495e exercice d’écriture créative créé par Pascal Perrat
Un feu orange, rivé à sa routine, en avait marre de clignoter bêtement. Il décida de se mettre au vert, histoire de se changer les idées…
Inventez la suite
Un feu orange, rivé à sa routine, en avait marre de clignoter bêtement. Il décida de se mettre au vert, histoire de se changer les idées…
Inventez la suite
Un feu orange, rivé à sa routine, en avait marre de clignoter bêtement. Il décida de se mettre au vert, histoire de se changer les idées…
Mais voilà, comment faire, pour mettre en œuvre cette escapade ? Feu orange tournait et retournait cela dans sa petite caboche, tant et tant qu’il en dépérissait. La déprime s’installa, il ne clignota plus que par intermittence, le souffle court, essoufflé
En haut, sa grande sœur coquelicot, éclatante, toujours vaillante, lui jeta un regard un peu inquiet, en bas, son jeune frère vert, pétillant, vif, en fit de même.
Un matin, une mésange trotta autour du feu de signalisation, sautillant. Feu orange sortit un instant de sa prostration et n’eut plus d’yeux que pour son petit manège, quel bel oiseau, murmura-t-il.
Sa sœur et son frère, entendirent ces mots à peine audibles.
Ils se concertèrent, chuchotis-chuchotant : « il faut faire quelque que chose pour le frangin, il ne peut pas continuer comme cela…
A nous deux, nous devrions pouvoir assurer le service. »
L’oiseau envolé, ils profitèrent de ce moment pour bavarder l’air de rien avec orange,
« Ok, nous sommes la pointe de la technologie, mais toi, tu as besoin de prendre l’air, de prendre la poudre d’escampette. Tu sais, orange, tu as du rouge en toi lui dit sa sœur, et tu as aussi le jaune de notre frère vert. Tu pourrais en faire quelque chose. Ça se sent que tu as besoin aussi d’autres horizons, si tu t’absentes un peu, personne ne s’en rendra compte. »
Orange, les écoutaient, ils sentait une flammèche s’animer en lui, et grandir. Au point que le verre, son étau, commença de se fendiller.
Il remercia sa sœur et son frère, leur dit « au revoir », laissa derrière lui un led quasi incolore, se fit boule, roula par terre, s’étirant , il prit de la distance : il avait envie de s’envoler lui aussi, de courir le monde.
C’était l’été, avec tendresse, il composa avec ses teintes quelques pigments s’accordant aux fleurs, aux papillons, aux oiseaux…
Un soir de 14 juillet, il explosa parmi un bouquet de feu d’artifice, parmi ces corolles qui fusaient, s’ouvraient haut, éclairaient la nuit, allumaient la magie dans les yeux des petits et des grands, des jeunes et de vieux, les faisaient s’exclamer des : « Ohhh !!! », des « Ahhh !!!!
Un autre soir, il rencontra un peintre roux et passa de sa palette à sa toile, se fit spirales de lumière, puis toujours l’accompagnant un moment, tournesols, meules de foin…lit, fenêtre,chaise de sa chambre…
En une belle fin de journée, allongé, au raz de pâquerettes, il vit ce qu’il avait déjà vu et admiré de loin, un magnifique coucher de soleil, une fois de plus il en resta « baba », quelle merveille ! C’était l’un de ses moments préférés, aucun soir ne se ressemblait, aucun coucher de soleil n’était le même que la veille, ne serait identique à celui du lendemain…
Il s’éleva dans les airs, et se mêla aux couleurs chargées de nuances, changeantes, fugaces, et dès lors ne les quitta plus.
Annoncer ainsi, dans tant de beauté la fin de la journée, l’enchantait bien plus que ne l’avait jamais fait ses années passées, à signaler : « ralentir ! », « ralentir ! », certes parfois il pensait à son vieil ami le passage piéton, à sa rougeoyante sœur, à son verdoyant frère.
Il leur rendait visite, leur racontant son plaisir euphorique, partageant avec eux son bonheur. Quant à eux, ils étaient, là, gardes-fous des quatre roues vrombissants , prenant leur mission à cœur, et à l’occasion en profitaient pour admirer, les jaunes orangé rouges flamboyants couronnant la fin du jour et la disparition de l’astre.
Un feu orange, rivé à sa routine, en avait marre de clignotait bêtement.Un beau matin, je clignote encore, un coup de soleil trop puissant et me voila t’y pas que je passe au jaune! C’est quoi ce délire là? Bon d’accord j’ai dit que je voulais passé au vert du genre…aller me balader ,voir du pays, me dorer la pilule,voir la mer, les vagues,les embruns,respirer l’air pur…quoi! C’est trop demander? Ben finetoto me voila jaune.
Je vois d’ici Rouge qui pousse un gros soupir, eh oh ça va toi là-haut joue pas au snobinard hein! Non mais des fois, c’est pas parce que Môssieur se trouve perché là-haut qu’il doit p…. plus haut que son c.. Moi aussi je peux le faire…tas l’un… Bon Vert lui si sensible, si printanier me boude à son tour. En voila des manières, c’est pas ma faute et quand la,la,la,la comme le dit la chanson c’est pas ma faute à moi!
Okay je suis pas une Lolita…je sens que la journée va être très,très longue. Ceux qui roulent de jour comme de nuit vont se demander si c’est du lard ou du cochon, quant’on sait que c’est du pareil au même hein! Je suis d’humeur taquin et ope un coup je fonctionne, un coup je m’éteins…
faut voir la tronche de ceux qui sont en bas,je m’éclate tous seul sur ce coup là, les deux autres me battent froid,z-ont plus qu’à prendre un pisse-mémé et le tour et jouer. Moi je veux seulement un peu de détente,c’est pas demander la Lune ça !Si! Eh ben flûte.
Je campe sur mes positions. Un coup je suis là et ope un coup j’y suis plus. Ah la liberté qu’est ce que c’est cool…j’aime ça, ce petit vent de révolte qui cligne en moi. Oh et puis re-flûte, voila le fouteur de trouble qui arrive avec sa casquette de travers, ses yeux qui vont soit d’un côté, soit de l’autre eh!!!tu fais le milieu de temps en temps?
Il branche son appareil et voila…Détection d’un disfonctionnement. Il aboie un : » Chef je répare ça dans dix secondes, un fils qui se…-j’en ai rien à faire , répare moi ça, c’est un vrai foutoir ce carrefour , vivement qu’on installe les nouveaux, là il n’y aura plus de problème._Bien chef, je termine.
Fini ma vie de bohème, retours au train train quotidien, allez les pollueurs roulez donc et faites gaffes à vos petits points. Moi, Nous, vous nous voyez bien n’est ce pas! Ben les prochains vous feront pas de cadeaux. Téléphones en main, ceintures non mises, passage à l’orange et on vous écrase…Gardez-vous bien. y.l.
Sur une idée de Pascal Perrat.
