502 exercice d’écriture créative créé par Pascal Perrat
Leur comportement déconcertait le village. Propriétaires d’une maison de campagne, ils n’entraient et ne sortaient que par les fenêtres, jamais par les portes. Les suppositions allaient bon train…
Inventez la raison et écrivez la suite
Sur ce blogue, on n’apprend pas à écrire un roman ou des nouvelles, on enflamme son imagination. Les exercices que j’invente, aiguillonnent l’esprit. Mon but est de conduire toute personne vers le créateur plus ou moins claquemuré en elle. L’enfant imaginatif avec lequel elle se réconcilie définitivement dès qu’elle se prête au jeu. Après quoi, elle décide de mener le projet d’écriture qui lui convient.
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Leur comportement déconcertait le village. Propriétaire d’une maison de campagne, ils n’entraient et ne sortaient que par les fenêtres, jamais par les portes. Les suppositions allaient bon train.
Marguerite n’en pouvait plus. Il fallait qu’elle en discute avec le père Germain. Lui, lui il saurait la réconfortait pas comme ce gros, gras balourd d’Alphonse. Dire à la pauvre mère Marguerite que ces drôles d’individus étaient les fils du diable…alors qu’elle habite si près de ces gens là…
A quoi songeait il donc ce gros, gras d’Alphonse? Trottinant malgré ses quatre-vingt-dix-ans ( toujours bon pieds ,bon oeils la Marguerite disait on dans le village ou encore…si la Marguerite n’est point sortie, la danse de la pluie pour le jour d’huis et cela ne manquait pas).
Les enfants aimaient à la suivre et lâchaient bientôt l’affaire, Marguerite ne s’arrêtait que lorsqu’elle était arrivé au grand-dame des enfants qui ,cherchaient toujours à lui passé devant pour la narguer. L’église son petit havre de paix, le seul endroit ou elle y trouvait encore un peu de sécurité.
Elle franchit non la grande porte, mais la petite. Le père Germain travaillait à ses écritures. Elle fit un petit bruit pour attiré son attention. Un bruit plus fort le père devenait sourd l’âge sans doute. En son fort interrieur Marguerite sourie.
Elle, elle n’avait rien perdu, oh la vilaine se dit-elle, ce n’est pas bien de se moqué des autres. Le sourire en coin, Marguerite frappa contre le petit secrétaire. Le père Germain leva la tête._Marguerite? Que me vaut l’honneur de votre visite de si bon matin?
_Il faut que je vous parle mon « père » Elle sourit encore plus en elle-même, ce jeunot d’à peine quatre-vint ans qu’elle appelait « père » quelle drôle de chose! Enfin là n’était pas la question n’est ce pas?
_De quoi donc Marguerite ! Que se passe t’il donc de si grave pour que vous sortiez d’aussi bonne heure?
_Les voisins « père » Germain, Alphonse m’a dit qu’ils étaient enfants du diable alors vous allez venir avec tous ce qu’il faut, pour bénir le sol qui entoure ma maison. Puis, ma maison et tous ce qui s’y trouve, mes trois bêtes et moi aussi…c’est urgent « père » Germain.
Je sent déjà les griffes de cet être maléfique qui s’enroule autour de ma gorge, d’ailleurs un verre d’eau ne serait pas de refus, vous avez ça mon « père »? Souriant le père Germain se leva, alla dans sa petite cuisine toute proprette suivit de prés par une Marguerite ne voulant pas être seule.
_Un grand verre ou un petit verre Marguerite?
_Un grand mon « père », j’ai du sable dans la bouche. Vous croyez qu’il a déjà mis ses pattes sur moi?
_Oh allons donc Marguerite! Depuis qu’on se connaît, le bon père ne vous laissera jamais tombé, avez vous souhaité le mal depuis la dernière fois?
_Ben à vrai dire juste un petit peu après l’Alphonse et sa vilaine répartie, c’est qu’ils vivent juste à côté de moi ces montes en l’air et qu’en fait, ben j’ai grand-peur qu’ils passent par une fenêtre et me volent tous mes pauvres souvenirs.
Ce sont pour beaucoup de précieux souvenirs alors pensez-bien que…rosissante Marguerite avala son grand verre d’eau sous le regard bienveillant du père Germain.
_Ma fille cela n’est pas compatible avec vos dévotions, vous, vous en rendez-comte n’est ce pas?
_Oui da, mais eux, ils sont quoi hein! ils sont quoi c’est gens là!,
_Eh bien chère Marguerite vous-même les avez nommer, ce sont d’anciens montes en l’air ou plus vulgairement des voleurs.
Ils se sont reconvertis en » testeurs » de fenêtres. Leur maison leur sert en quelque sorte de pis aller les fenêtres sont souvent changés ainsi, ils font leur rapport à leur commanditaires. Puis, ils ont l’impression en entrant et en sortant ainsi d’être au sommet de leur art. Fermez donc vos fenêtres et laissez votre porte ouverte en journée…vous ne craignez rien Alphonse le sait très bien .
Je m’en vais lui caressait les oreilles à ce drôle surtout qu’il les connaît car voyez-vous Marguerite, ces drôles de gens sont de sa famille.
_Ah vous m’en direz tant mon « père » Je m’en va lui retourné sa vilenie à celui-là. Ah dé faut pas poussée la Marguerite dans le pré, l’Alphonse il va chanté et pas pour mâtine ça c’est sûr. Elle quitta le père Germain aussi vivement qu’une dame pouvait se le permettre.
