308e proposition d’écriture créative imaginée par Pascal Perrat
Il serait mort pour « y être allé un peu fort le rouquin« ,
ou d’un infarctus lors d’un concert de jazz.
Il aurait quitté ce monde pendant les 30 glorieuses,
ou au tout début de la crise. À 73 ou 83 ans.
De cette vie, on ne sait pas grand-chose, mais vous allez pourtant la raconter en détail.
Ce soir-là, il faisait frais, la rue brillait de cette humidité joyeuse lorsqu’elle reflète toutes nos vies. Ils marchaient avec entrain vers cette sonnerie, annonciatrice du silence sérieux et solennel du début de la pièce ; elle s’en réjouissait. Le théâtre n’était plus très loin, mais elle sentit que son compagnon se tenait à distance de sa fébrilité ; pourtant il lui sembla que son ombre dessinait sur le sol des instruments de musique. Tantôt un saxo, tantôt un piano, parfois un harmonica. Depuis qu’elle s’en était aperçue, elle ne pensait plus qu’à ça et s’en réjouissait. Elle avait des images dans la tête qui se chargeaient de la nourrir et de la faire rèver.
Ils virent au détour d’une brasserie, des clients dégustant un plat d’huitres ; la lumière était douce, le vin scintillait au travers de la vitre et ils eurent envie.
Ils firent un peu la queue devant le théâtre ; quelqu’un commentait : « Il serait mort pour « y être allé un peu fort le rouquin« ou d’un infarctus lors d’un concert de jazz.
Il aurait quitté ce monde pendant les 30 glorieuses,
ou au tout début de la crise. À 73 ou 83 ans. »
Cette phrase lui rappela l’archange de ses 15 ans. Un jour que sa mère l’avait chargée de déposer des cerises à leur voisin, celui-ci lui avait montré sa collection de plantes grasses. Après un verre de frênette, il lui avait offert une crassula en lui faisant mille recommandations. Touchée par ce cadeau, elle n’en avait parlé à personne, mais avait entretenu la plante selon les conseils avisés de cet homme réservé. Le timide sourire de ses yeux bleus l’avait poursuivie longtemps et nourrissait l’attention qu’elle continuait à porter à la plante.
Mais un jour qu’elle prenait du tabac pour son père au café, elle avait appris sa mort par cette phrase : il y allait un peu fort sur le jazz et le rouquin…
Elle stoppa net son avancée vers le guichet et planta son regard tueur dans celui de l’homme qui commentait. Elle était glacée, vide, nouée, et ne pu retenir ces mots : « non, monsieur, il était un archange, l’archange de mes 15 ans » à l’adresse du parleur.
Son compagnon l’attira vers lui, et la pressa d’avancer tandis que l’homme, surpris de sa remarque, la regardait s’éloigner sans comprendre. Les conversations reprirent dans la file d’attente en pénétrant dans le théâtre.
La pièce se déroulait durant les trente glorieuses ; il s’agissait d’un homme un peu ermite, qui vivait à rebrousse poil de cette consommation naissante, et parlait à ses plantes de l’économie de la pensée positive. Une fille l’interpellait régulièrement et le poussait dans ses retranchements. Elle dansait sur un morceau de Miles Davis, comme un songe récurrent quand notre esprit refuse d’avancer vers la sagesse.
Elle revit le saxo, le piano et l’harmonica des ombres sur le trottoir, et se glissa dans la peau de ses 15 ans. Elle se tourna vers son compagnon et reconnut son archange. Elle avait hâte de quitter ce théâtre ; elle voulait des huitres, de l’amour et du vin, devant sa crassula en écoutant du jazz. Nul ne pouvait comprendre, mais tout était en place : la lumière, les ombres, les odeurs, l’humidité lui rappelait ce début de soirée de juin, il y a fort longtemps où elle avait découvert les prémices de l’amour.
Tout se mélangeait ; elle avait faim, c’était la fin. Elle était ivre de ses premiers émois.
Il serait mort pour « y être allé un peu fort le rouquin« , ou d’un infarctus lors d’un concert de jazz.
Il aurait quitté ce monde pendant les 30 glorieuses, ou au tout début de la crise. À 73 ou 83 ans.
Lulu entra dans la salle, repéra sa place et s’installa. Rapidement, il jeta un coup d’œil autour de lui. Non pas pour repérer un potentiel tricheur ou un quémandeur. Non, juste pour s’assurer qu’il serait tranquille.
Le brouhaha des chaises cessa enfin.
Le bourdonnement des voix cessa aussi.
Dans un silence de catacombe (ben oui, pourquoi pas?), les surveillants se plantèrent dans les quatre coins alors que le professeur distribuait les enveloppes.
Lulu sentit la paume de ses mains moitir (ça fait mieux que devenir moite). Quel sujet tarabiscoté avait-on rédigé pour le Bac Philo ? Serait-il à la hauteur ? Un méchant cratère dans sa mémoire ne réduirait-il pas à néant le dur labeur du lycéen lambda qu’il était ?
– Mesdemoiselles, messieurs, à partir de maintenant, vous avez quatre heures….
Lulu s’empara de son enveloppe et en sortit les documents. Il se cala sur sa chaise, dos bien droit, pieds à plat. Posture propice à une bonne respiration pour dynamiser (et pas dynamiter) les synapses de ses neurones.
Il commença la lecture du sujet.
