443e proposition d’écriture créative imaginée par Pascal Perrat

Exercice d'écriture très créative
© S.Mouton-Perrat

Un euro, rêvant de faire des ronds dans l’eau, voire de ricocher dans la vie, ternissait d’ennui dans la sébile d’un miséreux. Mon sort n’est pas brillant pleurnichait-il.  
Or, il advint…

C’est ainsi qu’est née cette idée

23 réponses

  1. Peggy Malleret dit :

    Un euro, rêvant de faire des ronds dans l’eau, voire de ricocher dans la vie, ternissait d’ennui dans la sébile d’un miséreux. Mon sort n’est pas brillant pleurnichait-il.
    Or, il advint…
    qu’un malandrin le vola malgré les protestations du mendient unijambiste.
    Personne ne s’en émut, chacun continua son chemin indifférent à l’ignominie du geste.
    L’euro sauta de joie imaginant un nouvel avenir plein de promesses rayonnantes. Enfin, une nouvelle vie s’annonçait ! Il était prêt à toute éventualité.

    Le voleur cherchait la meilleure façon d’utiliser cet unique euro : acheter à manger ? Pas la peine, puisqu’il était assez malin pour se nourrir, au moins une fois par jour grâce à de petits larcins. La jouer serait sans doute une bonne solution, du moins celle qui, avec un peu de chance, lui rapporterait le plus.

    Tout en réfléchissant à d’autres possibilités, il buta contre un réverbère, la pièce tomba, et roula dans le caniveau, où elle fit des ronds dans l’eau. Beau présage, pensa-t-elle. Quelle frayeur ! pensa l’homme en s’essuyant la main sur son pantalon. Par précaution, il la glissa au fond de sa poche. Elle eut l’impression d’être enterrée vivante. Dans la sébile au moins elle voyait le jour et brillait comme un sou en or pour en attirer d’autres et augmenter les revenus du pauvre homme. Là, elle ne servait plus à quoi que ce soit.

    Le voleur marcha un long moment avant d’extirper l’euro, qui se morfondait, au fond de sa poche.

    – Que vais-je bien faire de toi ? Comment te multiplier comme les pains ? Avec toi tout seul, je n’irai pas loin. Même pas de quoi acheter de l’herbe pour la revendre. J’ai une idée, par forcément géniale, mais j’essaie.

    Il « emprunta » une voiture, dont le chauffeur n’avait pas verrouillé la porte, et en as de la manipulation des fils, la mit en route pour filer au casino le plus proche.

    Le cœur battant, il inséra son euro dans la fente d’une machine à sous. Les yeux écarquillés, il regardait les fruits défiler et s’arrêter un à un en priant le ciel de le faire gagner ! Et le ciel entendit sa prière….Un monceau de pièces d’un euro s’écoula de la machine. Fou de joie, il voulut me remercier de sa chance en m’embrassant, mais se trompa de pièce. Nous nous ressemblions toutes.

    Enfin, de quoi subvenir à ses besoins pendant quelques temps ! Mais peut-être pourrait-il en avoir encore plus ? Alors, il remit pièce par pièce dans une autre machine sans que celle-ci ne lui en rende une seule.

    Je fus la dernière à entrer dans la fente. J’ai vainement essayé de m’y opposer en lui glissant des mains, or comme une bouche affamée, la « bandit » était insatiable et engloutit petit à petit toute sa richesse. Pour la deuxième fois je fus enterrée.

  2. Michele B.Beguin dit :

    La pièce de 1 euro saute, roule et rigole toute seule au fond de la poche poisseuse de John, ce pauvre ère qui l’a récupérée.
Elle se sent bien pour l’instant puisqu’il fait froid dehors et que la poche lui est douillette et familière. De temps en temps, elle joue à cache-cache avec la doublure déchirée. Parfois, la main crasseuse la cherche pour sentir sa présence rassurante.
    Pour John, c’est le début d’un repas, mais il lui faut faire encore des petits pour pouvoir manger. 
Sa main enserrant bien la pièce, il part d’un pas traînant à la recherche de son coin de manche. 
    

L’euro se met à tousser, il voudrait se dégager, car l’odeur des doigts qui l’enveloppent devient insupportable et il a du mal à respirer, il étouffe, il se sent partir. 
Sa vie défile en quelques secondes.
    Il se revoit passer de main en plateau, à la terrasse du café snob de saint Tropez. Parfois, il est resté quelques minutes sur une soucoupe vite happé par le serveur qui le glisse dans sa petite besace, au milieu des autres pièces, le bousculant, car toutes veulent aussi servir à payer, sortir respirer, être contemplées.
    
Il se souvient quand il est sorti de la banque, propre comme un sous neuf, brillant à faire pâlir un bijou, ressemblant à l’or et à l’argent. Depuis il est devenu terne, mais beaucoup plus vivant.
    Il se souvient du jeune prestidigitateur qui le faisait rouler entre ses doigts avant de le faire disparaître et hop, il refaisait surface dans l’oreille d’un tiers. Quelle rigolade. Il ne dévoilera jamais le secret de son jeune maître qui l’a gardé très longtemps, plusieurs mois, parce que l’impression sur sa face, Mozart-Autriche, le fascinait et il espérait en tirer une belle petite somme.

    Un jour l’euro est tombé, il a été perdu et très vite ramassé par un gamin qui voulait lui faire faire des ricochets sur le lac du Bourget. Mais finalement il l’a utilisé pour acheter un paquet de gâteaux.
    Les souvenirs de l’euro lui ont permis de ne pas se focaliser sur l’étouffement dans la poche, et lorsque John le déposa bien en évidence au creux de la casquette sur le trottoir pour attirer d’autres pièces, il prit une longue respiration tout en contemplant le caniveau ,où l’eau coulait abondamment, en rêvant à ses ricochets qu’il ne connaitrait peut être jamais.

  3. Fleuriet Mireille dit :

    Un Euro rêvant de faire des ronds dans l’eau, voire de ricocher dans la vie, ternissait d’ennui dans la sébile d’un miséreux. Mon sort n’est pas brillant pleurnichait-il. Or, il advint… tout à ses pensées moroses qu’un Euro tomba juste à côté de lui, le faisant revenir sur terre.
    Salut l’ami, tu m’as l’air bien tristounet parmi toute cette menue monnaie.
    Oui, je m’ennuie rien ne m’interpelle, qu’elle triste vie d’être dans cette sébile, aucun avenir.
    Je me présente je suis un Euro Grec sur une de mes faces j’ai une chouette et toi ?
    Un Euro Français, sur une de mes faces j’ai l’Arbre de Vie, tu parles qu’elle vie j’ai là au milieu de cette mitraille
    Oh ! Oh ! Oh ! Il va falloir te remuer mon pote, je ne supporte pas les euros négatifs. Voilà ce que je te propose, je vais te raconter mon pays et toi, tu me parleras du tien. Mais, avant il faut que je te dise de ne pas déblatérer sur la mitraille sans elle tu ne serais pas là et moi non plus. Quelques cents font de nous un Euro. Penses-y vieux.
    Dans mon pays, nous avons quelques problèmes d’argent, mais, nous avons beaucoup de monuments et beaucoup de touristes viennent visiter la Grèce et c’est ainsi que je me retrouve avec toi aujourd’hui dans cette coupelle. Grâce à l’Europe nous pouvons nous permettre de nous balader sans être importuné, plus de tracas pour les changes, les équivalences etc… Et toi l’ami ?
    C’est vrai que la France est belle et qu’elle reçoit aussi beaucoup de touristes, c’est vrai ce que tu dis.
    A ce moment précis, un autre Euro tombe à côté de nos deux compères.
    Salut la compagnie quoi de neuf dans le quartier ?
    Bienvenu dans notre coupelle, nous devisions de nos pays différents et toi ? D’où viens-tu ?
    Je suis un Euro du Vatican sur une de mes faces j’ai l’effigie de du Pape Jean Paul II.
    Du Vatican ? Dirent-ils en choeur, c’est la première fois que je rencontre un Euro du Vatican.
    Idem, répond l’Euro Grec. Tu vas nous raconter ton petit pays.
    C’est un endroit où il y a beaucoup de pèlerinages et je me retrouve souvent dans des paniers où l’on fait la quête, les Euros ne se bousculent pas trop dans ces paniers…
    De fil en aiguille tout ce petit monde discute, se mêlant même à la mitraille. 19 heures, il est temps pour notre miséreux de faire le compte de sa journée : 3 Euros et le reste en mitraille faisant quand même un montant de 10 € comme quoi la mitraille ça compte aussi.