Elle ramassa une belle brassée d’ortie, demanda l’aide de ses voisins après leur avoir expliqué les paroles d’Alphonse. Le rire fusa des lèvres de ceux-ci mais devant le regard farouche de Marguerite,le plus petit d’entre eux accepta de lui rendre ce petit service. Il entra par la fenêtre arrière, permettant à Marguerite d’entrée par la porte de la cuisine, il la laissa faire .
Le tout ni vu, ni connu. Alphonse eut la cuisante réponse à sa petite blague, car la coquine fit un bon lit d’orties et Alphonse fourbu s’y coucha de tous son poids. Imaginez donc le bon qu’il fit et la dure et cuisante sensation de brûlures qu’il ressentit.
Les voisins disparurent après coup, trop de de gens passaient les voir. Et tous voulaient qu’ils testent leur propre fenêtres. Ah bé non trop de boulot d’un coup ne fait pas bon coup pour des montes en l’air voulant juste prendre l’air. Et l’anonymat alors?.y.l.
Sur une idée de Pascal Perrat.
désolé pour la longueur.
Leur comportement déconcertait le village. Propriétaires d’une maison de campagne, ils n’entraient et ne sortaient que par les fenêtres, jamais par les portes. Les suppositions allaient bon train.
Le plus jeune de la maison voisine disait que simplement ils avaient perdu leur trousseau de clés, peu après leur arrivée, et ne disposaient pas d’un double.
Il omettait de préciser qu’il avait trouvé des clés de bonne heure ce matin-là, au milieu de la haie qui séparait les deux jardins. Il les avait gardées, car cela l’amusait ces divers enjambements par la fenêtre de toute cette famille.
L’aîné quant à lui ne doutait pas qu’ils faisaient les intéressants.
Dans le village, personne ne les appréciait. Déjà parce que Parisiens.
Ensuite parce qu’ils avaient obtenu à bas prix la propriété en viager, la mamie ex-proprio ayant vite rejoint les bras de Morphée éternellement. Il se racontait toutefois qu’ils avaient exercé quelques pressions psychologiques sur elle.
Rumeurs villageoises…
Dernière hypothèse, qui rejoignait ce qui leur était reproché ci-devant : un sort leur aurait été jeté. Une volonté supérieure leur imposait de ne plus aller et venir dans leur maison que par les fenêtres. Aussi les pièces sans accès par ce type d’ouverture étaient bannies. C’était le cas du grenier, uniquement accessible par une fenêtre velux du toit ; celui de la cave, si bien qu’ils ne pouvaient plus utiliser leur voiture garée à l’intérieur, ni même les vélos – et l’échelle afin de monter éventuellement sur le toit…
Ils étaient de fait maintenus dans une certaine dépendance au village. Si « on » ne voulait pas d’eux, c’était plutôt raté, car leur présence se faisait de plus en plus manifeste, et pas que physiquement et visuellement.
Elle parcourait tous les esprits villageois ; on ne parlait plus que d’eux.
Qui donc avait envahi les espaces – terriens et psychiques – des uns et des autres ?
KNAUB Jean-Christophe 13 juillet 2020
hello, j’aime bien ce texte, belle journée.
En fonction des habitudes de vie des habitants du village , les suppositions et les commentaires allaient bon train .
Pour les gens seuls : « Ces nouveaux arrivants sont des pique-assiettes . Habituellement ils se rendent à des soirées sans y être invités , se font claquer la porte au nez pour revenir par la fenêtre , du coup , ils font de même chez eux »
Pour les jaloux : « Ces vacanciers sont tellement dépensiers qu’ils essayent de rattraper l’argent qu’ils jettent par les fenêtres »
Pour les commères : « Ce sont les cornes que chacun fait porter à son conjoint qui les empêchent de passer par la porte »
Pour d’autres touristes : « C’est tout simplement pour faire parler et distraire la population locale , cela les occupe jusqu’aux prochaines vacances sinon c’est l’ennui assuré ! »
Pour le personnel médical : « Ces estivants auraient-ils rencontré le Docteur Toqué et ses étranges prescriptions ?
Les derniers juillettistes devaient sauter à cloche-pied devant la mairie pour obtenir leur autorisation de travaux
Y aurait-il une prescription du même genre ? (comme vous le supposez bien , le maire est le Docteur Toqué!!) »
Pour un cercle très fermé : « C’est une famille de sorciers qui s’est installé ici . Ils s’élancent par les fenêtres sur leurs balais magiques invisibles du commun des mortels mais bien visibles par nous , adeptes de cette pratique »
Et pour les superstitieux : « C’est simple , ils ne peuvent plus passer sous les portes depuis qu’un de leurs ancêtres est mort enseveli sous sa maison après avoir simplement ouvert sa porte pour ..??. On ne sait plus »…
La clef de ce comportement déconcertant se trouve t’elle dans toutes ces suppositions ?…Ou pas !!? Allez savoir .
502/Leur comportement déconcertait le village. Propriétaires d’une maison de campagne, ils n’entraient et ne sortaient que par les fenêtres, jamais par la porte. Les suppositions allaient bon train.Certains pensaient qu’ils avaient perdu la clef, d’autres qu’ils étaient retombés en enfance ou qu’ils n’en étaient jamais sortis.
Et puis un matin le village se réveilla à grand bruit, les vaches meuglèrent, les coqs
coqueriquèrent tout çà parce que les propriétaires de cette maison de campagne, après avoir claqué la porte de leur 2CV citroën, étaient entrés dans leur maison par la porte d’entrée. Que se passait-il ?