Un feu orange rivé à sa routine, en avait marre de clignoter bêtement. Depuis des années, il n’avait fait aucune touche. Un coup ça marche, un coup, ça marche pas. Cet automatisme stérile lui rendant la vie insipide et sans frivolité, il décida de se mettre au vert, histoire de se changer les idées. Etant géré électroniquement, le bon fonctionnement se rétablit de lui-même, pile dans la norme, instantanément. Mais c’est qu’il avait de la suite dans ses idées de démocratie, l’entêté. S’il avait décidé de varier ses nuances, un point vert dans le tableau de la multitude, cela ne se verrait pas. La fantaisie du vert, personne ne connaissait. Pourquoi toujours orange ? Pourquoi pas bleu ! Pourquoi pas violet ! Un jour de grande colère, il s’était piqué de rouge qu’il finit par griller. Là d’accord ! Plus jamais, il ne recommencerait cette folie meurtrière. Il ne voudrait plus se retrouver dans l’idéologie du rouge. Bonjour les dégâts ! Un feu de détresse lui avait été envoyé par un inconnu. » Ca va pas la tête ! qu’il avait cru voir dans la nuit noire. » Suite à cette expérience douloureuse, il s’était assagi. Mais aujourd’hui, il estimait devoir se libérer et travailler à sa guise avec un rythme reposant. Il en avait soupé de l’orange, tellement qu’il avait la tête en marmelade. La révolution orange avait bien eu lieu. Il était temps de tourner la page. Pourquoi mon électronique à moi ne se rebellerait-elle pas ? Il était normal, maintenant de passer au vert. Ce n’était pas une question de mode mais une impérieuse nécessité. Tout le monde disait qu’il fallait passer au vert, mais personne ne donnait le feu vert. Il fallait changer les codes et regarder la réalité pleins phares. La lutte entre l’orange et le vert dura plus de deux jours. Un électricien finit par se poser la question : « Mais qu’est-ce qu’il trafique ? »
– Tu vas le remettre aux normes, dit son chef, dépêche-toi avant la nuit.
Dans le feu de l’action, il en oublia sa lampe torche. Décidément, cette histoire de feux devenait incandescente. Arrivé sur place, il chercha dans les méandres des fils.
– Qu’est-ce qu’il se passe avec ce feu ? demanda le chef.
– Je ne sais pas, il en a marre de l’orange.
– Quoi ? Il en a marre de l’orange. C’est quand même pas lui qui décide !
– Ben, apparemment si, chef. Il veut son indépendance.
– Non, mais tu n’as pas autre chose à me raconter !
– Non, chef, moi aussi, j’ai envie de me mettre au vert.
Un feu orange, rivé à sa routine, en avait marre de clignoter bêtement. Il décida de se mettre au vert, histoire de se changer les idées…
A l’heure où les touristes sont tous partis, le Feu Orange du petit pont d’ en bas, avait mis les bouts pour aller faire un tour à la fête du village. Il y avait donné rendez-vous à son meilleur pote, celui du haut, qui siège près des remparts.
Plantant leurs collègues Verts et Rouges, ils rejoignirent en catimini, la charmante petite place, blottie entre l’ancienne bergerie, un pan de mur du château et les maisons aux teintes pastel.
Ils s’étaient promis d’être sages car la réputation du village dépendait d’eux.
– On sera sobres, hein !
– Oh, couillon, tu doutes de moi ?
– Non, mais faut pas qu’une voiture soit coincée, hein !
– Faut pas, ça c’est sûr !
Tout en barjaquant, ils se trouvèrent une petit table sous un laurier-rose.
Une Galinette peu farouche planta ses mirettes dans le feu de leurs yeux et leur demanda :
– Vous prendrez ?
– Ce que tu nous offres, Petite !
– Alors, ce sera deux vins d’orange. Cette année, il a reçu la médaille d’or à Orange, c’est tout dire !
– Va pour deux vins d’orange, primés à Orange, s’exclamèrent-ils.
Les boissons apportées, ils entamèrent le cérémonial.
D’abord le regarder.
Le premier cligna des yeux et trouva au vin un bel éclat grenat. L’autre le trouva cristallin avec une pointe de rubis.
Le premier insista, le second renchérit.
Pour se mettre au diapason, ils ne trouvèrent pas mieux que de le boire.
Et d’un !
– Hé, Galinette, tu nous remets deux verres, on n’a pas eu le temps de le sentir…
Aussitôt quémandés, aussitôt servis.
Le premier Feu orange, les joues en feu, prit le verre, fit légèrement tourner le nectar et le huma :
– Parfait ! Safrané avec délicatesse…
– Que nenni, répliqua l’autre Feu orange, c’est subtil, très subtil, mais un rien de douceur vanillée…
– Orange et cannelle !
– Muscade et clou de girofle !
– Bonne Mère, s’écrièrent-ils ne résistant plus. Et ils consommèrent !
Et de deux !
– Hé, Galinette…
– La même chose ? Mais faudrait pas abuser quand même, vous êtes encore de service…
– Certes, certes, on s’est focalisés sur la robe et les arômes, au point d’oublier les saveurs
Et de trois !
– Comme les Mousquetaires !
– Mais non, z’étaient quatre !
– Va pour quatre ! Santé, mon Pote !
– Santé.
Première gorgée, une explosion gustative.
Deuxième gorgée, une, deux, trois, quatre caudalies !
– Divin, ce vin d’orange !
Au-dessus des platanes, la lune commençait à se fendre de rire. C’est que les deux Feux ne tarissaient pas d’éloges sur le vin local, se gaussant toutes leurs connaissances œnologiques.
Après Vénus, les étoiles s’allumèrent les unes après les autres.
Le Campanile les rappela à l’ordre.
Ils se regardèrent dans les feux.
– J’crois qu’on a un peu abusé…
– J’crois pas qu’un peu….
Ils tendirent l’oreille. Il faisait calme.
– Pas la moindre si-sirène!
– Ni celle du Sa-samu,
– Ni celle des pom-pom- pompiers…
– Les pom-pompiers, c’est si- la ou fa-la ?
Tout à leurs interrogations, les Feux n’entendirent pas le la-ré de la police qui constata leur abandon de poste et les fit souffler dans le ballon.
– Sou-souffler dans l’ballon, mais on en a déjà bu tr….tr… ou …qu….qu…
– Bu quoi ? demanda le premier Policier dans son uniforme bleu, avec une moue de dégoût.
– De l’orange, enfin, du vin d’orange…
– Et il était comment, ce vin d’orange ?
– Difficile de le décrire, faut l’goûter !
Les deux Duos hésitèrent quelques instants. Ils eurent une pensée pour toutes les victimes qu’ils avaient rencontrées sur leur route. Et soudain, les Bleus et les Oranges ressentirent une profonde lassitude.
De la fenêtre ouverte du véhicule de police, un crachotement s’évada puis la voix de Bécaud emplit l’atmosphère : « Tu as volé, as volé l’orange, tu as volé, as volé l’orange du marchand…. »
Le Feu Orange se mit à clignoter, tel un lampion en folie.
Le second synchronisa son scintillement sur le premier.
Le premier policier, dans son uniforme bleu, hésita entre dégoût et fou-rire.
Le deuxième policier, dans son uniforme tout aussi bleu, oscilla entre résignation et transformation. Puis, il hurla :
– On se barre, les mecs, on se met au vert !
– Mort aux vaches, osa le premier Feu Orange.
– Le bonheur est dans le pré, renchérit le second en rougissant de plaisir.
Après cette fougueuse harangue, ils furent brutalement cloués par la stupéfaction et ils se turent. Les Bleus et les Oranges se regardèrent dans les feux et se toisèrent longuement.
