet de Montfaucon.

    Bref, dans l’immeuble on ne disait plus « con comme un balai » mais « con comme un balcon ».

    Ce chagrin d’amour dura quelque temps jusqu’à la construction d’un immeuble de standing sur le trottoir d’en face.

    Il s’intéressa à son édification, mois après mois, étage après étage, sans se douter qu’un coup de foudre, un nouvel amour l’attendait au dernier niveau.

    Et un jour, elle apparut lumineuse avec sa face sud, spacieuse, perpétuellement fleurie avec des noms qui sentaient bon la littérature française (Truffaut, Vilmorin), toujours animée avec ses soirées où des gens bien vêtus buvaient et dansaient dans la bonne humeur.

    Il prit très vite conscience qu’elle ignorait son existence et l’ignorerait tant qu’il vivrait.

    Cette situation le mina et il décida d’en finir avec l’existence. Il avait tant pleuré autrefois pour l’ingrate petite étagère que ses fissures s’étaient imprégnées d’eau et l’avaient fragilisé.

    Il se jeta dans le vide le 12 juillet 1998 vers 23 heures. Mais son trépas passa inaperçu par tous et surtout par la belle terrasse car elle accueillait ce soir-là de nombreuses personnes qui fêtaient bruyamment un heureux événement dont j’ai oublié à ce jour l’objet

  6. 🐀 Souris verte dit :

    Ça c’est super bien écrit ! Bravo !

  7. Catherine M.S dit :

    Conte végétal

    – Amoureux d’une étagère ?
    Les commères d’en bas se gaussent
    Tout en gardant le nez en l’air
    Vers l’objet de leurs moqueries :
    Le balcon du cinquième tout en vert-de-gris
    – Mais qu’est-ce qui lui prend ?
    – C’est la faute au ravalement ma chère
    – Il ne savait plus du tout quoi faire
    Sans la visite régulière de ses propriétaires

    Confiné sous des bâches en plastique
    Il s’est amouraché d’une « étagère botanique »
    Qui dépérissait elle aussi
    Thym, romarin, menthe et basilic
    Étaient en état de panique
    Elles manquaient d’air
    Dans cette sinistre atmosphère
    Pauvres plantes aromatiques !

    Alors le vieux balcon eut d’abord pitié d’elles
    Et les a prises sous son aile
    Tous les matins il leur fredonnait une ritournelle
    Pour leur insuffler de l’énergie
    Et qu’elles continuent à pousser sans soucis
    C’est ainsi qu’au fil du temps
    Une relation privilégiée s’est instaurée
    Entre le balcon déserté
    Et l’étagère fanée
    Mais tous les deux ont survécu
    Et quand les bâches ont disparu
    Des lampions ont illuminé tous les balcons
    Du premier au dernier étage
    Y compris dans tout le voisinage
    Ça s’est mis à sentir bon, si bon
    Que les langues des commères se sont enfin tues…
    Silence et bouche cousue.

  8. Blackrain dit :

    Même si l’étagère n’avait que de modestes parements, elle en connaissait un rayon pour la séduction. Elle avait de très belles moulures qu’elle mettait en avant avec une simplicité calculée. Elle était au faite des choses de la vie et ne manquait pas d’ambition. Malgré sa casquette auvent, l’étagère se voyait devenir Marquise, prendre l’ascenseur social pour habiter dans un palace. « Finies pour toit la lauze, les tuiles qui te tombent dessus sans personne pour te servir de couverture » avait-elle décidé un beau jour, « dans ton corps niche ton avenir » se répétait-elle souvent. Il lui en fallait du courage pour supporter les rondeurs de ce vieux balcon lorsqu’il la couchait sur la balustrade. Elle affichait un sourire de façade puis elle plaçait un bandeau imaginaire sur ses yeux pour ne plus voir les rides de son fronton et l’effritement de sa voûte. Elle se rêvait alors dans les bras de cariatides aux formes parfaites. Puis il lui fallait aller encore bellement pour lui faire croire qu’elle prenait du plaisir sous ses caresses en béton armé, avant qu’un dernier cri ne la terrasse lorsque sa colonne cessait enfin d’onduler. Heureusement pour elle, il n’avait pas un cœur en pierre ponce pilastre. Il ne s’en lavait pas les mains pour passer à une autre. Il l’avait demandé en mariage devant toute la galerie. Pour la première fois de sa vie la modeste étagère se croyait au théâtre. Elle occupait désormais l’avant-scène et ne craignait plus de tomber parterre.

