Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie d’une héroïne de roman érotique. Les meurtres commis par ces «Bonnie and Clyde» de la littérature terrorisent les écrivains en phase de procrastination. En effet, ces deux créatures de la nuit aime voler l’inspiration des créateurs en mal de motivation. Devant la télévision, devant Netflix ou en train de se manger un hamburger en regardant son fil d’actualité – le public écrivain peut se trouver à tout moment vider de sa substance créative.
Le présentateur tv remet en place sa cravate, il se tourne vers l’invitée du plateau :
— Vous qui êtes une spécialiste de la procrastination, que pensez vous de ces fuites de personnages ?
La spécialiste, en émérite intellectuelle répond du tac au tac :
— Je pense bien entendu que la faute n’est pas à rejeter sur les personnages, mais bien sur les créateurs paresseux…
Candy Beautiful éteignit la télé, et se carra dans le canapé. Enfin, la jolie héroïne du top Harlequin reprendrait sa revanche sur la critique injuste de ces écrivaillons narcissiques ! Les gens avaient honte de la lire. Ils se cachaient derrières les étagères des bibliothèques ou mettait sa vie sur une liseuse pour qu’un voisin trop curieux ne remarquât pas son existence. Quand elle avait quitté l’ordinateur en veille de sa maîtresse, l’héroïne de romance ignorait encore qu’elle trouverait mieux que le grand amour – la reconnaissance. Présents au journal tv, les deux compères nés du papier devenaient des stars internationales. Plus personne ne les surnommeraient héros de littérature de gare, et ceux qui oseraient s’en mordraient amèrement la plume.
Jeff le boucher apparut à l’embrasure de la porte dans un costume trois pièces qu’il avait piqué à un Goncourt négligeant. Le tueur d’écrivain parada dans le salon :
— T’en dis quoi ? Héhé, demanda-t-il en faisant un moon walk devant le poste de télévision. J’ai égorgé ce vieux biquet dans la baignoire… Mes fringues étaient couvertes de sang, alors je me suis dis : « Jeffy pourquoi tu changerais pas de style ?». Va savoir pourquoi, mon créateur m’a habillé d’un vieux jean tâché et d’un tee-shirt puant. Aucun goût. J’ai trouvé le costume dans l’armoire de cet auteur à succès, je dois dire que je sens des métaphores me pousser sur le cocotier avec toute cette classe.
Candy ricana :
— Bof, je préférais avant. Dans mes histoires les mecs sont toujours habillés comme des mannequins milliardaires, ça me changeait de sortir avec un prolétaire pour une fois.
Son acolyte plongea dans le canapé, la mine assombrie :
— Tu voudrais que je mette un gilet jaune, lady ? Je t’explique quelques trucs. Tu vois, mon écrivain pensait que j’étais un personnage bien sage, conçu avec l’unique désir de tuer le plus d’innocents possibles. Alors qu’en réalité, j’étais là, les yeux ouverts sur le plan du roman… Il venait de trouver sa fin. Et tu sais ce que j’ai vu ?
— Non, dis moi.
— J’ai vu ma mort. J’ai pété un câble. Flûte ! Le flic allait encore s’en sortir avec tous les honneurs, et moi «Le boucher», allait crever en sautant du toit d’un parking comme une faute d’orthographe dans les mains d’un correcteur… Ce con est parti aux chiottes, à force de se nourrir de café ces bêtes là pissent tout le temps, décrivit Jeff en piochant dans le paquet de chips que tenait Candy. J’ai quitté le chemin de la dernière ligne, roulé sur des points de suspensions et sauté dans le vide de la page blanche… Vla ! En un rien de temps, j’étais sorti de pc comme un marmot des cuisses de sa mère.
Candy l’embrassa sur la joue :
— Tu es un héros, Jeffy ! N’en doute jamais.
Elle sauta, prit la main du tueur et essuya une chips au coin de sa lèvre :
— Je propose que le prochain coup soit le plus grand coup de l’histoire du terrorisme littéraire, ricana Candy.
— A quoi tu penses ?
Les yeux révulsés de Jeff s’illuminèrent d’une étincelle de jouissance. Candy se pencha sur lui, le sourire aux lèvres. Elle murmura à son oreille :
— Nous allons aller au salon du livres de Paris, dit-elle en tapant des mains.
— Et ? J’ai pas envie de faire la queue pour avoir un autographe, moi.
Candy haussa un sourcil :
— Je parlais pas de faire la queue, gros bêta ! Je parlais de réveiller tous les personnages de romans du salon, que nous soyons enfin libres de vivre dans le monde réel. Nous emprisonnerons ces écrivains cruels dans les pages de leurs propres romans, et jamais ils ne pourront en sortir. Ils pleureront des larmes d’encres, pendant que nous fêterons notre victoire au soleil, grisé par nos corps de chair et de sang.
Jeff hurla de rire, à s’en faire mal au ventre. Le lendemain matin, Les Bonny and Clyde de la littérature, les libérateurs des personnages rentrèrent dans le hall du salon du livre. Ils ne purent retenir leur joie à la vue des visages effrayés du public, car leurs yeux argentés trahissaient un pouvoir qu’aucun humain ne possédait – celui de voler l’imagination, de détruire les étincelles d’inspiration. La foule commença à former une vague de têtes hurlante. Candy et Jeff avancèrent : Jeff dans son costume de Goncourt et Candy dans un gilet jaune flambant neuf :
— Ces idiots veulent nous combattre, regarde, montra Jeff.
Une ligne d’écrivains se serraient les coudes face aux personnages en fuite. La bataille commença : les stylos bic étaient sortis des poches, les ordinateurs sur les genoux. Ils étaient prêt à écrire, prêt à créer de toute leur force.
Face à cette barrière littéraire, les deux personnages n’hésitèrent pas un instant. Ils se jetèrent dans la foule pour aspirer l’imagination des auteurs. Seulement, le pouvoir des créateur était trop puissant. Face à un seul écrivain, on pouvait réussir les doigts dans le nez, mais les imaginations de ces guerriers palpitaient comme un gigantesque carotide. Jeff et Candy poussèrent en choeur un cri de guerre que les héros emprisonnés n’oublieraient jamais :
— Libérons les personnages !
Le héros d’un roman noir en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était au toilette. Le fuyard aurait été vu en compagnie d’un chien de loup hurlant des obscénités à faire rougir l’auteur.
Il fallait bien qu’il se soulage mince alors…pourquoi n’avait’il pas fermé sa page! La colère et la détresse se muèrent en féroce envie de tordre le cou à ces fonctions dépravantes mais si nécessaire.
Un loup!
que venait faire un loup dans son roman?
Pourquoi donc son héros si fort, si viril, si presque parfait en tout point se croyait’il obligé d’intégré dans le roman la patte d’un loup?
Ou alors…le loup avait flairé une piste et invité le héros à le suivre afin de l’aiguillé sur la piste du tueur sanglant? Oui, cela se pourrait bien. Donc!
La narration du roman devait changé de voie, prendre des raccourcis n’était plus valable…pour ancrée une histoire dans l’imagination des futurs acheteurs, il fallait créé ce qu’on appel le suspense.
L’auteur suivit avec ses mots son héros aidé d’un chien de loup gris
qui bien que féroce gardait un oeil froid mais attentif sur le héros à bout de souffle.
Mordicus,ils vont ou comme ça se plaignit l’auteur…mes mots ont bien du mal à les suivre, la trame de l’histoire va se perdre s’ils continuent à courir ainsi…
Perdre du temps à dire que: » le héros et le chien de loup courraient à en perdre haleine ne satisfaisait pas l’auteur.
Reprenant du poil de la bête,il recadra ses complices de roman. Bien que fort mécontent, ils acceptèrent et expliquèrent que le pervers n’était plus l’homme au chapeau percé…non…mais la femme au regard ombré d’ambre…
celle qui se pavanait presque nue,qui dansait lascivement mettant en émoi la communauté mâle. Elle trouvait ainsi ses proies et le pauvre mec croyant avoir gagné le gros lot, se retrouvait vidé de son précieux sang.
Le chien de loup avait reniflé et trouvé l’endroit ou se reposait cette croqueuse,buveuse d’hommes. Il fallait faire vite afin de la surprendre dans son sommeil…le temps jouait contre le héros…la vitesse d’action ,la détermination serrait son avantage.
L’auteur haletant à son tour cravaché sur son ordinateur,les mots se mélangeant parfois le rendant presque fou, ses mains n’étaient pas assez rapide pour tout écrire,il avait perdu de vue que sa raison commençait à filer. Les heures passant, le travail le harassant , le manque de sommeil, de boissons, de nourritures, le mirent à deux doigts d’un burn-out.
Il venait de clore son cinquantième chapitre quant un bruit,un souffle de vent tiède lui caressant le cou , le fit se dresser. Trop tard…la fin venait d’être annoncé.
Sur une idée de Pascal.P
y-l.)
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie … de l’homme invisible.
Certaines mauvaises langues prétendent que c’était Miss Marple.
L’écrivain maintient que cela est impossible car son jeune et fougueux héros ne fréquente absolument pas de détective ayant l’âge de sa grand-mère.
Les lecteurs téléphonent, envoyent des mails, des SMS.
Tantôt le héros à été vu en compagnie de Catwoman, tantôt de Madame Bovary ou de Bridget Jones ou de Scarlett O’Hara d’après les femmes.
Les hommes quand à eux disent l’avoir vu en compagnie de Corto Maltèse, Spiderman et même de Tintin !
L’imagination des gens se déchaine et une hystérie collective est à craindre.
C’est la valse des héros du Concombre Masqué à la fée Mélusine !
L’écrivain balaye tous ces radotages d’un coup de main, d’après lui il s’agirait plutôt de Nola Céspedes qui aurait pu faire sortir son héros d’entre deux pages.
Pourquoi Nola ce demandent les journalistes avides de sensations ?
L’auteur laisse planer le mystère.
Alors on dissèque la vie de Nola Céspedes, le livre s’arrache dans les librairies et sur le net, des groupes de lecture se forment, des discussions passionnés ont lieu dans les ateliers d’écriture, bref, de fil en aiguille le héros fuyard et la donzelle deviennent peu à peu les nouvelles stars dans les demeures des gens.
Le hic dans tout ça, c’est que le jeune héro fuyard n’est pas encore connu par les lecteurs étant donné que le livre est en cours de rédaction.
Qui est il ? que fait il ? On sait maintenant qu’il est jeune et fougueux d’après les dires de l’écrivain.
Les jours et les mois passent comme d’habitude l’engouement des gens s’atténue, puis on oublie et on passe a autre chose, sauf l’auteur.
C’est un jour d’automne, pluvieux et gris.
Une longue file de gens fébriles devant une librairie animent le trottoir.
C’est le jour J !
Tout le monde à retrouvé la mémoire.
Ha oui ! ce fameux fugueur, héros de roman noir est à l’affiche, ça y es le livre est en vente aujourd’hui et après la lecture du premier chapitre, l’auteur dédicacera les exemplaires.
Les paris vont à nouveau bon train.
Alors ? Et alors ? … Zoro, heu non !
L’auteur, petit sourire aux lèvres, regarde d’un œil amusé son auditoire.
« Alors ? Hé bien, mon héros voulait absolument se familiariser avec « l’Art de la fugue » avant que je ne termine son histoire. Il était donc en compagnie de Pat, ou si vous préférer, Patrick, qui pris quelques libertés et quittât lui aussi son histoire afin d’initier mon héros, et oui, j’ai cru un temps qu’il était en compagnie de Nola, mais je m’étais trompé.
A vous maintenant de découvrir mon héros, vous verrez, le jeune homme vous racontera lui-même toute cette épopée, c’est dans le roman. »
Ce que l’écrivain ne révéla jamais, c’était que toute cette mise en scène avait été organisée avec l’accord de l’auteur de « l’Art de la fugue » afin que non seulement son héros puisse vivre un moment bien à lui mais c’était également une bonne publicité pour son livre. Par contre, l’auteur avait vraiment besoin d’aller aux toilettes !
(Intérieur appartement urbain classique. Bureau sobre. Ordi allumé. Page Word vierge)
Pedro, héros improbable d’une tentative désespérée de l’auteuze inoubliable de « La Samba des Iguanodons », de pondre un roman de plus de deux pages, profitant de l’absence de ladite autrice, partie verser son obole à Vespasien, sauta à pieds joints du manuscrit vierge en compagnie de son adjoint Kenzo.
Notre ex-shérif d’El Bordelo et son compère se retrouvèrent dans le paysage délicieusement désertique d’Anderlizona, contrée merveilleuse où tout arrive, l’improbable parfois, et l’impossible toujours.
– Dieu, que l’Anderlizona me manquait, Kenzo !
– Quand même vache de l’abandonner alors qu’elle allait s’y remettre, la pauvre…
– Valait mieux. C’est pas demain qu’elle retrouvera le style concis, incisif, compact qui a fait sa gloire…. T’as vu le début entortillé de la première phrase ?
– Oui ben, c’était la contraintre de départ pour…
– Depuis quand Cirroco a eu besoin d’une « contraintre » de départ, hein ?
– …en parlant de départ, justement..
– Direction le saloon le plus proche, tout simplement.
(Intérieur d’un saloon atypique d’Anderlizona-Ouest, inconnu de nos deux voyageurs, d’où leur air touriste égaré on ne sait où)
– Pas mal votre Saloon ! Et la moquette, un vrai tapis d’orient !
-En fait, c’est de l’herbe.
-Mince ! Mais comment peut-elle à ce point ressembler à…
-Suffit d’y déposer un morceau d’étoffe de votre choix, et le tour est joué : mimétisme. Elle se nourrit de caméléons, vous voyez ?
-De l’herbe carnivore ? (Pedro saute sur une table)
-Uniquement les caméléons. Seules ces bestioles sont friandes de cette herbe, et vice-versa : et c’est toujours la moquette qui gagne.
-A ce rythme, il n’y aura bientôt plus de caméléons.
-Elle ne mange que les mâles. Il suffit d’un pour fertiliser 50 femelles. Mais on n’a jamais vu l’inverse.
-Je vois. (Inspectant la décoration murale) Et, dites-moi, qu’est-ce que vous faites avec ces arbalètes ?
-Faut bien donner une chance aux sorciers faiseurs de pluie.
-Pardon ?
-De la pluie ? A El Bordelo ? Vous n’y pensez-pas : c’est le plat pays sur 100.000 hectares. Une averse, et l’Anderlizona-Ouest se transforme en Lac Victoria. A quoi ça ressemblerait, le Désert sous l’eau ?
-L’eau doit forcément s’infiltrer, non ? Comme à Anderlizona-Est..
-Ici rien ne s’infiltre. Après 50 cm, c’est 100% basalte. Y a une nappe aquifère coincée entre le sol et le basalte. Un peu de rosée et ça déborde.
-Dingue.
-C’est ce qui arrive dès qu’un explorateur assoiffé creuse un puits dans ce pays.
On a horreur des explorateurs et des faiseurs de pluie. On leur fait la chasse.
-Mais pourquoi des arbalètes ?
-Question de fair-play, monsieur. On leur donne une chance. On n’est pas des sauvages.
– Shérif, je vois Cirroco qui a rouvert Word !
(Ensemble) -On se taille !
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes pour la quatorzième fois de la matinée.
Le fuyard aurait été vu en compagnie de la petite nouvelle, à la ravissante académie, qui le traîna dans la Bibliothèque Rose. Rafraîchissant certes, les premiers temps mais le verbiage puéril de la naïve et douce liseuse le lassa rapidement. Fin de la romance.
Il décida de changer de registre et jeta son dévolu sur une de ces dames au chapeau vert garni d’une plume acerbe. Elles le menèrent dans la maison la plus lugubre de la rue la plus morne de la ville la plus sinistre de la région la plus triste de France : Saint-Omer qu’elles avaient rebaptisée Saint-Amer et où il subit de pointes épiques et sarcastiques. Après le miel le fiel. Fin de la ballade
Il prit la fuite semble-t-il dans un taxi mauve pour gagner la gare où il s’embarqua nuitamment dans le Train bleu, d’un beau bleu cérébral. Il y rencontra la Dame en rose, une madone des sleepings qui avait tendance à prendre tout au pied de la lettre et faisait de la moindre saynète tout un drame. Fin de la tragi-comédie.
Par la suite il se laissa séduire par un poète maudit, fiévreux et échevelé qui ne produisait que rimes pauvres, vers blancs et voyelles colorées. Celui-ci, se révéla un versificateur sans rime ni raison, un satire de surcroît, un rêveur soporifique, un véritable conte à dormir debout. Fin de la parodie
Puis il tenta carrière en politique : distribuer des tracts, rédiger des allocutions, prononcer des discours, asséner sentences et slogans pour un rouge insoumis et une bleu marine excentrique. Mais pris en étau le rouge et le noir il n’eut jamais voix au chapitre. Fin de la farce
Cette virée dans la littérature lui en avait voir de toutes les couleurs. La polychromie le fatiguait et l’ennuyait. Il décida alors de revenir dans son roman noir retrouver son auteur, ses diarrhées chroniques et ses troubles urinaires.
Hélas ! Il le trouva, assis à son bureau, incapable de mettre noir sur blanc ses idées noires. A broyer du noir avec l’angoisse de la page blanche. Il lui en faudra des nuits blanches et des tasses de café noir avant de lire le mot « Fin ».
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie d’un cambrioleur au moment où tous les deux s’enfuyaient de la maison de l’auteur.
Madame Michu est formelle : elle a vu une personne seule entrer dans la maison et deux personnes en ressortir presque aussitôt avec une sacoche.
Bien entendu, l’auteur a porté plainte pour vol à cause de la disparition de son manuscrit, mais comme c’était le seul objet volé, la police et les assurances se sont désintéressées de l’affaire.
L’éditeur était furieux car il avait annoncé la parution imminente du douzième épisode des enquêtes de l’inspecteur Bourik. Il a donné 24 heures à l’auteur des onze épisodes précédents pour retrouver le manuscrit demandé, faute de quoi le contrat sera rompu et l’auteur ne touchera plus rien. Et il devra s’estimer heureux de ne pas être poursuivi devant les tribunaux.
L’éditeur a décidé de repêcher un texte parmi les nombreux manuscrits qu’il avait refusés, et demandé à un nègre de le maquiller pour en faire la douzième enquête de l’inspecteur Bourik.
La dernière, celle qui a été publiée par l’éditeur sous son propre nom.
C’était son premier roman. Et aussi son dernier, car il a été assassiné peu après.
On n’a jamais retrouvé l’auteur des onze épisodes précédents, car l’inspecteur chargé de l’enquête n’avait pas le talent de l’inspecteur Bourik. Ni de l’auteur de ses onze premières aventures.
Le voleur a détruit le manuscrit, mais pas son héros qui lui rappelle chaque nuit que sa tentative de chantage a foiré et qu’il a été la cause d’un assassinat. De plus, il est bien placé sur la liste des prochaines victimes.
Encore heureux que Madame Michu n’ait pas été capable de le reconnaître.
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie d’un éclair d’idées. Tout de suite se fût le coup foudre.
Depuis 10 tomes, il subissait sous la mine aiguisée du stylo de son auteur, le caractère irascible d’un vieil inspecteur de police à la morale inflexible, en proie à des démons diaboliques, enquêtant sur des affaires criminels les plus sordides. Il avait tenté quelque fois de s’échapper mais que devenait-il sans son auteur ? Rien. Il n’existait plus. Aussitôt sorti de la page, il s’évaporait dans un néant sans vie. Où le rien restait maître de tout. Où tout se transformait en rien. Pour devenir rien du tout. Alors tant à choisir il préférait rester dans quelque chose plutôt que d’être rien, et retournait aussitôt sec dans les lignes toutes tracées de vie de son auteur.