A la nuit tombée,et après leur départ, le garde champêtre , muni de sa lampe frontale , s’approcha de la maison et à sa grande surprise s’aperçut que la porte d’entrée avait été remplacée par une fenêtre et la fenêtre par laquelle ils accédaient précédemment à l’intérieur de la maison par une porte . Des volets protégeaient celles-ci de toute intrusion malveillante.
Quand ces travaux avaient-ils été effectués ? Sans doute une fois la nuit tombée. Sûr qu’ils avaient été effectués au « noir ». En son for intérieur le garde-champêtre se dit « que celui qui n’a jamais péché leur jette la première pierre….
Le lendemain chaque habitant trouva dans sa boîte aux lettres une lettre d’invitation à la pose de leur crémaillère.
C’était une grosse maison bourgeoise, avec une porte énorme, à l’écart du village, qui ne s’ouvrait que pour les vacances. La famille arrivait dans sa traction noire. Il y avait le père Pétuel, sa femme et le grand fils. Le père était imbu de sa personne et la famille avait interdiction de mettre les pieds au village. On ne mélange pas les torchons et les serviettes comme le dit si justement le dicton populaire. Un dimanche, au retour de la messe, l’automobile perdit un pneu, le père perdit le contrôle et le véhicule bascula dans le ravin. Seul le fils en sortit vivant et indemne. Les villageois s’apitoyèrent un peu mais après tout ces bourges qui pètent plus haut que leurs c…, ils sont tout pareil comme nous.
Dans l’accident, le fils, devenu père Pétuel, avait pris un coup sur le carafon. Il décida de ne plus bouger : ni train, ni voiture, ni vélo. Pour fuir la solitude il prit des locataires. N’étant pas dans le besoin, le loyer était dérisoire. La seule condition était de ne point fréquenter le village. Il accueillit le père Kaline, le père Cutaner, le père Hocquet, le père Ruche, le père Clu.
Au début tout alla bien. Les villageois cancanaient, ce qui est normal quand on est tenu à l’écart et qu’on ignore tout. On ne peut que subodorer des secrets infâmes.
Le père Kaline s’enticha d’une péronnelle, ballerine de son état, au demeurant fort bien gaulée. Le père Kaline, se rengorgeant présenta son amoureuse à tous les locataires. La belle, fort aguichante séduisit toute la maisonnée.
Le père Cutaner avait belle figure, toujours tiré à quatre épingles et boutonné jusqu’au col. Le pauvre avait hérité de la peau de son père : une peau de lézard, pleine de squames. Toutes les crèmes du monde, toutes les huiles, même l’huile d’olive première pression à froid n’avaient pu résoudre le problème.Il déprimait dur mais était devenu carrément mélancolique depuis qu’il avait vu la fiancée du père Kaline.
Le père Hocquet, pas top porté sur la chose tomba follement amoureux des tutus de la belle : rose, bleu, vert, et même arc en ciel. Il rêvait de caresser ces tutus, peut être même de s’en vêtir mais chut : cela ne se dit pas.
Le père Ruche pensait un peu la même chose. Il rêvait de se lover dans le tutu vert. Le mardi était le jour du tutu vert et tous les mardis, il devenait fou, faisait des ronds de jambes et des salamalecs à n’en plus finir.
Un matin à cinq heures la maison fût ébranlée par des coups et des cris furieux. C’était la mère de la donzelle qui venait récupérer sa ballerine de fille. Elle mit la machine à claques en route et personne n’y échappa. Puis elle ferma la porte à clef, garda cette clef qu’elle jeta loin au plus profond du lac. C’était une clef spéciale, unique qui datait de la renaissance, pesait trois kilos deux cent cinquante. Aucun serrurier n’était capable de la reproduire.
Depuis les occupants sortaient et rentraient par les fenêtres. Les villageois ignorant l’épisode de la maman et de la clef supputaient de plus belle. Seul le père Linpimpin aurait pu mettre fin aux commérages. En tant que garde champêtre de trois villages environnants il avait été appelé pour recevoir la plainte. Malheureusement, juste au moment où il sortait par la fenêtre, le père Clu rentrait de cure à Tamalou Les Bains. Bien incapable de franchir la fenêtre il a demandé l’aide du père Linpimpin qui généreusement l’a fait passer à l’intérieur. Mais en ressortant un pied a glissé, la bouche a brutalement rencontrer la barre de la fenêtre et a perdu deux dents zuste devant. Depuis le shérif zozote honteusement et se retranche derrière le secret professionnel dont il se dit garant. Sur sa poitrine, il a placé un panneau : motus et bouche cousue.
hello
je dirais même plus, hilarant.
Les suppositions n’allaient pas bon train, il n’y en avait aucune : tout le monde de l’aïeul au gamin en âge de raison savait. Tous se taisaient, tous étaient solidaires en cette terrible année 1942, époque douloureuse où le silence valait plus que l’or, il sauvait des vies.
Malheur à qui aurait parlé, on n’eut pas attendu la libération pour lui régler son compte. Les Fridolins devaient partir, point !
Le Notaire leur avait prêté cette maison dont il n’avait pas l’usage afin qu’ils puissent s’y réfugier en cas de besoin. Tous les moyens furent mis en œuvre pour en faire une bonne planque, une petite forteresse à l’écart du village, espérée invincible.
Le menuisier et le forgeron s’étaient occupés d’en souder les serrures, d’embâcler les fenêtres de planches solides, invisibles une fois les persiennes fermées et bouclées de l’intérieur, la porte fut blindée pareillement.