  9. Sylvianne perrat dit :

    Entiché de la petite étagère de l étage du dessous. A force de se pencher son Garde-coros s était rompu. Plus rien pour le protéger du vide. Il avait pourtant veillé à conserver son garde-fou, se sachant fragile et enclin au vertige.
    Son garde-fou fidèle en fer forgé, solide et maternant le protégeait depuis toujours.
    Là, il se sentait en danger… la petite étagère le narguait mais aussi la rue et ses multiples sollicitations. Un pas de plus, et il tombait..
    Il s arquebourta. Apeuré. Il reçut un Sms de la terrasse, sa vieille copine du 7e. « Mais ma paroles, Tu flageoles ? »
    « Mon garde-corps est tombé. Je suis seul et j ai peur »
    « c est fou ! Reprends tes esprits, ne reste pas dans le passé, tu es cap de vivre sans garde fou ! Confiance mon grand ! Un architologue doit passer. »
    Balcon reprit confiance, se pencha et invita la jolie Étagère à grimper.

  10. Maguelonne dit :

    À tous les étages on ne parlait que de ça ! le vieux balcon du cinquième s’était entiché d’une petite étagère. En son temps ce vieux balcon avait été très beau : mais c’était avant. Tout l’immeuble essayait de le prévenir.
    « Attention, nous sommes plutôt vétuste et tu es peut être le plus mal en forme. Faudrait pas grand chose pour qu’on nous déclare dangereux. Faut se faire oublier mon vieux, pas de vagues. Et puis être amoureux ça n’est plus de ton âge. Regarde toi ».
    Lui n’entendait rien. Depuis longtemps il avait senti la décrépitude gagner du terrain un peu plus chaque jour. Alors comme il n’y pouvait rien il avait décidé d’ occulter tout ce qui était dérangeant. Aujourd’hui il lui restait les rêves.
    Aussi quand sur le balcon d’en face, on avait installé une petite étagère portant des pots de fleurs, il était tombé fou amoureux. Elle était en fer forgé, comme lui et arrosée trop généreusement elle commençait à rouiller de ci, de là, comme lui. Si ce n’est pas un signe ça !!
    Il essayait de lui chanter la sérénade mais la belle était insensible et même méchante
    « Ta voix de crécelle c’est pour avertir que tu es lépreux »
    « Quoi, qu’est ce tu dis ? »
    « Tu n’es qu’un lépreux »
    « Je n’entends pas, attends ». Il se pencha en avant et patatras. Son garde corps devenu fou dévala les cinq étages brutalement et sans sommations.
    Tout l’immeuble poussa un Oh de crainte et d’horreur. Fort heureusement à ces premières lueurs de potron minet les humains ronflaient encore dans leurs lits. Ce n’était plus le cas à neuf heures du matin où un tas de bons hommes en costumes cravates et casques sur la tête déblatéraient à qui mieux mieux.
    Épilogue : l’immeuble fut condamné et voué à la démolition. Cela prit plusieurs mois.C’était une lente agonie pour ce bâtiment qui après avoir vitupéré contre ce fichu balcon, lui enviait sa fin brutale et en plein émoi amoureux

  11. Fanny Dumond dit :

    À tous les étages on ne parlait que de ça ! Le vieux balcon du 5ème s’était entiché d’une petite étagère. Il en avait même perdu son garde-corps à force de se pencher pour mieux la reluquer et lui faire du gringue.

    Elle vivait en face et lorsque la grande baie vitrée était ouverte, il passait son temps à attirer son attention en faisant dégringoler dans la rue une rosace ouvragée par-ci, un barreau rouillé par-là. Mais, cette bêcheuse n’avait que faire de lui. Dans la journée, elle se délectait à lire les ouvrages nichés dans ses alvéoles et connaissait le monde des bipèdes du bout de ses pieds jusqu’à la racine de son faîte. Et ce n’était pas ce vieux croulant, libidineux par surcroît, qui allait la faire tomber à la renverse. D’autant plus que, toutes les nuits, elle entretenait une liaison secrète avec son collègue, modulable selon les envies. Les propriétaires de cet appartement s’étonnaient quelque peu de retrouver, parfois, un bouquin ou un bibelot sur le plancher tant leurs ébats étaient torrides. Et c’est ainsi, qu’un beau matin, le fruit de leurs amours se retrouva étreint entre elle et lui.

