407e proposition d’écriture créative imaginée par Pascal Perrat

Exercice d'écriture très créative
© S.Mouton-Perrat

Racontez un heureux secret de famille

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29 réponses

  1. Anne dit :

    Malheureusement secret de famille rime avec caché. Qqchose de lourd à porter qui se transmet de génération en génération.
    Pour ma part j’ai découvert qu’il y avait eu 2 enfants morts nés avant moi. J’ai pu m’en libérer et avoir enfin envie d’avoir des enfants.

  2. françoise dit :

    Racontez un heureux secret de famille.
    Depuis quelque temps j’arrivais à l’école le sourire aux lèvres alors qu’à l’accoutumée j’avais plutôt la mine renfrognée.
    Le Maître bien sûr s’en aperçut et me questionna :
    – quelle est la cause de cette bonne humeur Jules ?
    je ne peux pas le dire c’est un heureux secret de famille et un secret c’est un secret..
    – ton père a gagné à la loterie lui dit-il en plaisantant ?
    – en se tortillant sur sa chaise Jules répondit oui
    – le gros lot !
    – oui monsieur !
    Tout le village fut vite au courant et le soir même le Maire téléphona à son père pour le féliciter et pour éventuellement en tirer quelque bénéfice pour la commune.
    Désespéré,celui-ci avoua au Maire qu’il était au chômage et que depuis deux mois il touchait le R.S.A.
    Le soir il gronda Jules
    Ben tu touches le R S A ! c’est chouette non ?
    Non çà ne l’est pas et c’est pour cela que je vous avais demandé de ne pas en parler aux étrangers
    Mais mes copains d’école c’est pas des étrangers .
    Cette histoire fit la une du journal local et un matin un chef d’entreprise téléphona au Père de Jules pour lui offrir un travail qu’il s’empressa d’accepter.
    Le moins heureux dans cette hisoire ce fut Jules qui n’avait plus de secret de famille.

  3. Françoise - Gare du Nord dit :

    Le secret de famille. Beaucoup de familles en cachent un. Mais dans le clan Mal ils nombreux : chaque membre de cette mystérieuse lignée dissimule un secret ou est un secret.

    Mais voyons donc l’arbre généalogique de cette mystérieuse tribu

    Arrière-grand père maternel Malandrin à l’origine de la fortune de la famille dont l’origine est de nos jours encore inconnue.

    Arrière-grand père paternel  Malabar suspecté d’abuser de sa robustesse au sein de sa famille
    Arrière grand-mère paternelle  Malcommode fille d’un ébéniste et petite-fille d’un menuisier et qui, après 20 ans de vie conjugale, trouvait encore amer le bien-fondé de son prénom

    Grand-père paternel  Malbec sensé être un grand crû mais se révèle plutôt cru tant il est rude dans ses propos et qui curieusement trouva la félicité conjugale avec Grand-mère paternelle Malveillance

    Grand-père maternel Malencontreux le fils soit-disant tant espéré mais né d’un préservatif foireux
    Grand-mère maternelle Marie Sixtine Thérèse la Vénérée mais surnommée en catimini M.S.T la Vénérienne

    Père Malentendu et Mère Maldonne. Ces deux-là n’auraient jamais dû se rencontrer et n’auraient pas engendré le petit Malvenu Quiproquo

    Mais il manque une branche à cet arbre. En effet, où est Arrière grand-mère maternelle?
    Malice, l’espiègle et facétieuse aïeule, auteur de clowneries et pitreries, de farces et taquineries.

    Pourquoi dissimuler une telle aïeule ? Toute autre famille se serait enorgueillie de posséder dans son lignage un sémillant ancêtre gai et fringant ?

    Parce que Malice n’a jamais eu besoin de consommer psychotropes, antidépresseurs, somnifères excitants, calmants stimulants.
    Or, la famille Mal est propriétaire d’un grand laboratoire de médicaments, Mylan est le quasi-anagramme de Malin

  4. Clémence dit :

    Racontez un heureux secret de famille ….

    Ma famille est vraiment une drôle de famille !

    De génération en génération, nous n’avons pas échappé à la tradition. Les aînés avaient pour prénom Théo ou Liz. Pour moi, c’est Liz.
    Curieusement, comme tous mes prédécesseurs et prédécesseuses, je suis née un trente mars.
    C’est étrange, non ?
    Ce qui l’est encore plus encore, c’est que tous décèdent un vingt-neuf juillet.
    Par chance, j’ai encore un peu de temps devant moi.

    L’histoire, notre histoire ne s’arrête pas là. Les traditions ont la vie dure. Et pour cause, depuis huit générations, nous sommes tenus à nous transmettre une croûte. Un barbouillage terne. Un tableau casé dans un cadre de bois sculpté d’arabesques. Et pas question de le reléguer au fond du grenier ! Il doit être exposé à la place d’honneur , dans la salle-à-manger.

    Ainsi donc, à l’heure actuelle, je peux encore avoir des idées légères, des envies de voyage, des projets d’écriture (mes mémoires) et même…Et pourtant, un chose me chagrine (un peu seulement): j’ai coiffé sainte Catherine et je suis restée vieille fille, sans mari, sans amant.

    Alors, je me demande quel tour pendable me réserve cette vieille dame Tradition  ? La raison en est qu’elle peut se braquer sur une clause !
    Si ma date de naissance est correcte, si le choix de mon prénom est juste, si la croûte est bien exposée dans mon séjour, (bien qu’elle ait vu ses couleurs se ternir à force de belles flambées hivernales), je n’ai personne à qui la transmettre. Aucun héritier, aucune héritière. Et vu mon âge….

    Dire que j’en suis catastrophée ? Non, je ne pense pas. Mais tout de même…
    Et c’est sur cette dernière pensée que je me dirigeai vers le bar et m’emparai d’une bouteille de rhum arrangé. Faut-il vous rappeler que les vertus du rhum sont excellentes pour booster la réflexion ? Vous n’avez qu’en faire ? Pour une fois, je suis d’accord avec vous !

    Derrière les chênes centenaires, un soleil rougeoyant plongea pour laisser surgir des couleurs sauvages. Demain, il fera mistral. Les teintes ocrées des murs du séjour s’enflammèrent. Cela dura un bref instant. Un dernier rayon de soleil se posa sur la toile et puis, une idée me vint. Lumineuse.

    Tel un automate, j’allai chercher un escabeau, je montai jusqu’à la dernière marche, je décrochai le tableau, sollicitai mon Éole pour enlever la poussière, redescendis les marches et posai l’objet sur la table de la cuisine.
    J’ouvris mon ordinateur portable et lançai une recherche. Bien sûr, comme on trouve tout sur Internet, j’ai trouvé la solution. Elle me convenait d’autant plus que ce dont j’avais besoin se trouvait dans ma maison. Avec une certaine effervescence, je partis à la recherche des produits et des accessoires et je revins à la cuisine. J’enfilai une paire de gants en latex en fixant intensément le coin inférieur droit de la toile. Un sourire illumina mon visage. Mon travail pouvait commencer.

    La solution préparée, j’y trempai un chiffon et le passai avec une douceur infinie…
    Lentement, mais sûrement, je découvris des couleurs éclatantes, du bleu, du vert, un peu de jaune….des traits précis…
    Et puis apparut la première lettre, presque enfantine….

    Je déposai le chiffon, passai ma main sur mon front en sueur.
    Une joie infinie me submergea.
    Je respirai profondément et me redressai.

    Je m’installai à nouveau devant mon ordinateur et lançai la recherche. Tout concordait. Je jubilais.
    Et pourtant, j’étais certaine que personne ne me croirait, quelles que fussent les réalités. J’étais bien une descendante.
    Une descendante de Vincent V.G.