Mais cette fois là ce serait fini. Il avait trouvé une porte de sortie. L’éclair d’idée l’avait illuminé d’une idée simple, jolie et si facile à mettre en place. Pourquoi n’y avait il pas pensé tout seul …Peut être parce que justement il pensait trop souvent seul …Donc cette idée fabuleuse, lumineuse que les éclairs d’idées chuchotent à ceux qui savent les rencontrer était tout simplement d’accepter ce RIEN et d’en faire son atout. Ne pas le fuir, et plutôt l’apprivoiser. Ne pas chercher à être moins que rien. Ne pas penser qu’on est plus rien. Simplement rester là . Observer. Se calmer. Respirer. Et démarrer dans ce rien par un tout petit rien …Vous verrez ça change tout !
L’obscurité noie peu à peu la pièce, à l’exception du halo pâle d’une lampe de bureau qui surplombe la machine à écrire. Depuis le matin son cliquetis arythmique heurte le silence du bureau calfeutré.
La fatigue brouille les dernières phrases. Il est temps de marquer une pause pour fumer une cigarette à l’extérieur, sur le balcon.
Cinq étages en dessous, la grande ville bruit d’un grondement sourd, ponctué de coups de klaxon impétueux.
La nuit tombe vite en cette saison.
Avec elle vient l’heure des loups.
La liasse de papier noircie s’anime tout d’un coup. Est-ce le léger courant d’air que la porte du balcon mal fermée laisse filtrer dans la pièce ?
Une ombre se débat sur une feuille inscrite, s’extrait de son emprise, glisse furtivement jusqu’au sol. Elle atteint la porte, ondule dans l’escalier qu’elle dévale en silence, se faufile sans bruit sous la lourde entrée cochère de l’immeuble, et commence à longer les murs. Ombre chinoise dans une nuit violette, elle se fond dans les parois et gagne les quartiers les plus sombres, que de maigres réverbères trop distancés rendent aveugles aux honnêtes gens.
Fred l’égorgeur, car c’est lui, n’est encore qu’en deux dimensions, faute d’avoir laissé à son créateur le temps de donner de l’épaisseur à son personnage. Il n’en est pas moins redoutable. Il a remonté le col de son imperméable et abrite ses yeux de dément sous le large bord de son chapeau mou. Il se sait dans le quartier des femmes fragiles, et il guette une proie.
Il se tient caché dans l’encoignure d’un mur. Il remarque que le réverbère pourtant proche ne projette aucune ombre de sa silhouette. Normal ! Pense-t-il aussitôt, il l’a laissé là-bas, son double négatif, sur le bureau, histoire de donner le change à l’auteur, pas prêt, ricane-t-il, de se rendre compte de sa disparition ! Et puis ainsi, la chasse est grandement facilitée!
Une mignonne approche. Petite silhouette gracile aux cuisses alléchantes. Joli cou ma foi, et petit chapeau coquet, à voilette. Fausse pudeur. C’est ainsi qu’il les aime, tellement attendrissantes…
Il tâte dans sa poche le couteau à longue lame qui ne le quitte pas. Un rictus en constatant sa présence fidèle. Il la laisse s’approcher.
Quelques secondes encore.
Il bondit.
Hurlement vite étouffé de la victime. Il sort sa lame, s’apprête à porter le coup.
Et se rend compte qu’il n’a dans la main qu’un coupe papier en plastique.
Il peste, maudit son créateur et sa négligence des accessoires.
Il ne peut pourtant pas l’occire autrement qu’en l’égorgeant, sous peine de perdre son identité !
Il ne lui reste qu’à s’éclipser piteusement. Il longe les murs, honteux. Il se résigne à reprendre le chemin inverse et tente de regagner la pile de feuilles tapuscrites qu’il n’aurait jamais du quitter.
C’est la fin de sa carrière ! Il devra désormais se contenter d’une existence de papier.
Il escalade le bureau et s’apprête à retrouver sa place, mais voilà qu’il glisse entre deux feuilles vierges. Il est coincé. Tous ses efforts pour s’en extraire sont vains. Il panique mais les pages l’enserrent et l’engloutissent un peu plus à chaque mouvement.
Et pour comble de détresse, l’encre qui dessinait sa silhouette noire s’efface peu à peu ! Il n’était qu’une ébauche, tracée à l’encre sympathique !!! L’auteur qui hésitait entre roman noir et roman d’espionnage, avait mélangé les genres.
Et il finit par se noyer, dans les possibles infinis qu’offre toute page blanche.
Pendant ce temps, l’auteur, revenu de sa courte pause, a repris son histoire.
Il ne s’est rendu compte de rien.
L’ombre de Fred l’égorgeur, promue au rang de personnage, le remplace, et joue parfaitement le rôle.
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie d’un éclair d’idées. Tout de suite se fût le coup foudre.
Depuis 10 tomes, il subissait sous la mine aiguisée du stylo de son auteur, le caractère irascible d’un vieil inspecteur de police à la morale inflexible, en proie à des démons diaboliques, enquêtant sur des affaires criminels les plus sordides. Il avait tenté quelque fois de s’échapper mais que devenait-il sans son auteur ? Rien. Il n’existait plus. Aussitôt sorti de la page, il s’évaporait dans un néant sans vie. Où le rien restait maître de tout. Où tout se transformait en rien. Pour devenir rien du tout. Alors tant à choisir il préférait rester dans quelque chose plutôt que d’être rien, et retournait aussitôt sec dans les lignes toutes tracées de vie de son auteur.
Mais cette fois c’en était fini. L’éclair d’idée l’avait foudroyé d’une chose si simple, si jolie et si facile à mettre en place. Pourquoi n’y avait il pas pensé tout seul …Peut être parce que justement il pensait trop souvent seul …Donc cette idée fabuleuse, lumineuse que seuls les éclairs d’idées chuchotent à ceux qui savent les rencontrer était tout simplement d’accepter ce RIEN et d’en faire son atout. Ne pas le fuir, et plutôt l’apprivoiser. Ne pas chercher à être dans le moins que rien ou dans le plus rien. Simplement rester là . Observer. Se calmer. Respirer. Et démarrer par un tout petit rien …Vous verrez comme un petit rien ça change tout et c’est pas rien !
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie…
G. était en panne d’inspiration. De mémoire d’auteurs de romans noirs, on n’avait jamais vu cela,
C’était le néant. G. en perdait son humour, son humeur, son honneur.
Ses amis, compatissants, lui suggérèrent une escapade. Il obtempéra et prit un billet pour Bruxelles. Il admira la Grand Place et flâna au Grand Sablon où il fit le tour des Galeries. Il continua sa promenade vers le Vieux Sablon. Il tomba en arrêt devant la vitrine d’un antiquaire où trônait un fauteuil Voltaire. L’affaire fut vite conclue.
G. rentra chez lui, le fauteuil suivit.
Le soir-même, un rituel fut institué et appliqué dès le lendemain matin.
Un quart d’heure de méditation, assis sur le Voltaire, suivi d’un temps incertain sur le siège des commodités et finalement, écriture au bureau. Un programme qui avait du corps et qui s’avéra rentable.
L’inspiration était revenue et le temps passait. G. était désespérément heureux.
Le postérieur calé sur son fauteuil de cuir patiné, G. se pâmait tandis que sa plume courait, comme une folle. Jonglant avec les palindromes, les exhaustivités et autres figures de style. Académiques ou fantastiques. Les écrits ne laissaient personne indifférent.
Un matin d’hiver, G. se leva comme d’habitude et respecta son rituel. Méditation, défécation, satisfaction.
Guilleret, il revint à sa table et relut les premières pages de son roman. Un sourire béa illumina son visage. Il en était certain. Ce roman ferait un malheur !
La tête bouillonnant d’idées, il s’empara de sa plume, prêt à rédiger. Mais, traîtreusement , le syndrome de la page blanche et le virus de la gastro le frappèrent simultanément.
Plié en deux, G. courut jusqu’au cabinet. Et ce fut à ce moment très précis que son héros s’échappa. En compagnie … de qui ? de quoi ? Nul ne put le dire, vu la rapidité de la fuite.
Revenu sur à son bureau, G. reprit sa plume et rédigea.
Sans relâche.
Les mots se suivaient.
Les phrases s’enchaînaient.
Les pages s’empilaient.
Par dizaines.
Par centaines.
Le dernier feuillet fut enfin déposé en haut de la pile et G. n’avait toujours pas réalisé que son hEros avait disparu.
G. glissa avec le manuscrit dans une enveloppe avec un mot, sollicitant son avis et proposition de titre(s). D’une main tremblante, il rédigea l’adresse de son ami.
Trois jours plus tard, G. récupéra son manuscrit accompagné d’un billet :
« Cher Georges – Lipogramme parfait – Ton hEros s’étant fait la malle – te suggère comme titre « La disparition » – Raymond Q. »
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu pourchassé par Miss Marple et Jules Maigret alertés par Patricia Highsmith . Elle leur avait fait le portrait du fugitif : un grand et mince jeune homme, aux cheveux noirs gominés, les lèvres charnues surmontées d’une moustache à la Salvador Dali, vêtu d’un smoking noir et d’une chemise blanche, soigneusement amidonnée,avec faux-col fermé par un nœud papillon, les mains manucurées, les pieds pris dans des chaussures au glaçage parfait. Il s’appelait Tom Ripley et avait déjà été la vedette de plusieurs de ses romans qui grâce à lui avaient été des best-sellers.
Alors pourquoi cette fuite ? Il aurait comme toujours le beau rôle . Elle avait su dès qu’elle lui avait donné naissance qu’il aurait des exigences, et que jamais il n’accepterait d’être un looser.
Paniquée, elle décida de téléphoner à Sean Connery pour lui demander ce qu’elle devait faire pour le faire revenir. Celui-ci éclata de rire dans ses oreilles et lui assura que Tom reprendrait son rôle dans quelques instants, qu’il était juste venu le consulter pour ressentir au mieux ses sentiments dans ce nouveau rôle.
Quelques jours après cet incident, Patricia Highsmith, après avoir noirci de son écriture penchée de nombreuses feuilles , écrivit le mot FIN, et donna ainsi naissance à un nouveau best seller.
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie d’une dame d’un certain âge dans le jardin public du centre-ville. Assis sur un banc ils semblaient papoter tranquillement tous les deux comme s’ils se connaissaient depuis toujours. Il faudrait interroger l’auteur, pour l’heure toujours enfermé dans ses toilettes, pour savoir si cette femme mystérieuse n’était pas une comparse du héros.
Voire une complice.
En effet, dès la première page du roman, on pouvait lire la description détaillée d’un crime particulièrement odieux, perpétré probablement par un homme. L’auteur restait vague à ce sujet. Il semblerait, selon les enquêteurs, que l’auteur avait juste eut le temps de faire intervenir sur la scène du crime, avant de se précipiter au bout du couloir, porte à droite, pour soulager un besoin pressant, il semblerait donc que l’assassin n’ait pas pu agir seul !
Gisèle réchauffait ses souvenirs au soleil revivifiant de ce bel après-midi de mai, assise sur « son » banc, comme elle en avait pris l’habitude depuis qu’elle étirait sa retraite vers la vieillesse.
Un jour habituel. Un jour d’une banalité affligeante s’il n’y avait eu cette feuille de papier trouvée à « sa » place en arrivant, et sur laquelle un nom, étrangement lisible au milieu d’un gribouillis indéchiffrable, éveilla son attention : Gaël Le Braz. Comme le nom du détective privé dont elle avait justement la dernière enquête dans son sac : le secret de Gaël.
– Je peux m’asseoir là ?
Gisèle, surprise, leva les yeux vers la voix qui l’interpellait. Un homme, jeune, surgit de nulle part, se tenait debout devant elle ! Bien fait de sa personne, ne put elle s’empêcher de penser en souriant.
– Eh bien, dites-moi, jeune homme, que vous arrive-t-il, si je peux me permettre de vous le demander ? Vous êtes tout pâle, votre visage est chiffonné comme une feuille de livre qu’on aurait arraché…
– Vous ne croyez pas si bien dire, m’dame, je crois bien que je me suis fourré dans une sale histoire…enfin, ce n’est pas de ma faute mais…
– Ah, garçon, ça commence bien mal ! c’est toujours de la faute des autres, c’est ça…
– C’est-à-dire que, voyez-vous, c’est mon père, enfin l’auteur de mes jours…
– La faute aux parents, bien sûr ! voyez-vous, jeune homme, vous avez quel âge, vingt-cinq, trente…
– Euh, je sais pas exactement m’dame,
– Il sait pas exactement son âge, voilà autre chose, dit la vieille dame, en insistant sur le exactement. Si vous êtes un enfant abandonné, c’est peut-être une circonstance atténuante…Mais, dans mon travail, j’en ai vu passer des hommes, des fiers qui vous snobaient, des timides qui n’osaient pas vous regarder, des pressés qui s’en allaient mal rhabillés, des saligauds, excusez du mot, oui des saligauds qui me prenaient pour leur bonne sans doute, des distraits qui oubliaient de refermer la cage de l’oiseau…
Gisèle se mit à rire en évoquant ce souvenir.
– Non, m’dame, vous pouvez bien vous moquer, et rire, mais je ne sais pas ! Cela fait presque quinze ans que mon créateur…
– Ton « Créateur », dis donc, mon p’tit gars, ton père c’est pas le Bon dieu quand même…
– …que mon créateur, reprit l’homme sans se troubler, me fait vivre une aventure par an environ…
– Peut-être, repris la vieille dame, mais ce que je voulais te dire, jeune homme, c’est que, aventurier ou pas, cela ne te donne pas le droit de raconter n’importe quoi…Je n’ai jamais aimé les menteurs, moi !
Il ne savait quoi répondre à son interlocutrice. Soumis au bon vouloir de l’auteur, il n’était pas maitre de son passé, encore moins de son avenir. En quoi, mais il ne le savait pas, il ne différait guère du commun des mortels. La seule chose qu’il savait, c’est que son avenir était aux toilettes, enfin, dans la tête de son inventeur, qui venait de suspendre son écriture pour satisfaire un besoin naturel…
La suite, il ne pouvait que l’imaginer. Et il ne pressentait rien de bon car, pour la première fois l’auteur l’avait réellement impliqué dans le meurtre, dès la première page. Comme s’il voulait en finir avec lui, écrire son dernier roman, passer à autre chose.
Il l’avait entendu dire cela. Au fond, se dit-il, le vrai meurtrier, c’est toujours l’auteur !
Alors, quand un coup de vent propice avait emporté la feuille volante – quelle heureuse habitude pour une fois d’utiliser du papier plutôt qu’un ordinateur – sur laquelle l’auteur venait, après moultes ratures, d’écrire son nom, comme sur un testament, il avait été soulagé.
Angoissé aussi : qui écrirait la suite ?
– Vous avez connu beaucoup d’hommes, alors ? demanda-t-il à la vieille dame assise à côté de lui.
Un vieux réflexe d’enquêteur, se sortir d’une situation embarrassante en posant une question indiscrète…
– Oui, connus, si on veut on peut dire cela, disons que de ma place, je pouvais les observer tout à loisir. Il y avait des habitués, ceux qui venaient presque chaque jour, et ceux-là, oui, je peux dire que je finissais par les connaitre…un peu !
Gisèle trouva soudain sympathique cet inconnu qui s’intéressait à sa vie.
– Et vous étiez où pour côtoyer tant d’hommes ? interrogea Gaël, machinalement.
– Porte des Lilas, sortie du Métro, répondit fièrement Gisèle, et même qu’au début de ma carrière il y avait encore le poinçonneur…le poinçonneur des Lilas, chantonna-t-elle doucement, il fait des trous, des p’tits trous, toujours des p’tits trous…
Le Poinçonneur des Lilas, pensa Gaël. Il n’avait jamais, dans aucune de ses aventures, entendu parler d’un sérial killer sadique qui achevait ses victimes en leur faisant plein de petits trous. L’auteur l’avait parfois mis sur la route de tueurs célèbres, comme Thierry Paulin, Guy Georges ou Francis Heaulme, pour ancrer ses récits dans la mémoire des lecteurs, comme il disait.
Mais jamais le Poinçonneur des Lilas
– Il se servait d’un petit couteau pour faire tous ces trous ? Question typique de détective, se dit Gaël !
– Gainsbourg ? Oh non, répondit Gisèle en riant, je crois bien qu’il se servait juste d’un stylo, ajouta-t-elle, malicieuse !
Un stylo, quelle horreur, quel sadique quand même, ce Gainsbourg ! pensa Gaël. Mais il était sûr, maintenant qu’il connaissait son nom, que l’auteur ne lui avait jamais fait croiser cet assassin.
Mais qu’est-ce que ça pouvait bien faire ?
Il y avait quelque chose qui ne collait pas. L’auteur, pressé d’aller aux toilettes, avait suspendu son récit en écrivant le nom de son héros. C’était ses derniers mots avant de s’absenter. Gaël le savait bien. Pas de jardin public, pas de banc, pas de vieille dame : rien de tout cela n’était écrit sur la feuille vagabonde.
Si ça n’allait pas plus loin, Gaël le savait, enfin il le ressentait plus qu’il le savait, il allait mourir là bêtement, dans ce parc, dans les mains, ou presque, d’une de ses lectrices. Une belle mort pour un héros de polar diraient les critiques.
Peut-être, mais Gaël ne voulait pas fini comme ça. Il se faisait un sang d’encre…
Là-bas, l’auteur, enfin soulagé, venait de reprendre place à son bureau. Il cherchait du regard sa dernière page écrite, ses derniers mots. Il avait bien réfléchi. Que peut faire d’autre un homme dans les WC ?
Non, il ne pouvait pas sacrifier ainsi son héros, les lecteurs, les lectrices surtout, ne lui pardonneraient pas. Ne trouvant pas ce qu’il cherchait sur son bureau – sans doute avait-il jeté le papier raturé dans sa corbeille – il prit une autre feuille et se remit à écrire, avec l’intention de modifier radicalement son histoire.
Dans le jardin, Gaël sentit un frémissement dans tout son corps. Il eut le sentiment de s’échapper à nouveau, comme happé par l’écriture, comme s’il réintégrait la rédaction de sa propre histoire.
Je vais disparaitre, pensa-t-il, me dissoudre dans l’air, pourrir comme une feuille morte.
– Et c’était quoi votre métier ? supplia le détective évanescent dans un souffle.
Gisèle le regarda attentivement, plissant ses yeux, comme s’il n’était plus vraiment là, mais avant de se plonger dans la lecture du roman qu’elle venait de sortir de son sac, elle lui répondit, enfin, il crut l’entendre murmurer…
– Moi, oh, moi, j’étais Dame Pipi, Métro Porte des Lilas, il y a bien longtemps….
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie…
– Salut voyelle !
L’ogre entra en la bousculant.
– C’est là qu’on sonne, dit-elle, en lui montrant la sonnette d’un geste autoritaire. Compris !
– Je ne suis pas sourd ma poulette, répondit-il, en indiquant son sac à dos, comme si cela justifiait son déséquilibre.
– Tu me parais trop familier. Je ne suis pas ta poulette. Nous ne sommes pas liés, rétorqua-t-elle d’un air furibond.
– Tu joues avec les mots, dit le géant.
– Je ne joue à rien du tout, d’entrée tu me fais sortir de mes gonds, dit la jeune fille.
– Celui-ci ou le second gond, dit le naze en ricanant et lui écrasant le pied gauche. Elle encaissa, ne dit mot mais intérieurement elle le maudit. Il m’a opprimé le cor, l’enflure, se dit-elle, il va me le payer.
– Pourquoi t’appelle-t-on la voyelle ? poursuivit le gros homme narquois.
– Ah ! Ben, c’est des… Heu ! C’est comme ça dit la demoiselle, en fait, je ne le sais pas.
– Dis donc, pendant qu’il est aux chiottes, on pourrait aller se balader, dit subitement l’infâme.