    Fou de douleur, le balcon s’était effondré en éparpillant tout son chagrin dans la ruelle. Il était affligé, désespéré, meurtri dans son amour-propre d’écouter les habitants du quartier déblatérer sur son compte, lui qui était si beau, fut un temps ! Pourquoi ce vieux tromblon, qui avait failli tuer un passant, soit dit en passant, était-il en si piteux état ? Pourquoi personne n’avait remarqué la dangerosité de ce pervers ? Pourquoi ? Pourquoi ? Parce que, comme l’écrivent certains philosophes, on ne voit jamais que les effets et non point les causes.

    Le balcon eut des funérailles vite bâclées par une pelleteuse qui lui meurtrissait ses quelques ferronneries encore alertes qui firent la joie de certains brocanteurs.

  12. Laurence Noyer dit :

    Sur le vieux balcon du 5ème étage, Berthe pose,
    -Figure de style et ponctuation –
    Elle s’éternise dans sa rêverie … en point de suspension…
    L’ombrelle verte et l’éventail rouge antithèsent la blancheur de sa robe
    Les visages autour sont flous, celui de Berthe , MAJUSCULE
    Sa présence immobile calligramme son inaccessible intériorité
    Au fond de la pièce, l’étagère noire allégorise ses souvenirs
    La main de Manet oxymore cet ombre lumineuse
    (Il entreparenthèse ce temps mort)
    ‘’’’’ Portrait à l’accent aigu ’’’’’
    De l’attrait d’un peintre pour son modèle

  13. Antonio dit :

    À tous les étages on ne parlait que de ça !
    Le vieux balcon du 5e s’était entiché d’une petite étagère.
    Il en avait même perdu son garde-corps.

    « Son garde-corps ! Non, mais… vous imaginez ? » s’offusquait la terrasse du rez-de-chaussée.

    « Oh ! moi je n’imagine pas » lâcha la gouttière de son toit, encore humide de l’orage de la nuit dernière, « j’ai vu. »

    « Et qu’est-ce que vous avez vu ? » rougit une plante voisine qui dépassait d’une petite tête son balcon bien gardé.

    « Ah ! elles sont tombées de haut les fleurs en parterres quand la fameuse étagère s’est jetée sur le vieux, les planches ouvertes. »

    « Les pauvres, je les ai ramassées à fleur de pots complètement brisés » s’affligea la terrasse.

    « Il a baissé, ni une ni deux, son garde-corps qui ne tenait qu’à un zip » poursuivit la gouttière, « puis là, je ne peux vous décrire ce que j’ai vu… c’était… mon dieu, j’aurais préféré ne rien voir… ! »

    « Mais quoi ? » insista la voisine, ses deux grandes feuilles rougies agrippées au balcon, grand ouvertes.

    Tous les étages se turent dans un même frémissement.

    « Un désir… abject ! » continua la gouttière, en eau. « On ne voit ça que dans des maisons closes… Il l’a… oh ! »

    « Quoiiiiiii ? » s’exclamèrent en chœur les plantes de tous les étages.

    « Il l’a prise dans ses bras pour ne pas qu’elle s’envole tant il haletait à grand coup de vent. Il lui a arraché ses derniers ornements, elle était nue !

    « Haaaan !!! »

    « Mais pas de bois. C’était pas du Rodin non plus, c’est clair, elle n’avait aucune forme. Son corps, on aurait dit plusieurs planches. Je dirais plutôt du rotin, si vous voyez ce que je veux dire, le genre d’étagère pour dépanner le célibataire. »

    « Quelle honte ! »

    « Quel pervers ! »

    « Et après ? »

    « Oh ! mon dieu, je n’ai pas vécu pareille tempête depuis 1999 ! » reprit le témoin, prêt à dégouliner encore de détails. « Elle s’est laissée faire, vous l’auriez entendue. Ces créatures ont le vice dans la peau. Elle couinait à le rendre marteau dès qu’elle l’aguichait avec ses petites pointes. Et ça a duré trois heures, cette nuit. J’ai cru qu’ils ne la finirait jamais. »

    « Trois heures pour une petite étagère ? » s’étonna le balcon du quatrième.

    « M’étonne pas, lâcha celui d’en dessous, chez Ikea ce sont des pervers. Ils t’envoient des suédoises qui te font tourner la tête jusqu’à te rendre dingue. »

    « Et qu’est-ce qu’ils sont devenus ? » osa demander la plante voisine qui semblait avoir pris un coup de chaud.