    Mais un doute m’envahit soudainement. Qu’allais-je faire de ce chef-d’œuvre ?
    Le barbouiller et continuer d’en jouir dans le secret le plus absolu ?
    Le faire expertiser et en faire donation à un Musée. Mais, lequel ?

    Je vois vos sourcils se hausser, votre bouche se tordre en moue, votre gorge réprimer un rire sardonique. Non mais, elle se prend pour qui ? Pour la descendante de Vincent ? Non, mais ! Même pas en rêve !

    Et pourtant, je vous le jure sur ce que j’ai de plus cher, je l’ai rencontré. En Provence. Il y a trois ou quatre étés. Il frappait à une lourde porte grillagée. Un bandage blanc entourait sa tête. Il m’a sourit.
    C’était troublant….

    Je vous avais prévenu. Ma famille est vraiment une drôle de famille…

    © Clémence.

  5. Michel-Denis ROBERT dit :

    Une chouette nouvelle venait d’arriver dans le pays. Elle toucha mille deux quarante sept habitants. L’événement s’était répandu d’une façon naturelle, de proche en proche, dans un silence quasi religieux. Puis tous les villageois en parlèrent. Elle devint le sujet principal de leurs conversations.

    Au marché, après les « Bonjour ! Ca va ! » la nouvelle circula. Elle apporterait la chance et, pourquoi pas une belle année, commentaient les gens en souriant.

    Chez le boulanger un peu bougon, on n’osait pas trop en parler. Mais on pouvait lire dans son regard quelque chose d’original, d’inhabituel, comme une lueur de gaieté qui laissait une bonne impression. Et puis son pain était si bon !

    A la pharmacie, les gens un peu anxieux venaient prendre quelque remède alors qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter. La patronne, dans le secret de ses mélanges donnait toujours de bons conseils.  » Si cette potion ne vous convient pas, je vous préparerais celle-ci, disait- elle comme un secret à garder. »

    Cet événement étrange prit des allures que chacun interpréta d’une façon différente.
    Les uns dirent que cela ferait de la publicité au pays, les autres le rejetèrent sous prétexte de superstition tandis que certains plus dubitatifs, affirmèrent qu’il fallait attendre pour voir.

    Si la nouveauté dérangea, c’est que là où elle se propagea, les gens n’étaient pas familiarisés avec. Ils avaient leur coutumes et tout phénomène récent était par politesse, d’abord accepté sur le bout des dents. Ils aimaient leur tranquillité. puis quand ils eurent goûté à la rareté du prodige, ils prirent la chose avec sérénité.

    Mais le problème avait pris de l’ampleur, la nouvelle parvint jusqu’aux oreilles de Madame la Maire, à tel point qu’elle le soumit au Conseil Municipal.

    – Je n’irais pas par quatre chemins, dit-elle sans préambule. J’ai deux nouvelles à vous annoncer. Je commence par la mauvaise : la chouette nouvelle effraie, ceci dit, sans jeu de mots, dit-elle pointilleuse. Dans le clocher de l’église, ça gêne, et comme chacun le sait, l’église est située au centre du village. La chouette dévote dérange nos électeurs. Il va falloir la déloger et lui trouver une autre location.

    La bonne nouvelle, c’est que Monsieur R… s’est proposé pour l’héberger, je lui donne la parole.
    Monsieur R… se leva et prit la parole :

    – Merci Madame la Maire, dit-il. Et je n’irais pas par quatre chemins non plus. J’en ai essayé un qui n’a pas marché. Dans un premier temps, j’ai voulu l’installer dans mon grenier, mais mon épouse a dit non. Finalement, j’ai installé la chouette dans une grange isolée et elle s’y trouve très bien. Cependant quand j’ai rangé mon grenier, j’ai retrouvé des archives poussiéreuses et dans un carnet, j’ai découvert qu’un grand oncle avait travaillé sur une nouvelle méthode de champagnisation d’un vin blanc qu’il importa dans un village près de Bordeaux. Il créa une nouvelle marque et celle-ci se développa. Et maintenant elle est commercialisée dans toute la France. Je fus heureux de découvrir ce que je peux appeler une chouette nouvelle. Et cela m’a permis de reprendre contact avec ma famille…

    D’après une histoire vraie.

  6. Laurence Noyer dit :

    Donc il sema le contenu de chaque paquet.
    Des fleurs poussèrent.
    Il les cueillit et les posa sur la feuille blanche.
    Des lettrétamines en glissèrent
    Et révélèrent ce texte:
    « Voici mon secret: Les fleurs ont un langage. Elles parlent et elles écoutent.
    Elles sont comme ces mots sur cette feuille. Mémoire,souvenir,ombre ou lueur. Bonheur et secret des mots. Les fleurs sont des mots. »

    Signé Forget me not, alias Myosotis (surnom de mon père)

  7. Catherine M.S dit :

    Secret de famille

    Mais vous êtes fou, mon chou !
    Vous me dites que là-bas
    Sous le toit de cette maison
    Tout le monde vit au diapason
    Et que c’est l’Amour avec un grand A
    Qui donne le LA ?
    Papa, maman, les enfants
    Je t’aime, tu m’aimes, on s’aime
    Aujourd’hui et pour toujours
    Roulement de tambours
    Et ce, depuis des générations ?

    Mais vous êtes fou, mon chou !
    Jamais les murs n’ont tremblé
    Aucun cri du dimanche au lundi
    Pas une once d’acrimonie
    Le malheur n’a jamais frappé à leur huis
    Même en catimini ?
    J’ai peine à vous croire mon ami
    Personne n’échappe aux couacs de la vie
    Les plus belles partitions peuvent souffrir d’un bémol
    Et les plus belles chansons de tristes paroles .

    Mais quel est donc leur secret ?
    Ah, vous ne pouvez rien révéler
    Vous ne voulez rien dire
    Pour ne pas les trahir ?
    Alors allez au diable voir si j’y suis
    Et surtout, surtout, restez-y
    Pour y soigner votre folie …

  8. Claude DUCORNETZ dit :

    Racontez un heureux secret de famille.