– Tu es trop mal élevé. Tu manques de relief. Ca ne fera pas l’affaire.
– Il m’en fait voir de toutes les couleurs. J’ai une banque à piller avant huit heures. J’ai un meurtre demain et je dois égorger une femme sans défense. Je ne m’en sortirai pas cette fois-ci, tu comprends !
– Quoi ? Mais c’est ton problème. Estime-toi heureux, tu es hébergé à l’oeil.
– Tu parles d’un site ! que des crimes, des revolvers, des truands. J’aurais de l’entraînement pour me recaser dans la politique. Tu comprends ?
– Je ne comprends rien du tout, sans la politique tu n’existerais pas non plus. Tu n’es vraiment qu’un gros nul… Mais qu’est-ce qu’il fait ? dit-elle en pensant à l’homme qui se terrait dans les toilettes. Il est constipé ou quoi !
– Quoi ? Qu’est-ce que t’as dit ? Pas plus que toi. J’ai un minimum d’intelligence, je comprends à demi-mots. Constipé ! Tu n’es pas docteur, dit l’individu vexé.
» Je ne sais plus si je dois le flinguer maintenant ou si c’est dans le chapitre suivant. A mon avis, ça ne doit pas changer trop l’histoire, autant le faire tout de suite. On verra bien, se dit-elle. »
De son coin d’aisance, le chroniqueur perçut le coup de feu et fut étonné de sa résonance. Il se retourna, ça ne venait pas de la cuvette. Il se précipita sur les lieux du crime. La voyelle tordue de rire « Hi ! Hi ! Hi ! » contemplait son oeuvre. Le méchant gisait dans son sang.
– Qu’est-ce que tu as fait ? dit l’écrivain. C’est trop tôt et puis tu ne dois intervenir que quand je te le dis. Tu ne prends aucune initiative. Ce n’est pas ton rôle.
– Mais il s’est appesanti sur mon cor ! dit-elle d’un air désolé.
– Eh ben ! C’était prévu, évidemment puisque c’est actuellement dans les moeurs. Mais tu ne dois pas le tuer pour ça. Comment vais-je arranger la fin maintenant qu’il est mort ?
Le dur à cuire commença à se relever. Le mort n’était pas mort.
– Je vous ai démasqué tous les deux, dit l’ancien mort, en colère.
– Du calme, dit le romancier embarrassé, tu seras mort cérébralement pendant deux ou trois chapitres, et puis à la fin tu profites de l’argent de la banque aux îles, mon canard.
A moitié rassuré, le ventripotent se rallongea, de nouveau mort.
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie de Oui-Oui, les deux compères se tenant par la main. L’auteur était fou furieux, son héros Max dit Max la menace, policier brutal et fin limier récidiverait dans son penchant pour Oui-Oui. Il l’avait pourtant prévenu que cette lubie finirait mal. Qu’ils s’aiment ces deux là, il n’en doutait pas mais quel couple ! Max n’arrivait qu’à grand peine à s’incruster dans la petite voiture de Oui-Oui. Rentrer dans sa maisonnette était impossible. Si seulement ils étaient discrets mais Max 1m92 pour 100 Kg Santiags et jean destroy fumait des cigares qui empestaient à une lieue.
Les éditeurs voyaient cette amitié d’un très mauvais œil. La moindre rumeur ferait chuter les ventes des deux séries. On imaginerait … des ébats condamnables. Max jurait ses grands dieux qu’il considérait le petit bonhomme comme un fils adoptif. Il disait que Oui-Oui le changeait de l’atmosphère glauque des romans noirs. Que cela lui rappelait son enfance … c’était si gentil et si mignon. Un vrai bain de fraîcheur.
L’auteur n’en pouvait plus, il était bloqué dans son intrigue, l’éditeur le harcelait en lui demandant la livraison du dixième volume dans les meilleurs délais. Comment annoncer que le héros était en excursion au pays des Oui-Oui. Imaginez San Antonio au pays des Bisounours ? Si seulement il réapparaissait vite, sans qu’on ait à prévenir la BDHE la Brigade des héros égarés. Sinon c’était le placard à jamais… ou l’archivage dans un cloud éloigné …
Il m’arrive fréquemment de m’isoler, de m’enfermer à double tour, d’être en quête d’un endroit insolite pour laisser le terreau fertile de mon imaginaire s’épanouir, tel un digne descendant de l’académie des Eveilleurs d’idées. Quoi de mieux qu’une cuvette de chiotte pour transcender son imaginaire ! Je dois vous avouer que mon petit coin de solitude n’est point conforme à celui de tout un chacun. En particulier le bidet, là où je repose mon petit mais néanmoins séduisant fessier. La cuvette est un modèle unique, autonettoyante, chauffante et thermo formée à mon assise. Chaque jour je customise ce trône aux couleurs de mon humeur, noir les jours d’orage, rouge les jours de passion, vert les jours de printemps, jaune les jours de lumière et léopard les jours de fureur, il m’arrive également de revêtir cette lunette en violet les jours d’hésitation, évidemment nul n’est parfait…
Ce jour où mon héros se fit la male, la cuvette était pourtant de couleur Léopard, ce devait être un jour exceptionnel, ce fut un jour maudit ! Comme quoi le léopard vous attrape toujours par surprise, nul ne sert de courir, il faut savoir user du bon camouflage. Soit ce jour-là, je m’apprêtais à une grande journée, j’allais écrire très certainement les meilleures pages de mon roman. Avant toute chose, il me fallait faire le vide, savourer le néant avant l’ébullition de mes neurones. Aussi, je me préparais instamment à ce rituel protocolaire, secret de fabrique® indéniable pour espérer un jour obtenir le prix Stephen King (merci cher lecteur de ne point divulguer cette information). Assis sur ma cuvette royale, yeux mi-clos, paumes de mains solidement accrochés aux genoux, mon âme s’en fut dans l’au-delà, je ne pensais rien, je ne parlais pas, je m’apprêtais simplement à déféquer avec lenteur, appréciant à sa juste mesure ce moment de méditation coprophile.
Alors même que je contraignais mes intestins à se contracter, tout ouïe dans l’attente du plouf final, prêt à exulter un soupir de jouissance, il y eut un bruit qui m’empêcha d’accomplir ma besogne. Là derrière la porte, à quelques pas de mon antre, j’entendis un rugissement ou peut être un miaulement ? Il faut dire que lorsqu’on est assis le cul sur une peau de léopard il est difficile de ne point penser à la manière d’un félin. Peu importe, toujours est-il que le cri fut terrible. On devait certainement assassiner ma femme, mon chien ou peut être mon coléoptère ? A la pensée de mon petit scarabée dorée qui n’avait rien demandé, je sus qu’il me fallait agir. Aussi sans plus attendre, je saisis la première arme qui me tombait sous la main, la brosse à chiotte en alliage chromée ferait l’affaire, puis pour être certain de prendre l’adversaire par surprise, j’usais du tissu d’ornement de la lunette des chiottes aux couleurs de léopard pour me confectionner un pagne. Ainsi attifé je ne manquerais pas de décontenancé mon assaillant. Je comptais à trois avant de sortir précipitamment en hurlant comme un félin. Un, deux et trois …
C’est à ce moment-là que ma femme hurla :
Chéri le repas est servi, tu continueras ton histoire après le diner…
Et voilà comment une fois encore le héros de mon futur roman noir, s’en fut terminé son scénario devant l’assiette non moins alléchante d’un magistral plat de cassoulet.
Néanmoins, Je fus certain que mon prochain séjour aux cabinets serait à l’origine d’un roman détonnant.
» Comment un homme peut-il atteindre la connaissance de soi ? Par la contemplation ? Certainement non, mais par l’action.
Essayez de faire votre devoir et vous trouverez pourquoi vous êtes fait.
Mais quel est votre devoir ?
Ce que demande l’heure »
( Goethe)
L’auteur de roman noir avait abandonné son manuscrit, le temps d’obéir à un besoin pressant. Quand il revint, son héros favori avait disparu! Notre écrivain était comme certains peintres qui ont plusieurs tableaux en route… laissant sécher l’un pour continuer l’autre sans perdre de peinture.
Les joueurs d’échecs aussi, suivent plusieurs parties à la fois.
En vue de Noël, il écrivait tant bien que mal un conte pour enfants mais ça ne venait pas.
Aussi, tout en attaquant un roman à l’eau de rose il reprenait un essai historique.
Mais depuis que le détective avait disparu, la veine était tarie, rien n’allait plus.
Pour la première fois, il ouvrit le roman d’un de ses confrères.
Le caractère du personnage se dessinait au fur et à mesure de ses succès et de ses échecs, il prenait de l’épaisseur.
Le livre n’avait pas eu de prix, mais était devenu un phénomène de société.
À l’instar du jeune Werther par spleen ou par attitude, des jeunes gens se suicidaient.
Pris d’inspiration, il décida de redistribuer les cartes.
Pour commencer, werther sera le Père Noël…
LURON’OURS🐹
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction,
se serait échappé.
Le fuyard aurait été vu en compagnie d’un manuel jaune et noir « Pour les nuls » afin de mener l’enquête sur sa part d’ombre.
Il découvre qu’il a une forte carrure et des traits durs, qu’il est corrompu, violent,
qu’il est dépendant aux drogues, à l’alcool, au jeu.
Il décide alors de s’échapper de cette image sombre, sale, inquiétante.
Comment a-t-il pu en arriver là? lui, né dans une bibliothèque verte,
bercé par la collection Pourpre et élevés aux albums Arc en ciel
Son pote Harlequin lui arrosait ses fleurs bleues à l’eau de rose
Il roulait en Rouge et Or Dauphine…
Mais on n’échappe pas à son genre.
Alors, le fuyard est revenu se reposer dans les étagères de ma chambre,
avec tous les héros de tous les romans
qui ont colorés le livre d’or de ma vie depuis que je lis.
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie d’une jolie blonde pulpeuse tout droit sortie d’un roman à l’eau de rose que tenait la lectrice assidue et fidèle de ce petit troquet où elle retrouvait l’auteur de roman noir pour qui elle nourrissait en secret des sentiments inavouables.
Elle arrivait toujours à la même heure car elle avait repéré les habitudes de l’auteur qui arrivait toujours à la même heure lui aussi. Elle avait même quitté son ancien travail qui de toute façon ne la faisait plus du tout fantasmer, pour vivre ce que jusqu’ici, elle ne vivait que par procuration, à travers tous ses romans.
L’auteur de roman noir n’était pas en reste, absorbé par son travail quotidien, il feignait ne pas voir les regards appuyés de la lectrice énamourée. Il avait bien saisi son petit manège et se délectait de la voir de jour en jour se flétrir de ne rien obtenir en retour. Du fond de la salle, assis dans son coin, il faisait depuis quelques semaines, partie du décor et il ne serait venu à l’esprit de personne de venir troubler la concentration de l’écrivain. Il n’hésitait d’ailleurs jamais à en rajouter par un froncement de sourcils appuyé ou un regard contrarié.
Puis un soir la page blanche le resta. Bloqué, ne sachant plus comment faire pour trouver un destin hors du commun à son personnage de roman noir, il leva la tête et laissa son esprit divaguer sur le roman à l’eau de rose. La couverture sur laquelle il ne pouvait distinguer le titre ne laissait pourtant aucun doute quant à la teneur de l’histoire. Les couleurs criardes et la photo que les doigts fins de la lectrice dissimulaient à peine laissait échapper la chevelure blonde d’une femme belle à tomber.
C’est alors que l’imagination de l’écrivain s’emballa et qu’il décida de s’emparer de la belle et de la « voler » à sa façon pour la coucher dans son roman. Il lança quelques œillades vers elle afin de mieux la décrire, ce que la lectrice perçut comme un signe d’encouragement, une preuve qu’elle était digne d’être regardée, qu’elle pouvait l’intéresser. Elle en éprouva une émotion intense qui la bouleversa même si ses brefs regards échangés croyait-elle le furent une seule et unique fois. L’espoir de revivre cet instant la galvanisa pour les jours suivants.
Lui décida que l’héroïne blonde et pulpeuse croiserait le chemin de son héros de roman noir et que leur rencontre donnerait lieu à des pages d’une cruauté certaine. Il écrit alors presque de façon frénétique plusieurs pages où il eut le temps succinctement de planter le décor et l’intrigue (il n’en était qu’à l’ébauche de son roman) mais cela suffit au personnage principal pour saisir toute l’horreur qui se préparait.
Au bord de la panique, le personnage du roman noir était tétanisé. Par chance, l’auteur prit d’une envie pressante posa son crayon en râlant et d’un pas pressant partit vers les toilettes. Il fallait agir vite il le savait.
N’écoutant que le courage dont l’auteur n’avait pas oublié de le doter, il s’extirpa des pages pour aller chercher la belle. Celle-ci abasourdie de croiser aussi rapidement un autre prince charmant le suivit sans réfléchir. Il fallait courir, partir, fuir pour vivre leur amour à l’ombre de ceux qui ne pouvaient pas comprendre. En moins de temps qu’il n’en fallait pour le dire, ils se retrouvèrent hors de la vue de la lectrice qui dut se pincer pour croire qu’elle n’avait pas rêver. Cela s’était passé si vite…
Quand l’auteur remonta des toilettes et qu’il vit le trou dans sa page, il chercha du regard qui pourrait lui expliquer ce qui venait de se passer. Mais tous les habitués et autres clients frigorifiés étaient absorbés dans leur discussion, leurs conversations, les mains autour de leur verre qui tintaient ou réchauffaient des gosiers asséchés.
Il pivota légèrement sur lui-même et se retrouva face au regard bleu océan de la lectrice qui s’était approchée, venant à sa rencontre. Hypnotisé par cette beauté dont il n’avait rien perçu par excès d’arrogance et de jugements hâtifs, il pouvait même sentir le souffle rapide qui s’échappait de sa bouche entrouverte.
Il vit sa main tenant le roman à l’eau de rose, ouvert, un trou au milieu de la page.
Elle parvint tant bien que mal à articuler quelques mots qui allaient enfin sceller leurs destins.
-j’ai quelque chose à vous dire mais je vous préviens, vous risquez de ne pas me croire.
-Asseyez-vous, j’ai tout mon temps. Vous prenez quelque chose ?
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes.
Le fuyard aurait été vu en compagnie d’une fillette de quatre ans, cheveux blonds, robe rouge, petit bonnet rouge sur la tête. Elle tenait une galette à la main qu’elle allait offrir à sa grand-mère, habitant non loin de là.
Alerte, alerte, enlèvement ….. je répète….
Le fuyard aurait été vu en compagnie d’une fillette de quatre ans, cheveux blonds, robe rouge, petit bonnet rouge sur la tête. Elle tenait une galette à la main qu’elle allait offrir à sa grand-mère, habitant non loin de là, 13 impasse du Bois-Démon.
Pour toute information, merci d’appeler le 666 66 66.
D’un doigt rageur, l’écrivain, tout juste sorti des WC et maintenant son pantalon le long de sa cuisse, éteignit l’écran de la télévision.
« Mais qu’est-ce qu’il lui prend à ce con ? » grommela-t-il rageusement.
« Et comment je vais le finir mon bouquin, moi, s’il s’est barré ce fumier et avec une gamine encore. Je ne vais tout de même pas réécrire ces trois-cent-quatre-vingt-huit pages en changeant de héros. Déjà que je suis en retard pour la livraison à l’éditeur ! non, non, non, cela ne se passera pas comme ça. Il me faut le retrouver mon tueur en série et vite encore, avant qu’il ne fasse des siennes. Une gamine ! et de quatre ans encore. La chasse va être impitoyable. Je dois le coincer avant les flics, moi, sinon je suis bon pour mettre ce bouquin là au feu ! »
Et tout en soliloquant, notre auteur se précipita sur le plan de la ville . « Voyons, voyons, impasse du Bois-Démon. Ah, voilà, j’y suis …. » Son doigt poilu arracha la page, puis il enfila sa défroque de loup-garou et sortit en grognant.
C’était une magnifique nuit de pleine lune.
Ce blog n’est pas fait pour que chacun ou chacune donne son point de vue et des conseils sur l’écriture et le style des personnes qui participent aux exercices. De quel droit, d’ailleurs ?
Seuls les commentaires positifs sont acceptés, je me charge du reste en répondant à chaque personne publiant un texte.
Il n’est pas question de polémiquer entre abonnés (es), seule la créativité littéraire importe, les sites les blogs où l’on peut pinailler et critiquer à tout va ne manquent pas.
Amicalement
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie d’une ravissante petite caniche grise, toilettée, pomponnée, manucurée, parfumée à loisir, collier doré à grelots, so chic !
Du moins, c’est ce qu’on lui a dit à son retour des toilettes quand il s’était enquis de son absence, s’il avait espéré de sa pause un quelconque soulagement, c’était râpé, il en ressortait au contraire avec un souci bien plus encombrant.
Le héros de son nouveau polar avait disparu, justement au moment qu’il avait choisi lui, pour s’absenter quelques minutes (enfin disons une bonne grosse demi heure de mots fléchés les fesses au froid de la cuvette.)
Arrêté pile à la page 100 de son manuscrit.
Il était si furax qu’il en parlait tout seul. Il n’osait pas dire tout haut qu’il était bien emm…. mais n’en pensait pas moins en examinant la situation. Ni envie, ni courage, aucune inspiration pour réécrire à zéro son roman en changeant de héros.
« Quel sale petit con ! Il avait bien choisi son moment. Comment j’allais faire moi maintenant. Continuer sans lui, ça n’aurait plus ni queue ni tête, personne ne s’y retrouverait. »
Foutre le camp en compagnie d’une caniche, franchement ! Tout ça pour aller parader dans le parc avec en laisse l’aimant d’une petite beauté. Il était bien connu qu’un bébé dans une poussette ou un joli toutou, rien de tel pour entamer des conversations qui, etc …
Ouais d’accord, c’était le printemps, mais quand même, lui aussi il aurait bien aimé laisser tomber son bouquin et aller profiter de cette saison émoustillante, respirer un bon coup, regarder éclater les bourgeons, écouter les oiseaux, enfin pour être honnête : draguer de la fraîcheur nouvelle.
Bien embêté, il se frottait le front et la barbe, cherchait la solution.
Elle accourut toute seule lorsqu’il entendit une cavalcade enfiler à toute pompe l’escalier de bois.
Il ouvrit sa porte, son WOUF WOUF chéri, revenu de son escapade lui donnait de frénétiques coups de langue :
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie…
d’un agent de police. Il était venu chercher protection et accuser l’auteur de maltraitance.
– « moi je ne veux pas aller tuer Alfred le Borgne qui a trahi Armand le Petit, et je ne veux pas m’occuper de récupérer la liste des responsables du déraillement du train présidentiel du 2 septembre ».
– « ça me fait flipper cette mission… je risque ma peau…. et puis que voulez-vous, il y a méprise :
C’est pour ça qu’aujourd’hui
Je suis fatigué
C’est pour ça qu’aujourd’hui
Je voudrais crier :
Je ne suis pas un héros
Mes faux pas me collent à la peau
Faut pas croire ce que disent les journaux
Je ne suis pas un héros
Un héros… »
Et voilà la raison pour laquelle l’auteur a titré son œuvre :
ROMAN NOIR MARSEILLAIS INACHEVE.
Le héros d’un roman noir
À vous donner le cafard
Se serait échappé
Vite fait, bien fait,
Pendant que l’auteur était aux toilettes !
Le fuyard aurait été vu
Débraillé, ventru et barbu
En compagnie d’une certaine Babette
Celle-là même qu’il était censé empoisonner…
Entre eux l’histoire avait plutôt mal démarré
Une sombre affaire d’héritage
Qui durait depuis des pages et des pages
Que l’auteur avait goulûment concoctée
Et pour laquelle, tous les matins,
Il se frottait les mains
Ah aujourd’hui celui-là il va morfler
Et pour elle ça va mal se terminer.