    Notre mendiant se rend dans le super marché le plus proche pour faire quelques courses, pain, pâté, boite de sardine, un litre de vin rouge pas trop cher pour faire passer le tout.
    8,90 € dit la caissière.
    Une main crasseuse va pour rafler l’appoint dans la sébile, c’est à ce moment là que nos compères se disent « au revoir » peut être à une prochaine qui sait ?
    Les Euros se retrouvèrent dans la caisse de la supérette dans le casier des 1 Euros, ils purent encore quelques instants continuer leur conversation et la mitraille selon les cents dans d’autres casiers.

    Lorsque j’aurai des 1 Euros, je penserai à mes trois compères, peut être se souviendront-ils de moi, de l’histoire que je leur ai écrite, car, sachez le, la monnaie comme les mots ça circule.

  4. Clémence dit :

    Un euro, rêvant de faire des ronds dans l’eau, voire de ricocher dans la vie, ternissait d’ennui dans la sébile d’un miséreux.
    – Mon sort n’est pas brillant pleurnichait-il.  
    Or, il advint…

    Richard avait perdu définitivement son sourire quand il se rendit compte que son prénom était un leurre, un pied de nez à la vie. Richard ? Lui ? Oui, riche de déveines et de « manques à pas de chance » ! Alors, tant qu’à faire, il poussa le bouchon jusqu’au bout et décida de s’asseoir par terre, avec un chien somnolant à sa gauche et une sébile à sa droite.

    Ce lundi, en fin de journée, il y avait récolté un tas de minuscules pièces orange.
    – Bah, c’est toujours ça, se dit-il en se grattant vigoureusement la tête ? Ce ira mieux demain…

    Mardi , en fin de journée, il avait encore reçu une collection de pièces orange. Leur diamètre s’était légèrement agrandit.
    – Bah, j’ai de quoi me nourrir, ainsi que mon fidèle compagnon !

    Mercredi, en fin de journée, la collection pesait un peu plu lourd et le diamètre continuait de croître.
    – C’est un bon signe, ça, hein, mon chien !

    Jeudi, à midi, ce fut un euro un peu terni qui tinta dans sa sébile. Richard décida de l’y laisser.
    – Ce premier euro sera un message subliminal…

    Et de fait, le soir, trois autres pièces d’un euro l’avaient rejoint.
    – Je crois que j’ai trouvé le bon filon, dit-il à son chien en partageant un croissant offert par la boulangère.

    Vendredi, matin, il s’installa avec son chien, sa sébile et les quatre euros.
    – Bon, ils pourraient toujours se faire la conversation , à défaut de faire des ronds dans l’eau…

    Le soleil commençait à chauffer. Richard se cala contre le mur de pierres dorées et ferma les yeux. Tout à coup, il ressenti un courant d’air frais. Il sursauta, leva la tête et à contre-jour, il vit une silhouette se détacher.
    – Hum, euh… bonjour, monsieur, Je suis bien embarrassé, j’ai besoin d’un peu de monnaie pour acheter mon journal…et … euh, payer mon parking…euh, pourriez-vous…
    – Combien ? demanda Richard en versant les pièces au creux de sa main. Cinq soixante-quinze, seize, dix-sept…
    – Ça ira. Je prends tout, dit l’homme en lui tendant un billet de dix euros. Merci beaucoup !

    Richard fit un clin d’oeil à son chien.
    – Je crois que nous sommes sur la bonne voix ! La place est bonne !

    De son côté, l’homme se dirigea vers le Point Presse, acheta un journal et demanda un billet de loterie. Pour le fun et pour le sourire de la vendeuse. Au retour, il déposa un billet de cinq euros dans la sébile, en guise de porte-bonheur. En se dirigeant vers le parking, le journal sous le bras, il gratta son billet de loterie et un sourire illumina son visage. Il allait empocher un gain avec un zéro. Pour être précis : un trois et un zéro. Trente euros.
    – Pas mal, pour la première fois que je me laisse tenter !

    L’homme s’installa au volant de sa voiture et démarra. Il glissa les quelques pièces qu’il devait pour son stationnement et s’en alla au super marché.
    Il fit ses provisions pour la semaine. Il passa à la caisse où il fut délesté d’ un montant « sérieux ». La caissière lui sourit et lui dit :
    – N’oubliez pas de passer votre code barre à la « Machine-bonheur » à l’entrée.

    L’homme remercia et obtempéra. La machine clignota de tous ses feux et tintinnabula de tout son carillon.
    – Diable, c’est Byzance ! Un trois suivi de deux zéros ! Un bon de trois cents euros ! Allons bon, je craque pour un nouveau smartphone dit-il en repassant le portique. Son choix fut rapide.

    Il s’en alla en fredonnant « If I were a rich man … nanananana… ». En arrivant près de sa voiture, il stoppa net. Au bas de sa portière, il vit un sac à main au logo à peine discret. Il regarda autour de lui. Tous les emplacements étaient vides.
    Il se pencha, s’empara du sac, le déposa sur le siège passager et se dirigea vers le Commissariat. Il fut accueilli par un chahut monstre. Une femme gesticotait en hurlant dans une langue indéfinissable. Il ne fallut qu’une fraction de seconde pour comprendre cette scène. L’homme déposa le sac à main devant la femme. Celle-ci lui sauta au coup en hurlant de plus belle. Puis, aussi vite qu’elle s’était déchaînée, aussi vite elle s’empara de son sac, sortit une liasse de billets qu’elle tendit à l’homme. Qui refusa bien sûr. Il n’avait fait que son devoir. Mais la femme lui fourra la liasse dans le creux de sa chemise ouverte.
    Le policier lui fit un discret signe de la tête… l’homme haussa les épaules en pensant :
    – Pourquoi pas…

    Assis sur son siège, il effeuilla les billets…
    – Mince, c’est mieux que la suite de Fibonacci ! Me voilà riche de trois mille euros ! C’est incroyable ce qu’il m’arrive. Il faut que cette journée me soit mémorable. Je vais la terminer en beauté! A l’Opéra, on y joue « La Clémence de Titus » !