La maison n’avait plus l’air qu’abandonnée. Ce qui n’étonnait personne, tant étaient partis sur les routes délaissant toit et mobilier. Son air de morte en faisait une cache idéale. A condition de n’y venir que de nuit.
Ils n’entraient et n’en sortaient que par l’œil-de-bœuf du grenier à l’arrière, à l’aide d’une échelle de bois qu’ils aplatissaient dans les taillis quand ils quittaient cet asile. Il n’y venaient que par deux, prudence et discrétion.
Le notaire, bien qu’il sût, fut sidéré lorsqu’il récupéra la maison au printemps 45. L’endroit était devenu un véritable entrepôt, un arsenal de tout ce qui pouvait être utile au maquis. Chacun avait donné ce qu’il pouvait gardant pour soi fourches, pioches, haches, scies, marteaux, enterrant vieux tromblons, pour le cas où.
Quantité d’armes, Sten, balles, fusils et cartouches, un bazooka, des grenades, des jerrycans restés remplis. A voir la vieille Ronéo, son encre tout juste sèche, tambour encore cerclé d’un stencil gravé d’un tract, elle avait dû sacrément tourner. Dans un angle un bureau branlant avec tout le nécessaire pour faux papiers, cartes, timbres et tampons officiels prêtés par le Maire.
Que faire de cette bâtisse et de ce fatras de souvenirs ? l’idée d’un musée à la gloire du Maquis local fut votée à l’unanimité. C’est ainsi que cette maison supposée être demeurée endormie si longtemps s’honora d’arborer la gratitude tant des Partisans que des villageois, inscrite sur une plaque vissée sur sa façade libérée du secret : pas un qui n’eut su tenir sa langue.
L’histoire n’est pas drôle mais ce temps-là ne l’était pas non plus, et puis, ces gens étaient de ceux qui sortis par la porte, rentraient par la fenêtre.
– Monsieur et Madame Loiseau ont une maison
– Oui et alors ?
– J’ajoute une petite précision
– Mais encore ?
– Ils ont contracté une drôle de maladie
– Le corona ?
– Non pas ça
– Alors quoi ?
– L’aptonymie
– L’apto. ..quoi ?
– L’aptonymie
– Connais pas !
– Ils se prennent pour des volatiles
– Les imbéciles !
– Et chaque jour ils mettent leur vie en péril
– A leur domicile ?
– Oui exactement
– Mais comment ?
– Ils entrent et sortent par les fenêtres
– Depuis longtemps ?
– Depuis la nuit des temps
Comme leurs ancêtres
– Il faut alerter le garde – champetre !
– Il n’y verra que du feu…
– Alors téléphoner aux pompiers
– Cela ne servira à rien
Loiseau ils sont nés
Loiseau ils continueront à voler
Ni le médecin ni le veto
N’y pourront rien changer
– Et l’asile ?
– Pour les volatiles pas de prison
C’est toi mon ami qui perds la raison
Fais bien attention. ..
SWEET HOME
Pourquoi passer par la fenêtre, quand on peut le faire par la porte ? Ou réciproquement… Ici, on n’avait pas encore vu ça. Une mode de la ville ? Sans doute ! Il allait falloir envisager cette nouvelle façon. D’abord, laisser ses chaussures en bas, puis rajuster ses vêtements. Pour les gros qui déjà se mettaient de travers pour passer la porte, mission impossible tant qu’ils n’auraient pas minci.
Les perclus souffriraient, ils en avaient déjà un avant goût. Les enflés de la tronche devraient en rabattre, les gringalets gonfleraient leurs biscottos et souffleraient en cadence sinon, gare, guillotine de la fenêtre les couperait en deux.
Et la porte dans tout ça ? Pas contente… Elle grincerait sur ses gonds au gré du vent, elle claquerait.
Elle s’envisageait campagnarde, en deux parties, le bas, clos à mi-hauteur, l’autre moitié, une sorte de fenêtre, comme pour les chevaux à l’écurie.
Peut-être récupèrerait-elle l’usage de sa fonction, entrée et sortie, mais pour qui ? Les bas du cul ou les échalas ? À eux de s’arranger, de se faire la courte échelle, de s’encourager …
Ce fut bientôt une attraction. Le village acquit une notoriété, jusqu’à ce qu’une loi scélérate imposât portes et fenêtres.
Les passe-murailles eurent leur heure de gloire jusqu’à ce qu’ils restassent coincés une fois leur pouvoir perdu.
Pour rentrer chez soi, on se dématérialisation, on devint gazeux.
😺 LURON’OURS
Leur comportement déconcertait le village. Propriétaires d’une maison de campagne, ils n’entraient et ne sortaient que par les fenêtres, jamais par les portes. Les suppositions allaient bon train…Et les ragots aussi. Pensez donc, des gens sans racines ici qui débarquent et se comportent comme personne auparavant, il ne fallait pas s’attendre à passer inaperçus. Et peut-être, était-ce ce qu’ils voulaient. Ce fut l’hypothèse de Madeleine, la plus proche voisine qui passait son temps derrière la fenêtre. Elle passait pour un peu gâteuse et ce statut lui convenait bien, au moins elle pouvait continuer sans que personne ne l’importune à épier ou plutôt observer et surveiller les alentours. Elle consignait toutes ses menues découvertes dans de petits cahiers quelle cachait dans le placard de la cuisine derrière une dalle de carrelage qui tomberait quelques années après sa mort au hasard de travaux de rénovation. Cette découverte de taille ferait l’effet d’une bombe dans le village tellement elle avait référencé avec une grande minutie et pléthore de détails les petits secrets plus ou moins romancés de chacun. Mais pour l’heure elle était occupée à décrypter le petit manège des voisins sur lesquels les passants lui demandaient un avis dont ils n’écoutaient pas les réponses qui ne venaient pas de toute façon.