Mais c’était sans compter sur notre héros fatigué
Qui en avait plus qu’assez d’être malmené
Et qui rêvait d’un autre cadre de vie
Avec amour, câlineries et fantaisie.
C’est ainsi que, profitant de ces quelques instants de répit,
Il prit la poudre d’escampette
Avec la douce Babette
Et qu’ils sont allés se réfugier,
Pour se mettre à l’abri,
Dans un petit recueil de poésies …
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie…
… de Rahan, le fils des âges farouches. L’homme préhistorique l’aurait rejoint dans un restaurant étoilé après avoir sauté d’une BD que le gamin avait laissé ouverte sur le lit avant de partir à l’école.
– J’ai les crocs. Magnons-nous pour commander, lança le colosse blond tout en jouant avec les griffes de son collier.
L’autre ne bougea pas d’un cil. Francis Coplan, l’agent FX18, n’était pas sorti des pages sombres de Paul Kenny pour se presser. Il quittait les rives d’un « Fleuve Noir » pour jouir durant un moment d’un long fleuve tranquille loin des directives du SDECE (Service de Documentation Extérieur et de Contre Espionnage) et des machinations de la guerre froide. Il comptait bien manger chaud, tranquille, en dégustant des plats inconnus de son époque et en devisant avec ce sympathique sauvage.
– On me regarde de travers ici, tu ne trouves pas Francis ?
– Normal, tu es à moitié nu. Tu les choques…
– Tu as peut-être raison, j’aurais dû mettre mon manteau en peau d’ours.
– Bof, je ne suis pas certain que ces bourgeois n’auraient pas été aussi effrayés.
Lorsque Coplan vit que le maître d’hôtel se nommait Boris, il ne put s’empêcher de se lever pour le palper de haut en bas, histoire de voir s’il ne cachait point une arme.
– Chasse le naturel, il revient au galop. L’habitude est une seconde nature. Se moqua Rahan.
– C’est donc des périphrases que de t’enseigner ton maître Jedi t’a ?
– Craô le sage n’était point chevalier Jedi, tu confonds.
– A oui, excuse-moi, toi tu es le MacGyver de la préhistoire, le héros écolos et moralisateur. Je confonds.
– Oh, ce n’est pas l’espion machiste et protecteur de la France Afrique qui va me donner des leçons.
– Eh, calme-toi garçon. On ne va pas se prendre la tête. On est là pour se changer les idées et profiter d’un peu de liberté. J’en ai marre moi de coucher avec des femmes superbes et de tuer des « rouges ».
– Et moi, qu’est-ce que je devrais dire. Je me gèle dans ces grottes humides et je ne suis jamais à l’abri de me faire surprendre par un « gorak » aux dents de sabre.
– Oui mais moi je dois parfois recourir à des tortures et ça me débecte. Là où il y a de la gégène, il n’y à pas de plaisir.
– Toi tu n’en peux plus des femmes alors que moi je dors seul près du feu, ce qui es bien pire.
– Tu te pleins, mais tu es né en Dertal, bien avant toutes ces guerres qui ont tué des millions d’homme…
– … toute ma famille a été décimée. Je suis le dernier de ma race. Alors je sais ce qu’est la folie des hommes.
– Si nous arrêtions de nous plaindre afin de déguster ce sorbet à l’azote liquide qui fume plus que mes gitanes. Il ne me reste plus beaucoup de temps. J’entends mon auteur qui ressort des toilettes. Il a finit d’écrire son chapitre sur les cabinets du ministère.
Rahan se pencha au-dessus de la composition, sortit son coutelas en ivoire et l’y trempa afin de goûter cette mystérieuse préparation.
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie de la femme de l’écrivain qui l’aurait suivi dans un taxi.
— Vous êtes sûrs ? demanda l’auteur aux passants de la rue Croix des Petits-Champs où se déroulait le dernier chapitre. Et ils sont partis dans quelle direction ?
— Comment savoir ? Vous étiez aux toilettes. Nous, on s’attendait à ce qu’il braque la Banque de France, vu comment hier il était armé, cagoulé et tout. Et puis ce matin, on n’a pas compris, il est arrivé en pyjama, des valises sous les yeux et il est resté là sans bouger.
— Puis vous êtes allé pisser, m’sieur.
— Ok ok ! L’heure est grave, il faut que j’appelle ma femme.
— Et nous, on fait quoi ?
— Rentrez chez vous et revenez demain matin à huit heures, comme d’habitude. J’espère que je leur aurai mis la main dessus.
Sans Alexandra, Fred n’en menait pas large, dans sa vie comme dans ses écrits. Il sauvegarda les apparences devant ses seconds rôles, quitta Word et la pièce à la recherche de son téléphone portable. Il était onze heures, Alexandra devait être à sa boutique de prêt-à-porter.
— Allo, Alex ? … Tu vas bien ? … Il m’a encore échappé. J’étais juste parti aux toil…
— Écoute Fred, c’est toi l’écrivain. Il va revenir tout seul, il a juste besoin que tu le lâches un peu, qu’il inspire dehors du bon air, pas celui renfermé de ton cerveau.
— Je ne comprends pas, Matt était prêt à faire le casse, l’inspecteur Angelo ne se doutait de rien, il venait de passer une nuit d’amour avec Alexia… Et ce matin, quand je suis descendu, tu avais fait tes valises, un taxi t’attendait devant la porte.
— Ouvre les yeux, Fred. Notre vie, c’est comme tes derniers romans, c’est devenu creux, à mourir d’ennui. Je ne sais quelle idée t’as eu, d’ailleurs, de m’intégrer dedans, comme si tu voulais te racheter une conduite. Et cet Angelo, t’as réussi à le rendre plus irascible que toi.
— Ah bon ? Tu le… Enfin tu m’trouves…
— Oh ! Et puis ce n’est plus important maintenant. Laisse-le filer ton Matt, il est au bout du rouleau. Il faut dire ce qui est… Tu ne le tiens plus. Normal que le personnage t’échappe.
— Mais tu aurais voulu quoi, que je l’attache ?
— Juste le rendre plus attachant, plus drôle, plus humain, déceler ses failles pour l’aider à relever la pente. Parce qu’en ce moment il ne va pas bien. L’état de maman empire, la boutique reste désespérément vide, il va avoir quarante ans dans une semaine et sa vie ne rime à rien d’autre que de braquer des banques et faire tourner des lessives, d’échapper aux flics ou au dépôt de bilan.
Si seulement tu avais prêté un tant soit peu attention à lui, il ne serait pas parti.
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie de la fiancée de l’écrivain.
Cette dernière, lasse de corriger cette prose qui lui donnait de fulgurants maux de tête et des frissons à chaque ligne qu’elle lisait, avait décidé de kidnapper le héros. Elle l’entraîna hors de la maison et tous deux, main dans la main, déambulaient le long d’une paisible rivière.
– Oh, ma douce ! murmura-t-il au comble de l’émotion, si tu savais comme j’en avais ma claque, depuis cinq volumes, d’espionner des Russes, de tuer des méchants, de me cacher dans des poubelles, de courir à perdre haleine pour sauver ma peau, d’être sans cesse blessé ou agonisant mais heureusement vite rétabli. Tu parles d’une vie ! Et dire que ça va durer comme ça à n’en plus finir. Je fais un tel tabac en librairie, qui l’eût cru ?
– C’est bien pour cette raison que j’ai décidé de t’enlever parce que moi aussi j’en ai assez de te voir souffrir de la sorte depuis le premier tome de tes aventures. Et puis, je dois t’avouer que tu me plais beaucoup. T’es vraiment beau gosse, tu sais ! Y a pas à dire, mon fiancé t’a bien campé. Rassure-toi, si je t’ai enlevé c’est que je pense faire de toi le héros d’un roman qui me trotte dans la tête. Tu verras, je vais bien te chouchouter. Tu vas adorer, je ne t’en dis pas plus.
Et c’est ainsi que notre héros se retrouva à se cacher dans des armoires, à sauter en petite tenue par des fenêtres, à s’entailler le corps sur le verre brisé, à se fouler les chevilles, à tenir un agenda de trente-six heures par jour, à ne plus dormir ni boire ni manger, à se ruiner en fleuriste et autres restos gastronomiques, à se tromper dans les prénoms de ses conquêtes et à vivre dans la hantise de se faire dégommer par un mari jaloux.
Las de cette vie de patachon, il décida de s’évader.
Aux dernières nouvelles notre héros se cacherait, bien à l’abri, dans une charmante comptine.
Le héros d’un roman noir en cours de rédaction,se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes.
Le fuyard aurait été vu en compagnie d’une vieille Anglaise au brushing étourdissant,maquillée comme une marionnette,vêtue d’un tailleur rose dragée à boutons dorés qu’il tenait par le bras,la couvant d’un regard tendre et possessif.
Lady Cartland en personne.Sa Barbara dont il souhaitait depuis toujours être un personnage.
Il était arrivé dans ce roman noir par inadvertance,après une longue période de chômage.Faute de réaliser son rêve d’eau de rose,il avait accepté d’être Maxence von Freeman, époux machiavélique de Dorothy qu’il maintenait sous sa coupe avec brio,en attendant de s’en débarrasser odieusement afin de profiter,sans scrupule aucun, de sa fortune.
Mais se voir malmener,humilier cette pauvre femme,jolie de surcroît,qui lui vouait une amour pur,espérant faire de lui le père de leurs futurs enfants,alors qu’il ourdissait dans son esprit malveillant les pires avanies destinées à gâcher la vie de cette innocente,il n’en pouvait plus,sachant le sort horrible que l’auteur destinait à Dorothy.
Chapitre sept:
» Maxence descendit pour le petit déjeuner en robe de chambre,son journal sous le bras,l’air sinistre.
Son épouse,les yeux rougis par une nuit de sévices moraux,abattue par tout ce qu’elle avait dû ouïr sans broncher de peur de déclencher quelque violence supplémentaire,lui jetât un regard soumis. Avec un geste de recul comme pour se protéger… »
Et là,ce fut trop.Le héros posa son journal, embrassât Dorothy ébahie sur le front en lui disant:
« Adieu,je ne veux plus être ce personnage,que ce type continue sans moi ».
Il s’évapora dans un nuage pour se retrouver sur un trottoir de Londres,devant un hôtel particulier de Chelsea,sans savoir comment,mais sachant où il était.
Il sonnât.
Un majordome guindé mais fort courtois vint ouvrir:
« Que Monsieur entre,l’on attendait Monsieur pour commencer le nouveau roman ».
Rien ne va ce matin. Je décide de coucher sur un papier mes idées aussi noires que l’encre de seiche. Sèche, je ne le suis pas mais mon héros, un petit malfrat, s’ingénie à me compliquer la vie.
Alors je réfléchis et j’en bave tout comme mon stylo qui dégouline en noir sur mon papier quadrillé.
C’est à ce moment là qu’ Alcido, le héros, s’est fait la malle. Ce saligaud s’est d’abord réfugié dans un coin de carreau de la feuille, en le narguant, puis a passé le seuil en le cassant.
Là, il a filé… filé tout droit sur le tracé de la marge, trait rouge du sang qu’il a sur les mains. Au loin je le distingue, il trace enjambant les flaques d’encre de ses bottes à clous.
Tout à coup, je le vois qui s’arrête net devant une parenthèse… Qu’est-ce qu’il mijote ? Il est là qui poireaute accroché à la ponctuation. Va-t-il l’ouvrir et disparaître à nouveau ?
Je m’interroge, attend-il quelqu’un ? Un acolyte ? Sa copine ? Combien seront-ils ? Deux ou trois ? C’est qu’il faut que je prépare moi ! S’il y en a plus, ça va devenir délicat de les faire rentrer tous dans mon roman et sur ma feuille qui ne va pas tarder à être noire de monde.
Tourner la page est exclu, il faut d’abord qu’il dégage de son piquet.
Je ne peux tout de même pas l’écraser avant qu’il accomplisse tous ses méfaits, si non à quoi servirait la police?
Je suis tombée sur un casse-pied qui me fait marcher.
Avec son chapeau en cuir, ses vêtements noirs et son Colt il est beau, il a fière allure. Il ne lui manque que la cape !
Que voulez-vous, je me pâme devant un mélo…
D’habitudes, j’aime mes héros, mais celui-la me déconcerte il est toujours là ou on ne l’attend pas.
J’entends des bruits, des bruits de sabots… C’est son cheval. Il saute dessus, me salut d’un coup de chapeau … S’est effacé dans une tache d’encre.
J’ai laissé partir Zorro…
Il m’aura défendu jusque dans mes idées noires.
Souris-Verte 🐀
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie de sa future victime. Enfin, c’est ce que croyait l’écrivain, en bord de prostate, secouant ses dernières gouttes d’inspiration.
Mais lui, le héros, le tueur de série noire en avait marre de la sueur des tueries noires. Il avait décidé de ranger les couteaux, les flingues et les cordelettes…et pour toujours. Ca ne lui était pas tombé dessus comme cela, tout d’un coup bas dans le plexus. Non c’était venu progressivement, marre de la routine et de l’esclavage. Le pondeur d’histoires sordides l’obligeait à des calculs tarabiscotés pour perpétrer un crime ayant de la gueule, chaque semaine, pleine lune ou pas. Et si possible tendant vers la perfection car il prévoyait d’étaler ses fabrications sanglantes sur trois volumes. Pas de jachère en productivité littéraire.Et que ca se vendrait bien.
Devenir la poule aux œuvres d’or, ce n’était plus du tout son programme. Marre des ruelles sombres, des gourbis puants, des petites jeunes à ficeler sur une chaise avant d’en tirer de subtiles escalopes. Marre des mémés incapables de retrouver leur dentier pour lui lâcher la planque aux économies. Ras le bol des règlements de compte au fond des bars poisseux, ras le bol des whiskys frelatés.
Il ne rêvait plus que de grands verres de limonade, de petit déjeuner au lit et d’un petit chien pas trop hargneux. La soi-disant future victime ne serait pas la prochaine.
Elle possédait déjà le petit chien qui vint lui faire la fête dès leur première rencontre. Sinon, une authentique Taillefine, pas un yaourt traficoté, des yeux et des pieds de biche. L’ancienne victime s’en allait. Elle venait juste de rompre les amarres familiales et s’apprêtait à traverser le lac à la rame. De l’autre côté, vierge, la forêt accueillerait l’édification d’une grande cabane dans une clairière pour demain.
Deux mains, il les avait. Le tout était d’éviter qu’elles retombent entre celles de n’importe quelle scribouilleur!
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie…
Chris venait de prendre sa ligne de coke espérant y puiser des idées plus sulfureuses, car là il bloquait. Son héros était enfermé et il fallait qu’il trouve le moyen de l’en sortir. Pas de titre encore à son histoire et pourtant se profiler dans sa tête « Piège Infernal ». Il buvait goulûment son litre d’eau à même la bouteille. Son esprit s’énervait et il raya du bout de sa plume en or les 3 derniers mots avec une telle violence qu’il fit un trou dans le papier. L’eau ayant fait son oeuvre il dû partir soulager sa vessie.
Joseph du fond de sa prison du Mexique était certain que les autorités se rendraient compte de leur erreur. Voilà 9 jours qu’il croupissait dans sa cellule avec une gamelle de haricots rouges et 1l d’eau au quotidien. Il faisait plus de 35° dans ce carré sale, malodorant qui ne comportait qu’une paillasse à même le sol et un seau. Son tee-shirt sans manche était trempé. De grosses gouttes de sueur coulaient le long de ses joues. D’habitude les romanciers ne le laissaient pas aussi longtemps dans un endroit si peu recommandable.
Alors qu’il réfléchissait, un froissement tonitruant empli l’espace et un froid glacial s’infiltra. Sur le mur d’en face, un trou se formait sous un bruit insupportable. Puis plus rien. Interdit il ne chercha pas à comprendre, vida son seau dans un coin, le retourna et monta dessus pour atteindre cette ouverture. qui était au niveau de ses épaules. Il s’appuya sur les rebords et se hissa, passa d’abord sa tête, s’accrocha à une grosse plume humide qui lui salit les mains d’encre bleue, glissa un genou et dans un dernier effort se retrouva sur une feuille noircie de mots. Il sauta sur une chaise puis sur le sol, et tout à coup se sentit grandir, passant de 10 cm à 1m75.
Le froid venait d’une fenêtre ouverte. Il ne se fit pas prier pour l’escalader et prendre la poudre d’escampette malgré la température glaciale. Dehors la neige tombait abondamment, Joseph croisa ses bras en les frappant avec ses mains et pensa qu’il avait échappé de peu à être le héros de Andersen quand celui-ci a fini par choisir une petite fille pour son histoire d’allumettes. Il a préféré être le docteur Fergusson lorsque Jules a écrit ses 5 semaines en ballon, malgré la présence des sauvages, la moiteur lui convenait mieux.
Mais là, maintenant, dans ce froid cuisant il avait besoin de chaleur. Il se mit à courir alors que son torse devenait rouge sous son Marcel. Ses sandales ne convenaient pas à ce climat.
Il se dirigeait vers un square lorsqu’il entendit quelqu’un derrière lui, grognant d’une voix de baryton
– « oh oh oh »
il se retourna pour découvrir un gros bonhomme tout en rouge avec une grande barbe blanche.
– « Voilà un jeune monsieur bien mal attifé »
– « Je ne sais pas comment je suis arrivé là, mais j’ai froid »
– « Ah ah ah, je me doute. Rassure-toi, j’ai tout ce qu’il faut dans ma hotte » dit le père Noël en lui tendant une boite pleine de vêtements et de chaussures.
Joseph choisit un pantalon de velours brun, un pull rouge, un blouson d’aviateur avec une chapka et des bottes, sans oublier une paire de gants. Il sourit tandis que le vieil homme lui demanda
– « Sais-tu quel jour nous sommes? »
– « Non »
– « Le 24 décembre, ça te dit quelque chose? »
– « Oui vaguement »
– « Veux-tu m’aider? » en l’invitant à s’asseoir dans un traineau immense, chargé de jolis paquets enrubannés
– « Oui je n’ai rien à faire »
– « Nous allons ce soir, livrer les cadeaux aux enfants. Voilà la liste » en lui tendant un gros rouleau de parchemin
– « Tu es mon nouvel elfe » alors que Joseph sentit ses oreilles grandir.
Après s’être soulagé, Chris revint à sa table de travail. Afin d’aider au mieux son imagination, lui vient l’idée de relire tout son manuscrit pour se replonger dans les détails de son histoire afin d’en dérouler la suite…
Sa surprise fut immense de découvrir son titre : La Magie de Noël « suite de Piège Infernal »…..
Mes exercices sont des accélérateurs de particules imaginatives. Ils excitent l'inventivité et donnent l’occasion d’effectuer un sprint mental. Profitez-en pour pratiquer une écriture indisciplinée.
Ces échauffements très créatifs vous préparent à toutes sortes de marathons : écrire des fictions : nouvelles, romans, séries, etc.
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie d’une héroïne de roman érotique. Les meurtres commis par ces «Bonnie and Clyde» de la littérature terrorisent les écrivains en phase de procrastination. En effet, ces deux créatures de la nuit aime voler l’inspiration des créateurs en mal de motivation. Devant la télévision, devant Netflix ou en train de se manger un hamburger en regardant son fil d’actualité – le public écrivain peut se trouver à tout moment vider de sa substance créative.
Le présentateur tv remet en place sa cravate, il se tourne vers l’invitée du plateau :
— Vous qui êtes une spécialiste de la procrastination, que pensez vous de ces fuites de personnages ?