La tension retomba, la sérénité revint et le Quatuor entonna : E Viva la libertà …
© Clémence.
excellent , Clemence, j’ai adoré . merci
tout y est la musique , les odeurs, des saveurs, l’humour un brin sarcastique….un vrai regal
Merci, pakitapom 😉
494/Un feu orange, rivé à sa routine, en avait marre de clignoter bêtement. Il décida de se mettre au vert, histoire de se changer les idées…Hélas le malheureux ignorait apparemment qu’en France les feux de signalisation lumineux et leurs conditions d’emploi sont définis dans l’instruction interministérielle sur la signalisation routière (IISR) dans sa 6eme partie (article 109 à 111-1)et qu’aucun d’entre eux ne pouvait décider d’un changement quelconque dans leur couleur ou leur fonctionnement. Feu orange il était et feu orange il devait rester et clignoter.
Le feu orange des feux de la rue parallèle saisissant son désarroi l’alerta sur les conséquences dramatiques que pourrait avoir pour lu son changement d’aspect ; il pourrait peut-être même développer un mélanome et là il ne donnait pas cher de sa « peau » s’il pouvait s’exprimer ainsi . Avait-il envie de finir prématurément au cimetière des feux d’où là aucun feu ne revenait ?
Ebranlé le feu orange continua à clignoter tout en prenant enfin conscience de son utilité d’être utile.
Label : ROUSSE
Madame ne s’y était pas trompée quand, en feuilletant le catalogue, elle l’avait sélectionnée. Il faut dire que des alezanes de cette classe, c’était plutôt rare et pourtant, elle en avait vu passer…
Une crinière rousse étourdissante, une peau de satin, un air désarmant de pucelle, une vierge de Raphaël avec un corps à damner tous les saints …Quoi de plus excitant, de plus sulfureux ?
Elle avait eu raison. Comme à chaque fois , elle avait fait le bon choix.
Il suffisait qu’Irina – oui, la sublime était roumaine, d’un petit village au nord-est de Bucarest où elle crevait la faim – il suffisait donc qu’Irina entre dans le salon pour que se tendent les caleçons…Si sa beauté et son élégance étaient innées, il lui manquait encore ce rien de rouerie et de savoir faire que dans un Eros Center de Belgique elle a vite appris. La jeune renarde est devenue panthère et Madame savait que, les hommes, cela allait leur plaire .
Moulée dans un fourreau de soie noir, elle avançait, féline, s’approchait du bar. Pudique, les yeux baissés, mais les reins cambrés, d’un geste, elle retirait alors l’épingle qui retenait son chignon, laissant crouler sur ses épaules nues une cascade de boucles cuivrées. Elle redressait ensuite la tête, lentement, avec une moue enfantine sur ses lèvres rouge baiser et plantait son regard labradorite aux reflets d’azur dans celui de son client…
« Je m’appelle Irina » soufflait elle, comme pour partager un secret, en faisant légèrement rouler les r, roucoulement de tendresse, prémices d’envoûtantes caresses..Un soupçon d’exotisme titillait déjà, en un seul mot, leur érotisme
Champagne !
Ce soir là le club était bondé, la clientèle d’habitués mais aussi, dans un autre genre, quelques visiteurs du salon de l’agriculture venus s’encanailler à la capitale. Un groupe de bons vivants qui s’était promis de déniaiser l’un d’entre eux . Déniaiser ! Tout de même, l‘Albert n’était plus puceau mais, avec la vie à la ferme, les bêtes, et tout ça , les femmes n’étaient pas, il est vrai, sa priorité alors bien sûr, ici et là, à la va vite, après le bal du samedi soir, mais rien de sérieux .
Ces oir la Là, c’est dans son regard à lui qu’Irina choisit de planter ses pupilles magnétiques, de sacrées banderilles ! Sous le choc, le garçon devint pale tout a coup , puis rosit alors que certaines autres parties de son anatomie viraient au rouge puissant .Subjugué , envoûte , tétanisé.l’Albert.
Des filles comme ça , y a que dans les magazines qu’on en voit…
Je m’appelle Urina …
Champagne !
Le salon de l’agriculture avait fermé ses portes mais Albert était encore à Paris et chaque soir, ses pas le ramenaient vers le club . Toutes ses nuits, il les passait à découvrir de nouvelles taches de douceur sur le corps de la sublime qui s’amusait de sa candeur mais ne dédaignait pas ses ardeurs
« Mon Albert, monté comme un taureau ( imaginez avec le roulé de R) mais doux comme un agneau ». Albert avait de l’argent- une de ses plus belle Salers, au salon avait été primée pelage roux orangé , une vraie beauté – Alors Irina, pour lui, avait tout le temps
Petit aparté :
Salers : race bovine française arborant une robe acajou foncé, à poil long et frisé, et à grandes et fines cornes de couleur claire en forme de lyre. Les muqueuses sont couleur chair. Sélectionnée à l’origine pour le travail, c’est une race de grand format, très charpentée. Bonne grimpeuse, elle n’est pas sujette au vertige.
Le 16 mars alors qu’Albert se prépare à rejoindre Irina, sa Lilith à lui, son feu, ses flammes, l’information tombe , froide, implacable : Confinement général et interdiction de déplacement de la population à partir du 17 mars 2020 à 12 h dans le cadre d’une politiques de restrictions de contacts humains et de déplacements en réponse à la pandémie de Covid -19 en France.
La fête est finie, Albert doit rentrer au bercail…Il se précipite au Club où l’ambiance est pour le moins morose. Madame vient d’annoncer que la boutique fermait et que ces demoiselles devaient se débrouiller pour trouver un endroit où séjourner le temps du confinement espérant que cela ne dure pas trop longtemps.
Quelle déveine pour la belle roumaine qui n’a nulle part où aller . Tous ces beaux messieurs qui semblaient tant l’apprécier sont tous rentrés bien à l’abri dans leurs foyer…Mais Albert, le doux le gentil, le naïf aussi, Albert,sans hésiter, propose à la belle de venir chez lui se mettre au vert et c’est ainsi que, par un beau matin de printemps, ils font route commune vers le Cantal et ses verts pâturages …
Le soleil caresse les épaules dénudées de la reine de la nuit et son teint marmoréen se fait églantine piquetée d’éphélides . Irina a troqué son fourreau de soie pour un simple jean et un chemisier assez échancré vert forêt . Ses boucles rousses caracolent au travers des rais de lumière. Rose sauvage en plein épanouissement à l’inverse d’Albert qui, curieusement, devient de plus en plus taciturne au fur et à mesure que ils se rapprochent de leur destination.
Il y a une chose qu’Albert a omis de dire à sa fougueuse panthère en lui proposant de l’emmener au vert, c’est qu’à la ferme il y a Mémère…
Veuve précoce à qui la vie n’a pas fait de cadeau, si ce n’est lui laisser la charge d’une grosse exploitation sur le dos et, en plus,… un marmot , Mémère a la vie un peu amère et tout d’un Cerbère !A peine arrivés, elle lui fonce dans le lard . Albert doit tout justifier sous le regard mi étonné, mi amusé de sa Dulcinée : son retard, sa vie de fêtard et surtout, là sur le siège passager, l’espèce de drôle de renard femelle, à ses yeux , un peu trop belle …
Avec beaucoup de tact, son fils la prend dans ses bras et la rassure tendrement sur ses sentiments,
« Ce n’est la qu’une amie qui vient passer un peu de temps ici et puis, franchement, de la main d’oeuvre bon marché, Maman, cela ne peut pas se refuser. .. »Sésame imparable , la mère est conquise – ou presque – et Irina, à la ferme, enfin admise.