Mais Madeleine, elle, derrière sa fenêtre avait compris leur petit manège. Tout occupés à être surpris, choqués, étonnés, interloqués par les entrées et sorties par les fenêtres, le commun des mortels n’avait pas vu que les portes s’ouvraient véritablement mais pas pour y laisser passer des gens, non, plutôt des paquets, de la même couleur que la porte, d’un marron quelconque proche des tons de troncs d’arbres et d’arbustes qui masquaient d’ailleurs un peu une partie de la porte. Les habitants de la maison sitôt passés par les fenêtres, ne tardaient jamais à récupérer ces cartons étranges ni trop petits ni trop grands qui ne semblaient pas très lourds mais en nombre conséquent.
Il y avait d’ailleurs beaucoup de mouvement de voitures à la tombée de la nuit et de mots chuchotés. Parfois des éclats de rire pourtant raisonnaient comme pour se moquer de ceux-là même qui les prenaient de haut.
Un soir, l’homme laissa tomber un carton qui s’éventra par terre. Un silence plombant sembla s’installer bientôt rompu par les mots sourds de la femme qui parcourut des yeux les alentours. Y compris la fenêtre de Madeleine qui s’était immobilisée comme une statue. Mais ça les autres ne l’avaient pas vu. D’ailleurs elle entendit distinctement « laisse tomber, c’est une vieille folle à moitié sourde. Personne ne la croirait ». Madeleine crut quelques secondes céder à la panique mais se ressaisit comme toujours. Elle ouvrit son petit carnet de moleskine rouge et écrit de ses doigts tremblants ce qu’elle venait de voir…
🐀 À RESSORTS
Ces ‘ gens là ‘ ne prenaient jamais la porte.
D’abord parce qu’ils n’auraient su quoi en faire, et d’autre part, leur conformation bizarre ne leur permettait pas de s’en servir.
Ils n’étaient pas très grands, leur hauteur eût été inutile vu que certains se déplaçaient en prenant un élan et, sans pattes, tournant sur eux-mêmes ou se basculant d’avant en arrière et de plus en plus vite, ça faisait le mouvement du culbuto. Ils avançaient ainsi en ligne tels des œufs sur la planche qui menait à la fenêtre et d’un coup de derrière un peu plus violent que le précédent se laissaient glisser sur le toboggan.
Pour eux, en forme œuf, ils dormaient dans des lits creux arrondis comme des coquetiers.
Ça intriguait et amusait les passants qui avaient appelé cette propriété sans porte : la maison des rigolos.
Les autres co-locataires étaient plus inquiétants.
Tous bosselés comme ayant été bercés trop près du mur, ils avaient des petites pattes courtes et à ressort. Un simple appel du pied les projetait en hauteur et toc ! Ils se payaient le plafond. D’où leurs bosses qui leur donnaient un air patibulaire. Pattes et tubulaires à la fois !
Bon j’admets que ce jeux de mots n’est pas charitable surtout que tout déplacement nécessitait un calcul savant et atteindre leur objectif leur prenait la journée.
Donc ils sortaient peu mais on le savait car, ayant souvent mal calculé leur coup, chaque gnon déclenchait des hurlements de douleurs.
Et les voisins ainsi prévenus accouraient. Les secourir ? Bien sûr que non, mais il est vrai que rien ne suscite plus l’hilarité que voir quelqu’un tomber.
C’est comme ça et on n’y échappe pas.
Si nos Culbutos dormaient dans des coquetiers ceux à ressorts se réfugiaient sur des étagères dans des hamacs d’ouate pour panser plaies et bosses.
En fait, ils vivaient tous dans la même pièce à des hauteurs différentes.
On comprend mieux pourquoi la maison des ‘ rigolos ‘ n’avait pas de porte. 🐀
En ce début de printemps, leur comportement déconcertait le village. Propriétaires d’une maison de campagne, ils n’entraient et ne sortaient que par les fenêtres, jamais par les portes. Les suppositions allaient bon train.
– Ça me fait penser à une blague de Toto, disait Gustave à Paul, l’ermite qui vivait dans une caravane au fond du bois.
– Tu me l’as déjà racontée cent fois, mille fois, répondait Popaul. Toi, avec tes blagues à deux balles qu’on ne sait même pas quand il faut rire !
– Tu sais pourquoi Toto sort par la fenêtre ? poursuivait Tatave qui n’en démordait pas.
– J’en sais fichtrement rien, moi, s’agaçait Popaul. Je les oublie aussi sec, tes histoires à la gomme.
– Eh ben, c’est parce qu’il y a une grosse bouse de vache envahie d’un essaim de mouches devant la porte. Ah, Ah, Ah ! se fendait Tatave plié en deux de rire.
– Et c’est là qu’il faut rire ? s’interrogeait Popaul dépité qui s’en allait s’en jeter quelques-uns derrière la cravate dans l’unique bistrot du village.
– Je sais pourquoi, moi, s’écriait Yvonne la gazette du quartier. C’est parce qu’ils ont perdu les clés.