La spécialiste, en émérite intellectuelle répond du tac au tac :
— Je pense bien entendu que la faute n’est pas à rejeter sur les personnages, mais bien sur les créateurs paresseux…
Candy Beautiful éteignit la télé, et se carra dans le canapé. Enfin, la jolie héroïne du top Harlequin reprendrait sa revanche sur la critique injuste de ces écrivaillons narcissiques ! Les gens avaient honte de la lire. Ils se cachaient derrières les étagères des bibliothèques ou mettait sa vie sur une liseuse pour qu’un voisin trop curieux ne remarquât pas son existence. Quand elle avait quitté l’ordinateur en veille de sa maîtresse, l’héroïne de romance ignorait encore qu’elle trouverait mieux que le grand amour – la reconnaissance. Présents au journal tv, les deux compères nés du papier devenaient des stars internationales. Plus personne ne les surnommeraient héros de littérature de gare, et ceux qui oseraient s’en mordraient amèrement la plume.
Jeff le boucher apparut à l’embrasure de la porte dans un costume trois pièces qu’il avait piqué à un Goncourt négligeant. Le tueur d’écrivain parada dans le salon :
— T’en dis quoi ? Héhé, demanda-t-il en faisant un moon walk devant le poste de télévision. J’ai égorgé ce vieux biquet dans la baignoire… Mes fringues étaient couvertes de sang, alors je me suis dis : « Jeffy pourquoi tu changerais pas de style ?». Va savoir pourquoi, mon créateur m’a habillé d’un vieux jean tâché et d’un tee-shirt puant. Aucun goût. J’ai trouvé le costume dans l’armoire de cet auteur à succès, je dois dire que je sens des métaphores me pousser sur le cocotier avec toute cette classe.
Candy ricana :
— Bof, je préférais avant. Dans mes histoires les mecs sont toujours habillés comme des mannequins milliardaires, ça me changeait de sortir avec un prolétaire pour une fois.
Son acolyte plongea dans le canapé, la mine assombrie :
— Tu voudrais que je mette un gilet jaune, lady ? Je t’explique quelques trucs. Tu vois, mon écrivain pensait que j’étais un personnage bien sage, conçu avec l’unique désir de tuer le plus d’innocents possibles. Alors qu’en réalité, j’étais là, les yeux ouverts sur le plan du roman… Il venait de trouver sa fin. Et tu sais ce que j’ai vu ?
— Non, dis moi.
— J’ai vu ma mort. J’ai pété un câble. Flûte ! Le flic allait encore s’en sortir avec tous les honneurs, et moi «Le boucher», allait crever en sautant du toit d’un parking comme une faute d’orthographe dans les mains d’un correcteur… Ce con est parti aux chiottes, à force de se nourrir de café ces bêtes là pissent tout le temps, décrivit Jeff en piochant dans le paquet de chips que tenait Candy. J’ai quitté le chemin de la dernière ligne, roulé sur des points de suspensions et sauté dans le vide de la page blanche… Vla ! En un rien de temps, j’étais sorti de pc comme un marmot des cuisses de sa mère.
Candy l’embrassa sur la joue :
— Tu es un héros, Jeffy ! N’en doute jamais.
Elle sauta, prit la main du tueur et essuya une chips au coin de sa lèvre :
— Je propose que le prochain coup soit le plus grand coup de l’histoire du terrorisme littéraire, ricana Candy.
— A quoi tu penses ?
Les yeux révulsés de Jeff s’illuminèrent d’une étincelle de jouissance. Candy se pencha sur lui, le sourire aux lèvres. Elle murmura à son oreille :
— Nous allons aller au salon du livres de Paris, dit-elle en tapant des mains.
— Et ? J’ai pas envie de faire la queue pour avoir un autographe, moi.
Candy haussa un sourcil :
— Je parlais pas de faire la queue, gros bêta ! Je parlais de réveiller tous les personnages de romans du salon, que nous soyons enfin libres de vivre dans le monde réel. Nous emprisonnerons ces écrivains cruels dans les pages de leurs propres romans, et jamais ils ne pourront en sortir. Ils pleureront des larmes d’encres, pendant que nous fêterons notre victoire au soleil, grisé par nos corps de chair et de sang.
Jeff hurla de rire, à s’en faire mal au ventre. Le lendemain matin, Les Bonny and Clyde de la littérature, les libérateurs des personnages rentrèrent dans le hall du salon du livre. Ils ne purent retenir leur joie à la vue des visages effrayés du public, car leurs yeux argentés trahissaient un pouvoir qu’aucun humain ne possédait – celui de voler l’imagination, de détruire les étincelles d’inspiration. La foule commença à former une vague de têtes hurlante. Candy et Jeff avancèrent : Jeff dans son costume de Goncourt et Candy dans un gilet jaune flambant neuf :
— Ces idiots veulent nous combattre, regarde, montra Jeff.
Une ligne d’écrivains se serraient les coudes face aux personnages en fuite. La bataille commença : les stylos bic étaient sortis des poches, les ordinateurs sur les genoux. Ils étaient prêt à écrire, prêt à créer de toute leur force.
Face à cette barrière littéraire, les deux personnages n’hésitèrent pas un instant. Ils se jetèrent dans la foule pour aspirer l’imagination des auteurs. Seulement, le pouvoir des créateur était trop puissant. Face à un seul écrivain, on pouvait réussir les doigts dans le nez, mais les imaginations de ces guerriers palpitaient comme un gigantesque carotide. Jeff et Candy poussèrent en choeur un cri de guerre que les héros emprisonnés n’oublieraient jamais :
— Libérons les personnages !
Aurait été vu en compagnie d’une hyène
Hystérique
Yeux
Éloquence
Nostradamus
Espiègle
Le héros d’un roman noir en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était au toilette. Le fuyard aurait été vu en compagnie d’un chien de loup hurlant des obscénités à faire rougir l’auteur.
Il fallait bien qu’il se soulage mince alors…pourquoi n’avait’il pas fermé sa page! La colère et la détresse se muèrent en féroce envie de tordre le cou à ces fonctions dépravantes mais si nécessaire.
Un loup!
que venait faire un loup dans son roman?
Pourquoi donc son héros si fort, si viril, si presque parfait en tout point se croyait’il obligé d’intégré dans le roman la patte d’un loup?
Ou alors…le loup avait flairé une piste et invité le héros à le suivre afin de l’aiguillé sur la piste du tueur sanglant? Oui, cela se pourrait bien. Donc!
La narration du roman devait changé de voie, prendre des raccourcis n’était plus valable…pour ancrée une histoire dans l’imagination des futurs acheteurs, il fallait créé ce qu’on appel le suspense.
L’auteur suivit avec ses mots son héros aidé d’un chien de loup gris
qui bien que féroce gardait un oeil froid mais attentif sur le héros à bout de souffle.
Mordicus,ils vont ou comme ça se plaignit l’auteur…mes mots ont bien du mal à les suivre, la trame de l’histoire va se perdre s’ils continuent à courir ainsi…
Perdre du temps à dire que: » le héros et le chien de loup courraient à en perdre haleine ne satisfaisait pas l’auteur.
Reprenant du poil de la bête,il recadra ses complices de roman. Bien que fort mécontent, ils acceptèrent et expliquèrent que le pervers n’était plus l’homme au chapeau percé…non…mais la femme au regard ombré d’ambre…
celle qui se pavanait presque nue,qui dansait lascivement mettant en émoi la communauté mâle. Elle trouvait ainsi ses proies et le pauvre mec croyant avoir gagné le gros lot, se retrouvait vidé de son précieux sang.
Le chien de loup avait reniflé et trouvé l’endroit ou se reposait cette croqueuse,buveuse d’hommes. Il fallait faire vite afin de la surprendre dans son sommeil…le temps jouait contre le héros…la vitesse d’action ,la détermination serrait son avantage.
L’auteur haletant à son tour cravaché sur son ordinateur,les mots se mélangeant parfois le rendant presque fou, ses mains n’étaient pas assez rapide pour tout écrire,il avait perdu de vue que sa raison commençait à filer. Les heures passant, le travail le harassant , le manque de sommeil, de boissons, de nourritures, le mirent à deux doigts d’un burn-out.
Il venait de clore son cinquantième chapitre quant un bruit,un souffle de vent tiède lui caressant le cou , le fit se dresser. Trop tard…la fin venait d’être annoncé.
Sur une idée de Pascal.P
y-l.)
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie … de l’homme invisible.
Certaines mauvaises langues prétendent que c’était Miss Marple.
L’écrivain maintient que cela est impossible car son jeune et fougueux héros ne fréquente absolument pas de détective ayant l’âge de sa grand-mère.
Les lecteurs téléphonent, envoyent des mails, des SMS.
Tantôt le héros à été vu en compagnie de Catwoman, tantôt de Madame Bovary ou de Bridget Jones ou de Scarlett O’Hara d’après les femmes.
Les hommes quand à eux disent l’avoir vu en compagnie de Corto Maltèse, Spiderman et même de Tintin !
L’imagination des gens se déchaine et une hystérie collective est à craindre.
C’est la valse des héros du Concombre Masqué à la fée Mélusine !
L’écrivain balaye tous ces radotages d’un coup de main, d’après lui il s’agirait plutôt de Nola Céspedes qui aurait pu faire sortir son héros d’entre deux pages.
Pourquoi Nola ce demandent les journalistes avides de sensations ?
L’auteur laisse planer le mystère.
Alors on dissèque la vie de Nola Céspedes, le livre s’arrache dans les librairies et sur le net, des groupes de lecture se forment, des discussions passionnés ont lieu dans les ateliers d’écriture, bref, de fil en aiguille le héros fuyard et la donzelle deviennent peu à peu les nouvelles stars dans les demeures des gens.
Le hic dans tout ça, c’est que le jeune héro fuyard n’est pas encore connu par les lecteurs étant donné que le livre est en cours de rédaction.
Qui est il ? que fait il ? On sait maintenant qu’il est jeune et fougueux d’après les dires de l’écrivain.
Les jours et les mois passent comme d’habitude l’engouement des gens s’atténue, puis on oublie et on passe a autre chose, sauf l’auteur.
C’est un jour d’automne, pluvieux et gris.
Une longue file de gens fébriles devant une librairie animent le trottoir.
C’est le jour J !
Tout le monde à retrouvé la mémoire.
Ha oui ! ce fameux fugueur, héros de roman noir est à l’affiche, ça y es le livre est en vente aujourd’hui et après la lecture du premier chapitre, l’auteur dédicacera les exemplaires.
Les paris vont à nouveau bon train.
Alors ? Et alors ? … Zoro, heu non !
L’auteur, petit sourire aux lèvres, regarde d’un œil amusé son auditoire.
« Alors ? Hé bien, mon héros voulait absolument se familiariser avec « l’Art de la fugue » avant que je ne termine son histoire. Il était donc en compagnie de Pat, ou si vous préférer, Patrick, qui pris quelques libertés et quittât lui aussi son histoire afin d’initier mon héros, et oui, j’ai cru un temps qu’il était en compagnie de Nola, mais je m’étais trompé.
A vous maintenant de découvrir mon héros, vous verrez, le jeune homme vous racontera lui-même toute cette épopée, c’est dans le roman. »
Ce que l’écrivain ne révéla jamais, c’était que toute cette mise en scène avait été organisée avec l’accord de l’auteur de « l’Art de la fugue » afin que non seulement son héros puisse vivre un moment bien à lui mais c’était également une bonne publicité pour son livre. Par contre, l’auteur avait vraiment besoin d’aller aux toilettes !
(Intérieur appartement urbain classique. Bureau sobre. Ordi allumé. Page Word vierge)
Pedro, héros improbable d’une tentative désespérée de l’auteuze inoubliable de « La Samba des Iguanodons », de pondre un roman de plus de deux pages, profitant de l’absence de ladite autrice, partie verser son obole à Vespasien, sauta à pieds joints du manuscrit vierge en compagnie de son adjoint Kenzo.
Notre ex-shérif d’El Bordelo et son compère se retrouvèrent dans le paysage délicieusement désertique d’Anderlizona, contrée merveilleuse où tout arrive, l’improbable parfois, et l’impossible toujours.
– Dieu, que l’Anderlizona me manquait, Kenzo !
– Quand même vache de l’abandonner alors qu’elle allait s’y remettre, la pauvre…
– Valait mieux. C’est pas demain qu’elle retrouvera le style concis, incisif, compact qui a fait sa gloire…. T’as vu le début entortillé de la première phrase ?
– Oui ben, c’était la contraintre de départ pour…
– Depuis quand Cirroco a eu besoin d’une « contraintre » de départ, hein ?
– …en parlant de départ, justement..
– Direction le saloon le plus proche, tout simplement.
(Intérieur d’un saloon atypique d’Anderlizona-Ouest, inconnu de nos deux voyageurs, d’où leur air touriste égaré on ne sait où)
– Pas mal votre Saloon ! Et la moquette, un vrai tapis d’orient !
-En fait, c’est de l’herbe.
-Mince ! Mais comment peut-elle à ce point ressembler à…
-Suffit d’y déposer un morceau d’étoffe de votre choix, et le tour est joué : mimétisme. Elle se nourrit de caméléons, vous voyez ?
-De l’herbe carnivore ? (Pedro saute sur une table)
-Uniquement les caméléons. Seules ces bestioles sont friandes de cette herbe, et vice-versa : et c’est toujours la moquette qui gagne.
-A ce rythme, il n’y aura bientôt plus de caméléons.
-Elle ne mange que les mâles. Il suffit d’un pour fertiliser 50 femelles. Mais on n’a jamais vu l’inverse.
-Je vois. (Inspectant la décoration murale) Et, dites-moi, qu’est-ce que vous faites avec ces arbalètes ?
-Faut bien donner une chance aux sorciers faiseurs de pluie.
-Pardon ?
-De la pluie ? A El Bordelo ? Vous n’y pensez-pas : c’est le plat pays sur 100.000 hectares. Une averse, et l’Anderlizona-Ouest se transforme en Lac Victoria. A quoi ça ressemblerait, le Désert sous l’eau ?
-L’eau doit forcément s’infiltrer, non ? Comme à Anderlizona-Est..
-Ici rien ne s’infiltre. Après 50 cm, c’est 100% basalte. Y a une nappe aquifère coincée entre le sol et le basalte. Un peu de rosée et ça déborde.
-Dingue.
-C’est ce qui arrive dès qu’un explorateur assoiffé creuse un puits dans ce pays.
On a horreur des explorateurs et des faiseurs de pluie. On leur fait la chasse.
-Mais pourquoi des arbalètes ?
-Question de fair-play, monsieur. On leur donne une chance. On n’est pas des sauvages.
– Shérif, je vois Cirroco qui a rouvert Word !
(Ensemble) -On se taille !
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes pour la quatorzième fois de la matinée.
Le fuyard aurait été vu en compagnie de la petite nouvelle, à la ravissante académie, qui le traîna dans la Bibliothèque Rose. Rafraîchissant certes, les premiers temps mais le verbiage puéril de la naïve et douce liseuse le lassa rapidement. Fin de la romance.
Il décida de changer de registre et jeta son dévolu sur une de ces dames au chapeau vert garni d’une plume acerbe. Elles le menèrent dans la maison la plus lugubre de la rue la plus morne de la ville la plus sinistre de la région la plus triste de France : Saint-Omer qu’elles avaient rebaptisée Saint-Amer et où il subit de pointes épiques et sarcastiques. Après le miel le fiel. Fin de la ballade
Il prit la fuite semble-t-il dans un taxi mauve pour gagner la gare où il s’embarqua nuitamment dans le Train bleu, d’un beau bleu cérébral. Il y rencontra la Dame en rose, une madone des sleepings qui avait tendance à prendre tout au pied de la lettre et faisait de la moindre saynète tout un drame. Fin de la tragi-comédie.
Par la suite il se laissa séduire par un poète maudit, fiévreux et échevelé qui ne produisait que rimes pauvres, vers blancs et voyelles colorées. Celui-ci, se révéla un versificateur sans rime ni raison, un satire de surcroît, un rêveur soporifique, un véritable conte à dormir debout. Fin de la parodie
Puis il tenta carrière en politique : distribuer des tracts, rédiger des allocutions, prononcer des discours, asséner sentences et slogans pour un rouge insoumis et une bleu marine excentrique. Mais pris en étau le rouge et le noir il n’eut jamais voix au chapitre. Fin de la farce
Cette virée dans la littérature lui en avait voir de toutes les couleurs. La polychromie le fatiguait et l’ennuyait. Il décida alors de revenir dans son roman noir retrouver son auteur, ses diarrhées chroniques et ses troubles urinaires.
Hélas ! Il le trouva, assis à son bureau, incapable de mettre noir sur blanc ses idées noires. A broyer du noir avec l’angoisse de la page blanche. Il lui en faudra des nuits blanches et des tasses de café noir avant de lire le mot « Fin ».
Excellent!
J’aime cette balade littéraire, un régal!
Rysame
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie d’un cambrioleur au moment où tous les deux s’enfuyaient de la maison de l’auteur.
Madame Michu est formelle : elle a vu une personne seule entrer dans la maison et deux personnes en ressortir presque aussitôt avec une sacoche.
Bien entendu, l’auteur a porté plainte pour vol à cause de la disparition de son manuscrit, mais comme c’était le seul objet volé, la police et les assurances se sont désintéressées de l’affaire.
L’éditeur était furieux car il avait annoncé la parution imminente du douzième épisode des enquêtes de l’inspecteur Bourik. Il a donné 24 heures à l’auteur des onze épisodes précédents pour retrouver le manuscrit demandé, faute de quoi le contrat sera rompu et l’auteur ne touchera plus rien. Et il devra s’estimer heureux de ne pas être poursuivi devant les tribunaux.
L’éditeur a décidé de repêcher un texte parmi les nombreux manuscrits qu’il avait refusés, et demandé à un nègre de le maquiller pour en faire la douzième enquête de l’inspecteur Bourik.
La dernière, celle qui a été publiée par l’éditeur sous son propre nom.
C’était son premier roman. Et aussi son dernier, car il a été assassiné peu après.
On n’a jamais retrouvé l’auteur des onze épisodes précédents, car l’inspecteur chargé de l’enquête n’avait pas le talent de l’inspecteur Bourik. Ni de l’auteur de ses onze premières aventures.
Le voleur a détruit le manuscrit, mais pas son héros qui lui rappelle chaque nuit que sa tentative de chantage a foiré et qu’il a été la cause d’un assassinat. De plus, il est bien placé sur la liste des prochaines victimes.
Encore heureux que Madame Michu n’ait pas été capable de le reconnaître.
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie d’un éclair d’idées. Tout de suite se fût le coup foudre.
Depuis 10 tomes, il subissait sous la mine aiguisée du stylo de son auteur, le caractère irascible d’un vieil inspecteur de police à la morale inflexible, en proie à des démons diaboliques, enquêtant sur des affaires criminels les plus sordides. Il avait tenté quelque fois de s’échapper mais que devenait-il sans son auteur ? Rien. Il n’existait plus. Aussitôt sorti de la page, il s’évaporait dans un néant sans vie. Où le rien restait maître de tout. Où tout se transformait en rien. Pour devenir rien du tout. Alors tant à choisir il préférait rester dans quelque chose plutôt que d’être rien, et retournait aussitôt sec dans les lignes toutes tracées de vie de son auteur.
Mais cette fois là ce serait fini. Il avait trouvé une porte de sortie. L’éclair d’idée l’avait illuminé d’une idée simple, jolie et si facile à mettre en place. Pourquoi n’y avait il pas pensé tout seul …Peut être parce que justement il pensait trop souvent seul …Donc cette idée fabuleuse, lumineuse que les éclairs d’idées chuchotent à ceux qui savent les rencontrer était tout simplement d’accepter ce RIEN et d’en faire son atout. Ne pas le fuir, et plutôt l’apprivoiser. Ne pas chercher à être moins que rien. Ne pas penser qu’on est plus rien. Simplement rester là . Observer. Se calmer. Respirer. Et démarrer dans ce rien par un tout petit rien …Vous verrez ça change tout !