    La soirée fut magnifique. Un décor époustouflant avec d’immenses blocs de marbres, mobiles…
    Les dernières notes résonnaient encore dans sa tête lorsqu’il arriva près de sa voiture. Il eut un mouvement de recul lorsqu’il vit un long rouleau emballé de papier journal, coincé près de la roue avant. Il lui sembla entendre des sirènes hurler quelque part … au-dessus de lui… dans la rue ? Son cœur se mit à battre la chamade. De la glace coulait le long de son dos. D’une main tremblante, il s’empara de l’objet et retira doucement le papier journal. Puis, il déroula délicatement et poussa un hurlement. Il sentit sa vie basculer. C’était impensable, inimaginable. Avec mille précautions, il glissa le rouleau sous son siège et démarra.
    – Surtout, ne pas me faire remarquer…

    A peine dans le flot de la circulation, il dut ralentir, puis s’arrêter. Un policier à la mine patibulaire frappa à sa vitre.
    – Que se passe-t-il ? s’inquiéta l’homme.
    – On nous a signalé un vol … euh…. assez embarrassant… euh…vous n’avez rien remarqué ?
    – Non…
    – Allez… et ne manquez pas à votre devoir de citoyen au cas où…

    Cette dernière phrase avait une résonance étrange dans la tête de l’homme. Il se demandait quelle devait être sa conduite. Il décida de poursuivre sa route. L’inspiration lui viendrait certainement.

    Quelques heures plus tard, un imper jeté nonchalamment sur le bras, l’homme poussa la porte du Musée. Les tractations se firent à la vitesse de l’éclair.
    En passant la porte dans l’autre sens, il n’en revenait toujours pas de ce qui s’était passé. Il regarda à nouveau le chèque et s’exclama :
    – Un trois suivi de quatre zéros ! Tout ça pour un point noir sur une toile blanche…Ah, quelle affaire, mais quelle affaire !

    Et cette affaire, justement, ne fit pas grand bruit dans les médias. Mais pour l’homme, cette affaire ne se terminait pas là. Il s’envola vers le Sud et acheta l’objet de ses rêves.

    Il remonta dans le Nord et partit à la recherche de Richard. Il était toujours assis au même endroit, avec son chien et sa sébile où un euro s’ennuyait dans la grisaille.
    Richard leva les yeux et reconnut l’homme. Il s’apprêtait à lui parler, mais l’homme lui coupa la parole d’un geste bref et lui dit :
    – Mon ami, je crois que nous allons seulement commencer notre vie. Ça vous dirait de faire des ronds dans la Grande Bleue ? Il y a des hommes et des femmes qui ont besoin de nous…

    © Clémence.

    443 : Un euro, rêvant de faire des ronds dans l’eau, voire de ricocher dans la vie, ternissait d’ennui dans la sébile d’un miséreux.
    – Mon sort n’est pas brillant pleurnichait-il.  
    Or, il advint…

    Richard avait perdu définitivement son sourire quand il se rendit compte que son prénom était un leurre, un pied de nez à la vie. Richard ? Lui ? Oui, riche de déveines et de « manques à pas de chance » ! Alors, tant qu’à faire, il poussa le bouchon jusqu’au bout et décida de s’asseoir par terre, avec un chien somnolant à sa gauche et une sébile à sa droite.

    Ce lundi, en fin de journée, il y avait récolté un tas de minuscules pièces orange.
    – Bah, c’est toujours ça, se dit-il en se grattant vigoureusement la tête ? Ce ira mieux demain…

    Mardi , en fin de journée, il avait encore reçu une collection de pièces orange. Leur diamètre s’était légèrement agrandit.
    – Bah, j’ai de quoi me nourrir, ainsi que mon fidèle compagnon !

    Mercredi, en fin de journée, la collection pesait un peu plu lourd et le diamètre continuait de croître.
    – C’est un bon signe, ça, hein, mon chien !

    Jeudi, à midi, ce fut un euro un peu terni qui tinta dans sa sébile. Richard décida de l’y laisser.
    – Ce premier euro sera un message subliminal…

    Et de fait, le soir, trois autres pièces d’un euro l’avaient rejoint.
    – Je crois que j’ai trouvé le bon filon, dit-il à son chien en partageant un croissant offert par la boulangère.

    Vendredi, matin, il s’installa avec son chien, sa sébile et les quatre euros.
    – Bon, ils pourraient toujours se faire la conversation , à défaut de faire des ronds dans l’eau…

    Le soleil commençait à chauffer. Richard se cala contre le mur de pierres dorées et ferma les yeux. Tout à coup, il ressenti un courant d’air frais. Il sursauta, leva la tête et à contre-jour, il vit une silhouette se détacher.
    – Hum, euh… bonjour, monsieur, Je suis bien embarrassé, j’ai besoin d’un peu de monnaie pour acheter mon journal…et … euh, payer mon parking…euh, pourriez-vous…
    – Combien ? demanda Richard en versant les pièces au creux de sa main. Cinq soixante-quinze, seize, dix-sept…
    – Ça ira. Je prends tout, dit l’homme en lui tendant un billet de dix euros. Merci beaucoup !

    Richard fit un clin d’oeil à son chien.
    – Je crois que nous sommes sur la bonne voix ! La place est bonne !

    De son côté, l’homme se dirigea vers le Point Presse, acheta un journal et demanda un billet de loterie. Pour le fun et pour le sourire de la vendeuse. Au retour, il déposa un billet de cinq euros dans la sébile, en guise de porte-bonheur. En se dirigeant vers le parking, le journal sous le bras, il gratta son billet de loterie et un sourire illumina son visage. Il allait empocher un gain avec un zéro. Pour être précis : un trois et un zéro. Trente euros.
    – Pas mal, pour la première fois que je me laisse tenter !

    L’homme s’installa au volant de sa voiture et démarra. Il glissa les quelques pièces qu’il devait pour son stationnement et s’en alla au super marché.
    Il fit ses provisions pour la semaine. Il passa à la caisse où il fut délesté d’ un montant « sérieux ». La caissière lui sourit et lui dit :
    – N’oubliez pas de passer votre code barre à la « Machine-bonheur » à l’entrée.

    L’homme remercia et obtempéra. La machine clignota de tous ses feux et tintinnabula de tout son carillon.
    – Diable, c’est Byzance ! Un trois suivi de deux zéros ! Un bon de trois cents euros ! Allons bon, je craque pour un nouveau smartphone dit-il en repassant le portique. Son choix fut rapide.

    Il s’en alla en fredonnant « If I were a rich man … nanananana… ». En arrivant près de sa voiture, il stoppa net. Au bas de sa portière, il vit un sac à main au logo à peine discret. Il regarda autour de lui. Tous les emplacements étaient vides.
    Il se pencha, s’empara du sac, le déposa sur le siège passager et se dirigea vers le Commissariat. Il fut accueilli par un chahut monstre. Une femme gesticotait en hurlant dans une langue indéfinissable. Il ne fallut qu’une fraction de seconde pour comprendre cette scène. L’homme déposa le sac à main devant la femme. Celle-ci lui sauta au coup en hurlant de plus belle. Puis, aussi vite qu’elle s’était déchaînée, aussi vite elle s’empara de son sac, sortit une liasse de billets qu’elle tendit à l’homme. Qui refusa bien sûr. Il n’avait fait que son devoir. Mais la femme lui fourra la liasse dans le creux de sa chemise ouverte.
    Le policier lui fit un discret signe de la tête… l’homme haussa les épaules en pensant :
    – Pourquoi pas…

    Assis sur son siège, il effeuilla les billets…
    – Mince, c’est mieux que la suite de Fibonacci ! Me voilà riche de trois mille euros ! C’est incroyable ce qu’il m’arrive. Il faut que cette journée me soit mémorable. Je vais la terminer en beauté! A l’Opéra, on y joue « La Clémence de Titus » !