– Mais non ! Je les ai vus de mes yeux vus, la contredisait la Jeanne, vieille toupie qui braconnait les légumes dans les potagers. C’est parce qu’ils sont trop grands et qu’ils s’assomment sur les linteaux. Et même qu’un jour, lui il avait un bosse grosse comme un œuf de pigeon. (Tout juste si elle ne faisait pas « Na » comme les gamins).
Tous autant qu’ils étaient dans ce village perdu dans le trou du cul du monde, aucun n’avait remarqué que cette toute mignonne maison de campagne était hantée depuis que les propriétaires avait péri asphyxiés, à la fin de l’hiver, à cause du mauvais tirage de leur cheminée. En désespoir de cause, au bout de leur vie, ils avaient sauté par les fenêtres de derrière qui donnaient sur un maquis de ronces.
Leur comportement déconcertait le village..Propriétaires d’une maison de campagne,ils n’entraient et ne sortaient que par les fenêtres.Jamais par les portes,les suppositions allaient bon train.
Certes on ne les voyait pas souvent,mais à chaque fois c’était le même manège.Tout la famille,y compris l’aïeule que l’on poussait aux fesses,s’engouffrait par l’ouverture après que le plus jeune ait débloqué les contrevents de la cuisine.
Puis se faisait entendre le claquements des huit fenêtres de la maison.Ca faisait un sacré raffut dans le village endormi, à six heures du matin.
Le père aimait voyager de nuit disait-il.
Les voisins en avait déduit, au départ,qu’ils avaient perdu la clé,mais ensuite…
La gendarmerie avait fait des recherches sur les fichiers de la petite délinquance et du grand banditisme.Rien à signaler.
Le maire s’en désintéressait puisqu’ils payaient leurs taxes.Les commères supputaient qu’ils voulaient se faire remarquer,ce qui était réussi.
Ce sont bien des parisiens disait Emiiienne,celle qui tenait l’agence immobilière »Vend Moi Ton bien »,ils viennent acheter à bas prix notre patrimoine et en profitent pour faire n’importe quoi.
Dans la chambre qu’elle occupait chez ses parents,la jeune Louise souriait.Ils étaient arrivés!Les volets claquants l’avais réveillée.
Elle,elle savait, mais ne le dirait jamais,elle l’avait juré à Emeric, celui qui ouvrait les premiers contrevents.
Ils étaient amoureux depuis la première fois que la famille des Voltigeurs comme on les appelait ici,avait passé ses vacances dans cette maison.Ils avaient douze ans,ensemble ils allaient se baigner dans des petits endroits secrets pour éviter les ragots et la méchanceté des frères d’Emeric.
Quand Louise lui avait demandé la raison de leur curieuse habitude,la réponse fit si acratopège et stupide qu’elle en rit un bon moment.
Alors c’était aussi simple que ça!
Après avoir échangé leur sang « A la vie,à la mort jusqu’à ce qu’elle nous sépare » et juré de ne jamais rien révéler,ils avaient continué leurs rencontres de plus en plus tendres au fil des années.
La demi sonnait au clocher,Louise,la joie au coeur,se rendormit au premiers rayons du soleil.
Ils ont emménagé une nuit. Sans témoin. Ni lune. Ni étoiles. En catimini.
Un chien avait pourtant aboyé longuement, intensément. Alors Marcel s’était levé pour le faire taire, bien qu’il pensât que les chiens, ils étaient là pour gueuler…et pour mordre… Il vit alors des halos de lumière provenant de la maison de campagne située à une centaine de mètres de chez lui.
– C’est-y que les nouveaux propriétaires ont débarqué ? se dit-il en se grattant la tête.
C’est ainsi que commencèrent les premiers questionnements. Laissés sans réponse.
Les villageois surveillaient, épiaient. Ils ont parcouru le mur d’enceinte pour trouver une faille, pour y jeter ne serait-ce qu’un œil. En vain. Ils tambourinèrent au haut portail en bois de la propriété. Ils alertèrent la gendarmerie car tout ceci était louche.
Sans suite…
Marcel eut l’idée de s’installer dans son grenier. Il invita ses copains de belote. A tour de rôle, ils observaient avec des jumelles la bâtisse et leurs énigmatiques habitants.
Les pichets de vin défilaient Les esprits troublés par l’alcool échafaudaient des scénarii. Les suppositions allaient bon train. Les quatre compères finirent par déclarer :
– On les a vus. Ils n’entrent et ne sortent que par les fenêtres, jamais par les portes.
Les villageois, nourris par leur frustration, les crurent illico. Seul, le Jacquot, l’idiot du village avait demandé : « et par les portes-fenêtres ?… ». Mais il fut aussitôt rabroué et partit, tête baissée, suivi par le chien de Marcel. Ils s’aimaient bien ces deux-là.
C’est ainsi que continuèrent les affabulations. L’équipe de Marcel avait même remarqué qu’ils avaient d’une fenêtre du deuxième étage un toboggan qui arrivait directement dans une immense piscine…
Trafiquants de drogues. Proxénétisme .Mafia. Malades mentaux…Insidieusement, la haine avait miné les esprits. La révolte grondait.
Marcel et toute sa clique rêvaient, ce mardi 14 Juillet 2020, de prendre d’assaut la bastide…
Pas d’inquiétude, la maréchaussée fera son devoir…
Certains ferment leurs portes.
D’autres, leur vie, c’est, d’ouvrir des portes…
Et surtout leur cœur.
Leur comportement déconcertait le village. Propriétaires d’une maison de campagne, ils n’entraient et ne sortaient que par les fenêtres, jamais par les portes. Les suppositions allaient bon train.