Dans ces mondes qui se télescopent, la cohabitation n’est pas toujours aisée . Si, sur la corde à linge rassemblés, culottes coton xxl, caleçons et tankas léopard au vent, harmonieusement, s’agitent, les discussions, elles, volent bas . Elles explosent souvent, laissant parfois de douloureux éclats fichés dans les cœurs blessés, ici et là..
La vieille tâcheronne marmonne, râle et ronchonne pendant que la jeunette joue à la dînette, à son Albert fait des risettes en se faisant bronzer les gambettes. Irina est aux anges, pour la première fois, on lui a fait le coup du « je t’aime, un peu beaucoup » . Dans des champs de marguerites remplis , ils ont roulés et joui. C‘est beau la vie !Même sans être fleur bleue, si on ne se méfie pas un peu – une fleur déracinée doit se donner du mal pour continuer à vivre – le parfum du bonheur , vite, cela vous enivre …
Le temps passe. Quand Irina pleine de bonne volonté, s’en va au jardin travailler ou, dans les champs ,les vaches garder, la haie tout à coup se remplit d’yeux voisins . La bouche haineuse de Mémère crache alors en mitraillette des mots trop longtemps ruminés : » rouquine roulure, trainée, catin, fille du diable « . Celui là, une fois qu’ on l’a invoqué , c’est souvent difficile de s’en dépètrer…Mémère se fait vipérine, méchante, ignominieuse, Irina, elle, est de plus en plus câline , ardente et tellement amoureuse ….Albert vit un enfer. Pour un peu il battrai sa mère .
Le déconfinement est annoncé, entériné ,mais Irina aime bien sa vie au grand air avec son Albert et lui , son enfer est aussi son paradis . Comment faire ?
C’est au début de l’automne que Mémère s’est mise à tousser. Un mauvais rhume sans doute ?
Depuis quelque temps Irina se plaignait d’une invasion de bestioles noires rampant dans la cuisine . Du coup, elle avait demandé à Albert de lui rapporter de l’insecticide de la coopérative.. .Chaque soir, à la vieille fatiguée, elle apportait gentiment une tisane d’herbes mais, apparemment, cela n’était pas suffisant .
Mémère, malgré tous ces bons soins, toussait de plus en plus et s’affaiblissait doucement .
A l’entrée de l’hiver, à la campagne, c’est bien connu , les rats fruitiers et autres bestioles envahissent les séchoirs et y font des ravages . Là, c’est Albert qui décida d’aller acheter de la mort aux rats….pou régler définitivement le problème
Mémère s’est enfin arrêtée de tousse . Juste avant Noël, on l’a enterrée .
Quelques jours plus tard , dans la grande ferme vivement dépoussiérée, pour le Jour de l’An, on réveillonna, décence oblige, en tout petit comité . Tendrement enlacés, Irina, en fourreau de soie noir, les cheveux dénoués et Albert dansaient . Dans l’air flottait une délicate odeur d’hespérides et quand ils furent sous le gros bouquet de gui et de houx mêlés, ils s’embrassèrent en se souhaitant une bonne année !
Un feu orange, rivé à sa routine, en avait marre de clignoter bêtement. Il décida de se mettre au vert, histoire de se changer les idées…
Jojo était l’idiot du village. Tous les jours, il allait jusqu’à la grand-route et il observait le manège incessant des véhicules lancés à toute allure, ignorant le feu clignotant ; il entendait les lamentations et jérémiades des habitants du lieu qui regrettaient de n’avoir pas de feu vert pour pouvoir s’insérer en toute sécurité sur la voie qui les menait au travail ou aux courses.
Il enviait le pouvoir supposé de ce sémaphore routier qui en permettait ou refusait l’accès à son bon vouloir lui semblait-il. Il se nourrissait de cette puissance et était subjugué par le clignotement incessant qui faisait son admiration.
Ça l’amusait beaucoup d’invectiver les piétons de la rue principale et unique en leur disant, non, non vous ne passez pas , en clignant fortement des yeux ; il disait, regardez, c’est feu clignottant, attendez le feu vert !!! Tout le monde l’aimait bien, Jojo, dans le village, c’était un doux dingue que la nature avait doté d’yeux d’un vert exceptionnel impossible à ne pas remarquer. Les habitants jouaient le jeu et s’arrêtaient, attendant gentiment que Jojo ouvre grand ses yeux verts en les invitant à passer, non sans avoir auparavant cligné de l’oeil du côté où ils étaient censés se rendre. Oui, il avait le pouvoir de leur rendre le sourire. Aussi, quand, se rendant comme chaque jour sur le carrefour vers la grand-route, quelle ne fut sa surprise de voir le feu irrémédiablement au vert seulement du côté de la grande voie de circulation et plus rien vers le hameau, privant les villageois de toute issue… et le privant, lui, par la même occasion, de son privilège. Il fut envahi par un désespoir sans nom. Il errait tristement dans l’unique rue, le sourire l’avait quitté,
Jojo déprimait si fort que le feu orange eut pitié de lui. Il se remit à clignoter, passant au vert par intermittence, octroyant même régulièrement, quoique pour de courtes durées, le rouge à la grand-route. Jojo retrouva son sourire et sa joie de vivre, et le jour de la fête du village, il fut porté en triomphe par les habitants reconnaissants. Merci Jojo.
Un feu orange, rivé à sa routine, en avait marre de clignoter bêtement. Il décida de se mettre au vert, histoire de se changer les idées, il en avait marre d’être vrai, il voulait, inventer, inventer, d’autre couleurs, interstellaires, différentes de la terre, dans laquelle son socle était ancré, dans du béton armé.
Se mettre au vert ne suffirait point à cette entreprise d’envergure, une entreprise que même la mouette-là au dessus de lui (qui le narguait souvent en se riant de lui, coincé, embourbé dans son orange qui pulsait comme un citron – une orange – pressée…), n’aurait jamais entrepris de sa toute petite vie de mouette.
Il voyait grand, il voulait voir grand, démesurément grand, incommensurablement grand, tant et tant que son cou commença à s’allonger grandement, fortement, fichtrement.
Son socle devenait téléguidé, oui, même coincé dans le béton armé, il pouvait, lui aussi, s’envoler haut très haut (à vrai dire, il ne savait plus s’arrêter, ça grimpait, ça grimpait, ça grimpait et…. Hop, la mouette, coiffée au poteau eh ho ! Mais ça continue, les nuages se mettent à caresser et câliner ce corps tout froid d’acier qui continue de clignoter (il grelotte de froid et de peur, oui, c’était pour ça en fait – et de rancœur oh peuchère, tant de cœur, dans ce corps d’acier trempé, coincé dans du béton armé.
Il me faut m’arrêter. Il me faut le stopper, te stopper !
Se mettre au vert après tout c’est…. Se reposer et… Arrêter de, vouloir, avancer, juste, se poser, tel, une plume, d’écriture qui, se couche après avoir, bien, trop, travaillé (non sans avoir chatouiller le nez de, son auteur préféré, son maître, en vérité).
Avec la voix, c’est mieux 🙂 :
https://soundcloud.com/elise-raguet-durbesson/un-feu-orange-entre-2lettres
Un feu orange, rivé à sa routine, en avait marre de clignoter bêtement. Il décida de se mettre au vert, histoire de se changer les idées …
Le serveur informatique qui pilotait la voirie, fringant robot intuitif de nouvelle génération, était en phase d’apprentissage et engloutit aussitôt l’information.