    « C’est vrai qu’elle est belle, quand même ! » se dit Nicolas, admirant Julie, sa partenaire de jogging, en train de faire ses étirements sur la barrière qui fermait l’accès de l’escalier menant au lac.
    Une fois de plus elle avait atteint la première le rocher qui marquait le terme de leurs efforts. Mais cette fois il avait fallu qu’elle s’emploie, et c’est au sprint qu’elle avait parcouru l’ultime ligne droite. Il gagnerait un jour, il se l’était juré.
    La belle jeune femme avait bien senti le regard posé sur elle, rayon de soleil réchauffant son cou. Elle tourna la tête vers Nicolas et lui sourit. Tout naturellement, comme elle le faisait toujours. Ce naturel, cette bonne humeur communicative, ce sourire franc et sincère, comme un éclat de bonheur figé sur ses lèvres, tout cela l’avait singulièrement agacé, au tout début. Quand elle s’était installée chez lui, c’est-à-dire en réalité, chez son père.
    Elle affichait sa joie de vivre comme une provocation, pensait-il, une offense à sa propre tristesse, et, il devait bien secrètement se l’avouer, un aiguillon à ce sentiment de jalousie qui l’oppressait depuis que son père avait évoqué son existence.
    Pourtant, ils avaient tant de choses en commun. Ils aimaient presque les mêmes auteurs, ils appréciaient tous les deux plus la mer que la montagne, ils adoraient les balades en forêt, écoutaient les mêmes musiques, si ce n’est son goût à elle pour le rock, du bruit, disait-il un peu moqueur, qui ne lui procurait aucune émotion.
    Et plus que tout cette passion pour la course à pied, sport qu’elle pratiquait depuis longtemps, et dans lequel elle excellait.
    Pendant des semaines, malgré les efforts de Julie pour normaliser leurs rapports, peut-être même à cause de la bonne volonté qu’elle manifestait, il n’avait rien cédé. Ses sourires l’énervaient, ses rires lui semblaient vulgaires, ses amabilités des mièvreries, sa gentillesse et sa beauté l’inquiétaient. Il avait peur d’elle, comme si elle représentait un danger potentiel.
    Les remontrances de son père, pourtant discrètes et délicates, l’avaient excédé au plus haut point et attisé son ressentiment. Il ne lui avait pas pardonné l’intrusion de cette étrangère. Il n’avait pas supporté l’idée que son père puisse partager son amour, car il en était convaincu : depuis qu’elle était chez eux, il avait eu le sentiment de ne plus être aimé comme avant !
    Il se positionna tout près d’elle pour effectuer les mêmes mouvements d’assouplissements nécessaires à une bonne récupération des efforts, pour éviter les courbatures.
    « Alors, mon Nico, encore quelques courses comme celle-là, et c’est moi qui materais tes fesses à l’arrivée » s’exclama-t-elle en riant.
    « Et tu peux être sûre que ça vaut le coup d’œil » lui rétorqua-t-il sur le même ton taquin.
    Leurs relations, pourtant encore tendues il y a à peine un mois, une éternité quand ils y repensaient, avaient pris un tour plus léger, plus naturel, depuis quelques jours. Ils ne se gênaient plus pour se changer l’un devant l’autre au retour de leurs séances de sport. L’autre dimanche, même, Julie était sortie de la salle de bain quasi nue, et l’avait croisé dans le couloir menant à sa chambre, sans qu’elle ne semble y prendre garde, comme si c’était normal.
    Nicolas avait vainement tenté de détourner les yeux, mais elle l’avait frôlé de si près, qu’il n’avait pu faire autrement que de la regarder, ne serait-ce que pour éviter le contact direct. Et sa mémoire de jeune mâle avait imprimé avec précision les courbes émouvantes du corps musclé de la jeune femme.
    Il en avait été très troublé. Pourtant, il le savait, il ne pourrait jamais traduire en actes ses émotions.
    Tout avait commencé il y a presque un an, lorsque son père, s’était brusquement absenté pour se rendre à Lyon. Il y était resté une semaine.
    Fils unique, bon élève, Nicolas bien qu’adulte, restait le temps de finir ses études à la charge de son père, avec lequel il vivait depuis que leur mère les avait quittés. Le père et le fils s’entendaient plutôt bien, et n’entraient presque jamais dans des conflits majeurs.
    Qu’allait faire son père à Lyon, ville dans laquelle il avait séjourné il y avait un peu plus de vingt ans, et dans laquelle il n’était retourné que très rarement ? Aux questions du fils, le père avait sobrement répondu : « une affaire à régler ».
    Nicolas n’avait rien pu obtenir de plus. Tout juste avait-il fait le lien, mais peut-être avait-il eu tort de le faire, entre une lettre arrivée dans la boite deux jours avant, et que son père n’avait ouvert qu’une fois la porte de son bureau fermée. C’est ce que s’était imaginé le garçon après le départ de son papa, car son père était ressorti de son bureau peu après, le visage un peu pâle, les yeux brillants comme s’il avait pleuré. Mais il n’avait pas évoqué le contenu de la missive. Il avait simplement dit à son fils : « Je vais à Lyon après demain ».
    A son retour, pas un mot. Mais le fils sentait que le père avait laissé une part de lui-même au bout de son voyage.
    Nicolas avait trouvé cela un peu bizarre : d’habitude ils communiquaient bien tous les deux. Puis la vie avait repris son cours et lui les siens à la fac.
    Au fil des mois son père avait renouvelé ses aller-retours sans s’étendre davantage sur leur raison. Par contre, il semblait en revenir de plus en plus serein, de plus en plus « heureux », osait même penser Nicolas, même si cela lui en coûtait de l’admettre.
    Il se sentait de plus en plus perdu, de plus en plus abandonné. « Cherchez la femme » se répétait le jeune homme, nourrissant son intuition au fil des mois.
    C’est donc sans véritable surprise qu’il entendit son père un soir à table lui demander simplement : « Tu verrais un inconvénient à ce qu’une femme vienne habiter ici ? ».
    Sans surprise mais pas sans rancœur ! Son père aurait quand même pu lui en parler plus tôt, non, pensait-il avec mauvaise humeur. Il maugréa un vague « tu vas la faire coucher où ? » qui se voulait un peu ironique, et si franchement hostile que son père s’abstint de lui répondre. Mais qu’il prit comme une acceptation implicite.
    Huit jours plus tard, il y avait de cela un peu plus de trois mois désormais, c’est d’une humeur massacrante qu’il s’était rendu à la gare pour y retrouver son père et « accueillir » l’intruse.
    Quand il l’aperçut au loin marchant d’un pas alerte si près de son cher papa, si près que leurs épaules se touchaient à chaque enjambée, son cœur se serra : ils paraissaient déjà tellement complices.
    Il se déplaça légèrement derrière une colonnade pour les observer de face sans se découvrir lui-même.
    Quand il put enfin la voir vraiment son visage se ferma, un rictus douloureux lui crispa les joues tandis qu’il marmonnait : « La garce, non seulement elle est bien trop jeune, mais en plus elle est vachement belle ! ».
    Il aurait voulu fuir. Trop tard, son père, un sourire aux lèvres venait de le remarquer, et s’avançait vers lui.
    « Nicolas, lui dit-il sobrement en tournant son regard vers la jeune femme rayonnante, je te présente Julie, ta sœur ».

  9. iris79 dit :

    Un secret de famille heureux ?
    Il y a en si peu…

    je les ai glanés
    sans y être invité

    En observant, en regardant, en somnolant

    Avec ma grand-mère, il y avait fort à faire…

    En cuisine, c’était la meilleure

    elle possédait un tour de main incroyable
    sous des gestes des plus banals et des airs ordinaires
    elle saisissait des pincées d’ingrédients inattendus sans trop en faire
    elle accomplissait cette corvée dans un naturel des plus affables
    et suffisamment de discrétion de peur que les secrets ne s’éloignent, ne s’évaporent

    J’y ai glané pourtant quelques petits trésors
    bien à l’abri dans mon livre de recettes en or

    J’avais pu par exemple constaté
    que les petits pois ne pouvaient avoir ce goût acidulé que j’adorai
    qu’avec ce….

    Quant à la sauce de la daube !

    Des épices inattendues et autre ingrédient secrets
    la rendaient unique, introuvable chez ceux qui la copieraient
    certains en se concentrant
    avaient retrouvé deux de ces 3 ingrédients
    et le troisième restait un mystère
    pour tout un tas d’invités très ordinaires !

    Point de discours formel
    n’avait donné lieu
    à un partage familial précieux

    Il ne m’avait fallu qu’observer du coin de l’œil
    ma formidable aïeul
    qui transformait chaque repas
    en un ballet de gestes ordinaires et un dîner que l’on oublierai pas.

  10. Grumpy dit :

    Un heureux secret de famille ?

    Tiens, tiens, je n’ai pas à chercher bien loin.

    L’heureux secret de famille : c’est moi.

    Officiellement, je n’existais pas. Mes parents de par leur condition étaient empêchés de révéler mon existence.