    La soirée fut magnifique. Un décor époustouflant avec d’immenses blocs de marbres, mobiles…
    Les dernières notes résonnaient encore dans sa tête lorsqu’il arriva près de sa voiture. Il eut un mouvement de recul lorsqu’il vit un long rouleau emballé de papier journal, coincé près de la roue avant. Il lui sembla entendre des sirènes hurler quelque part … au-dessus de lui… dans la rue ? Son cœur se mit à battre la chamade. De la glace coulait le long de son dos. D’une main tremblante, il s’empara de l’objet et retira doucement le papier journal. Puis, il déroula délicatement et poussa un hurlement. Il sentit sa vie basculer. C’était impensable, inimaginable. Avec mille précautions, il glissa le rouleau sous son siège et démarra.
    – Surtout, ne pas me faire remarquer…

    A peine dans le flot de la circulation, il dut ralentir, puis s’arrêter. Un policier à la mine patibulaire frappa à sa vitre.
    – Que se passe-t-il ? s’inquiéta l’homme.
    – On nous a signalé un vol … euh…. assez embarrassant… euh…vous n’avez rien remarqué ?
    – Non…
    – Allez… et ne manquez pas à votre devoir de citoyen au cas où…

    Cette dernière phrase avait une résonance étrange dans la tête de l’homme. Il se demandait quelle devait être sa conduite. Il décida de poursuivre sa route. L’inspiration lui viendrait certainement.

    Quelques heures plus tard, un imper jeté nonchalamment sur le bras, l’homme poussa la porte du Musée. Les tractations se firent à la vitesse de l’éclair.
    En passant la porte dans l’autre sens, il n’en revenait toujours pas de ce qui s’était passé. Il regarda à nouveau le chèque et s’exclama :
    – Un trois suivi de quatre zéros ! Tout ça pour un point noir sur une toile blanche…Ah, quelle affaire, mais quelle affaire !

    Et cette affaire, justement, ne fit pas grand bruit dans les médias. Mais pour l’homme, cette affaire ne se terminait pas là. Il s’envola vers le Sud et acheta l’objet de ses rêves.

    Il remonta dans le Nord et partit à la recherche de Richard. Il était toujours assis au même endroit, avec son chien et sa sébile où un euro s’ennuyait dans la grisaille.
    Richard leva les yeux et reconnut l’homme. Il s’apprêtait à lui parler, mais l’homme lui coupa la parole d’un geste bref et lui dit :
    – Mon ami, je crois que nous allons seulement commencer notre vie. Ça vous dirait de faire des ronds dans la Grande Bleue ? Il y a des hommes et des femmes qui ont besoin de nous…

    © Clémence.

  5. Lauriane dit :

    Un euro, rêvant de faire des ronds dans l’eau, voire de ricocher dans la vie, ternissait d’ennui dans la sébile d’un miséreux. Mon sort n’est pas brillant pleurnichait-il. Or, il advint que son nouveau propriétaire fut ébloui par la brillance du métal et le motif recouvrant l’une des deux faces. Deux cygnes en vol au dessus d’un paysage qui semble être un lac et une colline. Ce motif était plutôt commun dans son pays d’origine, là-bas ou les gens parlent une langue agglutinante aux accents nordiques il n’était qu’une pièce aux cygnes parmi tant d’autres. Un jour, qu’il fut déposer dans la main d’un voyageur à la langue chantante il commença à voyager et se mit à rêver à un destin plus exceptionnel. Mais voilà comme tous les autres le voyageur s’était débarrassé de lui, dans cette sébile qui reposait sur le pavé au milieu des mégots, chewing gum et autres déchets qui jonchaient le sol de cette rue où des milliers de pieds effleuraient la sébile sans jamais la regarder. Ebloui par la brillance et l’envol de ces cygnes, le nouveau propriétaire le prit rapidement sous son aile et cacha précieusement la pièce dans la poche raccommodée de son jean. Tous les soirs il le sortait pour le polir à l’aide de vieux son t-shirt et admirait l’envol des cygnes, il lui racontait des histoires de voyage, de liberté et l’euro devient le confident de son nouveau propriétaire. Devenus inséparable, l’euro ne rêvait plus de voyage mais attendait avec impatience le soir leurs retrouvailles pour entendre de nouveaux récits remplis d’espoirs et d’aventures.

  6. Avoires dit :

    Or, il advint qu’un concurrent, un inconnu, un étranger fut jeté sur lui. C’était un euro qui brillait, on aurait dit qu’il sortait de l’usine . De plus, il scintillait dans la sébile de Jacques qui avait l’habitude de s’installer rue de la République, l’artère commerçante et donc passagère de la ville, toujours aux heures du milieu de la journée, lorsque le soleil brille le plus.
    L’euro grincheux et pleurnichard s’exclama :
    – Mais qu’est ce que c’est que cet importun qui s’est mis sur moi, il m’étouffe ! Et puis d’où vient-il, il ne fait pas partie de mes connaissances. Jacques, dépêche-toi de l’enlever, sinon tu n’auras plus rien.
    Jacques finit par remarquer la pièce qui venait d’être mise sur l’euro d’appel et avant de l’enfourner dans le sac réutilisable qui lui sert de fourre-tout, surpris par sa brillance, il l’examine. Cet euro est différent de ceux qu’il récolte habituellement : pas d’inscription Liberté Égalité Fraternité, donc pas français, pas d’aigle donc pas allemand, pas d’homme de Vitruve de Léonard donc pas d’Italie. A la place de ces faces que l’on finit par ne plus regarder Jacques contemple avec étonnement deux cygnes volant au-dessus d’un lac et de collines.
    – D’où vient-il celui-là ?
    – De Finlande répondit la brillante pièce avec un fort accent
    – Quoi, il y a des euros en Finlande ?
    – Oui, la Finlande fait partie de l’Europe ne t’en déplaise Jacques
    – Ben, oui, je sais, mais des euros venant de là-bas, c’est exceptionnel ! Comment es-tu arrivé ici ?
    – J’étais dans la poche d’un Portugais lorsque je me suis réveillé.
    – Tu t’étais donc endormi ?
    – Oui, je ne quittais pas mon beau pays de lacs, je voyageais un peu vers la frontière russe, bref, rien que du banal pour un finlandais. J’ai fini par m’assoupir puis à m’endormir carrément.
    – Comment es-tu arrivé au Portugal ?
    – Je ne sais pas, mais avec tous ces voyages maintenant, ces vols low cost comme on dit en bon français, je me suis retrouvé dans une atmosphère inhabituelle pour un euro du froid et ça m’a réveillé.
    Jacques resta pensif quelques instants puis demanda au bel euro
    – Tu te plais chez nous ?
    – Pas trop, ton euro d’appel, celui sur lequel on m’a jeté, ne m’a pas fait un joyeux accueil, c’est le moins qu’on puisse dire. La devise Liberté Égalité Fraternité qui est gravée sur lui , il s’en moque ?
    – Il est jaloux, il tient à être seul
    – Même en Finlande, la jalousie est considérée comme une passion triste
    – Tu sais ce que vais faire ? Je prends mes cliques et mes claques, je vais aller faire la manche en Finlande et je te mettrai en euro d’appel car mon euro grincheux ne va pas supporter les températures.

  7. oholibama dit :

    rêvant de faire des ronds dans l’eau, voire de ricocher dans la vie, ternissait d’ennui dans la sébile d’un miséreux.Mon sort n’est pas brillant pleurnichait ‘il. Or, il advint- qu’un trousseur de bourse passant par là,plus miséreux que l’autre…s’empara prestement de la miteuse chose qui, était accroché tant bien que mal à la ceinture vieillissante du pauvre hère.

    Quelle idée aussi que de ne pas porté son tout petit trésor tous près de son maigre corps. Cela l’aurai protégé de la concupiscence , après tout…même s’il ne s’agissait que d’une pièce banale et ternit…elle avait quand même une petite valeur!