Miam, ça faisait du bien aux circuits. Ainsi on avait droit à une certaine créativité ?
Il avait l’âme électronique d’un lanceur de mode : le vert fixe deviendrait tendance.
Bingo, il relaya l’info !
Les vieux feux habituellement tricolores, bousculés dans la somnolence de leur habitude, grognèrent pour la forme en campant 3 minutes sur leurs positions, qui au vert, qui à l’orange, qui au rouge, puis se soumirent comme d’habitude. Pourquoi 3 minutes : et bien, essayez de retenir votre souffle plus longtemps, vous verrez. C’est la capacité neuro-pulmonaire d’un feu de ville moutonnier.
Les enseignes des magasins, elles, ravies de l’aubaine, s’en donnèrent à cœur et à joie dans la déclinaison colorée :
Vert gazon pour la boutique des tondeuses Couparaz
Vert émeraude pour les leds qui bordaient le velours des présentoirs du bijoutier.
Vert caca d’oie pour l’entreprise de « plomberie-débouchage de vos canalisations », mais aussi pour le surplus militaire Tientoidroit, et le détective privé « J.Tembrouille». Qui aurait pu penser qu’une âpre rivalité se jouerait autour d’une teinte si commune dans le secret des couches de nourrissons ? Comme quoi, hein, des goûts et des couleurs …
Le cabinet juridique hésita un instant entre le vert avocat et le vert mentent – euh menthe ! – puis se décida pour le vert forêt qui cachait mieux l’arbre.
Dans les maisons, les ampoules diffusaient du vert électrique qui donnait mauvaise mine, sauf aux plants de cannabis paraît-il, mais ça, personne n’y fit allusion.
Les gens se demandaient si le green-washing politico-publicitaire avait pris le pouvoir ou bien si, tout simplement Gaîa leur signifiait que le printemps était arrivé ?
De désarroi, de plaisir, de surprise, d’inquiétude, ils sortirent dans la rue.
Et, à tout hasard, ne prirent pas leur voiture.
On appela ce jour mémorable le Grand Déconfinement, vous savez, celui qui met de l’antigel dans le moteur de l’homme et un grand sourire béat laissant filtrer le petit bout de salade verte entre les dents.
Conte urbain
Je suis fatigué, épuisé
Dit le feu orange
J’en ai marre de clignoter
D’être ignoré, moqué, dédaigné, négligé
Il n’y en a que pour mes deux acolytes
Moi je ne suis qu’un misérable parasite
Entre deux stars du bitume
Quelle amertume !
Tout le monde leur obéit
Manu militari
Au feu rouge tout le monde s’arrête
Le savant, le poète
La discrète, la coquette
L’auto, la moto, la bicyclette
Pas question de traverser
Quand le feu s’est embrasé
Il risquerait de se propager
Dans toute la ville
Et mettrait la population en péril
Quand au feu vert
Qu’il aille en enfer !
Il se croit tout permis
Car tout le monde le remercie
L’écolière en retard
L’infirmier et son brancard
Le p’tit vieux hagard
J’vous le dit tout net, j’ai l’cafard
Alors c’est décidé
Avant qu’on ne m’enterre
Je vais terminer ma carrière
Seul, au fin fond du désert
A regarder passer les dromadaires.
Ha ha j’adore
– Eh, mec ! Ta voisine de carrefour vient de m’annoncer que tu fais ta crise d’illuminé.
– Ne me parle pas de cette lampadaire d’en face ! Une commère ! Et oui, j’en ai marre de clignoter bêtement à l’orange.
– Pourquoi bêtement ? Tu es ici, car des têtes bien pensantes ont décrété que tu avais un rôle primordial à exercer à cet endroit précis. Tu devrais être fier.
– Peut-être, mais, comprends-moi, je suis rivé à ma routine depuis de longues années, et histoire de me changer les idées, j’aimerais partir en vacances, me mettre au vert.
– Fais gaffe, car si tu fais ça, celui qui te surveille va voir rouge.
– Celui qui me surveille, je l’EMM…
– Eh, mec ! Tu es en train de péter un câble, là !
– Oui, et alors ?
– Alors, tu n’imagines même pas ce que peut faire la plus haute autorité compétente vis-à-vis de ton comportement. Tu ne seras plus orange, ni rouge, ni vert. Le multicolore oublie-le. Tu seras décâblé, déboulonné, décarcassé, broyé. Complètement détruit. Si tu fais l’insoumis, le rebelle, tu signes ton arrêt de mort.
– Qu’importe si j’ai pu réaliser mon rêve…
– Et à moi ? Tu penses à moi ?
– Je ne vois pas en quoi cela te concerne.
– Tu oublies toutes les fois, où je me suis arrêté près de toi, cloué dans mon fauteuil roulant, te donnant une petite claque amicale. Pour reprendre mon souffle. Chercher du courage pour finir ma route. Mes jambes, je ne les retrouverai jamais. Perdues dans un champ de mines. Et toi, ta présence m’aide. Chaque nuit, quand les cauchemars me tiennent éveillé, la lueur orangée de ton clignotement me rassure et me permet de m’évader.
– Ca me touche ce que tu me dis. Ecoute, je crois bien que quelqu’un te cherche. Alors motus et bouche cousue. A demain.
– Je l’entends. C’est l’aide-soignante. Salut, mec !
– Monsieur Rivière ! Alors, Monsieur Rivière, on se la coule douce tandis que nous, on se fait du mouron. Vous le savez bien, Monsieur Rivière que vous devez rentrer à l’heure des soins. La prochaine fois, le couperet tombera : Interdiction de sortie. Vous croyez qu’on n’a que ça à faire, courir après vous. Et puis, vous savez, Monsieur Rivière, vous devriez acheter un fauteuil électrique, car d’ici que vous ayez des prothèses, il y en aura de l’eau qui…
J’ai décroché.
Elle raconte toujours la même histoire.
Alors qu’elle cause seule.
Elle ne m’amuse pas.
Et demain, je recommencerai.
Excellent, merci j’ai adoré le feu clignotant qui rassure et, le reste, merci !
Merci pour votre enthousiasme !
Il aurait très bien pu passer au rouge, l’autorité, l’interdit !
Mais non, il avait choisi le vert pour essayer de rendre sa vie peut-être plus douce, plus fluide, tolérante, conciliante.
Plus palpitante aussi ! Car ce orange monocorde laissait place à un vert flamboyant, témoin de passages plus rapides, plus aisés, moins hésitants.
La vie semblait plus gaie, les voitures comme les piétons passaient tranquillement, sereinement, avec le sourire.
Lui qui était habitué à des visages stressés, sur le qui vive face à ce orange ambigu, il se régalait maintenant de cette heureuse fluidité.
Non décidément, il n’avait pas envie de revenir à son train train !
Alors il entreprit d’en parler à ses collègues feux pour trouver un accord…
Ceux-ci, orange clignotant également, lui mirent l’évidence devant les yeux: s’il voulait être vert, il fallait aussi obligatoirement être rouge !!
Pas de lumière sans ombre, pas de plaisir sans contrainte.
Tout ceci était un travail d’équipe ! Une organisation, une collaboration pour avoir sa part de vert !
Il travaillèrent dur pour trouver une harmonie et
c’est ainsi que feu et ses collègues jouirent d’une nouvelle vie. Ou plutôt de nouvelles vies !