    Ma Maman m’élevait en qualité de parent isolé. Mais, chaque soir, mon Papa, son feutre légendaire enfoncé sur la tête, nous rejoignait en cachette. Son chauffeur le déposait à la nuit tombée au bas de notre immeuble cossu, bâtiment aux pierres très républicaines.

    J’étais très fier de lui : avocat finaud, rusé, matois, politique aiguisé, immense culture : un sommet de littérature, il avait d’ailleurs une très belle plume dont, hélas, il ne m’a pas légué le talent.

    Maman, beaucoup plus jeune que Papa avait été séduite par cette somme de défauts et de qualités. Elle aussi était à la pointe de la culture, celle de l’Art qu’elle s’appliquait à conserver.

    Un chauffeur me conduisait en classe tous les matins, je ne comprenais pas pourquoi il me serrait de si près et me protégeait au point que j’avais l’impression d’avoir un garde du corps.

    J’étais inscrit dans une école très sélect du côté de Saint-Germain des prés. Fréquentée par des camarades si bien élevés et portant eux-mêmes des prénoms venus du fin fond de l’Histoire, que pas un instant ils n’ont songé à se moquer du mien.

    Pensez-donc, mes parents, l’un comme l’autre, toujours un livre à la main, avaient trouvé évident de me donner le nom d’une bibliothèque, et Nationale par-dessus le marché.

    Je m’appelle Richelieu.

    Tout le monde se marrait et me croyait un peu mégalo lorsqu’à la ligne « profession du père », j’inscrivais « Président de la République ».

    Je m’en foutais, quand notre mystère familial finirait par se trouver éventé, j’aurais été et resterai pour toujours un secret chéri et très heureux.

    Le secret de famille par excellence.

  11. Odile Zeller dit :

    Un heureux secret de famille, vous vous moquez de moi ! Ça n’existe pas, c’est impossible. Ce qu’on ne dit pas dans les familles a un relent de honte, d’infamie. C’est une naissance illégitime, une folie héréditaire, un vice caché. Le bonheur surtout en famille se déguste à petites gorgées, pourquoi en parler. Sa fragilité fait qu’à peine ébauchée l’harmonie familiale est en danger et que l’instant magique s’est envolé. Mais pour vous faire plaisir je vais chercher tout au fond de ma tirelire …. peut être : un parfum iodé, lumière émeraude et relent de varech, sable doré oui ! J’y suis : cette station balnéaire où mes parents se sont connus et mariés où j’ai pris la mer et les vagues. Certains prétendent que l’union était arrangée et que ce ne fut qu’un bonheur sans lendemain, de mauvaises langues, des jaloux !
    Attendez le secret de famille n’est pas là, plus tard. La magie veut que les enfants, les petits enfants y soient retournés, longtemps après … ont acheté des maisons plus petites que les villas des ancêtres. Ils ont aimé que rien n’est vraiment changé ni les crêpes, ni la crêperie, ni les villas, ni le marché et encore moins le Look plaisancier où casquette de capitaine, marinières, cirés et vareuses font le marin de la tête au pied chaussé d’espadrilles ou de mocassins, avec ou sans bateau. On a le GBDA le grand bateau des autres. J’y suis retournée, invitée … un peu sur la défensive, tendue face à l’émotion. Tout y est encore identique, les palmiers, les promenades en bord de mer, les vedettes pour saint Malo, les fortes marées, les perspectives barrées d’îlots, de phares et de balises, le cidre et les huîtres et sous la carte postale une manière d’heureux secret de famille, un clin d’œil au temps qui passe.

  12. Beryl Dey Hemm dit :

    « Ça commence bien !!! » pensa Sophie quand elle lut le sujet que la prof désirait qu’ils traitent, « juste pour voir où vous en êtes ! ».
    « Vous avez une demi-heure »
    Le jour de la rentrée !!
    A peine le temps de pénétrer dans la classe, « Asseyez-vous ! ».
    Brève présentation de l’enseignante.
    « Prenez une feuille »
    Train-train habituel pensait Sophie, qui s’attendait aux questions rituelles, nom, prénom, profession du père et de la mère, etc.
    Mais non !
    « Je voudrais apprendre à mieux vous connaître »
    Introduction suspecte.
    Alerte.
    Silence.
    En garde !
    « Voyons ! »
    Elle leur avait tourné le dos pour écrire au tableau, d’une belle écriture régulière :
    « Racontez un heureux secret de famille »
    « Oxymore !! » avait aussitôt réagi Sophie, qui aimait raisonner et venait d’apprendre ce mot savant qu’elle replaçait à toutes les sauces.
    Un secret de famille ne peut pas être heureux. Un secret se cache, par définition. Seuls le connaissent les initiés, les membres d’une secte qui en font une sorte de mot de passe. Et dans une famille, quand on cache quelque fait, il est souvent peu reluisant. A moins qu’on le trouve tel, à tort ou à raison. Ce peut être un personnage véreux, une « femme de mauvaise vie », mais quelquefois – souvent – il s’agit seulement d’un déviant du chemin tracé, qui a mené sa vie loin des désapprobations mesquines de sa fratrie.
    De toutes façons un secret de famille, c’est la plupart du temps négatif et on ne s’en vante pas.
    « Je marque tout ça ! » se dit Sophie du haut de ses quatorze ans, pas peu fière de ses déductions,.
    La prof avait précisé qu’elle ne noterait pas.
    Précision fatale. Elle aurait ce qu’elle mérite : la vérité.
    Sophie releva le nez pour regarder autour d’elle.
    A voir la tête de ses collègues, elle n’était pas la seule à se poser des questions.
    Assise en face, au bureau sur l’estrade, Madame D… corrigeait des copies, calmement, et souriait. Elle devina l’inspection de Sophie, leva la tête et lui adressa son sourire franc dénué d’arrières pensées. Un visage paisible, des yeux clairs au regard direct.
    Pourquoi ce sujet… intraitable ? se demandait Sophie. Pour les mettre à l’épreuve ? Mesurer leur optimisme ? Leur naïveté de jeunes adolescents ?
    Alors que chacun sait que les familles se déchirent le plus souvent autour de leurs « secrets », justement ! Secrets de Polichinelle, fiel distillé à dose homéopathique à la victime jusqu’à l’apathie complète, avant le coup de grâce.
    Mais le bon sourire de Bouddha disait les intentions bienveillantes.
    Ça promettait ! Une année au pays des lapins roses. Retour à la cour de récré du Petit Nicolas.
    Et comme récemment elle avait vu la trilogie du « Parrain » de Coppola au ciné-club du collège, et qu’elle aimait mélanger les genres pour en faire des créations toutes personnelles, elle l’imagina, justement, le « Petit Nicolas ».
    Il était accompagné de sa maman, la lumineuse Marie Corléone, jouée par Sophia Coppola, et il paradait dans la cour de récréation de l’école devant ses copains :
    « Eh ben moi, mon papy, il a plein plein de sous, mais il donne tout à des associations carati cariti caritatives ! Et mon tonton il chante à l’opéra. Même que ma maman y va ce soir avec mon papy ! » pendant que sa mère, avec son sourire de Vierge, lui confirmait que Michael Corleone (« le parrain »), son père qu’elle idolâtrait, était un bienfaiteur de l’humanité.
    Un secret de famille heureux ??!
    Sophie ricana et leva les épaules d’un air supérieur.
    Décidément non ! Soit le secret n’était plus secret depuis bien longtemps, divulgué à qui mieux mieux par Madame Michu ou Brave Jacky, toujours avides de se faire valoir. Soit il était enfoui dans les strates générationnelles,parce que traumatisant.
    Sophie s’apprêtait à se relire quand une main tendue lui réclama sa copie. Madame D… avait toujours le même sourire énigmatique et elle plaça sa feuille dans le tas avant de passer au rang suivant.