    « Et qu’est-ce que vous voulez qu’ils deviennent ? », lui répondit la gouttière. « Il a changé de garde-corps, remis de nouvelles plantes et foutu à la porte l’étagère. »

    « J’ai vu la petite faire le trottoir », ajouta la terrasse du rez-de-chaussée. « Elle attendait le prochain client qui voulait faire une bonne affaire ».

    « Misère ! »

  14. Nouchka dit :

    – Jamais je n’aurais pas cru cela possible, s’étonne un fauteuil d’orchestre.
    – Pourtant, je le tiens des machinistes qui interviennent là-haut, répond la lyre.
    – Je ne comprends pas pourquoi.
    – Pourquoi, quoi ?
    – Pourquoi le balcon du 5ème fait une maladie de ce départ.
    – C’est pourtant facile à imaginer. Là-haut au paradis, le vieux balcon voyait cette petite étagère sculptée juste en avancée sur le 4ème bacon. Il était très attaché à elle. Il faut dire que la belle a des formes attirantes, un bois chaud et des nuances subtiles.
    Elle était éclairée de deux luminaires de faible intensité qui donnaient une atmosphère intimiste alors que le paradis n’est pas habitué à ce genre d’ambiance tamisée. Elle était utilisée pour recevoir des projecteurs annexes, explique la lyre
    – Et alors, que s’est-il passé ? demande une sculpture de stuc située au dessus du 5ème balcon sur la courbe entre le paradis et le plafond décoré de la Feniche.
    – Et bien, l’étagère a été retirée et remplacée par l’accrochage de 2 luminaires sur le devant du 5ème balcon, précise la lyre.
    – Il n’y a pas de quoi en faire une maladie. C’est normal ; la technique évolue et la sécurité également, devise le fauteuil d’orchestre.
    – C’est certain ; le théâtre a déjà subi plusieurs incendies. Il faut tout faire pour que cela ne se renouvelle pas.
    – Tout le monde est d’accord sur ce point, c’est évident.
    – Alors pourquoi s’est-il effondré le balcon ? insiste le fauteuil d’orchestre.
    – C’est juste après que la petite étagère ait été retirée, la balustrade du balcon a cédé et s’est décrochée. Un véritable suicide ! commente la lyre.
    – Mais il va se remettre ? On peut le réparer ? demande la sculpture.
    – Ce ne semble pas être simple. Tous les scenarii sont envisagés. Et bien sûr le financement n’est pas prévu. Or, des à présent, le paradis est fermé.
    – Heureusement que ce n’est pas le théâtre lui-même qui ferme ! s’insurge une loge du 3ème balcon qui suivait, de loin, la discussion.
    – Vous ne croyez pas si bien dire, répond la lyre.
    – Il va falloir que la commission de sécurité vienne donner son aval, avant et après travaux.
    – Et le balcon du 5ème, risque-t-il d’être démonté intégralement et d’être remercié ? s’inquiète la sculpture.
    – Je n’en sais rien. Pour le moment, toutes les équipes d’entretien étudient les solutions possibles.
    Personnellement, je pense qu’il va pouvoir rejoindre la petite étagère au rayon des objets remisés à tout jamais.
    – C’est sans doute ce qui pourrait lui arriver de mieux….

  15. jean marc durand dit :

    A toutes les étapes on ne parlait que de ça! Le vieux con du 5e s’est entiché d’une petite étrangère. Il en avait même perdu son garde du corps, un ancien des troupes paramilitaires. Protéger une métèque, avait-il déclaré, non ça, jamais. Il avait démissionné et laissé se démerder le vieux con avec sa grosse retraite de l’armée et ses petites roupettes à l’agonie…

    DRING DRING (oui, mon téléphone a son âge!)

    – Allo, élève Durand, ici Maître Pascal….ça ne va pas, vous digressez…

    – Et alors, c’est ma musique, à moi, en ce jour. On est en Ré public, non ? Alors je dis graisse, si je veux. Et je dis femme aussi. Et je dis fer. Et je dis j’erre, je dis Si Pline, à ma façon. Et toujours je dis sec les mots. Et toi, tu penses que je dis Si mule…ma flemme. Oui, Pascal, j’ai les godasses dans les cailloux de mon chantier, au pied d’un tas de pierrailles, haut comme un Vésuve de poche, les orteils dans la cendre, pas dans l’eau bleu d’une Italie de vacances. Je me suis pris un méchant coup de soleil. J’ai la casquette en feu, le chapeau de champignon atomisé.
    Un avis de sécheresse ne parvient même pas à nous pendre au nez, tant nos narines sont encrassées par les poussières du présent. Deux hirondelles aux ombres de vautours tournent au dessus de moi moite. Il est trop tard, Pascal, çaiyé, je meumeure…..aargh (oui , je sais, je sais, mon onomatopée date également)… Je meumeuure, tranquillement désespéré.