« Bah, ils ont été enfermés à l’intérieur, sans clés, faut pas chercher midi à quatorze heures ! »
Pour Emilie, il n’y avait jamais de mystère, même dans les romans policiers. Elle s’arrêtait toujours au milieu dès qu’elle était sûre d’avoir découvert le meurtrier.
« Et pourquoi ils ne sont pas allés voir un serrurier le premier jour ? Voilà trois mois que ça dure ! »
Pour Victor, il y avait bien autre chose derrière ce comportement suspect, une histoire macabre derrière chaque porte, comme il les délectait dans les polars.
« Les serruriers, tous des voleurs ! lui claqua au nez Emilie. Et puis les portes, ça ne sert plus de nos jours. Trop fastidieux. Toujours penser à prendre les clés, puis la poignée, sans faire claquer la porte au aux oreilles des enfants endormis, la refermer, à clé encore, sans oublier de penser à se rappeler où on a rangé les clés. Jusqu’au jour où tu les perds, une fois de trop, ne supportant plus de voir le serrurier se frotter les mains avec le pognon qu’il t’a à nouveau escroqué. »
Emilie enfonçait des fenêtres ouvertes.
« Superstition, je vous dis ! »
« Hein ? »
Robert, silencieux jusque-là, contemplant sa poire dans le reflet de son verre, avant de l’avaler cul-sec avec un grand Ah! de porteur de vie à son gosier comme s’il allait retrouver son teint de jeunesse, venait de rompre l’agitation ambiante dans le bistrot du village.
« Je les connais, les Duvivier, depuis le grand-père jusqu’au petit-fils. Ils ont tous pris la porte à l’usine de papier de Montburon, les uns après les autres. Licenciés, humiliés, des portes dans la gueule comme on en fait plus. Aujourd’hui, on te pousse derrière avec des pincettes, on te raccompagne avec un plan social, on te promet de la laisser entrouverte, chômage partiel, la même technique, avant que le double clic de la serrure ne te pince une dernière fois le cœur et ne t’enlève l’envie de te battre. Non, eux, c’était sans ménagement, dégage ! y a plus rien à voir, fin des bobines ! Alors, le petit dernier, avec sa femme, chaque fois qu’ils fermaient une porte, en partant bosser le matin, ils avaient toujours cette appréhension de se faire virer le soir. Depuis qu’ils prennent les fenêtres, en touchant le bois des vantaux à chaque fois, ils sont toujours à leurs postes, à la scierie du Bois Joli. »
« Bah, j’ai entendu dire qu’ils allaient fermer justement » lâcha Emilie, comme une bombe.
« C’est dans l’air, en effet » ajouta Victor.
Le vieux Robert cherchait une réponse au fond de son verre vide.
« Mouais, le problème, avec les fenêtres ouvertes, c’est que ça favorise les courants d’air qui s’infiltrent en bruit de couloir attendant la première porte ouverte pour vous claquer à la gueule… Je sais.
Mais tant qu’il restera une fenêtre ouverte, ils garderont le droit d’espérer. »
– Vé, vé Jules, regarde, Ils sont revenus et ils continuent de passer par les fenêtres !
– Ouais, je vois ça Antoine, ma foi…ils sont bien dérangés les pauvres !
– Moi je pense qu’ils ont choppé la superstition de la porte ?
– C’est quoi ça la superstition de la porte ?
– Ben c’est quand tu crois que ça porte malheur de passer par les portes… et qu’alors le bon Dieu…
– Oh mais tu délires Antoine, faut que t’arrêtes de boire le pastis avec l’abbé Marcel.
Là tu commences à m’inquiéter avec tes bondieuseries sur les portes… Je te dis que ces gens sont tout simplement dérangés.
Quand y a une porte, tu passes par la porte et pas par les fenêtres… C’est tout.
C’est pas plus compliqué que ça et je vois pas ce que vient faire le bon Dieu la-dedans.
Toi aussi je te trouve bien dérangé mon pauvre Antoine….
– T’as tort Jules, je te dis que la superstition de la porte, ça existe !
– Et ta sœur ?
– Je te jures Antoine…l’abbé Marcel, il m’a expliqué ce que c’était la superstition de la porte, et bien moi, depuis je commence à m’entraîner à passer par les fenêtres. Et pour tout te dire, j’ai commencé par celle de la pièce du bas…
– Quoi ? Mais tu deviens jobard mon pauvre ami ?!!! Tu m’inquiètes sérieux là… Je te le dis, arrête de boire le pastis avec l’abbé Marcel !
Jules criait si fort sur Antoine que les habitants de la maison sortirent par les fenêtres (évidemment) et ils s’approchèrent des deux amis surexcités.
Quand ils comprirent la raison de cette dispute, ils éclatèrent de rire et le plus âgé leur dit:
– Chers amis, bravo et félicitations !
Vous avez remporté le prix de la meilleure idée.
– ?
– Je suis Pascal Perrat « éveilleur d’idées », et j’ai demandé à mes amis de se livrer à cette comédie des fenêtres afin d’étudier les réactions des habitants du village et de réveiller leur imaginaire.
Sachez, Monsieur Antoine que l’idée de la superstition de la porte est excellente!
Cependant, cessez de vous entraîner à passer par les fenêtres, même par celles du bas… ça pourrait être dangereux !
Quant à vous, Monsieur Jules, Bravo pour votre pragmatisme, mais vous devriez intégrer notre fine équipe afin de libérer un peu plus votre imagination !
Ceci dit, allons tous trinquer à cette délicieuse expérience !