  13. Ophélie E. dit :

    Pour occuper ses longues soirées d’hiver, elle s’était lancée secrètement dans l’écriture du roman qui lui tenait tant à cœur. Sa petite cachotterie fut vite découverte par son mari qui lui demanda pourquoi elle se couchait si tard et, surtout, ce qu’elle pouvait bien fabriquer à taper sans cesse sur son ordinateur. Éberlué par ses aveux et remis de ses émotions, il ne put s’empêcher d’en faire part à leurs enfants. Ces derniers encouragèrent la romancière de leur mieux :

    – C’est un gentil petit hobby qui t’occupera bien pour ta retraite.

    Forte du succès d’estime qu’elle rencontra entre les murs de son bureau, elle poursuivit son passe-temps dans l’écriture de comptines plus mignonnes les unes que les autres ! Un soir son fils qui, entre-temps, était devenu son plus fervent admirateur, émit l’idée de faire illustrer son futur recueil.

    Malicieuse, elle lui dit :

    -Et pourquoi tu ne le ferais pas, toi qui dessines si bien !

    Et c’est ainsi que, l’année suivante, leur beau secret fut dévoilé lors d’un prestigieux festival.

  14. LABROSSE dit :

    Un secret bien gardé …
    L’ancien, le vénéré, avait toujours su se fondre dans les méandres de la forêt. Pour camoufler ses traces, Il usait de stratège digne d’un valeureux sioux. Il ne laissait rien au hasard, la moindre brindille déplacée, l’empreinte d’un pas trop appuyé, une fougère bousculée, tout était remis en place après son passage. Personne n’eut deviné le passage secret.
    Il n’y eut point de secret aussi bien gardé ! Cela devait remonter à la nuit des temps. Lorsqu’il s’approchait de la place, sa place, celle de ses ancêtres, chaque automne, toujours à la même date, aux alentours du 22 septembre. Depuis dix jours déjà, il sentait les molécules de son corps prendre du volume, elles s’affolaient, hurlaient à son souvenir. Malgré ses rhumatismes récurrents, lorsque la pleine lune se faisait chasseresse, lune fauve à l’affut des étoiles, chaque parcelle de son âme cognait, grondait, battait le rappel des troupes. Ainsi depuis la nuit des temps, chaque génération d’homme répondait présent, et se mettait en chasse. Une battue ancestrale, une traque générationnelle, personne ne pouvait se soustraire à cette tradition familiale.
    Cette année serait certainement la dernière car l’ancien avait décidé de livrer son secret. Il passerait la main, transmettrait le rituel. L’un des plus jeunes serait choisi pour accueillir la confession et alors l’ancien pourrait mourir en paix. C’était ainsi, une fois le secret dévoilé, l’ancien devait céder la place.
    Parmi les membres de la famille, les esprits s’échauffaient, on fantasmait, on rêvait d’être l’élu, celui qui recevrait les honneurs du vieux. Le Léon, il avait une tripoté de petits enfants, lequel serait désigné ? Il fallait un gars de confiance, solide comme un chêne, vaillant et droit, sauvage et chevaleresque. Un jeune homme forgé dans les aciéries locales. Non pas un prétentieux arriviste, encore moins un pauvre d’esprit, il fallait un cœur noble, un gars sensible dont le cœur était en harmonie avec l’âme de la forêt.
    Ce fut un cortège de prévenance qui entoura le vieux au cours de ce mois de septembre. Chacun y allait de sa roublardise pour courtiser le vieux. Mais le vieux n’était point obsolète à ce point, il connaissait l’esprit humain, comme dit le dicton : ce n’est pas au vieux singe … alors le vieux ne s’y trompa pas. Il choisit le « petit Max »… un tout petit gars déclaré hors catégorie depuis le début ! Tout le monde s’alarma, le vieux avait perdu la boule ! On devait suspendre la compétition pour cause de sénescence, de folie, d’usurpation de biens… Mais comment lui faire cracher le morceau ? Le vieux avait prononcé sa sentence et personne ne pourrait le contredire. Le vieux avait parlait et point barre crièrent les oncles moribonds.
    Alors chacun se retira dans ses pénates et jura de ne plus s’occuper du vieux : qu’il crève avec sa rogue s’indignèrent les présumés prodigues.
    Le jeune Maxime arriva sur la pointe des pieds. Il fut surpris qu’on l’ait choisi ! Lui le chétif, le moitié bossu, le pleurnichard, le solitaire. Celui qui fuyait la grégarité comme la peste. Il passait son temps à caresser les chiens, à soigner les oiseaux, à s’amouracher d’un papillon, à pleurer sur la mort du chevreuil fraichement abattu… on n’en ferait rien de celui-là, il était trop sensible…Dans la famille, on adulait les bravaches, les guerriers, les grandes gueules et les forts à bras. Le secret aurait dû être confié au plus teigneux, au plus gueulard, au meilleur chasseur, pas à un gringalet tout juste bon à rêvasser, à dessiner des couchers de soleil…
    – Bonjour Maxime, tonna le vieux en essayant de ne point effrayé son oisillon.
    – Bonjour grand père susurra le jeune, sans se départir de son regard d’enfant. Spontané et limpide.
    – Es-tu prêt à m’accompagner ? clama l’ancien
    Malgré son inquiétude, l’enfant lui jeta un sourire et le vieux n’en rajouta pas.
    Les deux sortirent à la lueur du petit matin, des entrelacs de brouillard maquillaient la campagne environnante. Pour l’un cela ressemblait à un linceul prémonitoire, pour l’autre c’était l’appel de la forêt, les fumées sédatives de l’automne. L’un parlait avec sa peur, l’autre avec son insouciance. Ainsi, sans paroles inutiles, ils se comprirent et progressèrent d’un pas assuré vers le cœur de la forêt.
    Déjà quelques notes éparses annonçaient l’oraison de la nature, quelques trilles furtives de la mésange, les tambourinements d’un pic affamé, le cri alarmiste du geai… l’un comme l’autre écoutait, emplissait ses pas de ce bonheur futile. Le vieux avançait avec agilité, prudemment, sans à-coups, l’autre le suivait comme son ombre, souple et discret, deux cervidés aux abois, en osmose avec leur terrain d’action.
    Ils empruntèrent une coulée de sanglier, presque une tranchée, firent halte devant un majestueux érable sycomore, l’observèrent quelques instants, hochèrent la tête, puis gravirent une pente plus cossue. La lumière jaillissait de biais, offrant des contrastes saisissants. Parfois le vieux, touchait une souche, caressait un bloc de pierre erratique, brisait une petite branche, une manière discrète de marquait le chemin, le gamin photographiait la scène, il ne pipait mot mais enregistrait chaque geste, chaque respiration du vieux.
    Le vieux s’arrêtait parfois, soufflait, inspirait délicatement les effluves d’humus, on aurait dit qu’il cherchait, traquait quelques fantômes du passé. Le jeune se faisait invisible, s’enhardissant parfois à tenir la main du vieux lorsque la pente fut trop raide. Le vieux ne disait rien, son regard parlait pour lui. La magie opérait. Le vieux savait qu’il avait fait le bon choix.
    Et puis, sans prévenir, le vieux s’arrêta net, le cœur battant la chamade, il tendit l’index droit devant lui. Le jeune suivit la ligne de mire, instinctivement, il avait compris. Là, au pied d’un vieil épicéa, se tenait le trésor. Il resplendissait de toute sa majesté ! Un chapeau beige mat camouflait sa bonhommie, on devinait son ventre bulbeux parsemée de réticules, un réseau filandreux ressemblant à de la dentelle, celle que revête les dames un jour de noces. L’allure frisait l’érotisme.
    Et puis dans une ronde effrénée se tenait par la main, d’autres plus petits, plus doux, plus soyeux… des petits bouchons de champagne !
    Le vieux s’approcha, mit genoux à terre, psalmodia quelques cantiques et d’un geste minutieux, il enveloppa la base du seigneur, le fit pivoter sur son axe et le délogea avec délicatesse. Il ne fallait jamais assassiner le prodige, lui couper le pied revenait à le taillader, à le larder de coup de couteau. Il fallait simplement le cueillir avec sagesse, juste un petit quart de tour. Ainsi le mycélium, la partie cachée, l’arbre pour ainsi dire ne serait pas meurtri et ainsi chaque année il porterait ses fruits.
    Ce fut là l’ultime confession du vieux, il venait de livrer son secret, son meilleur coin de champignon !