    Même pas besoin de me jeter du balcon ou de me pendre à l’étagère.

  16. camomille dit :

    À tous les étages on ne parlait que de ça !
    Le vieux balcon du 5e s’était entiché d’une petite étagère.
    Il en avait même perdu son garde-corps, c’est vous dire !

    L’inquiétude commençait à s’installer dans l’immeuble et les langues allaient bon train :
    – vous vous rendez compte à son âge !
    – et « elle », vous avez vu comme elle l’allume la garce ?

    En fait, la petite étagère était pacsée avec le balcon du 3ème, mais dès que celui-ci somnolait, et il somnolait souvent, elle faisait de l’œil à notre vieux balcon du 5ème qui en perdait et la tête et le garde-fou ; la petite étagère s’en donnait à cœur joie.

    Normal que les habitants s’inquiètent car, lorsque ça leur prenait à ces deux là, notre balcon number five se penchait, se penchait pour mieux voir la belle et déjà que le garde-fou s’était barré, les murs commençaient à se craqueler sous la pression.

    Les habitants de l’immeuble criaient :
    – Ça suffit ! Ça n’est plus tenable ! Ça va mal finir ! On va en parler au syndic !

    Mais rien ne calmait nos deux tourtereaux.

    La petite étagère, telle une sirène, rendait fou notre vieux balcon du 5ème qui ne pouvait plus se passer d’elle. Et alors… il se penchait et il se penchait.
    Les mur se lézardaient de plus en plus…

    Le balcon du 3éme, réveillé par les nombreux soubresauts de number five, finit par se rendre compte de l’histoire et en prit ombrage.

    Les habitants essayèrent de le calmer,
    Mais le balcon du 3ème se sentant offensé, gifla la petite étagère qui voltigea dans les airs, et il se mit à crier menaçant:
    – Attends que je monte te casser la gueule espère de vieux balcon du 5éme !

    Les habitant crièrent : NON ! NON ! NON !

    Pourtant, tout le monde sait qu’un 3ème étage ne peut pas rendre visite à un 5ème étage… même pour laver son honneur.
    C’est mathématiquement impossible.
    Mais… TROP TARD
    L’immeuble s’ébranla, s’effrita, s’écroula.
    Et la petite étagère atterrit sur le balcon du 4ème étage de l’immeuble voisin.

  17. françoise dit :

    504/À tous les étages on ne parlait que de ça ! 
    Le vieux balcon du 5e s’était entiché d’une petite étagère. 
    Il semblait avoir perdu la tête et tel un dément il se livrait à des actes qui risquaient de mettre sa vie en danger.
    On appela d’urgence le SAMU mais l’équipe de service était en opération non loin de là, plus exactement au musée des poutres, poteaux, etc….où un cluster s’était déclaré.
    Plusieurs balcons se mirent à crier que cette étagère était peut-être porteuse du coronavirus. Il fallait vite lui prendre sa température . Il s’avéra qu’elle n’en avait pas . Elle n’avait pas mal à la tête non plus. Au grand désespoir du vieux balcon on décida malgré tout ,pour respecter les gestes barrières, de la mettre en quarantaine.
    Pour ce faire on l’attacha avec une grosse ficelle à une barre du balcon. Au gré du vent elle se balançait un peu dans tous les sens et la situation semblait lui plaire.
    Chaque jour le vieux balcon tirait un trait au crayon sur une de ses parois ; mais une nuit il y eut un fort orage qui effaça tous ses traits.La même nuit la grosse ficelle cassa et nul ne sut ce qu’était devenue l’étagère.
    Le vieux balcon atteint d’Alzheimer continua chaque jour à tirer un trait. Bientôt ses parois en furent recouvertes alors dès qu’il apercevait la lune il en effaçait un. Puis le lendemain du jour du dernier bâton il en tirait un nouveau.Cela semblait suffire à son bonheur.
    Comme aurait dit Gottfried Wilhem Leibniz tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles.

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