Un coup verts, un coup rouges, ils ne s’ennuyèrent plus jamais.
Les quatre feux orange, rivés à leur routine, en avaient marre de clignoter bêtement. Ils avaient été posés là après que quelques bureaucrates penchés sur des plans, à leurs heures perdues, avaient jugé que ce petit carrefour méritait davantage l’attention des conducteurs. Mais les accrochages ne cessaient pas, puisque les automobilistes devaient encore avancer d’un bon mètre pour laisser la priorité à droite, car ils n’y voyaient goutte à cause des maisons qui leur masquaient encore la vue.
Par un bel après-midi d’été un stagiaire, qui s’ennuyait à tourner en rond et à servir des cafés aux ronds-de-cuir, jugea bon de se pencher sur ce cas qui lui paraissait étrange. Son chef opina du bonnet et le félicita pour son bon sens. Quelques jours plus tard, les Orange purent enfin délasser leurs pupilles. Ils laissèrent une large place aux Verts et aux Rouges qui étaient payés à ne rien faire, bien peinards, jusqu’à présent. Ils rechignèrent à être tirés de leur léthargie et à se synchroniser sous les coups de clé à molette, et autres tournevis, d’un agent de la voirie qui avait hâte de rentrer se vautrer dans son canapé pour regarder « the » match avec une bonne bière dans une main et un paquet de chips dans l’autre. La tâche des Oranges fut réduite à la portion congrue, et ils étaient enchantés de « se mettre au vert » depuis le temps qu’ils faisaient ce travail d’esclaves. Durant une semaine, les Rouges et les Verts ne cessèrent de se disputer, car les Rouges disaient qu’ils travaillaient plus longtemps et que ce n’était pas juste. Si bien qu’un jour, ils décidèrent, après un vote à poteau levé, de se mettre en grève et laissèrent tout le boulot aux Verts.
Le lendemain, le journal local relatait un terrible accident qui avait coûté la vie à deux personnes à ce carrefour. Le stagiaire retourna d’où il venait, c’est-à-dire à poireauter des heures durant sur une inconfortable chaise en plastique dans l’institution qui paye les infortunés à ne rien faire.
Ne cherchant pas plus loin que le bout de leur nez, les têtes bien pensantes décidèrent de mettre fin au farniente des Oranges dépités de clignoter à nouveau, jusqu’à en user leur rétine. Il leur vint l’idée d’imiter leurs collègues et c’est ainsi que l’année suivante, les tricolores laissèrent leur place à un petit rond-point et finirent leur vie découpés en morceaux après avoir fait un interminable voyage jusqu’en Chine.
C’était un feu bien tranquille, il était né pour les temps longs. Il voulait profiter pleinement de chaque instant, observer, s’imprégner de son environnement, il rêvait de se faire éponge.
Il aurait pu travailler dans le milieu de la bande dessinée, ou encore de l’illustration, là où un feu est orange, un point c’est tout. Il rêvait de figurer sur une illustration de livre pour enfant : il s’imaginait dessiné sur une jolie petite route de campagne, entouré d’animaux aux visages souriants.
Mais la vie en avait décidé autrement et, cherchant désespérément un travail, le feu orange avait été obligé d’accepter ce poste sur le boulevard extérieur d’une grande ville. Coincé entre le rouge et le vert, sa mission était de clignoter sans relâche. Et le pauvre n’en pouvait plus de clignoter : tout allait trop vite, il n’avait jamais le temps de s’attacher à ce qui le touchait, il lui était impossible d’apprendre ou de retenir quoi que ce soit et sa pauvre mémoire défaillante faisait peine à voir.
Plus les années passaient, plus il voyait sa vie défiler comme un zapping télévisuel, il en était profondément affligé. Il essaya bien une ou deux fois de changer son destin. Un dimanche matin très tôt, les voitures se faisaient rares, il décida de tenter une descente de son perchoir. Mais, vieux et rouillé par cette longue immobilité, il avançait très lentement, on le rattrapa avant qu’il touche terre. Après cette défaillance il fut tellement vissé et revissé qu’il en perdit le goût de la liberté : la seule idée de desserrer un boulon lui faisait faire des cauchemars épouvantables.
Notre pauvre feu orange aurait ainsi subi toute sa longue vie s’il n’y avait eu cette incroyable journée de mars 2020 où rien ne fonctionna comme d’habitude.
Ce jour-là, aussi loin qu’il pouvait voir par intermittence, et du fait de sa position sur un carrefour son champ visuel était très étendu, il ne discerna rien qui bouge. Il n’entendit rien non plus, mais son ouïe était moins performante que sa vue. Le plus incroyable dans cette histoire est que ce premier jour exceptionnel fut suivi d’un deuxième jour identique au premier, puis d’un troisième, d’un quatrième…
Au bout de dix jours sans voiture le feu orange réalisa qu’il y avait beaucoup plus d’oiseaux que d’habitude. Il ne pouvait hélas que les apercevoir car le fait de cligner de l’œil en permanence l’empêchait de poser son regard. C’est ce jour-là qu’il prit conscience de la vacuité de sa vie : il clignotait toute la journée et toute la nuit pour rien. Aucune voiture ne franchissait le carrefour, la nature reprenait ses droits comme si de rien n’était, plus personne ne s’intéressait à lui.
Alors le feu orange décida, pour la dernière fois, de tenter sa chance. Il mit plus de deux jours à se déboulonner, puis trois jours à descendre, il progressait très lentement par peur de se briser. Enfin le matin du sixième jour il toucha l’herbe fraîche au pied de son poteau et, tout ému, sentit en son cœur une nouvelle jeunesse. Il bondit vers la campagne, sur ce boulevard extérieur il n’en était pas loin, et sauta, tel un cabri rebondissant, jusqu’au fond d’un vallon bien abrité.
Aujourd’hui plus personne ne se souvient du feu orange mais ce vallon est signalé dans les guides touristiques : on dit qu’ici les fleurs sauvages ont un éclat particulier, comme si le soleil les éclairait par en-dessous.
Marianne B.
Je suis un feu clignotant orange : brille brille pas, brille brille pas, brille brille pas…C’est fastidieux. Au début j’espérais que certain me ferait des petits clins d’œil au passage. Mais que dalle, pense qu’à rouler vite, toujours vite. Et puis je suis là depuis tellement longtemps qu’on ne me voit même plus. Ce matin, c’est la torpédo de Maguelonne qui m’est rentrée dans le poteau. La chauffarde est descendue de sa voiture complètement ensuquée : « je l’ai pas vu, je l’ai pas vu… ». Le choc a été rude mais je n’ai pas plié. Mais ça m’a secoué les neurones et j’ai réalisé que mon imaginaire s’atrophie depuis belle lurette.Faut pas se laisser aller : je vole, je ne m’enfuie pas, je vole, je vole, comme dirait l’autre.
Je suis cette belle grosse orange brillante, juteuse. Je cherche grippette pour lui donner de l’élan.
Je suis cette salopette orange en tissu fluide, tellement légère. Je cherche petite nana bien roulée pour faire un bout de chemin.
Je suis cette bignone orange, ensoleillant le balcon de Françoise, balcon plein sud je précise. Je cherche bel ombrage pour que Françoise ne se dessèche pas en m’admirant
Je suis cet orang outan au poil brillant, un peu fatigué de son zoo. Je cherche petite scientifique chaleureuse pour m’emporter sur Bornéo.
