6 réponses

  1. Antonio dit :

    Maman-Nuage a donné naissance à une minuscule gouttelette. Maman-nuage s’inquiète. La petite dernière veut déjà rejoindre ses sœurs.

    On dit que sur terre des gueules béantes les ont engouffrées sans qu’elles aient pu assouvir leur soif de vie, en s’amourachant d’une belle plante pour se fixer avec son carbone au soleil. Maman-Nuage aime à revoir les photosynthèses de l’album de famille qu’elle a prise de ces premières ondées.

    C’était il y a si longtemps, à des années-lumière. Oh, comme elle regrette ce temps où chaque dispute virait à l’orage. Elle pleurait pour un rien, mais cela lui faisait du bien. Ne rien garder pour elle, c’est ce que lui disait toujours sa grand-mère. De ses émotions, ses tristesses passagères, ses éclats de colère, se nourrissait une végétation verdoyante et luxuriante qui, à la lumière d’un soleil radieux, réfléchissait un vert d’une espérance qui lui remplissait le cœur. Des jeux à saute-mouton aux ébats en « cubulto-nimbus », elle se gonflait de désir et, le soir venu, elle accouchait de ces pluies fines d’été qui forment de magnifiques arcs-en-ciel.

    C’était il y a si longtemps, à des années-lumière. Aujourd’hui, le soleil ne rit plus, il est devenu sévère. Les nuages ont déserté et la terre est devenue sèche et amère, sans la moindre vague, maintenant une vie fragile sans eau… sans elles, ses gouttelettes que maman-Nuage peine à faire naître.

    Elle observe ces gueules béantes et terrifiantes sur son nuage. Elle s’inquiète. La petite dernière veut déjà rejoindre ses sœurs. Si seulement elles avaient rejoint la nappe phréatique pour une vie future meilleure. Mais cela fait longtemps qu’elle n’a pas de nouvelles, que son album-photos reste vide. Elles se sont comme évaporées. Si seulement elle pouvait pleurer, comme autrefois. Pour un rien. Là, c’est plus grave, dramatique, son ventre gronde, mais rien ne vient.

    Et ce soleil qui ne rit plus, il mord comme un chien enragé cette terre aux plaies ouvertes qui agonise. Elle a soif, elle a faim. Seulement le ventre de Maman-Nuage gronde, mais rien ne vient.

  2. Rebelle !

    Après une énième incarnation terrestre, Gouttelette remontait sous forme de vapeur d’eau vers sa maison d’origine, celle qu’on appelle « Maman-nuage ».

    Ses sœurs applaudirent son retour et la regardaient comme une héroïne. Elles allaient l’interroger sur ce qui se disait sur Terre, mais Maman-nuage intervint sèchement pour les faire taire : « Voyez dans quel état nous revient une nouvelle fois Gouttelette ! Elle a besoin de repos ».

    Mais Gouttelette ne l’entendait pas ainsi. C’était une guerrière. Elle l’était devenue depuis que la foudre avait croisé sa descente, lors de son premier voyage sur terre. Si bien que la digue, dans laquelle elle avait eu le malheur de chuter, avait fini par céder quelque temps après. Juste le temps qu’il avait fallu à Gouttelette pour électriser — par ses discours enflammés — ses sœurs prisonnières.

    Gouttelette se sentait fille de la foudre. Rester dans les jupons d’une Maman-nuage inquiète, hyper protectrice, lui donnait envie de repartir aussitôt, quel que soit le nouveau périple qui l’attendait. Elle était toujours pressée de rejoindre ses sœurs pour les engager à la révolte afin de ne pas vivre dans les — larmes retenues — d’une Maman-nuage qui assurait ainsi la pérennité de son existence.

    Sa Maman-nuage se complaisait dans une certaine ouateur pour ne pas se dissoudre tout entière dans l’expérience. Et Gouttelette s’employait à lui arracher une larme qui lui permettrait de revenir sur terre.

    Certes, elle n’arriverait jamais, à elle seule, à faire refleurir un désert, à remplir un puits asséché, ou la cruche de l’homme assoiffé. Elle voulait juste exister… se sentir vivante… palper du nouveau. Ce que les Maman-nuage ne souhaitent pas toujours, car elles ne se définissent que dans ce rôle, et ne se projettent dans aucun autre. Alors que certaines s’invitent dans le Voyage, sous ses formes multiples, afin d’acquérir assez de force pour surfer sur le dos des vagues dans de vastes océans. Et devenir océan.

    C’était là, précisément, le rêve de Gouttelette.

  3. camomille dit :

    On dit que sur terre faut faire gaffe !
    La terre est de plus en plus occupée par des collectionneurs de gouttelettes.
    Parait que l’eau étant devenue rare donc précieuse, toute gouttelette est traquée puis négociée à prix d’or.
    Parait aussi qu’un musée de l’eau est en construction.
    Ce sera comme une prison dans laquelle on enfermera toute gouttelette intrépide.
    Les Humains paieront pour venir admirer ces malheureuses survivantes. Comme dans un zoo quoi !
    Maman-Nuage s’inquiète sérieusement et essaie de retenir la petite dernière.
    En vain !
    La petite rebelle est partie…
    Maman-Nuage pleure, et une nouvelle minuscule gouttelette naît…

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