  15. LURON'OURS dit :

    🐹 L’ HEUREUX SECRET DE FAMILLE : c’est le dimanche quand papa soigne sa barbe. C’était rituel. Je n’ai pas compris combien cette particularité était essentielle à la cohésion de la famille ainsi que le léger nuage de parfum qui l’accompagnait.
    L’hiver, une fois l’ultime passage du peigne dans le fleuve ondoyant, après un dernier coup de ciseaux, le brumisateur diffusait la lavande fine.
    Au printemps, l’impétrant s’ondoyait de verveine ou de thé vert. ‘ c’est pour pas qu’on me confonde avec les petites fraises des bois’ riait mon père.
    Je secret de famille était bien gardé de la composition d’herbes dans l’armoire aux draps frais ainsi que des plantes médicinales. Ça datait des anciens, droguistes et colporteurs bas-alpins, il y avait  » lulure  ». Les épices de maman, c’ était aussi le secret de ses repas savoureux et digestes, mais il ne fallait pas la déranger dans son laboratoire ! La cuisine était son officine.
    Les simples que nos aînés ont collectés, on ne les trouve plus que séchés entre les feuilles d’un herbier.
    Dimanche dernier, papa qui a la main moins sûre, a coupé sa barbe. 🐹

  16. Souris verte dit :

    UNE COLOQUINTE COQUINE
    Ce savant en botanique qui m’acquit, coquine coloquinte que je suis, créa un lien puissant en me soufflant sur le pédoncule: j’en frissonnais dans les pépins.
    – Viens ma beauté me murmura-t-il d’un ton câlin je vais te révéler ton secret, celui de ta naissance.
    Il m’astiqua, non pour me cuire et me mastiquer mais pour m’ exposer avec d’autres dans un compotier.
    J’y explosais par ma rutilance et ma volupté dont je n’étais pas avare.
    À l’instant où je le vis, je suis tombée raide dingue d’un beau mâle aux aspérités pointues. Un affriolant africain assez chaud des épines qui avait nom : cucumis ce qui, à mon avis en disait long sur sa pratique.
    Mais avant d’aller plus loin, notre botaniste nous prit, un dans chaque main.
    – Mes enfants il faut que je vous explique le joyeux secret de vos origines.
    Dans le temps, s’épanouissaient doucement au soleil sur les collines, les Gnangnans, quelques gros fruits bien rouges et à côté des verts nonchalants. Les voisins, ceux d’en face, beaucoup plus délurés mais tenaces les appelèrent pas très gentiment les ‘ Cucus ‘. Par un beau jour de printemps, une jolie calebasse tinta joyeusement de ses graines pour annoncer sa fécondité. Vous dire si ceux d’en face ne se firent pas prier et ne ménagèrent pas leurs efforts..
    Melons, pastèques, potimarrons tous naissaient heureux d’être si nombreux.
    – Cessez, c’est assez, toutes ces courges et cornichons hurlait le chef des ‘ En face ‘arrêtez la reproduction de ces Cucus!..
    C’est assez !
    C’était fait.. ainsi naquit joyeusement votre famille celle des Cucurbitacées … Il fallait que je vous le dise avant que vous alliez plus loin :vous êtes cousins.🐀

  17. Nadine de Bernardy dit :

    Au courrier ce matin, une grande enveloppe venant des Etats Unis avait été glissée dans ma boîte aux lettres.
    Larson,Larson and Mac Millan: un cabinet d’avocats du Michigan,de Détroit plus précisément.Très intriguée,j’ouvre la missive et le peu d’anglais qui me reste me permet de reconnaître le nom de ma mère Miss Emilie Guilain,celui d’un certain Peter Martin.
    Il semble être question d’une grosse somme en dollars et d’un ranch dans la Montana.
    Qu’est ce que tout cela veut bien dire?
    Après une nuit sans sommeil à penser et repenser à ces papiers,je téléphone à mon amie Mylène qui enseigne l’anglais au collège Saint Nicolas.
    Nous convenons de nous voir au déjeuner.Rarement matinée durât si longtemps.
    Je tendis l’enveloppe à mon amie en lui disant: « Lis ma grande,je crois que quelque chose se prépare.
    Effectivement,au fur et à mesure qu’elle parcourt le texte,son visage s’illumine d’un grand sourire incrédule.
    « Ben ma petite vieille,tu ne m’avais jamais dit ça.Tu es la fille d’un Américain qui te lègue sa fortune et un ranch dans le Montana!!! Il faut que tu ailles à Détroit pour régler cette succession.
    Hé ça va?
    J’étais bouleversée,au bord de l’évanouissement.
    – Tu peux me lire tout cela à voix haute,j’ai besoin de comprendre.
    C’est ainsi que j’apprend,devant une assiette de lasagnes refroidies,que mon père biologique,Peter Martin, avait rencontré et aimé ma mère à la fin de la deuxième guerre mondiale.
    Il avait dû repartir chez lui,laissant ma mère enceinte,avec la promesse de la faire venir aux Etats Unis le plus rapidement possible.
    Ma mère,cette petite bonne femme discrète et sage! Un amant! Un américain!
    Sans nouvelle de son bel amour,elle avait épousé, sans doute peu après ma naissance,Jean Lebreton celui que j’ai toujours cru être mon père.Jamais aucun des deux ne m’a jamais parlé de rien.
    Même au moment de sa mort,ma mère a gardé son secret si tendre et désespéré.
    Je fondis en larmes.Quelle histoire incroyable et banale à la fois.
    Les avocats disaient que Peter Martin s’était marié et qu’à la fin de sa vie,veuf et sans enfant,il avait tenu à réparer sa conduite.
    Il engagea un détective pour retrouver la trace d’Emilie et donc la mienne,car je vivais dans la petite maison de mes parents,morts à quelques mois d’intervalle.
     » Bon,que vas tu faire,demanda Mylène,toute excitée
    Je sortis de mon rêve:
    – Pour l’instant je vais digérer les informations,ensuite je vais aller sur place voir de quoi il s’agit.C’est dingue cette histoire à mon âge,ça me fait tout drôle,qu’est ce que vais faire de tout ça?
    – Commence par m’inviter à t’accompagner à Détroit suggéra Mylène toujours pratique,tu auras besoin d’une interprète et d’un soutien pour gérer les émotions et le reste. Ca me donne aussi envie de pleurer ton conte de fée.
    – D’accord pour ta proposition mais pas un mot à qui que ce soit pour l’instant
    – OK! miss Martin,dit elle en m’embrassant.
    .