    Le voleur tout sourire s’en alla à l’estaminé du sieur Craquetonfric, et d’une voix forte réclama un…verre d’eau.
    _Que me vaut ta visite Furetout?
    _J’ai en ma possession un petit pécule mais comme le dit ton écriteau…j’ai le droit à un verre d’eau gratuit!
    _Si cela te fait plaisir vieux rat…
    _Oui cela me plaît

    _Dis moi Tiretout, ou donc as tu trouvé cette merveille, et cette bourse que je vois qui pendouille contre ton ventre , hein dis moi tout?
    _Aaaah non tu ne tireras rien de moi, je suis sobre comme le petit Toré qui est né cette nuit,na!

    Goguenard Le sieur Craquetonfric le regarda avec suspicion.Puis un sourire torve orna ses grosses lèvres.
    _Bien Tiretout on va faire un marché tu veux?
    _Quoi!
    _Eh bien si je devine la provenance de ta bourse, si je te donne le nom du pauvre hère à qui tu as volé cette misère, tu me donneras aors ce que tu as sur toi, cela te paraît ‘il bon?
    _Ben non, j’y gagne quoi moi à cette farce que tu me propose hein!
    _Mon estime il va s’en dire.

    _Ton estime! Tu sais ou tu peux la mettre hein! Moi, j’ai faim et ventre affamé n’a pas d’oreille. Je ne t’apprends rien Craquetonfric si?
    _Évidemment que non et je te comprends bien, disons qu’entre tourne bourse on se rejoint sur certains points mais…je pourrais misé plus? Tu en dis quoi?
    _Ooooh là tu me rejoint bien, que me donneras-tu?
    _Eh bien que dirais-tu d’un bon ragoût à la sauce piquante et autant que ton estomac peut en avaler et cela sur deux jours!
    _Je te dis qu’à part ta sauce qui cache tout, je suis partant dis voir maintenant,j’ai la dalle en pente moi!

    Riant sous cape le Sieur Craquetonfric changea pourtant d’expression, son regard devint noir et sa voix aussi froide que le bloc de glace qui servait dans sa cave.
    _Tu as troussé le pauvre Amédée Padchance, et tu sais qui est Amédée pour moi?
    _Ben ton demi-petit frère je crois!
    _Oui c’est bien ça! Alors tu vas de ce pas lui rendre sa vieille pièce …après cela, je te donnerais à mangé et tu te goinfreras jusqu’à en crevé.
    Postillonnant à tous va Tiretout parti d’un bon pas. Chemin faisant,il trouva le vieil Amédée tout larmoyant la main tendue devant lui. Voyant qu’un passant s’arrêtait près de lui, il brailla de suite son histoire et Tiretout un peu vinaigre,lui tendit sa maigre bourse en lui disant: »J’ai trouvé ça il y a peu, est ce à vous Amédée?

    Amédée suspicieux fonça sur lui toutes quenottes restantes en avant,il avait compris et pour lui, ce faquin devait payé. Ils se battirent, se crièrent après, empoignèrent la pauvre chose qui d’un crac un peu mou lâcha son maigre pécule.

    L’étang de L’efol débordant de vigueur regardait et attendait et ce qui se passa ce jour là, resterait dans les anales du Canton. La vieille pièce bondit et tel un caillou plat se jeta dans l’étang grondant. La pièce ricocha tant et tant qu’à la fin, les deux hommes restèrent comme deux ronds de flanc. Perdue pour tous les deux, la pièce elle s’envola pleine de joie.

    Quant’ils racontèrent cela à l’estaminé du Sieur Craquetonfric, toute les tablées éclatèrent d’un rire tonitruant et pourtant! Depuis ce jour là…il n’est pas rare de croisé un grand nombre de curieux…sait on jamais hein il est dit que dans toute fable réside un petit fond de vérité mais, est ce bien vrai?
    y-l.
    sur une idée de Pascal Perrat.

  8. Ophélie E. dit :

    Un euro, rêvant de faire des ronds dans l’eau, voire de ricocher dans la vie, ternissait d’ennui dans la sébile d’un miséreux. Mon sort n’est pas brillant pleurnichait-il.

    Or, il advint qu’un petit garçon, qui passait par-là, s’arrêtât devant le mendiant et lui demanda :

    – Pourquoi t’es assis par terre et pourquoi t’es pas beau ?

    L’homme lui expliqua qu’il n’avait pas de maison, qu’il était vieux et très fatigué, qu’il n’avait plus la force de travailler, qu’il n’avait qu’un pauvre euro et surtout qu’il avait un peu faim.

    Le bambin, intrigué, fronça les sourcils et s’en retourna chez lui. Au crépuscule le pauvre hère, dépité, se leva en se massant le dos. Il se courbait pour ramasser sa sébile et le carton sur lequel il était assis quand, tout à coup il entendit :

    – Attendez monsieur ! Ne partez pas. Je veux vous donner l’argent de ma tirelire.

    Et c’est ainsi que l’euro trouva de la compagnie dans la poche trouée du malheureux. Tout heureux de ne plus s’ennuyer, il papotait sans relâche avec ses congénères qui lui racontaient leurs aventures. Mais, tout à ses distractions, il ne se rendit pas compte qu’il avait atterri sur le trottoir et qu’il n’en finissait plus de faire de cabrioles.

    Des doigts le ramassèrent et depuis il fait de merveilleux voyages.

  9. Catherine M.S dit :

    Douce utopie

    Je suis seul et je ternis d’ennui
    Il me faut de la compagnie
    À tout prix !
    Je ne veux pas ressembler à ce miséreux
    Habillé comme un gueux
    Qui fait office de maître des lieux
    Et qui m’offre en pâture
    Dans une sébile de mauvaise facture
    À des passants frileux
    Alors que je ne rêve que de nature
    À moi les ronds dans l’eau
    Les caresses des roseaux
    Je veux ricocher dans la vie
    Faire friser l’eau des puits
    Glisser sous la pluie
    Avoir plus d’amis
    Et vivre dans un pays où tout serait gratuit
    Je serais en vacances toute l’année
    Côté pile pour buller la journée
    Côté face pour rêvasser la nuit
    Rêver d’un monde sans économie ni profit
    Sans marché, dow-jones et compagnie
    Ah la belle vie …

    Malheur interdit
    Moi, petit euro de trottoir,
    J’instaurerais le bonheur obligatoire
    À protéger comme une denrée rare
    Plus besoin de sous pour nourrir l’espoir
    Même les centimes n’auraient aucun droit de regard
    Sur un style de vie
    Qui s’approcherait du paradis.

  10. Blackrain dit :

    Or il advint qu’un homme sorti d’une Porsche pour s’avancer vers le misérable qui sommeillait sous un porche, encore soûl d’un mauvais vin. Cet homme argenté était le fils prodigue sur lequel l’ivrogne avait jadis casé des briques pour avoir dépenser son capital, pour avoir dilapidé ses écus dans les salles des fêtes défaites qu’il avait vécu comme de sales défaites. L’indigent était alors très exigent avec celui qui aurait dû être plus grand trésor que ses courbes de bourse. Il ne donna plus aucun denier au dernier de ses fils, le chassa de sa demeure et le priva de tous ses biens. Sans aucun viatique, ce dernier s’en alla gagner son pécule dans l’humble métier de cuisinier. Avec des aptitudes insoupçonnées, il trouva la recette pour se faire du blé en accommodant la galette avec le radis et l’oseille. Il obtint plusieurs toques sur l’écu de son enseigne culinaire. L’ex fêtard eut tôt fait d’atteindre richesse et célébrité. Son restaurant d’été devint le salon de thé de toutes les célébrités. Il apprit par quelque mauvaise langue qui croyait avoir du palais que son père avait tout perdu. De sa fortune passée il ne restait plus une tune. Il ne lui restait plus que l’amertume et la rancune. Sa jeune mégère l’avait laissé dans sa misère. Lui qui courait après la vie comme un dératé avait tout raté, l’amour de ses enfants, de sa compagne. Même de la guerre à l’argent il avait perdu la campagne. Il avait même raté son suicide. Depuis lors, il errait, se suicidant à grandes lampées. Malgré la barbe sale et les cheveux hirsutes, le fils avait reconnu le père qui lui avait reproché ses impairs. Un père et manque. Le manque du lien l’avait fait stopper la voiture. Dans la sébile du miséreux, l’écu avait alors vu poindre une perle salé sur le visage ridé lorsque le fils avait tendu sa main tremblante pour le relever.