L’obscurité noie peu à peu la pièce, à l’exception du halo pâle d’une lampe de bureau qui surplombe la machine à écrire. Depuis le matin son cliquetis arythmique heurte le silence du bureau calfeutré.
La fatigue brouille les dernières phrases. Il est temps de marquer une pause pour fumer une cigarette à l’extérieur, sur le balcon.
Cinq étages en dessous, la grande ville bruit d’un grondement sourd, ponctué de coups de klaxon impétueux.
La nuit tombe vite en cette saison.
Avec elle vient l’heure des loups.
La liasse de papier noircie s’anime tout d’un coup. Est-ce le léger courant d’air que la porte du balcon mal fermée laisse filtrer dans la pièce ?
Une ombre se débat sur une feuille inscrite, s’extrait de son emprise, glisse furtivement jusqu’au sol. Elle atteint la porte, ondule dans l’escalier qu’elle dévale en silence, se faufile sans bruit sous la lourde entrée cochère de l’immeuble, et commence à longer les murs. Ombre chinoise dans une nuit violette, elle se fond dans les parois et gagne les quartiers les plus sombres, que de maigres réverbères trop distancés rendent aveugles aux honnêtes gens.
Fred l’égorgeur, car c’est lui, n’est encore qu’en deux dimensions, faute d’avoir laissé à son créateur le temps de donner de l’épaisseur à son personnage. Il n’en est pas moins redoutable. Il a remonté le col de son imperméable et abrite ses yeux de dément sous le large bord de son chapeau mou. Il se sait dans le quartier des femmes fragiles, et il guette une proie.
Il se tient caché dans l’encoignure d’un mur. Il remarque que le réverbère pourtant proche ne projette aucune ombre de sa silhouette. Normal ! Pense-t-il aussitôt, il l’a laissé là-bas, son double négatif, sur le bureau, histoire de donner le change à l’auteur, pas prêt, ricane-t-il, de se rendre compte de sa disparition ! Et puis ainsi, la chasse est grandement facilitée!
Une mignonne approche. Petite silhouette gracile aux cuisses alléchantes. Joli cou ma foi, et petit chapeau coquet, à voilette. Fausse pudeur. C’est ainsi qu’il les aime, tellement attendrissantes…
Il tâte dans sa poche le couteau à longue lame qui ne le quitte pas. Un rictus en constatant sa présence fidèle. Il la laisse s’approcher.
Quelques secondes encore.
Il bondit.
Hurlement vite étouffé de la victime. Il sort sa lame, s’apprête à porter le coup.
Et se rend compte qu’il n’a dans la main qu’un coupe papier en plastique.
Il peste, maudit son créateur et sa négligence des accessoires.
Il ne peut pourtant pas l’occire autrement qu’en l’égorgeant, sous peine de perdre son identité !
Il ne lui reste qu’à s’éclipser piteusement. Il longe les murs, honteux. Il se résigne à reprendre le chemin inverse et tente de regagner la pile de feuilles tapuscrites qu’il n’aurait jamais du quitter.
C’est la fin de sa carrière ! Il devra désormais se contenter d’une existence de papier.
Il escalade le bureau et s’apprête à retrouver sa place, mais voilà qu’il glisse entre deux feuilles vierges. Il est coincé. Tous ses efforts pour s’en extraire sont vains. Il panique mais les pages l’enserrent et l’engloutissent un peu plus à chaque mouvement.
Et pour comble de détresse, l’encre qui dessinait sa silhouette noire s’efface peu à peu ! Il n’était qu’une ébauche, tracée à l’encre sympathique !!! L’auteur qui hésitait entre roman noir et roman d’espionnage, avait mélangé les genres.
Et il finit par se noyer, dans les possibles infinis qu’offre toute page blanche.
Pendant ce temps, l’auteur, revenu de sa courte pause, a repris son histoire.
Il ne s’est rendu compte de rien.
L’ombre de Fred l’égorgeur, promue au rang de personnage, le remplace, et joue parfaitement le rôle.
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie d’un éclair d’idées. Tout de suite se fût le coup foudre.
Depuis 10 tomes, il subissait sous la mine aiguisée du stylo de son auteur, le caractère irascible d’un vieil inspecteur de police à la morale inflexible, en proie à des démons diaboliques, enquêtant sur des affaires criminels les plus sordides. Il avait tenté quelque fois de s’échapper mais que devenait-il sans son auteur ? Rien. Il n’existait plus. Aussitôt sorti de la page, il s’évaporait dans un néant sans vie. Où le rien restait maître de tout. Où tout se transformait en rien. Pour devenir rien du tout. Alors tant à choisir il préférait rester dans quelque chose plutôt que d’être rien, et retournait aussitôt sec dans les lignes toutes tracées de vie de son auteur.
Mais cette fois c’en était fini. L’éclair d’idée l’avait foudroyé d’une chose si simple, si jolie et si facile à mettre en place. Pourquoi n’y avait il pas pensé tout seul …Peut être parce que justement il pensait trop souvent seul …Donc cette idée fabuleuse, lumineuse que seuls les éclairs d’idées chuchotent à ceux qui savent les rencontrer était tout simplement d’accepter ce RIEN et d’en faire son atout. Ne pas le fuir, et plutôt l’apprivoiser. Ne pas chercher à être dans le moins que rien ou dans le plus rien. Simplement rester là . Observer. Se calmer. Respirer. Et démarrer par un tout petit rien …Vous verrez comme un petit rien ça change tout et c’est pas rien !
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie…
G. était en panne d’inspiration. De mémoire d’auteurs de romans noirs, on n’avait jamais vu cela,
C’était le néant. G. en perdait son humour, son humeur, son honneur.
Ses amis, compatissants, lui suggérèrent une escapade. Il obtempéra et prit un billet pour Bruxelles. Il admira la Grand Place et flâna au Grand Sablon où il fit le tour des Galeries. Il continua sa promenade vers le Vieux Sablon. Il tomba en arrêt devant la vitrine d’un antiquaire où trônait un fauteuil Voltaire. L’affaire fut vite conclue.
G. rentra chez lui, le fauteuil suivit.
Le soir-même, un rituel fut institué et appliqué dès le lendemain matin.
Un quart d’heure de méditation, assis sur le Voltaire, suivi d’un temps incertain sur le siège des commodités et finalement, écriture au bureau. Un programme qui avait du corps et qui s’avéra rentable.
L’inspiration était revenue et le temps passait. G. était désespérément heureux.
Le postérieur calé sur son fauteuil de cuir patiné, G. se pâmait tandis que sa plume courait, comme une folle. Jonglant avec les palindromes, les exhaustivités et autres figures de style. Académiques ou fantastiques. Les écrits ne laissaient personne indifférent.
Un matin d’hiver, G. se leva comme d’habitude et respecta son rituel. Méditation, défécation, satisfaction.
Guilleret, il revint à sa table et relut les premières pages de son roman. Un sourire béa illumina son visage. Il en était certain. Ce roman ferait un malheur !
La tête bouillonnant d’idées, il s’empara de sa plume, prêt à rédiger. Mais, traîtreusement , le syndrome de la page blanche et le virus de la gastro le frappèrent simultanément.
Plié en deux, G. courut jusqu’au cabinet. Et ce fut à ce moment très précis que son héros s’échappa. En compagnie … de qui ? de quoi ? Nul ne put le dire, vu la rapidité de la fuite.
Revenu sur à son bureau, G. reprit sa plume et rédigea.
Sans relâche.
Les mots se suivaient.
Les phrases s’enchaînaient.
Les pages s’empilaient.
Par dizaines.
Par centaines.
Le dernier feuillet fut enfin déposé en haut de la pile et G. n’avait toujours pas réalisé que son hEros avait disparu.
G. glissa avec le manuscrit dans une enveloppe avec un mot, sollicitant son avis et proposition de titre(s). D’une main tremblante, il rédigea l’adresse de son ami.
Trois jours plus tard, G. récupéra son manuscrit accompagné d’un billet :
« Cher Georges – Lipogramme parfait – Ton hEros s’étant fait la malle – te suggère comme titre « La disparition » – Raymond Q. »
© Clémence.
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu pourchassé par Miss Marple et Jules Maigret alertés par Patricia Highsmith . Elle leur avait fait le portrait du fugitif : un grand et mince jeune homme, aux cheveux noirs gominés, les lèvres charnues surmontées d’une moustache à la Salvador Dali, vêtu d’un smoking noir et d’une chemise blanche, soigneusement amidonnée,avec faux-col fermé par un nœud papillon, les mains manucurées, les pieds pris dans des chaussures au glaçage parfait. Il s’appelait Tom Ripley et avait déjà été la vedette de plusieurs de ses romans qui grâce à lui avaient été des best-sellers.
Alors pourquoi cette fuite ? Il aurait comme toujours le beau rôle . Elle avait su dès qu’elle lui avait donné naissance qu’il aurait des exigences, et que jamais il n’accepterait d’être un looser.
Paniquée, elle décida de téléphoner à Sean Connery pour lui demander ce qu’elle devait faire pour le faire revenir. Celui-ci éclata de rire dans ses oreilles et lui assura que Tom reprendrait son rôle dans quelques instants, qu’il était juste venu le consulter pour ressentir au mieux ses sentiments dans ce nouveau rôle.
Quelques jours après cet incident, Patricia Highsmith, après avoir noirci de son écriture penchée de nombreuses feuilles , écrivit le mot FIN, et donna ainsi naissance à un nouveau best seller.
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie d’une dame d’un certain âge dans le jardin public du centre-ville. Assis sur un banc ils semblaient papoter tranquillement tous les deux comme s’ils se connaissaient depuis toujours. Il faudrait interroger l’auteur, pour l’heure toujours enfermé dans ses toilettes, pour savoir si cette femme mystérieuse n’était pas une comparse du héros.
Voire une complice.
En effet, dès la première page du roman, on pouvait lire la description détaillée d’un crime particulièrement odieux, perpétré probablement par un homme. L’auteur restait vague à ce sujet. Il semblerait, selon les enquêteurs, que l’auteur avait juste eut le temps de faire intervenir sur la scène du crime, avant de se précipiter au bout du couloir, porte à droite, pour soulager un besoin pressant, il semblerait donc que l’assassin n’ait pas pu agir seul !
Gisèle réchauffait ses souvenirs au soleil revivifiant de ce bel après-midi de mai, assise sur « son » banc, comme elle en avait pris l’habitude depuis qu’elle étirait sa retraite vers la vieillesse.
Un jour habituel. Un jour d’une banalité affligeante s’il n’y avait eu cette feuille de papier trouvée à « sa » place en arrivant, et sur laquelle un nom, étrangement lisible au milieu d’un gribouillis indéchiffrable, éveilla son attention : Gaël Le Braz. Comme le nom du détective privé dont elle avait justement la dernière enquête dans son sac : le secret de Gaël.
– Je peux m’asseoir là ?
Gisèle, surprise, leva les yeux vers la voix qui l’interpellait. Un homme, jeune, surgit de nulle part, se tenait debout devant elle ! Bien fait de sa personne, ne put elle s’empêcher de penser en souriant.
– Eh bien, dites-moi, jeune homme, que vous arrive-t-il, si je peux me permettre de vous le demander ? Vous êtes tout pâle, votre visage est chiffonné comme une feuille de livre qu’on aurait arraché…
– Vous ne croyez pas si bien dire, m’dame, je crois bien que je me suis fourré dans une sale histoire…enfin, ce n’est pas de ma faute mais…
– Ah, garçon, ça commence bien mal ! c’est toujours de la faute des autres, c’est ça…
– C’est-à-dire que, voyez-vous, c’est mon père, enfin l’auteur de mes jours…
– La faute aux parents, bien sûr ! voyez-vous, jeune homme, vous avez quel âge, vingt-cinq, trente…
– Euh, je sais pas exactement m’dame,
– Il sait pas exactement son âge, voilà autre chose, dit la vieille dame, en insistant sur le exactement. Si vous êtes un enfant abandonné, c’est peut-être une circonstance atténuante…Mais, dans mon travail, j’en ai vu passer des hommes, des fiers qui vous snobaient, des timides qui n’osaient pas vous regarder, des pressés qui s’en allaient mal rhabillés, des saligauds, excusez du mot, oui des saligauds qui me prenaient pour leur bonne sans doute, des distraits qui oubliaient de refermer la cage de l’oiseau…
Gisèle se mit à rire en évoquant ce souvenir.
– Non, m’dame, vous pouvez bien vous moquer, et rire, mais je ne sais pas ! Cela fait presque quinze ans que mon créateur…
– Ton « Créateur », dis donc, mon p’tit gars, ton père c’est pas le Bon dieu quand même…
– …que mon créateur, reprit l’homme sans se troubler, me fait vivre une aventure par an environ…
– Peut-être, repris la vieille dame, mais ce que je voulais te dire, jeune homme, c’est que, aventurier ou pas, cela ne te donne pas le droit de raconter n’importe quoi…Je n’ai jamais aimé les menteurs, moi !
Il ne savait quoi répondre à son interlocutrice. Soumis au bon vouloir de l’auteur, il n’était pas maitre de son passé, encore moins de son avenir. En quoi, mais il ne le savait pas, il ne différait guère du commun des mortels. La seule chose qu’il savait, c’est que son avenir était aux toilettes, enfin, dans la tête de son inventeur, qui venait de suspendre son écriture pour satisfaire un besoin naturel…
La suite, il ne pouvait que l’imaginer. Et il ne pressentait rien de bon car, pour la première fois l’auteur l’avait réellement impliqué dans le meurtre, dès la première page. Comme s’il voulait en finir avec lui, écrire son dernier roman, passer à autre chose.
Il l’avait entendu dire cela. Au fond, se dit-il, le vrai meurtrier, c’est toujours l’auteur !
Alors, quand un coup de vent propice avait emporté la feuille volante – quelle heureuse habitude pour une fois d’utiliser du papier plutôt qu’un ordinateur – sur laquelle l’auteur venait, après moultes ratures, d’écrire son nom, comme sur un testament, il avait été soulagé.
Angoissé aussi : qui écrirait la suite ?
– Vous avez connu beaucoup d’hommes, alors ? demanda-t-il à la vieille dame assise à côté de lui.
Un vieux réflexe d’enquêteur, se sortir d’une situation embarrassante en posant une question indiscrète…
– Oui, connus, si on veut on peut dire cela, disons que de ma place, je pouvais les observer tout à loisir. Il y avait des habitués, ceux qui venaient presque chaque jour, et ceux-là, oui, je peux dire que je finissais par les connaitre…un peu !
Gisèle trouva soudain sympathique cet inconnu qui s’intéressait à sa vie.
– Et vous étiez où pour côtoyer tant d’hommes ? interrogea Gaël, machinalement.
– Porte des Lilas, sortie du Métro, répondit fièrement Gisèle, et même qu’au début de ma carrière il y avait encore le poinçonneur…le poinçonneur des Lilas, chantonna-t-elle doucement, il fait des trous, des p’tits trous, toujours des p’tits trous…
Le Poinçonneur des Lilas, pensa Gaël. Il n’avait jamais, dans aucune de ses aventures, entendu parler d’un sérial killer sadique qui achevait ses victimes en leur faisant plein de petits trous. L’auteur l’avait parfois mis sur la route de tueurs célèbres, comme Thierry Paulin, Guy Georges ou Francis Heaulme, pour ancrer ses récits dans la mémoire des lecteurs, comme il disait.
Mais jamais le Poinçonneur des Lilas
– Il se servait d’un petit couteau pour faire tous ces trous ? Question typique de détective, se dit Gaël !
– Gainsbourg ? Oh non, répondit Gisèle en riant, je crois bien qu’il se servait juste d’un stylo, ajouta-t-elle, malicieuse !
Un stylo, quelle horreur, quel sadique quand même, ce Gainsbourg ! pensa Gaël. Mais il était sûr, maintenant qu’il connaissait son nom, que l’auteur ne lui avait jamais fait croiser cet assassin.
Mais qu’est-ce que ça pouvait bien faire ?
Il y avait quelque chose qui ne collait pas. L’auteur, pressé d’aller aux toilettes, avait suspendu son récit en écrivant le nom de son héros. C’était ses derniers mots avant de s’absenter. Gaël le savait bien. Pas de jardin public, pas de banc, pas de vieille dame : rien de tout cela n’était écrit sur la feuille vagabonde.
Si ça n’allait pas plus loin, Gaël le savait, enfin il le ressentait plus qu’il le savait, il allait mourir là bêtement, dans ce parc, dans les mains, ou presque, d’une de ses lectrices. Une belle mort pour un héros de polar diraient les critiques.
Peut-être, mais Gaël ne voulait pas fini comme ça. Il se faisait un sang d’encre…
Là-bas, l’auteur, enfin soulagé, venait de reprendre place à son bureau. Il cherchait du regard sa dernière page écrite, ses derniers mots. Il avait bien réfléchi. Que peut faire d’autre un homme dans les WC ?
Non, il ne pouvait pas sacrifier ainsi son héros, les lecteurs, les lectrices surtout, ne lui pardonneraient pas. Ne trouvant pas ce qu’il cherchait sur son bureau – sans doute avait-il jeté le papier raturé dans sa corbeille – il prit une autre feuille et se remit à écrire, avec l’intention de modifier radicalement son histoire.
Dans le jardin, Gaël sentit un frémissement dans tout son corps. Il eut le sentiment de s’échapper à nouveau, comme happé par l’écriture, comme s’il réintégrait la rédaction de sa propre histoire.
Je vais disparaitre, pensa-t-il, me dissoudre dans l’air, pourrir comme une feuille morte.
– Et c’était quoi votre métier ? supplia le détective évanescent dans un souffle.
Gisèle le regarda attentivement, plissant ses yeux, comme s’il n’était plus vraiment là, mais avant de se plonger dans la lecture du roman qu’elle venait de sortir de son sac, elle lui répondit, enfin, il crut l’entendre murmurer…
– Moi, oh, moi, j’étais Dame Pipi, Métro Porte des Lilas, il y a bien longtemps….
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie…
– Salut voyelle !
L’ogre entra en la bousculant.
– C’est là qu’on sonne, dit-elle, en lui montrant la sonnette d’un geste autoritaire. Compris !
– Je ne suis pas sourd ma poulette, répondit-il, en indiquant son sac à dos, comme si cela justifiait son déséquilibre.
– Tu me parais trop familier. Je ne suis pas ta poulette. Nous ne sommes pas liés, rétorqua-t-elle d’un air furibond.
– Tu joues avec les mots, dit le géant.
– Je ne joue à rien du tout, d’entrée tu me fais sortir de mes gonds, dit la jeune fille.
– Celui-ci ou le second gond, dit le naze en ricanant et lui écrasant le pied gauche. Elle encaissa, ne dit mot mais intérieurement elle le maudit. Il m’a opprimé le cor, l’enflure, se dit-elle, il va me le payer.
– Pourquoi t’appelle-t-on la voyelle ? poursuivit le gros homme narquois.
– Ah ! Ben, c’est des… Heu ! C’est comme ça dit la demoiselle, en fait, je ne le sais pas.
– Dis donc, pendant qu’il est aux chiottes, on pourrait aller se balader, dit subitement l’infâme.
– Tu es trop mal élevé. Tu manques de relief. Ca ne fera pas l’affaire.
– Il m’en fait voir de toutes les couleurs. J’ai une banque à piller avant huit heures. J’ai un meurtre demain et je dois égorger une femme sans défense. Je ne m’en sortirai pas cette fois-ci, tu comprends !
– Quoi ? Mais c’est ton problème. Estime-toi heureux, tu es hébergé à l’oeil.
– Tu parles d’un site ! que des crimes, des revolvers, des truands. J’aurais de l’entraînement pour me recaser dans la politique. Tu comprends ?