  18. Antonio dit :

    – Bon, tu m’le racontes ce secret, ou bien ?
    – Voilà voilà ! Mais jure-moi de le garder pour toi, parce que j’ai pas envie de finir à l’asile comme mon arrière grand-père.
    – T’inquiète, tu ne risques rien. Si on enfermait tous les auteurs de fake news aujourd’hui, les asiles seraient pleins. Alors ?
    – Et ben, le père de mon arrière grand-père, un jour, il a rencontré Dieu.
    – Ça commence bien. T’as pas plus original qu’un secret d’illuminé ?
    – Tu vois, tu m’crois pas. Si tu le prends comme ça, moi, j’arrête là.
    – Non non, vas-y continue, c’est peut-être drôl… heu, j’veux dire vrai. Il l’a rencontré où ton Dieu ?
    – Chez lui, en revenant de la mine de charbon, au nord. Tu sais, c’était les corons.
    – Merci, j’connais, épargne-moi la chanson.
    – En fait, il se lavait dans la baignoire, quand il lui est apparu…
    – De derrière un buisson, une lumière blanche sortie d’un frigo, c’est ça ?
    – Tu vois, tu recommences à déconner.
    – Hé oh ! C’est pas moi qui est commencé. Il ressemblait à quoi ton Dieu ?
    – Mais à rien de physique, ni corps, ni lumière, ni voix intersidérale qui aurait traversé l’univers. Il était là, c’est tout, comme un courant d’air chaud, une couverture invisible, une aura puissante. Tu ne pouvais pas ne pas le sentir. C’est ce qu’il disait mon aïeul.
    – Ni l’entendre du coup ?
    – Pas par la voix, mais par le cœur.
    – Oh ! pitié ! … Ton arrière arrière vieux il n’était pas tombé dans le bénitier petit ?
    – Pas du tout, il n’y avait pas plus athée que lui dans le coin. Il n’est jamais allé à la messe et baisait même les nones, il paraît.
    – Après j’imagine qu’il a dû se repentir après, non ?
    – Pas que je sache. Il a rencontré Dieu, pas le pape. Et les religions, Dieu, il en a par dessus l’esprit. Il paraît qu’il ne peut plus les voir en peintures. Les églises, les mosquées, il n’y a jamais mis les pieds.
    – Ça, c’est un scoop. Et il lui a dit quoi dans le cœur de ton ancêtre ?
    – Tout.
    – C’est peu, tout de même. Tout quoi ? Développe !
    – Tout, le commencement de l’univers, de la vie, pourquoi on est là…
    – Et la fin ? Il t’a parlé de la fin ?
    – Bah, justement, non. Il n’y a pas de fin, d’après lui.
    – Comment ça ?
    – Tout reste en suspension éternellement.
    – Il est bien gentil, mais y a bien une fin en chaque chose, même de la vie, non ?
    – Ben non. Par exemple quand tu manges, embrasses une fille ou quoi que tu fasses, ça reste en suspens éternellement.
    – Ah ouais ?
    – C’est pour ça que parfois, t’as l’impression de ressentir un événement très ancien, une odeur, comme si c’était hier, où des fois comme si c’était là. C’est parce qu’il n’a jamais cessé d’être là. Quand tu fais l’amour à ta maîtresse, les premiers ébats avec ta femme peuvent te revenir comme des effluves au dessus de l’oreiller, comme si, à côté de toi, c’était encore elle.
    – C’est vrai que des fois… Et il a dit quoi d’autre ?
    – Tout.
    – Tu fais chier avec ton tout. Tout c’est rien ou un gros paquet bien ficelé dont on ne voit pas le contenu. Alors ouvre-le, ton clapet !
    – Il lui a dit tout ce qu’il y a à savoir, d’où vient la matière, où elle va, ce qui l’anime, l’ingéniosité de l’univers aussi infini que l’on continue à s’épandre avec lui, l’inutilité d’avoir, le devoir d’être, les dangers de rester ancré à la même place, la nécessité de se mouvoir, selon une orbite précise, propre à chacun, l’abondance sur son chemin, à porté de cœur et de mains, son destin quoi.
    – C’est les poupées russes ton secret. Y a un mystère dans chaque phrase. C’est quoi notre destin ?
    – Le père de mon arrière grand-père, lui, a tout laissé, sa mine et ses corons et a pris la route avec sa famille et un baluchon. Depuis ce jour, nous sommes des nomades en orbite autour de notre destin, disait mon grand-père. Pour vous, on est des gitans, mais peu importe. Grâce au secret de mon aïeul, on est heureux comme ça.
    – Alors comme ça, pour être heureux faudrait être vendeur de tours de manège, c’est ça ?
    – Épandre du rêve dans l’univers, c’est ce qui fait courir les étoiles, disait mon grand-père.

  19. Laurence Noyer dit :

    Le notaire lui remit une boite
    qui renfermait des sachets en papier
    remplis de graines
    Et une enveloppe contenant une feuille de papier
    blanche.
    Sur l’enveloppe, cette inscription : « pour me lire : me semer »
    Il sema donc le contenu de chaque sachet,

    Et…

    Patience! Pour la suite, on attend que ça germe, … disons jusqu’à lundi!

  20. Liliane dit :

    – Bonjour ! Je m’appelle Hugo ! J’étais journaliste d’investigation pour la célèbre chaîne CBH. Actuellement, je fais des recherches pour écrire un livre sur les secrets.

    – Et en quoi puis-je vous être utile ?

    – J’ai suivi votre parcours, votre carrière, votre réussite. Je suis admiratif, Madame.

    – Appelez-moi Rose. Et le rapport avec votre livre ?

    – Il se dit que votre famille cache un heureux secret.

    Le sourire énigmatique de Rose est éloquent.

    – Je vais être direct, Rose. Quel est votre secret ?

    – Peut-être qu’il est inscrit dans nos gênes depuis la création du monde et qu’il se transmet de génération en génération !

    – Vous vous moquez !

    – Peut-être que ma famille cultive dans notre luxuriant jardin les fruits du paradis et les psilocybes !

    – J’ignore ce que sont les psi…

    – Des champignons. J’ai souvent entendu mon aïeul dire, que, pour manger ces champignons, il faut avoir le cœur pur.

    – Pour avoir une porte ouverte vers le bonheur ? J’en doute Rose. Sinon, ceux qui n’ont pas « le cœur pur » que…

    – Ils ne rencontrent que les monstres, le sang et le malheur !

    – J’ai le sentiment, dit Hugo, que vous ne me prenez pas au sérieux.

    – Alors, peut-être, d’autres pistes ? Le pouvoir de voler vers la Lune, de communiquer avec des êtres vivant sur d’autres planètes. Celui de…

    – Celui de ne pas vouloir m’aider !

    – Ne soyez pas contrarié Hugo ! Si je vous raconte l’histoire de cet heureux secret, ce ne sera plus un secret. Et j’y perdrais mon âme.

    – Je n’insiste pas. Au revoir.

    Perplexe et troublé, Hugo jette un dernier regard vers Rose.

    – Hugo ? Et si l’heureux secret est … de ne pas avoir de secret ?