  11. Nouchka dit :

    Dans une petite ville du centre de l’Angleterre, au fond de la sébile d’un miséreux, un euro se lamentait : « Que vais-je devenir ; je suis déjà depuis plusieurs jours dans cette coupelle métallique et rien ne se passe. Moi qui rêve de faire des ronds dans l’eau, de sentir ma vie ricocher, je me trouve coincé ici sans espoir de voir mon sort s’améliorer. Si encore mon actuel propriétaire avait quelque ambition, la situation pourrait évoluer. Il pourrait chanter, raconter des histoires, balayer les trottoirs, que sais-je ! Mais non, il ne fait rien, ne tente rien et moi je m’ennuie sérieusement, mon teint se ternit et j’ai peur des mois à venir. Imaginez ; si le Brexit devient effectif, je ne serai même plus convoiter pour obtenir une pinte de bière…
    Or trois autres pièces partageaient l’endroit avec l’euro. Ces pièces avaient un listel curieusement travaillé donnant une impression d’hexagone aux faces de ces monnaies du Costa Rica. De tailles et de couleurs différentes, elles échangeaient dans une langue que l’euro ne saisissait pas. Elles n’étaient là que depuis deux jours et semblaient impatientes. En effet, à l’heure où notre homme s’installait à l’angle de la rue principale, les passants allaient et venaient faire leurs courses, ramener les enfants ou revenir du travail pour les chanceux qui en avaient encore… C’est le moment que choisirent les pièces pour se frotter les unes contre les autres afin de créer du bruit, un chahut sonore, un rythme scandé comme des percussions. Chacune s’ingénia à se différencier des deux autres et une sorte de mélodie syncopée, qui tinta, résonna contre la coupelle, émis des grattements et de nombreux autres effets qui étonnèrent les passants. Le propriétaire, lui, se demandait s’il devait intervenir sur ce concert improvisé qu’il ne contrôlait pas. L’ensemble était tonique, enjoué qui donnait envie de danser ou de battre la mesure du pied ou de la main. Les badauds approchaient pour voir de plus près ce qui se passait. Les pièces de monnaie, sentaient ces regards, puis ces mouvements des corps et des visages qui se détendaient oubliant un moment leurs pesantes préoccupations.
    Notre euro étonné, bousculé pris le parti de gigoter à côté des autres pièces. Il comprit même comment participer activement à leur exhibition musicale. Les passants séduits jetèrent des pièces dans la sébile qui décupla ainsi le niveau sonore du concert. Le miséreux propriétaire amorça un sourire édenté craintif que quelque bobby local ne vienne s’immiscer dans son petit commerce.
    Effectivement, les réjouissances ne furent pas du goût de tout le monde et une commerçante mal embouchée donna un coup de pied dans la coupelle faisant rouler au sol les pièces de monnaie.
    C’est ainsi que notre euro retrouva sa liberté. Ses collègues costaricains partirent de leur côté et la vie d’échanges que constitue le sort des monnaie repris son cours pour la plus grande joie de tous.

  12. La vie rêvée d’une pièce d’un euro

    Un euro, rêvant de faire des ronds dans l’eau, voire de ricocher dans la vie, ternissait d’ennui dans la sébile d’un miséreux. « Mon sort n’est pas brillant », pleurnichait-il.
    Or, il advint que cette pièce s’ennuyait toute seule au fond de la petite coupe en bois du mendiant, parmi la menue monnaie, que ce pauvre hère recevait de temps à autre de la part d’un passant ‘généreux’, mais qui se donnait surtout bonne conscience !
    Personne ne l’avait écoutée cette pièce lorsqu’elle avait demandé à sortir. Personne ne pourrait de toute façon comprendre qu’elle attendait un sort plus enviable que de servir d’échange pour acheter un sandwich, pour finir vulgairement au fond d’un tiroir caisse minable.
    Qui pourrait se soucier de ce que pensait une pièce d’un euro, sans valeur réelle, qu’on jetait négligemment au fond d’une poche, ou qui servait à prendre un caddie au supermarché ? Vous parlez d’une vie !

    Cette pièce rêvait de grands espaces, d’une vie libre au lieu d’être confinée, rêvait de s’étirer au soleil, de rouler dans l’herbe fraîche, de s’amuser. Elle rêvait aussi de se retrouver au fond de la fontaine de Trevi à Rome, où tous les passants et touristes pourraient l’admirer, espérant que quelqu’un prononcerait un vœu grâce à son joli minois français !
    Au lieu de ça, elle servait de monnaie d’échange, au quotidien, sans que personne ne s’attache à elle. Elle avait compris qu’elle n’aurait aucun avenir en restant les bras croisés dans cette coupelle. Elle avait compris qu’elle allait devoir s’occuper elle-même de son destin, se prendre en main elle-même au lieu de finir dans de multiples mains qui n’avaient que faire de son existence !

    Profitant que le mendiant somnolait à cause de la chaleur estivale sous une arche en pierre d’une avenue passagère, la pièce sauta tel un ressort et roula dans le caniveau. Heureusement, le sol était sec. Elle roula, roula, roula si longtemps qu’elle atterrit dans une artère secondaire. Ouf, il y avait déjà moins de monde, mais qu’elle était heureuse, à en pleurer !
    Cela ne dura pas longtemps ; un pied vint la heurter, elle franchit d’un coup plusieurs mètres en l’air pour rebondir derrière la clôture d’un petit pavillon. Pas le temps de se remettre de ses émotions, une pie magnifique mais bavarde vint la pincer en son bec, pile poil à ce moment-là. Elle s’envola si haut qu’elle en eut le vertige ; quel voyage, sans doute le seul et unique de son existence !
    Mais, l’oiseau aperçut une denrée plus affriolante, et lâcha sa proie métallique. La pièce fit une chute vertigineuse et atterrit dans un pré. Sur un dôme. Un nid de fourmis en réalité. Ça grattait, ça piquait, mais impossible de réagir. Tel Gulliver, les insectes l’emmenèrent au plus vite dans leur réserve de nourriture. Mais, leur proie étant trop lourde, elles se fatiguèrent tant que la pièce put se sauver à quatre pattes, sans demander son reste. Elle était bien à la campagne ; c’était beau comme dans ses rêves de grandeur, mais quelle galère !
    Elle avait soif surtout et s’approcha d’une rivière. Mais, l’eau coulait en contrebas. Il lui fallut fournir encore un effort extraordinaire pour se hisser au bord de ce ruisseau qu’elle prenait pour le Rubicon. Elle put étancher sa soif sans problème, mais elle ne put pas remonter le talus. Finies les aventures ! Elle était bel et bien coincée dans le lit de la rivière. Seuls quelques poissons de passage l’observaient en se demandant si cette nouvelle friandise avait une odeur alléchante. Ils la dédaignèrent rapidement.
    Elle resta très longtemps au fond de la rivière. Elle commença à perdre ses couleurs, à déprimer, à ne plus rien espérer, à se dire que sa vie était foutue.
    Personne ne la voyait, et surtout, personne ne se serait risquer à vouloir la ramasser en ayant de l’eau jusqu’à la taille, avec le courant en plus. Qui ferait autant d’efforts, juste pour un euro ? Pour sûr, elle avait bien ricoché dans sa vie, mais elle n’avait même plus la force de faire des ronds dans l’eau…