– Attendez Monsieur Perrat, je vais chercher l’abbé Marcel s’écria Antoine, il va vous expliquer pour la superstition de la porte !
Leur comportement déconcertait le village. Propriétaires d’une maison de campagne, ils n’entraient et ne sortaient que par les fenêtres, jamais par les portes. Les suppositions allaient bon train.
Certains pensaient qu’avec leurs têtes un peu étranges et pas d’ici, leur agilité, ce n’était que des voleurs ayant fait fortune. Et déformation « professionnelle », ils entraient dans toutes les maisons par les fenêtres.
D’autres croyaient qu’il s’agissait de pauvres citadins ayant toujours vécu en sous- sol et dont les fenêtres et les portes possédaient sensiblement la même taille. Héritant de cette maison d’une arrière cousine , ils ne saisissaient pas vraiment l’usage et l’utilité de la porte.
La plupart, homme et femme, ronchonnait dans leurs barbiches, comme quoi ce ne pouvait qu’être qu’une bande de hippies/vauriens/déliquescents/marginaux, ne respectant rien des traditions, cultivant dans leur cave des champignons hallucinogènes à base d’endive exotique et dormant toute l’année à deux ou trois dans le même lit à une place.
La commune était petite et pauvre. Le maire n’avait même pas de quoi s’acheter un pot de glue pour se coller une étiquette. C’était délicat pour un maire de ne faire partie d’aucun clan et ses élus le suspectaient de tout et n’importe quoi, tel un camembert soupçonné de ne pas avoir été fabriqué en Normandie.
Evidemment, le problème des « bizarres » fut soulevé en réunion de conseil. Une vielle bigote prônait carrément l’excommunication. De plus modérés, proposaient d’encadrer la parcelle concernée, la 21, d’un mur, agrémenté sur le haut de barbelés, justement en promotion, et d’une tour de contrôle, cette dernière option ayant le double avantage de créer de l’emploi pour Bébert, l’idiot de service, et de l’empêcher de tourner autour de nos filles. Un ivrogne, signala quand même, que, parfois, à certaines heures, quand la porte était bouclée, c’était rudement pratique de passer par la fenêtre.
Finalement, après une demi-journée de concentration, de concertation et de conciliabules, rien ne fut décidé d’autre que de créer des commissions d’observations. L’une pour l’impact sanito sécuritaire, l’autre pour le social juridique et une troisième pour les aspects écolonomiques de l’affaire.
De fait, la plupart des gens avait peu regardé cette maison et ses habitants. Ils avaient rattrapé le premier bruit qui courait et chanté en chœur avec le premier son de cloche. L’essentiel des êtres vivants passant par les fenêtres n’étaient que des chats. Le seul propriétaire, un vieux philosophe lunatique, un peu ours, lui écrivait. Ancien président du FLNJ (le front de libération des nains de jardin), il passait ses journées à peaufiner une thèse sur l’inutilité des portes ayant partout et de tout temps disqualifié les rapports entre les êtres humains.
Il en était persuadé. Son ouvrage serait comme une bombe, pacifique, dans l’histoire des relations humaines et internationales. Le FLP avait de l’avenir et il allait vaincre!
PS: Déliquescent: nm. Type de délinquant ayant commencé par vendre de la drogue et fini par en consommer quotidiennement.
Ecolonomie: nf. Organisation des éléments du gaspillage de la Terre.
Il faut bien dire que dans le village, l’imagination était fertile, entre croyances religieuses, croyances plus anciennes encore bien ancrées. Que cela soit le soir, l’hiver, autour d’un feu de cheminée, où l’on racontait encore toutes sortes de récits , ou bien dans le café du centre, où la piquette déliait les langues, parmi toutes les choses étranges qui intriguaient les villageois, ce sujet était le sujet de prédilection.
Beaucoup croyaient dur comme fer, que la maison était frappée d’un sortilège qui tenait les portes verrouillées. Nombreux étaient ceux qui racontaient avoir vu les habitants de la maison passer par les fenêtres et descendre un escalier invisible, ou encore les avaient vu déployer de grandes ailes blanches et s’envoler dans le ciel, d’autres encore juraient les avoir vus léviter . Il y avait aussi ceux qui se signaient fébrilement d’un geste de croix, et murmuraient des histoires de sorciers volant sur des balais, accompagnés de chauve-souris au clair de lune, voire même des formes sombres mi-humaines, mi-animales prendre leur envol.
Cela échauffait sacrément les esprits.
Le jardinier de la maison riait intérieurement en écoutant ici ou là les différents avis et témoignages.
Il faut dire qu’il en savait quelque chose lui.
Le propriétaire des lieux, un original , entre deux âges, et sa petite famille qui vivaient un peu à part, adoraient tout simplement se laisser glisser le long de câbles solides, dans une étroite et légère nacelle.
Et c’est ainsi, avec plaisir et quelques rires qu’ils sortaient par les fenêtres.
D’ailleurs la vie dans cette maison était pleine de fantaisie, de créativité et de joyeuses petites inventions et systèmes mécaniques dont le paternel était l’inventeur féru.
Les portes fonctionnaient parfaitement, pourtant une seule servait sur l’arrière de la maison, celle de la cuisine, par laquelle la cuisinière, une petite femme ronde, souriante, et muette allait et venait.
Le parc autour de la maison était vaste, peu s’y aventuraient, pour s’approcher suffisamment, avoir la curiosité de vérifier la réalité et découvrir ces simples systèmes de poulies, alors de fils en aiguilles, voilà comment les rumeurs étaient nées et continuaient de courir.