– Je ne comprends rien du tout, sans la politique tu n’existerais pas non plus. Tu n’es vraiment qu’un gros nul… Mais qu’est-ce qu’il fait ? dit-elle en pensant à l’homme qui se terrait dans les toilettes. Il est constipé ou quoi !
– Quoi ? Qu’est-ce que t’as dit ? Pas plus que toi. J’ai un minimum d’intelligence, je comprends à demi-mots. Constipé ! Tu n’es pas docteur, dit l’individu vexé.
» Je ne sais plus si je dois le flinguer maintenant ou si c’est dans le chapitre suivant. A mon avis, ça ne doit pas changer trop l’histoire, autant le faire tout de suite. On verra bien, se dit-elle. »
De son coin d’aisance, le chroniqueur perçut le coup de feu et fut étonné de sa résonance. Il se retourna, ça ne venait pas de la cuvette. Il se précipita sur les lieux du crime. La voyelle tordue de rire « Hi ! Hi ! Hi ! » contemplait son oeuvre. Le méchant gisait dans son sang.
– Qu’est-ce que tu as fait ? dit l’écrivain. C’est trop tôt et puis tu ne dois intervenir que quand je te le dis. Tu ne prends aucune initiative. Ce n’est pas ton rôle.
– Mais il s’est appesanti sur mon cor ! dit-elle d’un air désolé.
– Eh ben ! C’était prévu, évidemment puisque c’est actuellement dans les moeurs. Mais tu ne dois pas le tuer pour ça. Comment vais-je arranger la fin maintenant qu’il est mort ?
Le dur à cuire commença à se relever. Le mort n’était pas mort.
– Je vous ai démasqué tous les deux, dit l’ancien mort, en colère.
– Du calme, dit le romancier embarrassé, tu seras mort cérébralement pendant deux ou trois chapitres, et puis à la fin tu profites de l’argent de la banque aux îles, mon canard.
A moitié rassuré, le ventripotent se rallongea, de nouveau mort.
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie de Oui-Oui, les deux compères se tenant par la main. L’auteur était fou furieux, son héros Max dit Max la menace, policier brutal et fin limier récidiverait dans son penchant pour Oui-Oui. Il l’avait pourtant prévenu que cette lubie finirait mal. Qu’ils s’aiment ces deux là, il n’en doutait pas mais quel couple ! Max n’arrivait qu’à grand peine à s’incruster dans la petite voiture de Oui-Oui. Rentrer dans sa maisonnette était impossible. Si seulement ils étaient discrets mais Max 1m92 pour 100 Kg Santiags et jean destroy fumait des cigares qui empestaient à une lieue.
Les éditeurs voyaient cette amitié d’un très mauvais œil. La moindre rumeur ferait chuter les ventes des deux séries. On imaginerait … des ébats condamnables. Max jurait ses grands dieux qu’il considérait le petit bonhomme comme un fils adoptif. Il disait que Oui-Oui le changeait de l’atmosphère glauque des romans noirs. Que cela lui rappelait son enfance … c’était si gentil et si mignon. Un vrai bain de fraîcheur.
L’auteur n’en pouvait plus, il était bloqué dans son intrigue, l’éditeur le harcelait en lui demandant la livraison du dixième volume dans les meilleurs délais. Comment annoncer que le héros était en excursion au pays des Oui-Oui. Imaginez San Antonio au pays des Bisounours ? Si seulement il réapparaissait vite, sans qu’on ait à prévenir la BDHE la Brigade des héros égarés. Sinon c’était le placard à jamais… ou l’archivage dans un cloud éloigné …
Chouette! Oui-oui! ha oui, falait y penser, mez suis bien amusée à lire votre histoire:)
Rysame
Le héros d’un roman noir en cours de rédaction se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes.
Le fuyard aurait été vu en compagnie du robot qui, la semaine passée, avait été victime d’un orage magnétique.
Duo improbable. Un commissaire dégingandé au regard chaleureux. Un robot déglingué au regard éteint.
Malgré leurs différences flagrantes, un flux attractif les enveloppa. Naquit une amitié immarcescible.
Le commissaire admirait ce robot, victime du conflit atomique entre vénusiens et martiens. Un des rares rescapés qui avait décidé de témoigner.
Cet humanoïde admirait ce héros, qui dans l’horreur des drames noirs de la vie, agitait le drapeau de la justice et de la paix.
D’un commun accord, ils décidèrent de rejoindre l’écrivain. Ils le trouvèrent, assis à son bureau. Page blanche. Sillons des larmes versées.
Le commissaire et le robot se faufilèrent dans l’esprit, le cœur et l’âme de l’auteur.
Pages noircies. Romans édités. Larmes séchées.
Il m’arrive fréquemment de m’isoler, de m’enfermer à double tour, d’être en quête d’un endroit insolite pour laisser le terreau fertile de mon imaginaire s’épanouir, tel un digne descendant de l’académie des Eveilleurs d’idées. Quoi de mieux qu’une cuvette de chiotte pour transcender son imaginaire ! Je dois vous avouer que mon petit coin de solitude n’est point conforme à celui de tout un chacun. En particulier le bidet, là où je repose mon petit mais néanmoins séduisant fessier. La cuvette est un modèle unique, autonettoyante, chauffante et thermo formée à mon assise. Chaque jour je customise ce trône aux couleurs de mon humeur, noir les jours d’orage, rouge les jours de passion, vert les jours de printemps, jaune les jours de lumière et léopard les jours de fureur, il m’arrive également de revêtir cette lunette en violet les jours d’hésitation, évidemment nul n’est parfait…
Ce jour où mon héros se fit la male, la cuvette était pourtant de couleur Léopard, ce devait être un jour exceptionnel, ce fut un jour maudit ! Comme quoi le léopard vous attrape toujours par surprise, nul ne sert de courir, il faut savoir user du bon camouflage. Soit ce jour-là, je m’apprêtais à une grande journée, j’allais écrire très certainement les meilleures pages de mon roman. Avant toute chose, il me fallait faire le vide, savourer le néant avant l’ébullition de mes neurones. Aussi, je me préparais instamment à ce rituel protocolaire, secret de fabrique® indéniable pour espérer un jour obtenir le prix Stephen King (merci cher lecteur de ne point divulguer cette information). Assis sur ma cuvette royale, yeux mi-clos, paumes de mains solidement accrochés aux genoux, mon âme s’en fut dans l’au-delà, je ne pensais rien, je ne parlais pas, je m’apprêtais simplement à déféquer avec lenteur, appréciant à sa juste mesure ce moment de méditation coprophile.
Alors même que je contraignais mes intestins à se contracter, tout ouïe dans l’attente du plouf final, prêt à exulter un soupir de jouissance, il y eut un bruit qui m’empêcha d’accomplir ma besogne. Là derrière la porte, à quelques pas de mon antre, j’entendis un rugissement ou peut être un miaulement ? Il faut dire que lorsqu’on est assis le cul sur une peau de léopard il est difficile de ne point penser à la manière d’un félin. Peu importe, toujours est-il que le cri fut terrible. On devait certainement assassiner ma femme, mon chien ou peut être mon coléoptère ? A la pensée de mon petit scarabée dorée qui n’avait rien demandé, je sus qu’il me fallait agir. Aussi sans plus attendre, je saisis la première arme qui me tombait sous la main, la brosse à chiotte en alliage chromée ferait l’affaire, puis pour être certain de prendre l’adversaire par surprise, j’usais du tissu d’ornement de la lunette des chiottes aux couleurs de léopard pour me confectionner un pagne. Ainsi attifé je ne manquerais pas de décontenancé mon assaillant. Je comptais à trois avant de sortir précipitamment en hurlant comme un félin. Un, deux et trois …
C’est à ce moment-là que ma femme hurla :
Chéri le repas est servi, tu continueras ton histoire après le diner…
Et voilà comment une fois encore le héros de mon futur roman noir, s’en fut terminé son scénario devant l’assiette non moins alléchante d’un magistral plat de cassoulet.
Néanmoins, Je fus certain que mon prochain séjour aux cabinets serait à l’origine d’un roman détonnant.
Pour le moins inattendu comme récit. J’aime bien les surprises!
WERTHER original
» Comment un homme peut-il atteindre la connaissance de soi ? Par la contemplation ? Certainement non, mais par l’action.
Essayez de faire votre devoir et vous trouverez pourquoi vous êtes fait.
Mais quel est votre devoir ?
Ce que demande l’heure »
( Goethe)
L’auteur de roman noir avait abandonné son manuscrit, le temps d’obéir à un besoin pressant. Quand il revint, son héros favori avait disparu! Notre écrivain était comme certains peintres qui ont plusieurs tableaux en route… laissant sécher l’un pour continuer l’autre sans perdre de peinture.
Les joueurs d’échecs aussi, suivent plusieurs parties à la fois.
En vue de Noël, il écrivait tant bien que mal un conte pour enfants mais ça ne venait pas.
Aussi, tout en attaquant un roman à l’eau de rose il reprenait un essai historique.
Mais depuis que le détective avait disparu, la veine était tarie, rien n’allait plus.
Pour la première fois, il ouvrit le roman d’un de ses confrères.
Le caractère du personnage se dessinait au fur et à mesure de ses succès et de ses échecs, il prenait de l’épaisseur.
Le livre n’avait pas eu de prix, mais était devenu un phénomène de société.
À l’instar du jeune Werther par spleen ou par attitude, des jeunes gens se suicidaient.
Pris d’inspiration, il décida de redistribuer les cartes.
Pour commencer, werther sera le Père Noël…
LURON’OURS🐹
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction,
se serait échappé.
Le fuyard aurait été vu en compagnie d’un manuel jaune et noir « Pour les nuls » afin de mener l’enquête sur sa part d’ombre.
Il découvre qu’il a une forte carrure et des traits durs, qu’il est corrompu, violent,
qu’il est dépendant aux drogues, à l’alcool, au jeu.
Il décide alors de s’échapper de cette image sombre, sale, inquiétante.
Comment a-t-il pu en arriver là? lui, né dans une bibliothèque verte,
bercé par la collection Pourpre et élevés aux albums Arc en ciel
Son pote Harlequin lui arrosait ses fleurs bleues à l’eau de rose
Il roulait en Rouge et Or Dauphine…
Mais on n’échappe pas à son genre.
Alors, le fuyard est revenu se reposer dans les étagères de ma chambre,
avec tous les héros de tous les romans
qui ont colorés le livre d’or de ma vie depuis que je lis.
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie d’une jolie blonde pulpeuse tout droit sortie d’un roman à l’eau de rose que tenait la lectrice assidue et fidèle de ce petit troquet où elle retrouvait l’auteur de roman noir pour qui elle nourrissait en secret des sentiments inavouables.
Elle arrivait toujours à la même heure car elle avait repéré les habitudes de l’auteur qui arrivait toujours à la même heure lui aussi. Elle avait même quitté son ancien travail qui de toute façon ne la faisait plus du tout fantasmer, pour vivre ce que jusqu’ici, elle ne vivait que par procuration, à travers tous ses romans.
L’auteur de roman noir n’était pas en reste, absorbé par son travail quotidien, il feignait ne pas voir les regards appuyés de la lectrice énamourée. Il avait bien saisi son petit manège et se délectait de la voir de jour en jour se flétrir de ne rien obtenir en retour. Du fond de la salle, assis dans son coin, il faisait depuis quelques semaines, partie du décor et il ne serait venu à l’esprit de personne de venir troubler la concentration de l’écrivain. Il n’hésitait d’ailleurs jamais à en rajouter par un froncement de sourcils appuyé ou un regard contrarié.
Puis un soir la page blanche le resta. Bloqué, ne sachant plus comment faire pour trouver un destin hors du commun à son personnage de roman noir, il leva la tête et laissa son esprit divaguer sur le roman à l’eau de rose. La couverture sur laquelle il ne pouvait distinguer le titre ne laissait pourtant aucun doute quant à la teneur de l’histoire. Les couleurs criardes et la photo que les doigts fins de la lectrice dissimulaient à peine laissait échapper la chevelure blonde d’une femme belle à tomber.
C’est alors que l’imagination de l’écrivain s’emballa et qu’il décida de s’emparer de la belle et de la « voler » à sa façon pour la coucher dans son roman. Il lança quelques œillades vers elle afin de mieux la décrire, ce que la lectrice perçut comme un signe d’encouragement, une preuve qu’elle était digne d’être regardée, qu’elle pouvait l’intéresser. Elle en éprouva une émotion intense qui la bouleversa même si ses brefs regards échangés croyait-elle le furent une seule et unique fois. L’espoir de revivre cet instant la galvanisa pour les jours suivants.
Lui décida que l’héroïne blonde et pulpeuse croiserait le chemin de son héros de roman noir et que leur rencontre donnerait lieu à des pages d’une cruauté certaine. Il écrit alors presque de façon frénétique plusieurs pages où il eut le temps succinctement de planter le décor et l’intrigue (il n’en était qu’à l’ébauche de son roman) mais cela suffit au personnage principal pour saisir toute l’horreur qui se préparait.
Au bord de la panique, le personnage du roman noir était tétanisé. Par chance, l’auteur prit d’une envie pressante posa son crayon en râlant et d’un pas pressant partit vers les toilettes. Il fallait agir vite il le savait.
N’écoutant que le courage dont l’auteur n’avait pas oublié de le doter, il s’extirpa des pages pour aller chercher la belle. Celle-ci abasourdie de croiser aussi rapidement un autre prince charmant le suivit sans réfléchir. Il fallait courir, partir, fuir pour vivre leur amour à l’ombre de ceux qui ne pouvaient pas comprendre. En moins de temps qu’il n’en fallait pour le dire, ils se retrouvèrent hors de la vue de la lectrice qui dut se pincer pour croire qu’elle n’avait pas rêver. Cela s’était passé si vite…
Quand l’auteur remonta des toilettes et qu’il vit le trou dans sa page, il chercha du regard qui pourrait lui expliquer ce qui venait de se passer. Mais tous les habitués et autres clients frigorifiés étaient absorbés dans leur discussion, leurs conversations, les mains autour de leur verre qui tintaient ou réchauffaient des gosiers asséchés.
Il pivota légèrement sur lui-même et se retrouva face au regard bleu océan de la lectrice qui s’était approchée, venant à sa rencontre. Hypnotisé par cette beauté dont il n’avait rien perçu par excès d’arrogance et de jugements hâtifs, il pouvait même sentir le souffle rapide qui s’échappait de sa bouche entrouverte.
Il vit sa main tenant le roman à l’eau de rose, ouvert, un trou au milieu de la page.
Elle parvint tant bien que mal à articuler quelques mots qui allaient enfin sceller leurs destins.
-j’ai quelque chose à vous dire mais je vous préviens, vous risquez de ne pas me croire.
-Asseyez-vous, j’ai tout mon temps. Vous prenez quelque chose ?
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes.
Le fuyard aurait été vu en compagnie d’une fillette de quatre ans, cheveux blonds, robe rouge, petit bonnet rouge sur la tête. Elle tenait une galette à la main qu’elle allait offrir à sa grand-mère, habitant non loin de là.
Alerte, alerte, enlèvement ….. je répète….
Le fuyard aurait été vu en compagnie d’une fillette de quatre ans, cheveux blonds, robe rouge, petit bonnet rouge sur la tête. Elle tenait une galette à la main qu’elle allait offrir à sa grand-mère, habitant non loin de là, 13 impasse du Bois-Démon.
Pour toute information, merci d’appeler le 666 66 66.
D’un doigt rageur, l’écrivain, tout juste sorti des WC et maintenant son pantalon le long de sa cuisse, éteignit l’écran de la télévision.
« Mais qu’est-ce qu’il lui prend à ce con ? » grommela-t-il rageusement.
« Et comment je vais le finir mon bouquin, moi, s’il s’est barré ce fumier et avec une gamine encore. Je ne vais tout de même pas réécrire ces trois-cent-quatre-vingt-huit pages en changeant de héros. Déjà que je suis en retard pour la livraison à l’éditeur ! non, non, non, cela ne se passera pas comme ça. Il me faut le retrouver mon tueur en série et vite encore, avant qu’il ne fasse des siennes. Une gamine ! et de quatre ans encore. La chasse va être impitoyable. Je dois le coincer avant les flics, moi, sinon je suis bon pour mettre ce bouquin là au feu ! »
Et tout en soliloquant, notre auteur se précipita sur le plan de la ville . « Voyons, voyons, impasse du Bois-Démon. Ah, voilà, j’y suis …. » Son doigt poilu arracha la page, puis il enfila sa défroque de loup-garou et sortit en grognant.
C’était une magnifique nuit de pleine lune.
PITIÉ gardez vos tonnes pour vous, vos commentaires pèsent déjà suffisamment lourd !
Commenter, critiquer est tellement plus facile qu’écrire …
Ce blog n’est pas fait pour que chacun ou chacune donne son point de vue et des conseils sur l’écriture et le style des personnes qui participent aux exercices. De quel droit, d’ailleurs ?
Seuls les commentaires positifs sont acceptés, je me charge du reste en répondant à chaque personne publiant un texte.
Il n’est pas question de polémiquer entre abonnés (es), seule la créativité littéraire importe, les sites les blogs où l’on peut pinailler et critiquer à tout va ne manquent pas.
Amicalement
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie d’une ravissante petite caniche grise, toilettée, pomponnée, manucurée, parfumée à loisir, collier doré à grelots, so chic !
Du moins, c’est ce qu’on lui a dit à son retour des toilettes quand il s’était enquis de son absence, s’il avait espéré de sa pause un quelconque soulagement, c’était râpé, il en ressortait au contraire avec un souci bien plus encombrant.
Le héros de son nouveau polar avait disparu, justement au moment qu’il avait choisi lui, pour s’absenter quelques minutes (enfin disons une bonne grosse demi heure de mots fléchés les fesses au froid de la cuvette.)
Arrêté pile à la page 100 de son manuscrit.
Il était si furax qu’il en parlait tout seul. Il n’osait pas dire tout haut qu’il était bien emm…. mais n’en pensait pas moins en examinant la situation. Ni envie, ni courage, aucune inspiration pour réécrire à zéro son roman en changeant de héros.
« Quel sale petit con ! Il avait bien choisi son moment. Comment j’allais faire moi maintenant. Continuer sans lui, ça n’aurait plus ni queue ni tête, personne ne s’y retrouverait. »
Foutre le camp en compagnie d’une caniche, franchement ! Tout ça pour aller parader dans le parc avec en laisse l’aimant d’une petite beauté. Il était bien connu qu’un bébé dans une poussette ou un joli toutou, rien de tel pour entamer des conversations qui, etc …
Ouais d’accord, c’était le printemps, mais quand même, lui aussi il aurait bien aimé laisser tomber son bouquin et aller profiter de cette saison émoustillante, respirer un bon coup, regarder éclater les bourgeons, écouter les oiseaux, enfin pour être honnête : draguer de la fraîcheur nouvelle.
Bien embêté, il se frottait le front et la barbe, cherchait la solution.
Elle accourut toute seule lorsqu’il entendit une cavalcade enfiler à toute pompe l’escalier de bois.
Il ouvrit sa porte, son WOUF WOUF chéri, revenu de son escapade lui donnait de frénétiques coups de langue :
Fugue pardonnée, page 101 à nous trois !
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie…
d’un agent de police. Il était venu chercher protection et accuser l’auteur de maltraitance.
– « moi je ne veux pas aller tuer Alfred le Borgne qui a trahi Armand le Petit, et je ne veux pas m’occuper de récupérer la liste des responsables du déraillement du train présidentiel du 2 septembre ».
– « ça me fait flipper cette mission… je risque ma peau…. et puis que voulez-vous, il y a méprise :
C’est pour ça qu’aujourd’hui
Je suis fatigué
C’est pour ça qu’aujourd’hui
Je voudrais crier :
Je ne suis pas un héros
Mes faux pas me collent à la peau
Faut pas croire ce que disent les journaux
Je ne suis pas un héros
Un héros… »
Et voilà la raison pour laquelle l’auteur a titré son œuvre :
ROMAN NOIR MARSEILLAIS INACHEVE.