  21. Blackrain dit :

    En arrivant devant la demeure de mon grand-père je reste frappé par l’austérité du lieu. Un saule n’en finit plus de pleurer au-dessus de l’étang. Une barque aux planches moussues y est amarrée. J’introduis une grosse clef dans la serrure grinçante. Les tapisseries jaunies transpirent leurs souvenirs humides tandis que des meubles Henri II se grisent de poussière. Des marches grinçantes me conduisent au grenier. Je pousse une porte branlante. Un train électrique est couché en travers de la voie. Il a déraillé, probablement bousculé par le cheval à bascule qui le domine de toute sa hauteur. Je pénètre à pas feutrés dans l’univers oublié de mon enfance avec l’envie d’éclairer mes souvenirs. Quelques soldats allemands en plastique de la marque Starlux font un conciliabule dans un coin. Ils racontent à ma remembrance les batailles imaginaires de mes dix ans. Mon voyage mental me fait aussi entendre les commérages des voisins qui avaient blessé mes seize printemps. D’aucun prétendait que grand-père avait collaboré avec l’occupant durant la seconde guerre mondiale afin d’obtenir des marchés de bois dans le département. J’avais même dû faire le coup de poing avec le fils du charbonnier. Plus tard, mes parents avaient fini par m’avouer, entre deux rougeurs de honte, que les habitants du bourg n’avaient plus jamais voté pour l’ancien maire, mon grand-père, après avoir eu l’assurance de cette triste réalité. J’avais beaucoup pleuré. Depuis ce jour, j’avais toujours refusé de lui rendre visite. C’est la raison pour laquelle quarante-cinq années s’étaient écoulées depuis ma dernière visite à cette maison en pierre à la froideur austère.

    Mes yeux s’embrument en touchant les objets qui m’évoquent des instants de bonheur. J’ai presque honte de les avoir éprouvés. Pourtant, à cet instant, les traits marqués de grand-père Joseph se dessinent devant mes yeux dans un sourire embrumé. Il lève le bras et pointe l’index. Il semble me désigner une boîte à chaussures en haut d’une étagère. La vision s’estompe dans ce tendre sourire. Un frisson traverse mon échine. Je grimpe sur un vieux bureau d’écolier pour atteindre le carton poussiéreux. J’en soulève le couvercle. La boite est emplie d’enveloppes éprises de sépia. J’ouvre la première et en sort une lettre manuscrite. L’écriture m’est inconnue mais un symbole m’interpelle. Une étoile de David en marque l’en-tête. J’ouvre une autre lettre aux armes de l’ambassade de France à Tel-Aviv. L’émotion me saisit au fur et à mesure de la lecture. Une larme coule le long de ma joue lorsque les mots se jouent de mon émoi. Il y est dit qu’une famille juive a effectuée des recherches durant plusieurs années afin de retrouver le maire d’un petit village de Haute-Loire. Ce dernier aurait caché aux autorités allemandes durant toute une année cette famille Ben Gourion au fin fond d’une scierie. Je m’esclaffe, je ris nerveusement. J’en tombe même le carton empli de lettres d’amour enrubannées par une soie rose effilochée. Un objet métallique rebondit sur le plancher grisâtre. Je me penche sur le sol pour ramasser une médaille. Une étoile de David en or réfléchit sur mon interrogation les quelques rayons timides du soleil que filtre une lucarne encrassée.
    Dans cette atmosphère ouatée, grand-père me sourit à nouveau. Puis ses lèvres bougent. Je m’avance comme pour mieux écouter cette silhouette sans chair qui tout à coup m’est devenu chère.
    – Sache mon petit que je te pardonne toutes ces années d’une tendresse perdue comme je sais que tu pardonneras à ceux qui ont sali tes jeunes années et qui nous ont éloignés d’une affection légitime.
    Son image s’estompe dans une larme au coin de son œil. Je range la médaille puis je replie la lettre dans les plis de mon cœur que je sens battre dans ma poitrine comme le roulement d’une victoire sur le passé. Je ferme les yeux. Le visage souriant de grand-père est là. Je lui adresse un baiser empli de pudeur
    – Je t’aime grand-père Joseph !

  22. durand dit :

    Mon père trimballait des problèmes d’intestin, il avait certains jours du mal à digérer sa vie. De là, certaines flatulences, ballonnements, formation et surplus de matière gazeuse dans la basse tuyauterie, exigeant par moments une ou plusieurs expulsions sonores.

    Etais ce dû au fait d’avoir souffert de la faim pendant la guerre et le bonheur d’avoir une assiette pleine tous les jours, je ne saurais dire, mais le fait est que ces nécessités d’évacuations se manifestaient toujours lors des repas.

    A un moment ou à un autre, selon les menus antérieurs et l’ inquiétude du jour, un son plus ou moins flûté, tirant souvent vers le cor de chasse montait de dessous la table.

    Ma mère s’offusquait: » Enfin quoi, Jacques, pas devant les enfants! ». Lui souriait d’un air étonné et complice et immanquablement répliquait: » Mais enfin chérie, tu sais bien que c’est Zampou, le dieu Zampou qui s’exprime… » Et il partait dans une vaste improvisation au sujet de l’existence de ce fameux Dieu, un foutu mécréant ricanant facilement au nez des institutions, des monuments, des gens du pouvoir et de l’argent. La bacchanale verbale pouvait s’éterniser, rebondir, jusqu’à ce que ma mère, exaspérée quitte la table et aille se venger sur sa vaisselle.

    Ma soeur et moi,on se marrait. Il y avait déjà un bon moment que le Père Noël était resté coincé dans sa cheminée et le Père Dieu dans son nuage. A ces instants privilégiés, on aimait beaucoup notre père et sa façon de monter les premières barricades de notre humour naissant.

  23. Christine Macé dit :

    Rose-Madeleine vient d’avoir six ans. Le bel âge pour une petite souris. Qui, en fait de souricette, est une vraie fouine, toujours aux aguets, à l’affût de tout et tout le monde. A commencer par le chat qu’elle terrorise en hurlant « yalla carambar ! » Une expression qui ne veut strictement rien dire mais dont elle raffole vu les effets nocifs sur les nerfs du greffier.
    Il a bien tenté de se plaindre aux parents mais papa souris refuse catégoriquement toute critique concernant sa progéniture, prunelle de ses petits yeux rouge-rose, car il est albinos. Une singularité qui en fait une espèce d’être à part, quasi surnaturel, au regard des autres membres de la famille au pelage communément pie. Même le chat ne peut lutter.
    Rose-Madeleine grandit et avec elle son insatiable curiosité. « Pourquoi » et « comment » sont ses mots favoris à propos de tout et de rien. Ne lâchant jamais le bout de gruyère avant d’avoir usé la patience de son interlocuteur qui finit invariablement par répondre « parce que… »
    La toison immaculée de son paternel est précisément un de ses sujets de prédilection. Le seul qui se heurte toujours à une insondable réponse : « un jour, je te dirai… »
    Un jour, c’est soudain devenu un peu trop loin à son goût. Et déterminée à percer le secret, après avoir soufflé les bougies de son gâteau aux trois fromages, elle décide de revenir à la charge. D’autant que chez les souris, six ans étant considéré comme l’âge de raison, elle compte bien qu’en échange de son renoncement à épouser papa, il finisse par lever le voile sur l’origine de son blanc manteau.
    A bout d’arguments, il consent.
    Ce qu’il lui raconte, nul ne le sait ni ne le saura. Juste que depuis, Rose-Madeleine n’a plus jamais agressé le chat, ni proféré de grossièreté. Et qu’on la surprend parfois, plantée devant la glace, à se regarder le museau où pointent quelques poils blancs dont elle ne semble pas peu fière. Une sorte d’héritage peut-être ?
    Mais un secret reste un secret…

    Bon week-end, Christine

  24. Camomille dit :

    Ca se passe dans la cour de récréation :

    Moi, mon grand-père… il est trapéziste de cirque !

    Moi, mon grand-père… il a déjà fait trois fois le tour du monde,

    Moi, mon grand-père… il sait parler en anglais, et en russe aussi,

    Moi, mon grand-père… il a quatre chiens et deux poules,

    Et toi ? Qu’est-ce qu’il fait ton grand-père ?

    Moi, mon grand-père… il est assistant du Père Noël, Mais CHUUUT ! C’est un secret de famille !

    (inspiré de : « Moi, ma grand-mère… »
    PEF :folio benjamin GALLIMARD

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