Et si je passais au vert !
STOP, qu’est ce que je fais dans ce texte débile !
Oh Maguelonne, quel délicieux doux délire!
Mais… faut arrêter la fumette sur le balcon de Françoise hein?!!!
Un feu orange, rivé à sa routine, en avait marre de clignoter bêtement. Il décida de se mettre au vert, histoire de se changer les idées…
Ça faisait des semaines qu’il faisait le larbin sur cette nationale à réguler le flot de voiture à cause des travaux interminables qui se tramaient derrière lui. Bon c’est vrai qu’il appréciait de voir les gens retrouver le sourire quand c’était à lui de clignoter après que le rouge les ait stoppés laissant passés ainsi le flot de voitures d’en face. Mais là quand même après 21 jours, il en avait vraiment assez. Surtout que ce n’était pas juste, il ne comprenait pas pourquoi lui devait clignoter orange pour signaler de passer alors que ces potes au bout du boulevard passaient au vert pour signifier la même chose ! Allez-y c’est à vous ! Son orange à lui semblait rabâcher « oui allez-y mais faites attention ! » Evidemment qu’il fallait faire attention mais comme partout tout le temps ! Il n’en pouvait plus de cet orange qui le rendait tout palot !
Il avait envie de vert à l’image des feuillages des arbres en ce printemps lumineux. Les arbres au moins passaient du vert au jaune, parfois au rouge mais savaient que le temps leur redonnerait des couleurs, leur assurant une vie moins monotone. C’était devenu une obsession ! « Je veux passer au vert ! »
Il ne croyait pas si bien dire…Un samedi soir au cœur d’une nuit sans lune, un conducteur passablement éméché revenant de soirée avec quelques copains crut bon de faire son intéressant en déclarant que personne ne pouvait l’arrêter. Encouragés par les rires gras de ses amis avinés, il se saisit du feu sur roulette et le poussa dans le champ qui bordait la nationale.
L’histoire ne dit pas ce que les conducteurs devinrent mais la presse locale fit mention dès le lendemain de l’étrange disparition d’un feu de circulation qui restait introuvable…
Un feu orange, rivé à sa routine, en avait marre de clignoter bêtement. Il décida de se mettre au vert, histoire de se changer les idées.
Une idée lumineuse, me direz-vous, en déconfinés que vous pensiez être, la hâte de faire de même en ce week-end de l’ascension, ressuscitant les feus parcs et autres coins de verdures éteints une veille de Pâques (paix à leurs flammes !).
Seulement en place de déconfinement, c’est la déconfiture avec laquelle on vous tartine à longueur d’onde de radio pour mieux vous protéger et vous dorer au soleil sur un coin de bitume.
Ah ! vous me voyez venir… vert de rage en zone rouge attendant qu’un p… de feu se mette au vert. N’importe lequel, même un feu de paille, un feu de tout bois, un feu de dieu !
Que n’avais-je pas dit… Dieu existe ! je l’ai rencontré, rivé à sa routine, il clignotait bêtement « paradis, enfer, paradis, enfer, paradis, enfer, non pas vous monsieur Piccoli, si je vous mets avec Vincent, Paul et les autres ça va être l’enfer »
— Et si on se mettait au vert, mon petit père ? lui souffle l’acteur qui connaît bien les choses de la vie.
— Quelle étrange affaire, lui répondit Dieu.
— Tu ne vas passer ta vie à poinçonner des tickets d’entrée de fête foraine dans ce purgatoire, c’est pas une vie, depuis dix mille ans !
— Deux mille et quelques…
— Ouais, bon, allez viens ! Où est le petit Reggiani, et Montand et Romy ?
Quand le dieu orange se mit au vert, la terre tout entière n’en crut pas ses yeux qui clignotaient « béement ».
Elle attendait ça depuis si longtemps.
Le moteur du désir vrombissant, passant la première de ses envies avec frénésie, étreignant la boîte de vitesse comme la main d’une amie trop longtemps délaissée, appuyant sur la pédale d’accélérateur d’un rêve soudain accessible, avec cette sensation folle et jouissive d’en avoir sous le pied, grisé par le crissement des « j’peux le faire » gonflés à bloc sur l’asphalte du monde d’hier, je vous jure que je l’ai vue s’envoler, quittant son orbite d’un temps révolu, oui j’vous jure qu’elle a filé comme une DeLorean, avec la classe d’une Sophia par une de ces journées particulières qui entraîne les stars dans son sillage.
Oui je l’ai vue dévaler la piste aux étoiles et suivre sa propre route, le soleil à ses trousses, Dieu, Vincent, François, Paul et nous autres.
Il avait décidé de se mettre au vert et avait acheté un pot de Ripolin vert sapin, un pinceau tout neuf. A peine allait-il attaquer le travail qu’arrivent 3 hurluberlus aussi ridicules qu’inquiétants dans leurs manteaux rouges de chasseurs à courre.
Il faut dire que ce feu se trouvait près de la place de Jeanne et que nous étions à la veille du Premier Mai.
Tôt fait de repeindre les feux en bleu, blanc, rouge. Orange s’en trouva blanc de peur, désorienté.
L’ancien Rouge, devint Bleu de rage, le vieux Vert : Rouge de colère.
Désormais les feux allumaient le tricolore patriote. Il allaient signaler quoi maintenant, hein ? Des ordres nouveaux ?
Cela créa une telle pagaille rue de Rivoli que Mme la Maire décréta d’en supprimer les feux et c’est ainsi que cette belle avenue devint un piste cyclable.
Depuis, le 1er Mai, on y chante « Allons z’enfants de la béca…ane »
Un feu orange, rivé à sa routine, en avait marre de clignoter bêtement. Il décida de se mettre au vert, histoire de se changer les idées. Et, petit bonheur, le comportement des esclaves de la route évolua. Là où, par le passé trépassé, les admirateurs du Dieu Macadam lui faisaient la gueule, aujourd’hui, les travailleurs, encastrés dans leurs nécessaires à circuler le caressaient du regard, lui souriaient.
Alors que d’habitude, tous ces chauffeurs et ces chauffeuses lui tiraient une tête à faire chialer un troupeau de Dracula, depuis sa transformation, le peuple le vantait, l’adorait, l’idolâtrait.
Le feu vert du carrefour de la Fontaine, on allait en causer en haut lieu. Lui seul allait ouvrir une brèche dans la falaise des interdits. Encore la veille, forcément, la masse le frappait tous les jours. Elle lui en voulait de ralentir ses envies de déambuler des combustibles, d’ingurgiter du temps et de l’espace. Et en plus, tendrement, progressivement, vicieusement d’annoncer le redouté feu rouge, ce sous-dieu Pandore si alerte à cogner du haut de son ascendant.
Complètement embobiné dans ces prévisions lunaires, le nouveau feu vert n’entendait rien de la cohue, à ses pieds. Ca carcassait dur , le César du temps présent compressait la tôle et les os. Une statue de rond point prenait vie sur la mort.
Certes, il viendrait peut-être un jour où chacun saurait respecter la réelle priorité des autres, ou il serait envisageable de se croiser sans se cogner mais le temps perdu n’était pas encore à ‘horizon.
Et la Terre demeurait bleu…comme une orange.
Un feu orange,rivé à sa routine,en avait marre de clignoter bêtement.Il décida de se mettre au vert,histoire de se changer les idées.