  13. iris79 dit :

    Un euro, rêvant de faire des ronds dans l’eau, voire de ricocher dans la vie, ternissait d’ennui dans la sébile d’un miséreux. Mon sort n’est pas brillant pleurnichait-il.  
    Or, il advint…un marchand de breloques qui traînait avec lui mille et un objets futiles. Le miséreux n’ayant que du temps et que son euro comme argent, s’approcha pour contempler les trésors du bonimenteur qui réussit si bien sa démonstration qu’il parvint à soutirer l’euro esseulé en échange d’un gadget garantissant mille et uns pouvoirs à celui qui le tenait entre ses mains.
    L’euro vécut alors mille et unes vies. Il se retrouva dans le porte-monnaie d’une mamie qui un jour incroyable se servit de l’euro pour gratter un ticket de loterie. Comme il fut gagnant, l’euro providentiel fut choyé, lustré, adoré, caressé, exposé, jalousement surveillé, montré pour finalement au décès de la vieille femme qui ne manqua pas d’arriver se retrouva, en héritage dans la tirelire de son arrière petite fille.
    Comme l’euro avait reçu mille faveurs, quand la petite s’amusait à compter ses pièces, elle repérait en un instant la star de son trésor. L’euro brillait de mille feux et la fillette trouva bien dommage de ne pas pouvoir profiter de son éclat et de sa renommée. Aussitôt dit, aussitôt attéri dans le petit porte monnaie de perles de la fillette.
    Quand les vacances furent venues, la famille partit en chantant sur les routes qui les menaient, sous le soleil de juillet vers un petit village du Sud.
    Le chant des cigales et la chaleur estivale les accueillirent à l’ombre des platanes qui trônaient sur la petite place du village. Quand un soir à la tombée du jour, la famille décida d’aller flâner dans les ruelles ombragées, elle arriva au bout d’un petit chemin face à une fontaine magnifique dont le ruissellement avait déjà quelque chose de rafraîchissant. Des lueurs étranges semblaient jaillir de son cœur transparent. Quand la petite fille se pencha, elle crut y voir le reflet des étoiles dans la nuit juste arrivée mais elle s’aperçut alors qu’une myriade de petites pièces dormaient au fond de la fontaine. Elle trouva cela magnifique et fut saisie par cette vision féerique. Lorsque qu’elle chercha du regard celui de ses parents pour partager son enthousiasme, elle vit une petite plaque émaillée sur laquelle elle put déchiffrer grâce à ses toutes récentes compétences de lectrice « fontaine à voeux ». Un vieux monsieur qui passait par là et semblait surgir de nulle part interpella l’enfant de son bel accent.
    « -Alors petite, tu veux faire un vœu ? C’est le moment ! Cette fontaine fait des miracles tu sais ! Et il paraît même que ses pouvoirs sont encore plus puissants les nuits de pleine lune! »

    Après avoir admiré un temps encore cet endroit magique, les parents s’éloignèrent sur le chemin qui retournait vers la maison de vacances. La petite traînait des pieds, le cœur battant.
    « -Allez viens maintenant on rentre, il est temps » lui rappelèrent ses parents.
    « -Oui oui j’arrive ! Je remets ma chaussure ! » leur répondit la petite qui déjà sortait son petit porte monnaie sur lequel elle faisait courir ses doigts depuis un moment en caressant dans sa poche les petites perles nacrées qui s’y trouvaient accrochées.

    Elle fit alors promptement glissé la fermeture éclair, en tira le fameux bel euro qu’elle déposa un bref instant sur le bord de sa bouche en lui intimant solennellement une dernière prière avant de l’envoyer rejoindre ses congénères dans la fontaine.
    Instantanément une lueur éclatante surgit du fond de l’eau pour monter vers les étoiles. La petite sourit puis repartit en courant.

    « -Attendez-moi ! »

  14. Antonio dit :

    Un euro, rêvant de faire des ronds dans l’eau, voire de ricocher dans la vie, ternissait d’ennui dans la sébile d’un miséreux. Mon sort n’est pas brillant pleurnichait-il. Quand un congénère tomba du ciel.

    « Euro qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage ! clama-t-il tout retourné, pile face à lui. Ou comme celui-là, qui conquit la toison, et puis est retourné, plein d’usage et raison, vivre entre ses parents le reste de son âge !
    — Mais, qu’est-ce que c’est que… ?
    — Du Bellay, jeune euro. Les Regrets, l’envie d’ailleurs, tu connais ?
    — Du balais, toi-même ! répliqua l’euro bousculé. J’ai le regret de te dire que j’étais là le premier !
    — Nous ne faisons que passer, chère monnaie, le voyage est dans notre ADN.
    — Parle pour toi, moi je suis né à Pessac et depuis la maternité dans une agence du Crédit Agricole, je n’ai connu que cette gamelle.
    — Jeune sou ! Comme c’est beau, tu as toute la vie devant toi. Tu verras, tu passeras d’une boulangerie pour une bouchée de pain à la main d’une jeune femme étourdie qui te perdra dans une rue où un gamin sautillant te ramassera pour un fond de poche où tu rencontreras un tas de billes. Tu prendras l’avion, découvrira d’autres villes, rencontreras d’autres euros aux faciès différents, comme moi. Je viens de Grèce, tu sais…
    — Ah ?
    — Si tu savais, tout ce que j’ai traversé, je pourrais réécrire l’Odyssée. Ah ! Euro, qui comme moi, a fait de beaux voyages !
    — Oh quelle chance, si seulement…
    — Mais tu dois croire en ton destin, petit !
    — C’est impossible, je suis prisonnier de ce misérable !
    — Comment ça ?
    — Il a fait de moi son porte-bonheur depuis que cette femme m’a troqué contre une conscience tranquille. Il est tombé raide dingue de son sourire, il faut croire. Et moi, je suis condamné à faire l’ouverture de sa mendicité pour nourrir sa gamelle. Il ne me lâchera pas.
    — Je vois… Attends, j’ai une idée.
    — Quoi ?
    — Colle-toi à moi… Allez plus que ça ! Je ne vais pas te manger.
    — Mais tu colles ! … Qu’est-ce que… ? ça sent la…
    — Oui la merde… Désagrément de mon dernier voyage, une chute fatale dans une rue de Paris. Le seizième. T’as une chance sur deux de tomber sur une déjection canine. Tu crois qu’on m’aurait nettoyé ? Non, la charité demande moins d’effort.
    — Beurk !
    — Tu vas voir, demain, je te parie qu’on voyage en première dans un tiroir-caisse de Monoprix. Et après, à nous la belle vie !
    — Euro, qui comme Ulysse, a fait un beau voyage, oui ! »

  15. Camomille dit :

    il advint… hé bien il advint RIEN !
    Point de ronds dans l’eau pour ce pauvre EURO esseulé et point de ricochets… RIEN !
    Et puis… un EURO qui rêve, c’est pas très sérieux vous en conviendrez ?
    De toute façon, les EUROS, ça ne rêve pas, sinon ça se saurait !
    Il s’ennuie dans la sébile du miséreux ?
    Pourtant, il a le beau rôle ! Le rôle principal même !
    Il sert d’appât.
    Lorsqu’il disparaît sous quelques centimes d’euros jetés rapidement par des passants en culpabilité, Hop ! Il est remis à la surface pour encore plus appuyer sur la culpabilité des passants aux centimes plein les poches.
    Notre EURO est un héros mais il ne le sait pas !
    Toujours là pour nous faire comprendre que nous ne sommes pas généreux,
    Toujours là pour nous faire croire que d’autres déposent des EUROS dans la sébile et non des centimes.
    Toujours là pour nous donner mauvaise conscience !
    Et comme dirait l’autre : CA MARCHE !
    Oui…il titille notre conscience
    Oui…il bouscule notre confort
    Oui…on ne voit que lui.
    Alors, faut qu’il arrête de râler et de rêver…
    D’ailleurs, regardez….Hop ! Le revoilà à la surface et hop ! Hop ! UN, DEUX puis TROIS EUROS viennent de tomber dans la sébile !
    Quand je vous le disais que ça marchait !
    Et ça marche tellement bien qu’un billet de CINQ EUROS vient de changer l’ordre établi.
    Mais c’est là que ça se complique pour lui car le miséreux qui sait s’adapter, change la donne.
    Désormais c’est le billet qui servira d’appât.
    Quant à notre EURO, rétrogradé au second rôle, il continue de pleurnicher sur son triste sort mais que voulez-vous, on ne peut pas venir en aide à tout le monde.
    Chacun son karma.

