Ces textes qui découragent le lecteur
Qu’est-ce qu’un texte « qui en fait trop » ?
C’est un texte dont de nombreux passages découragent le lecteur d’aller plus loin. Un écrit où se succèdent tour à tour : action, description, action, météo, action, sentiment, action, bla-bla et ainsi de suite.
C’est un texte où de nombreux passages s’étirent à n’en plus finir. Où l’auteur a oublié que si on veut raconter une histoire, il s’agit, avant tout, de la rendre captivante et jamais ennuyante, du début jusqu’à la fin.
Si j’aborde une fois de plus ce sujet c’est parce que je reçois parfois des textes dans lesquels je perds le fil de l’action dans le fatras des descriptions, dialogues et autres circonvolutions narratives.
Des textes où je ne parviens pas à me mettre dans la peau des personnages tant la narration m’éloigne du coeur de l’intrigue.
Parmi ces passages qui découragent les lecteurs :
Le registre météo
On a droit au soleil qui se lève ou qui se couche, au ciel changeant, à ses couleurs et ses nuages.
À la ville ou la rue écrasée par le soleil ou liquéfiée par la pluie, et toutes ses variantes.
Le registre écolo
Là, ce sont mille métaphores champêtres dans laquelle l’histoire s’empêtre.
C’est généralement un hymne à la nature et aux petits oiseaux. À la faune et à la flore.
Le registre prêchi-prêcha
Il s’agit d’une sorte de sous Bobin.* Souvent un galimatias spirituel.
On s’égare sur diverses voies pour parvenir à la pureté divine.
Atteindre les cieux, le grand tout. Bref, un chemin de croix pour le lecteur.
Le registre anthropologue
C’est le style « Première gorgée de bière » * mais excessivement étiré.
L’auteur détaille et énumère les moindres éléments ou faits et gestes,
au point d’exaspérer le lecteur.
Le registre psy
Le caractère des personnages est détaillé et analysé sous l’angle « psyratatouille ». C’est une sorte de « Doltomania » matinée de Madame Soleil.
Un psy n’y retrouverait pas ses petits. Le lecteur non plus.
Le registre Proustien
Des phrases fourre-tout où le lecteur se perd en chemin. E.M Forester comparait les longues phrases de Proust à une partie de chasse : « Trois prairies plus loin, comme une perdrix blessée, le verbe principal se tient accroupi, et l’on se demande alors en ramassant la pauvre petite bête si elle valait une randonnée pareille, avec tant de fusils et de chiens de race »
Le registre Abbé Pierre
Le texte sollicite notre bon cœur. Ses phrases compassionnelles se penchent sur la misère humaine et nous inclinent à partager les malheurs et les souffrances du monde. Tentant d’émouvoir le lecteur, il vire souvent au mélo.
Le registre guimauve
Ça rayonne de bonheur, les murmures sont émerveillés.
Les parfums sont « sans pareil », les couleurs chatoyantes.
Parfois, les yeux des enfants dansent et ils ont du soleil dans la voix.
Tandis que les flammes vacillent dans les cheminées l’intérêt du lecteur refroidit.
Le registre bla-bla-bla
Les personnages « taillent une bavette » comme au marché dominical ou au Café du Commerce. Parfois ils radotent, épiloguent ou coupent les cheveux en quatre, tandis que le lecteur se les arrache…
Ces remarques viennent de mes relectures de manuscrit, quand je me fais l’éditeur du diable.
Pour donner toutes ses chances à votre manuscrit, n’écrivez pas pour ne rien raconter, privilégiez l’action.
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Et tous ces tics de langage comme le fameux « du coup »
Remarquable classification , bravo Pascal
Il ne faut pas mettre les romans dans toutes les mains 😉
À lire l excellent Jourde et sa « Littérature sans estomac »
La semaine dernière Raboliot de M.Genevois Nobel de littérature m’est tombé des mains. Descriptions de paysages à n’en plus finir, pléthore de personnages décrits jusqu’à la couleur de leurs vêtements, intrigue dont on se doute de l’issue. Merci Pascal pour votre tribune qui me conforte dans l’idée que je me fais d’un bon roman. Amities d’Ophélie à qui on reproche souvent sa concision.
On écrivait ainsi quand la télé et Internet n’existaient pas. Il fallait, avec des mots, aider le lecteur à imaginer les personnages et leur environnement.
🐀💚LA HONTE DES MOTS
Mais alors ami, comment faut-il qu’on vous le dise !!! En long en court ? Sans fla-fla ni rodomontades.
C’est que moi voyez-vous, je laissais la bride sur le cou à mon stylo, le Pégase de mon évasion! faudra-t-il lui mettre un licou?
Comment lui faire comprendre qu’il doit arrêter de régurgiter son encre en mots qui se poursuivent, se bousculent et s’accolent la queue du premier sur la tête du suivant…
Cruel de séparer ceux liés officiellement par un trait d’union !!
Non ! Monsieur Pascal, vous me posez un problème et suis en grand dilemme de savoir comment m’adresser à vous.
S’ils sortent de moi, mes mots ne sont pas mes enfants… Je ne me l’autorise pas ni même ne les » Doltorise »!! Ils s’alignent tout seuls.
Et si les oiseaux veulent gazouiller en faisant pipi sur un fil électrique !!! Après-tout, c’est important ça … Pour eux au moins.
L’importance ? L’importance n’est pas la même pour tout le monde… Ah! Oui mais mais zut je » psychotournicote »! Tricoti tricota lève la queue et saute en bas… Bon, on ne va pas parler de ça..
Help!! Où est passé mon sac à trop plein de mots… Il faut que j’en coupe… des mots en quatre, des liaisons dangereuses ce soir Pégase ne volera pas… Non, je me sens bancale j’enfourcherai plutôt mon Dahu comme ça, si on boîte des deux côtés… On marchera droit.🐀🏵️
Au Bingo des registres, je me demande si je ne suis pas à ça d’avoir complété mon carton…Hum… Je vais me relire donc…encore… courageusement vôtre cher pascal
Curious ( et pas Furious) suffira. Mais mon téléphone est analphabète
Merci Pascal pour vos conseils toujours judicieux et pas si faciles à respecter. Il est si facile de tomber dans ce genre de pièges. Ceci dit je partage le point de vue de Malinconia et je trouve aussi qu’il est difficile de trouver un bon roman actuellement qui ne nous tombe pas des mains. Par contre fichons la paix à Proust qui sert de tête de turc à des gens qui ne l’ont pas lu. NB:je connais Proust (que j’ai lu) et pas Mr Forester. How Furious, isn’t it? Amicalement.
Heureuse de trouver quelqu’un partageant mon avis. Lisons américain, finlandais, japonais, turc etc… On y trouve de pleins silos de blé à moudre de qualité première. Garanti !
(JMG LE CLÉZIO : reviens !)
Merci Pascal de nous avoir fourni toutes ces armes de chasse à l’ennui du lecteur. Ah ! Si je les avais connues quand j’étais au lycée !
Bravo Pascal !
J’adore votre commentaire.
Merci Pascal !
Cela ferait une bonne check-list pour la relecture. Quand on écrit on a toujours tendance à diluer … à bavarder c’est en relisant que les ciseaux …
d’accord sur les derniers romans que j’ai lus … parfois je me demande si le nombre de pages ne justifie pas le prix
Quelle bonne description des romans français actuels, le catalogue des lieux communs est complet, rien n’y manque ! Champions du monde de l’ennui avant que peut-être de l’être de Foot, à choisir ….