D’autant plus bêtement qu’il passait une caravane par semaine, et encore.Le reste du temps il voyait du sable et des dune à perte de vue.
Le jour, il fondait presque sous le soleil impitoyable,la nuit il toussait dans le froid mordant.
Il avait bien vu passer un homme , quelques années auparavant,mourant de soif et de fatigue,un mouchoir noué aux quatre coins sur la tête.Mais il avait poursuivi sa route sans s’arrêter,croyant sans doute à un mirage.
Il prit sa décision après le passage de chameliers qui s’étaient encore une fois enquit ironiquement de sa santé, et qu’un dromadaire l’ait même choisit comme urinoir.
Blessé,humilié ,il commença sa pénible désincarcération.A la tombée du jour il se mit en marche maladroitement,se fiant à la Croix du Sud.
Il dépassa un squelette blanchi sur lequel il ne restait qu’un mouchoir décoloré autour de son crâne nu.
Au moment où l’astre du jour se montrait, il la vit:
une oasis!Verte,luxuriante,faisant entendre un léger gazouillis d’eau fraîche.
Le feu orange alla s’installer discrètement entre deux dattiers et attendit.Cela ne tarda pas.Un petit garçon vint voir ce qui clignotait ainsi.Il resta un bon moment à contempler ce drôle d’arbre puis courût avertir les autres oasiens.
Ce fut une renaissance.
Les voyageurs venaient de tout l’Afrique,admirer le phénomène qui servait de guide aux voyageurs.
Au » Phare du Sahara » comme on appellait l’endroit désormais. Des tentes furent dressées pour qui voulait y passer quelques jours.Une petite boutique vendait du rhé à la menthe et des Feux Clignotants sous forme de stylo,de boule de sable,de portes clef.
Et lui,au sommet de sa gloire,assurait son service,comblé.
🐀 FEU ROUGE
Alors, il la crache sa Valda ? Fulmine le Feu Rouge ! Rouge d’énervement qui attend… attend la fin de cette valse hésitation du Feu Orange qui clignote…clignote une fois oui, une fois non, qu’il en est au bord de l’orgasme.
Lorsqu’enfin, le but atteint, le Rouge très en colère l’a dans le baba ! C’est le Vert qui apparaît.
Je les laisse…Je passe ! On sait ce que c’est que les ménages à trois… C’est une histoire vieille comme le monde et ça n’en finit pas ! 🐀
Monsieur le Maire, appelé à la rescousse, est dans tout ses état le pauvre, et muni d’un haut parleur de policier, il tente de négocier :
– Voyons « FEU ORANGE» sois raisonnable, faut reprendre tes fonctions nom de Dieu, regarde ce bordel que tu me fais sur ce rond point… t’as pas honte ?
– NON, NON, et NON !
– T’as pas le droit de ne plus clignoter et encore moins de te substituer à FEU VERT.
C’est une grave entorse à ton contrat.
– Rien à foutre : NON NON, et NON !
– Bon… quelles sont tes revendications ?
– Veux plus clignoter… Personne me prend au sérieux, Personne me calcule, je sers à rien… pas de reconnaissance !
– Mais Bon sang, tu es la transition, ton rôle est très important, on a énormément besoin de toi ! La preuve, je suis là pour te le rappeler !
– Justement, marre d’être une transition… veux plus être une transition.
– M. le Maire, M. le Maire, c’est moi FEU VERT….Moi j’en peux plus de me disputer avec lui, je sais jamais quand c’est mon tour, il fait express de clignoter sans arrêt pour me prendre mon temps et je ne sais plus où j’en suis… je veux changer de carrefour !
– c’est vrai M. le Maire, c’est moi FEU ROUGE. C’est vrai, Il nous empêche de faire notre temps correctement, il nous pourrit la vie et on en perd notre latin. Moi aussi je veux changer de carrefour !
A ce moment là, une horde de gilets jaunes envahit le carrefour.
– Ah ! Manquait plus qu’eux se dit le pauvre maire, je croyais qu’ils s’étaient calmés ceux-là ?
Alors, il regarda médusé les gilets jaunes entourer de plastique noir les feux tricolores et prendre le pouvoir du carrefour.
Il se dit que ma foi, voilà une solution de mettre fin à une négociation bien mal barrée !
Il se dit que ma foi, sa fonction était de plus en plus acrobatique et ardue,
Il se dit que ma foi il était grand temps pour lui d’aller se mettre au vert et sans transition!
En poste à son feu de circulation routière, il en avait mare d’être critiqué. Il ne supportait plus qu’on dise de lui qu’il n’était pas une lumière, même lorsque la critique venait d’une signalisation directionnelle qui se prenait pour une flèche. Orange ! O désespoir ! O couleur ennemie ! Il voulait positiver, ne plus être qu’un signe d’alerte, une couleur indécise entre l’autorisation et l’interdiction. Il ne voulait pas être comme ces politiciens qui ne sont pas tout à fait à droite ni tout à fait à gauche. Il voulait être vert, vert comme l’espérance d’une vie meilleure, d’un allant vers la liberté. Par exemple, être celle d’aller vers le bar d’à côté, un bar italien, pour y boire un verre. Il s’y rendrait, envers et contre tout, avec son cousin, un adepte des chiffres. Ce dernier, orange comme lui, travaillait en circulation alternée. Il tempérait l’interdiction de son copain rouge en faisant le décompte du temps d’attente qui restait aux véhicules. Il donnait de l’espoir et s’en ressentait valorisé. Avec lui il partagerait une bonne pizza, une pizza Margarita, avec plein de vert, du basilic à outrance mais pas de rouge. Il ne voulait pas de pizza « automate ». Il ne voulait plus être dirigé par une machine. Si dans la voie transversale aucune voiture n’était en vue, il se mettrait au vert de son côté afin d’autoriser le passage. Il le ferait sans attendre le bon vouloir de l’automate, un robot qu’il mettrait aux fraises. Il s’unirait aux autres membres de son feu tricolore pour mener à bien cette petite révolution.
Un feu orange, rivé à sa routine, en avait marre de clignoter bêtement.
Lui qui avait un lion dans le moteur, un petit vélo dans la tête ! Il décida de se mettre au vert, histoire de se changer les idées… et de l’attendre au tournant
Elle finirait bien par tomber dans le panneau !
Sa maman en l’installant à son poste de conduite
Lui avait enseigné les interdictions et les obligations
« Ne te laisse pas dépasser » lui disait-elle « ne confond pas vitesse et précipitation »
Il se méfiait donc des traversées de cavalières venant de droite et de gauche
Un soir leurs routes se sont croisées et il lui a donné la priorité
Elle amusait la galerie, il l’a invité à danser le tango
Un pas sur le côté deux embardées de l’autre côté
Après lui avoir roulé sur les pieds toute la soirée il l’a raccompagnée et depuis elle est sa passagère
Il lui a dit « Veux tu m’épouser ? Oui réponse A Non réponse B »
Et elle lui a donné son feu vert
En double commande à ses cotes
Il est sa ligne continue
Son sens unique
Sa borne d’appel d’urgence
Sa place de parking
Sa carte routière
Il y a parfois quelques dérapages, des coups de volant, de la conduite par temps de pluie, des successions de nuages.
La vie n’est pas un long chemin tranquille !
Mais leurs enfants sont là.
Ils sont leurs roues de secours
Leurs aires de repos
Leurs essuie-glaces