  16. Anne dit :

    « Un Euro, rêvant de faire des ronds dans l’eau, ternissait d’ennui dans la sébile d’un miséreux. Mon sort n’est pas billant, pleurnichait-il. Or, il advint… »
    …qu’il se trouvait être le dernier Euro de ce miséreux nommé Robert. Ce dernier vivait dans une cabane au fond d’un étang en Bresse. Il se nourrissait de quelques rares carpes présentes au fond de l’eau. Il y trouvait aussi des écrevisses. Mais voilà, l’Euro était le dernier. Robert décida de lui ceindre une fine corde de chanvre. Il l’attacha au bout de sa canne à pêche et fit de grands tourniquets en l’air. On entendant le bruit du vent. Il jeta le fil le plus loin possible. Ce qu’il ne vit pas c’était l’apparition de petites étoiles autour. Lui qui attendait des heures pour attraper un poisson, sentit la corde se tendre immédiatement. Il tira, tira, tira. Il poisson apparut. C’était un saint-pierre. La légende dit que l’apôtre en retira de la bouche une pièce d’or. L’empreint de son pouce y était demeurée. L’étang ne devait pas être son habitat naturel. Robert n’en crût pas ses yeux. Il décrocha délicatement l’Euro de sa bouche. Il cuit sur la braise le poisson, sa chair était savoureuse.Quelques minutes après, une sorte de gargouillement se fit entendre. Des bulles apparurent à l’endroit où la ligne s’était posée. Une source jaillissait des profondeurs, l’eau s’éclaircissait. A la surface de l’étang, les poissons sautaient formant de belles ondes d’un bleu clair. Robert sortit ses peintures et immortalisa l’instant. Chose rare, il souriait et une sérénité le parcourut. Il était heureux, lui le miséreux. Avec le temps, des algues poussèrent permettant d’agrémenter son repas. Il aurait pu garder dans la sébile ce dernier Euro, mais non. Il avait décidé d’une certaine façon de l’investir dans la nature. En même temps, il suivait une logique, cette dernière le nourrissant. Il vivait de ses fruits. Comme pour le remercier, elle l’avait comblé au centuple par ce poisson de légende. Chaque nouvel Euro servait à la pêche suivante. Ce miséreux n’avait guère plus d’argent, mais il était maintenant épanoui.

  17. Nadine de Bernardy dit :

    Un euro rêvant de faire des ronds dans l’eau,voire des ricochets dans la vie,ternissait d’ennui dans la sébile d’un miséreux.
    Mon sort n’est pas brillant, pleurnichait-il.
    Or il advint qu’un malandrin, encore plus malhonnête que le propriétaire de la sébile était miséreux,passa en roller devant le pauvre homme,se baissa et lui prit le petit quart de métal qu’il aurait voulu plein de piécettes.
    Trop surpris pour réagir,le mendiant regarda s’éloigner le jeune homme et se mit à pleurer.Non pas pour sa piécette mais sur son contenant.Cet objet modeste,un peu cabossé,avait fait les deux guerres dans la famille et son père le lui avait donné pour ses 21 ans afin qu’il en prenne grand soin.
    Pendant qu’il se lamentait,le voleur et l’euro filaient dans la ville à toute vitesse,grisés par cette liberté mal acquise.Ils arrivèrent jusqu’au fleuve pour retrouver le petit groupe de complices qui,comme le roller man,vivaient de rapines et de vols à l’arrachée.
    Chacun étala son butin sur le quai. Pas très fructueux aujourd’hui.mais quand vint le tour du voleur de sébile,il se fit huer pour la pauvreté de son butin.
    Seul l’un d’entre eux examina soigneusement le quart,le retourna et se mit à hurler de joie en entamant une gigue effrénée.
     » J’en étais sûr,je l’ai reconnu tout de suite,ce petit truc à une valeur folle.Il est recherché par les spécialistes depuis des années.Le poinçon et les dates le prouvent.Il a appartenu au soldat inconnu à qui il a été volé sur le champ de bataille après sa mort par un compagnon peu scrupuleux.
    – Et la pièce? demanda le gars qui l’avait dérobée
    – Aucune valeur, mais si on la maquille en la patinant,elle pourra donner encore plus d’authenticité à cette tasse de métal. »
    L’euro,qui rêvait d’un sort glorieux, se retrouva par conséquent au Musée de la Guerre et des Armées,au fond du quart,entre un masque à gaz ténébreux et une pointe de baïonnette dédaigneuse.

  18. durand JEAN MARC dit :

    Un euro, rêvant de faire des ronds dans l’eau, voire de ricocher dans la vie, ternissait d’ennui dans la sébile d’un miséreux. Mon sort n’est pas brillant pleurnichait-il.

    Or il advint que la momie du trottoir mourut. Entre être et avoir, le malheureux n’avait pas eu le temps de pleurer. Pour un euro, on n’a que des cacahouètes de santé. 20 ans dans les rues, on devient comme un chewing gum, on colle au macadam. Il existe un moment, comme çà, à force de marcher pour rien, à constater que l’horizon ne fait que reculer, l’enflure, on pose son cul sur une bite, si on déambule dans un port, sur une grille de métro, ailleurs, sous les roues d’un tramway ou au fond d’un canal.

    Lui s’était rabattu sur le plus grand des classiques, l’opéra de deux sous, le sang coagulé de la Terre, la limonade de Dieu, les indignes du Seigneur. A chaque sortie de messe, on lui remplissait son gobelet d’un petit jus de grappe. Il aurait préféré un peu de rosé, pour voir la vie autrement, grimper aux arbres et chanter comme les piafs. Mais le chaland des églises ne distribue qu’avec parcimoney. Et le pauvre se noie dans la liquidité des pièces jaunes.

    Lui qui avait rêvé de voyages au delà des cercles bipolaires, demeurait collé à sa banquise. Il caramélisait dans les vapeurs de vieux rhum, de vieux tout, de fonds de tous les liquides, ceux fondant au soleil, là, partout, tout au bord des poubelles, des rues, des chemins, des avenues, des autoroutes de la soif.

    Un jour, il s’écroula, au bord d’une rivière, la berge de sa dernière chance. Un superbe chemin de halage…et personne pour le tirer de là.

    C’est un môme de 11 ans qui le découvrit et ne le recouvrit pas.(1) Il séchait l’école depuis longtemps et l’euro allait arroser sa journée. Juste un peu de jus pour sa mobylette, histoire de mobiliser son nouvel accès à la pauvreté ambulante.

    (1) (Ce geste et cette phrase, fallait l’oser! )

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