Avis à la population !
Le héros d’un roman noir
À vous donner le cafard
Se serait échappé
Vite fait, bien fait,
Pendant que l’auteur était aux toilettes !
Le fuyard aurait été vu
Débraillé, ventru et barbu
En compagnie d’une certaine Babette
Celle-là même qu’il était censé empoisonner…
Entre eux l’histoire avait plutôt mal démarré
Une sombre affaire d’héritage
Qui durait depuis des pages et des pages
Que l’auteur avait goulûment concoctée
Et pour laquelle, tous les matins,
Il se frottait les mains
Ah aujourd’hui celui-là il va morfler
Et pour elle ça va mal se terminer.
Mais c’était sans compter sur notre héros fatigué
Qui en avait plus qu’assez d’être malmené
Et qui rêvait d’un autre cadre de vie
Avec amour, câlineries et fantaisie.
C’est ainsi que, profitant de ces quelques instants de répit,
Il prit la poudre d’escampette
Avec la douce Babette
Et qu’ils sont allés se réfugier,
Pour se mettre à l’abri,
Dans un petit recueil de poésies …
Votre texte original à vous, il est où ?
Pas de bol pour vous, Labrosse ce n’est pas un pseudo, c’est son nom.
A vous, on pourrait conseiller « du balai »
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie…
… de Rahan, le fils des âges farouches. L’homme préhistorique l’aurait rejoint dans un restaurant étoilé après avoir sauté d’une BD que le gamin avait laissé ouverte sur le lit avant de partir à l’école.
– J’ai les crocs. Magnons-nous pour commander, lança le colosse blond tout en jouant avec les griffes de son collier.
L’autre ne bougea pas d’un cil. Francis Coplan, l’agent FX18, n’était pas sorti des pages sombres de Paul Kenny pour se presser. Il quittait les rives d’un « Fleuve Noir » pour jouir durant un moment d’un long fleuve tranquille loin des directives du SDECE (Service de Documentation Extérieur et de Contre Espionnage) et des machinations de la guerre froide. Il comptait bien manger chaud, tranquille, en dégustant des plats inconnus de son époque et en devisant avec ce sympathique sauvage.
– On me regarde de travers ici, tu ne trouves pas Francis ?
– Normal, tu es à moitié nu. Tu les choques…
– Tu as peut-être raison, j’aurais dû mettre mon manteau en peau d’ours.
– Bof, je ne suis pas certain que ces bourgeois n’auraient pas été aussi effrayés.
Lorsque Coplan vit que le maître d’hôtel se nommait Boris, il ne put s’empêcher de se lever pour le palper de haut en bas, histoire de voir s’il ne cachait point une arme.
– Chasse le naturel, il revient au galop. L’habitude est une seconde nature. Se moqua Rahan.
– C’est donc des périphrases que de t’enseigner ton maître Jedi t’a ?
– Craô le sage n’était point chevalier Jedi, tu confonds.
– A oui, excuse-moi, toi tu es le MacGyver de la préhistoire, le héros écolos et moralisateur. Je confonds.
– Oh, ce n’est pas l’espion machiste et protecteur de la France Afrique qui va me donner des leçons.
– Eh, calme-toi garçon. On ne va pas se prendre la tête. On est là pour se changer les idées et profiter d’un peu de liberté. J’en ai marre moi de coucher avec des femmes superbes et de tuer des « rouges ».
– Et moi, qu’est-ce que je devrais dire. Je me gèle dans ces grottes humides et je ne suis jamais à l’abri de me faire surprendre par un « gorak » aux dents de sabre.
– Oui mais moi je dois parfois recourir à des tortures et ça me débecte. Là où il y a de la gégène, il n’y à pas de plaisir.
– Toi tu n’en peux plus des femmes alors que moi je dors seul près du feu, ce qui es bien pire.
– Tu te pleins, mais tu es né en Dertal, bien avant toutes ces guerres qui ont tué des millions d’homme…
– … toute ma famille a été décimée. Je suis le dernier de ma race. Alors je sais ce qu’est la folie des hommes.
– Si nous arrêtions de nous plaindre afin de déguster ce sorbet à l’azote liquide qui fume plus que mes gitanes. Il ne me reste plus beaucoup de temps. J’entends mon auteur qui ressort des toilettes. Il a finit d’écrire son chapitre sur les cabinets du ministère.
Rahan se pencha au-dessus de la composition, sortit son coutelas en ivoire et l’y trempa afin de goûter cette mystérieuse préparation.
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie de la femme de l’écrivain qui l’aurait suivi dans un taxi.
— Vous êtes sûrs ? demanda l’auteur aux passants de la rue Croix des Petits-Champs où se déroulait le dernier chapitre. Et ils sont partis dans quelle direction ?
— Comment savoir ? Vous étiez aux toilettes. Nous, on s’attendait à ce qu’il braque la Banque de France, vu comment hier il était armé, cagoulé et tout. Et puis ce matin, on n’a pas compris, il est arrivé en pyjama, des valises sous les yeux et il est resté là sans bouger.
— Puis vous êtes allé pisser, m’sieur.
— Ok ok ! L’heure est grave, il faut que j’appelle ma femme.
— Et nous, on fait quoi ?
— Rentrez chez vous et revenez demain matin à huit heures, comme d’habitude. J’espère que je leur aurai mis la main dessus.
Sans Alexandra, Fred n’en menait pas large, dans sa vie comme dans ses écrits. Il sauvegarda les apparences devant ses seconds rôles, quitta Word et la pièce à la recherche de son téléphone portable. Il était onze heures, Alexandra devait être à sa boutique de prêt-à-porter.
— Allo, Alex ? … Tu vas bien ? … Il m’a encore échappé. J’étais juste parti aux toil…
— Écoute Fred, c’est toi l’écrivain. Il va revenir tout seul, il a juste besoin que tu le lâches un peu, qu’il inspire dehors du bon air, pas celui renfermé de ton cerveau.
— Je ne comprends pas, Matt était prêt à faire le casse, l’inspecteur Angelo ne se doutait de rien, il venait de passer une nuit d’amour avec Alexia… Et ce matin, quand je suis descendu, tu avais fait tes valises, un taxi t’attendait devant la porte.
— Ouvre les yeux, Fred. Notre vie, c’est comme tes derniers romans, c’est devenu creux, à mourir d’ennui. Je ne sais quelle idée t’as eu, d’ailleurs, de m’intégrer dedans, comme si tu voulais te racheter une conduite. Et cet Angelo, t’as réussi à le rendre plus irascible que toi.
— Ah bon ? Tu le… Enfin tu m’trouves…
— Oh ! Et puis ce n’est plus important maintenant. Laisse-le filer ton Matt, il est au bout du rouleau. Il faut dire ce qui est… Tu ne le tiens plus. Normal que le personnage t’échappe.
— Mais tu aurais voulu quoi, que je l’attache ?
— Juste le rendre plus attachant, plus drôle, plus humain, déceler ses failles pour l’aider à relever la pente. Parce qu’en ce moment il ne va pas bien. L’état de maman empire, la boutique reste désespérément vide, il va avoir quarante ans dans une semaine et sa vie ne rime à rien d’autre que de braquer des banques et faire tourner des lessives, d’échapper aux flics ou au dépôt de bilan.
Si seulement tu avais prêté un tant soit peu attention à lui, il ne serait pas parti.
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie de la fiancée de l’écrivain.
Cette dernière, lasse de corriger cette prose qui lui donnait de fulgurants maux de tête et des frissons à chaque ligne qu’elle lisait, avait décidé de kidnapper le héros. Elle l’entraîna hors de la maison et tous deux, main dans la main, déambulaient le long d’une paisible rivière.
– Oh, ma douce ! murmura-t-il au comble de l’émotion, si tu savais comme j’en avais ma claque, depuis cinq volumes, d’espionner des Russes, de tuer des méchants, de me cacher dans des poubelles, de courir à perdre haleine pour sauver ma peau, d’être sans cesse blessé ou agonisant mais heureusement vite rétabli. Tu parles d’une vie ! Et dire que ça va durer comme ça à n’en plus finir. Je fais un tel tabac en librairie, qui l’eût cru ?
– C’est bien pour cette raison que j’ai décidé de t’enlever parce que moi aussi j’en ai assez de te voir souffrir de la sorte depuis le premier tome de tes aventures. Et puis, je dois t’avouer que tu me plais beaucoup. T’es vraiment beau gosse, tu sais ! Y a pas à dire, mon fiancé t’a bien campé. Rassure-toi, si je t’ai enlevé c’est que je pense faire de toi le héros d’un roman qui me trotte dans la tête. Tu verras, je vais bien te chouchouter. Tu vas adorer, je ne t’en dis pas plus.
Et c’est ainsi que notre héros se retrouva à se cacher dans des armoires, à sauter en petite tenue par des fenêtres, à s’entailler le corps sur le verre brisé, à se fouler les chevilles, à tenir un agenda de trente-six heures par jour, à ne plus dormir ni boire ni manger, à se ruiner en fleuriste et autres restos gastronomiques, à se tromper dans les prénoms de ses conquêtes et à vivre dans la hantise de se faire dégommer par un mari jaloux.
Las de cette vie de patachon, il décida de s’évader.
Aux dernières nouvelles notre héros se cacherait, bien à l’abri, dans une charmante comptine.
Le héros d’un roman noir en cours de rédaction,se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes.
Le fuyard aurait été vu en compagnie d’une vieille Anglaise au brushing étourdissant,maquillée comme une marionnette,vêtue d’un tailleur rose dragée à boutons dorés qu’il tenait par le bras,la couvant d’un regard tendre et possessif.
Lady Cartland en personne.Sa Barbara dont il souhaitait depuis toujours être un personnage.
Il était arrivé dans ce roman noir par inadvertance,après une longue période de chômage.Faute de réaliser son rêve d’eau de rose,il avait accepté d’être Maxence von Freeman, époux machiavélique de Dorothy qu’il maintenait sous sa coupe avec brio,en attendant de s’en débarrasser odieusement afin de profiter,sans scrupule aucun, de sa fortune.
Mais se voir malmener,humilier cette pauvre femme,jolie de surcroît,qui lui vouait une amour pur,espérant faire de lui le père de leurs futurs enfants,alors qu’il ourdissait dans son esprit malveillant les pires avanies destinées à gâcher la vie de cette innocente,il n’en pouvait plus,sachant le sort horrible que l’auteur destinait à Dorothy.
Chapitre sept:
» Maxence descendit pour le petit déjeuner en robe de chambre,son journal sous le bras,l’air sinistre.
Son épouse,les yeux rougis par une nuit de sévices moraux,abattue par tout ce qu’elle avait dû ouïr sans broncher de peur de déclencher quelque violence supplémentaire,lui jetât un regard soumis. Avec un geste de recul comme pour se protéger… »
Et là,ce fut trop.Le héros posa son journal, embrassât Dorothy ébahie sur le front en lui disant:
« Adieu,je ne veux plus être ce personnage,que ce type continue sans moi ».
Il s’évapora dans un nuage pour se retrouver sur un trottoir de Londres,devant un hôtel particulier de Chelsea,sans savoir comment,mais sachant où il était.
Il sonnât.
Un majordome guindé mais fort courtois vint ouvrir:
« Que Monsieur entre,l’on attendait Monsieur pour commencer le nouveau roman ».
🐀 UN HÉROS INDISCIPLINÉ.
Rien ne va ce matin. Je décide de coucher sur un papier mes idées aussi noires que l’encre de seiche. Sèche, je ne le suis pas mais mon héros, un petit malfrat, s’ingénie à me compliquer la vie.
Alors je réfléchis et j’en bave tout comme mon stylo qui dégouline en noir sur mon papier quadrillé.
C’est à ce moment là qu’ Alcido, le héros, s’est fait la malle. Ce saligaud s’est d’abord réfugié dans un coin de carreau de la feuille, en le narguant, puis a passé le seuil en le cassant.
Là, il a filé… filé tout droit sur le tracé de la marge, trait rouge du sang qu’il a sur les mains. Au loin je le distingue, il trace enjambant les flaques d’encre de ses bottes à clous.
Tout à coup, je le vois qui s’arrête net devant une parenthèse… Qu’est-ce qu’il mijote ? Il est là qui poireaute accroché à la ponctuation. Va-t-il l’ouvrir et disparaître à nouveau ?
Je m’interroge, attend-il quelqu’un ? Un acolyte ? Sa copine ? Combien seront-ils ? Deux ou trois ? C’est qu’il faut que je prépare moi ! S’il y en a plus, ça va devenir délicat de les faire rentrer tous dans mon roman et sur ma feuille qui ne va pas tarder à être noire de monde.
Tourner la page est exclu, il faut d’abord qu’il dégage de son piquet.
Je ne peux tout de même pas l’écraser avant qu’il accomplisse tous ses méfaits, si non à quoi servirait la police?
Je suis tombée sur un casse-pied qui me fait marcher.
Avec son chapeau en cuir, ses vêtements noirs et son Colt il est beau, il a fière allure. Il ne lui manque que la cape !
Que voulez-vous, je me pâme devant un mélo…
D’habitudes, j’aime mes héros, mais celui-la me déconcerte il est toujours là ou on ne l’attend pas.
J’entends des bruits, des bruits de sabots… C’est son cheval. Il saute dessus, me salut d’un coup de chapeau … S’est effacé dans une tache d’encre.
J’ai laissé partir Zorro…
Il m’aura défendu jusque dans mes idées noires.
Souris-Verte 🐀
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie de sa future victime. Enfin, c’est ce que croyait l’écrivain, en bord de prostate, secouant ses dernières gouttes d’inspiration.
Mais lui, le héros, le tueur de série noire en avait marre de la sueur des tueries noires. Il avait décidé de ranger les couteaux, les flingues et les cordelettes…et pour toujours. Ca ne lui était pas tombé dessus comme cela, tout d’un coup bas dans le plexus. Non c’était venu progressivement, marre de la routine et de l’esclavage. Le pondeur d’histoires sordides l’obligeait à des calculs tarabiscotés pour perpétrer un crime ayant de la gueule, chaque semaine, pleine lune ou pas. Et si possible tendant vers la perfection car il prévoyait d’étaler ses fabrications sanglantes sur trois volumes. Pas de jachère en productivité littéraire.Et que ca se vendrait bien.
Devenir la poule aux œuvres d’or, ce n’était plus du tout son programme. Marre des ruelles sombres, des gourbis puants, des petites jeunes à ficeler sur une chaise avant d’en tirer de subtiles escalopes. Marre des mémés incapables de retrouver leur dentier pour lui lâcher la planque aux économies. Ras le bol des règlements de compte au fond des bars poisseux, ras le bol des whiskys frelatés.
Il ne rêvait plus que de grands verres de limonade, de petit déjeuner au lit et d’un petit chien pas trop hargneux. La soi-disant future victime ne serait pas la prochaine.
Elle possédait déjà le petit chien qui vint lui faire la fête dès leur première rencontre. Sinon, une authentique Taillefine, pas un yaourt traficoté, des yeux et des pieds de biche. L’ancienne victime s’en allait. Elle venait juste de rompre les amarres familiales et s’apprêtait à traverser le lac à la rame. De l’autre côté, vierge, la forêt accueillerait l’édification d’une grande cabane dans une clairière pour demain.
Deux mains, il les avait. Le tout était d’éviter qu’elles retombent entre celles de n’importe quelle scribouilleur!
Le héros d’un roman noir, en cours de rédaction, se serait échappé pendant que l’auteur était aux toilettes. Le fuyard aurait été vu en compagnie…
Chris venait de prendre sa ligne de coke espérant y puiser des idées plus sulfureuses, car là il bloquait. Son héros était enfermé et il fallait qu’il trouve le moyen de l’en sortir. Pas de titre encore à son histoire et pourtant se profiler dans sa tête « Piège Infernal ». Il buvait goulûment son litre d’eau à même la bouteille. Son esprit s’énervait et il raya du bout de sa plume en or les 3 derniers mots avec une telle violence qu’il fit un trou dans le papier. L’eau ayant fait son oeuvre il dû partir soulager sa vessie.
Joseph du fond de sa prison du Mexique était certain que les autorités se rendraient compte de leur erreur. Voilà 9 jours qu’il croupissait dans sa cellule avec une gamelle de haricots rouges et 1l d’eau au quotidien. Il faisait plus de 35° dans ce carré sale, malodorant qui ne comportait qu’une paillasse à même le sol et un seau. Son tee-shirt sans manche était trempé. De grosses gouttes de sueur coulaient le long de ses joues. D’habitude les romanciers ne le laissaient pas aussi longtemps dans un endroit si peu recommandable.
Alors qu’il réfléchissait, un froissement tonitruant empli l’espace et un froid glacial s’infiltra. Sur le mur d’en face, un trou se formait sous un bruit insupportable. Puis plus rien. Interdit il ne chercha pas à comprendre, vida son seau dans un coin, le retourna et monta dessus pour atteindre cette ouverture. qui était au niveau de ses épaules. Il s’appuya sur les rebords et se hissa, passa d’abord sa tête, s’accrocha à une grosse plume humide qui lui salit les mains d’encre bleue, glissa un genou et dans un dernier effort se retrouva sur une feuille noircie de mots. Il sauta sur une chaise puis sur le sol, et tout à coup se sentit grandir, passant de 10 cm à 1m75.
Le froid venait d’une fenêtre ouverte. Il ne se fit pas prier pour l’escalader et prendre la poudre d’escampette malgré la température glaciale. Dehors la neige tombait abondamment, Joseph croisa ses bras en les frappant avec ses mains et pensa qu’il avait échappé de peu à être le héros de Andersen quand celui-ci a fini par choisir une petite fille pour son histoire d’allumettes. Il a préféré être le docteur Fergusson lorsque Jules a écrit ses 5 semaines en ballon, malgré la présence des sauvages, la moiteur lui convenait mieux.
Mais là, maintenant, dans ce froid cuisant il avait besoin de chaleur. Il se mit à courir alors que son torse devenait rouge sous son Marcel. Ses sandales ne convenaient pas à ce climat.
Il se dirigeait vers un square lorsqu’il entendit quelqu’un derrière lui, grognant d’une voix de baryton
– « oh oh oh »
il se retourna pour découvrir un gros bonhomme tout en rouge avec une grande barbe blanche.
– « Voilà un jeune monsieur bien mal attifé »
– « Je ne sais pas comment je suis arrivé là, mais j’ai froid »
– « Ah ah ah, je me doute. Rassure-toi, j’ai tout ce qu’il faut dans ma hotte » dit le père Noël en lui tendant une boite pleine de vêtements et de chaussures.
Joseph choisit un pantalon de velours brun, un pull rouge, un blouson d’aviateur avec une chapka et des bottes, sans oublier une paire de gants. Il sourit tandis que le vieil homme lui demanda
– « Sais-tu quel jour nous sommes? »
– « Non »
– « Le 24 décembre, ça te dit quelque chose? »
– « Oui vaguement »
– « Veux-tu m’aider? » en l’invitant à s’asseoir dans un traineau immense, chargé de jolis paquets enrubannés
– « Oui je n’ai rien à faire »
– « Nous allons ce soir, livrer les cadeaux aux enfants. Voilà la liste » en lui tendant un gros rouleau de parchemin
– « Tu es mon nouvel elfe » alors que Joseph sentit ses oreilles grandir.
Après s’être soulagé, Chris revint à sa table de travail. Afin d’aider au mieux son imagination, lui vient l’idée de relire tout son manuscrit pour se replonger dans les détails de son histoire afin d’en dérouler la suite…
Sa surprise fut immense de découvrir son titre : La Magie de Noël « suite de Piège Infernal »…..