– Merde, je n’y comprends que dalle…
Il fit une deuxième lecture, puis une troisième. Rien. Aucune image visuelle, aucune image auditive, aucune idée. Le désert intellectuel.
Et que fait-on dans le désert quand on est en manque d’eau ? On prend un petit caillou, on le met dans sa bouche et on le suce…..
Lulu se dit que cela marcherait peut-être pour nourrir son imagination. Il plongea sa main dans la poche de son jeans et en sortit un galet de cristal de roche. Il le glissa en bouche.
Il attendit quelques instants…et…Fébrilement, il empoigna son stylo . Celui-ci se mit à courir sur le papier. Un vrai sprinter (Non, ce n’est pas la marque du stylo).
Le titre fut dépecé, haché menu, scruté, retourné, inversé, ébranlé, au laser des raisonnements déductifs ou inductifs, par analogie ou concessif, par l’absurde ou critique. Cet énoncée résistait. Restait donc… le syllogisme affectif. (si, si, je vous jure, ça existe!)
En riant sous cape, Lulu scanda :
– Et c’est parti, mon Philibert, comme pour les tables de multiplication. Mais ici, c’est une soustraction du monde des vivants…
Il se remémora, sans peur et sans reproche : « Le syllogisme est un mode de raisonnement exposé il y a 2 400 ans par le philosophe Aristote. Ce raisonnement consiste en deux propositions dont on déduit une troisième ; il est ordinairement fondé sur un des deux principes suivants, où il n’y a pas d’erreur possible… » . Pas d’erreur possible ? Allons donc !
– Il serait mort… donc, il pourrait encore être vivant….
– Il y est allé un peu fort…. donc, c’est pondéré, et encore !
– Le rouquin : « il » le représente-t-il, ou manque-t-il un « sur » entre « fort » et « le » ; auquel cas, cela change le sens de la proposition. Incompatibilité entre le sujet et le prédicat.
– Ou…ou… ou…., ça fait pas très sérieux comme validité !
Lulu continua, et nota une réelle similitude entre les premières prémices et les secondes :
– Il aurait quitté ce monde…et c’est reparti, mon Julos ! Avec les ou…ou…ou….
Lulu jeta un coup d’œil à l’horloge, muette d’effroi. So, it’s time to conclude…
– So… so… sophisme !
Lulu écrivit :
Plus il y a incertitudes, plus il y a de doutes.
Plus il y a de doutes , moins il y a d’incertitudes.
Donc plus il y a de doutes, moins il y a de doutes.
Il rendit sa copie en soupirant :
– Alea jacta est.
Trois semaine plus tard, il se murmurait dans les couloirs du Bahut que Lulu aurait eu beaucoup de chance. Il serait admis pour « y être allé un peu fort », en brocardant le monde du rationnel pour sublimer le monde de l’imaginaire.
Tout comme 30 glorieuses bachelières qui s’engagèrent avec lui pour fonder leur Start-Up : Sophistote&Socratis.
© Clémence.
Félicitations, on t’a reconnue Mandoline ! Voyons si mon style te dira lui aussi quelque chose ?
Oh, oui!!!!!
Il serait mort pour « y être allé un peu fort le rouquin« , ou d’un infarctus lors d’un concert de jazz. Il aurait quitté ce monde pendant les 30 glorieuses, ou au tout début de la crise. À 73 ou 83 ans.
Personne ne le savait, il n’avait pas de famille, du moins connue, et pas beaucoup de talent non plus.
Or, en 2010, au Havre, un homme aux cheveux roux, un peu fort, débarqua d’un cargo : influencé par sa lecture du livre d’Hugo Verlomme, il avait choisi ce type de bateau.
Son but n’était pas de visiter l’Europe, ni même la France, mais de retrouver ses origines paternelles. Avant de mourir, sa mère, pour la première fois, lui avait parlé de son père. Elle n’en savait pas grand’chose,elle ignorait même son âge ;il devait , s’il vivait encore,avoir entre 75 et 80 ans ; sauf qu’il était amateur de jazz et en jouait avec un certain talent, place des Abbesses à Montmartre et aussi qu’il menait une vie de bohème.Elle se souvenait qu’il était roux, d’ailleurs tout le monde l’appelait le rouquin. Elle n’avait jamais connu son nom de famille et n’avait donc jamais pu lui écrire pour lui faire part de sa paternité.
Et c’est ainsi qu’on retrouva notre homme, appelons-le Louis,
une fin de journée, place des Abbesses, où un homme, un peu plus jeune que lui, chauve mais les sourcils roux, jouait, à la trompette,un air de jazz.Etait-ce une hallucination ? Il lui ressemblait comme deux gouttes d’eau.
Quand le concert fut terminé, il se présenta à lui et lui raconta ce qu’il était venu faire à Paris. Sûrs tout de suite de leurs liens de parenté , Ils tombèrent dans les bras l’un de l’autre et ne se quittèrent plus.
Quelques jours plus tard, les deux frères allèrent sur sa tombe et Louis remarqua qu’aucune date de naissance et de mort n’était inscrite sur sa pierre tombale. Il ne dit rien ! Quelle importance cela avait-il !
Il serait mort pour « y être allé un peu fort sur le rouquin », ou d’un infarctus lors d’un concert de jazz. Il aurait quitté ce monde pendant les trente glorieuses ou au début de la crise, à 73 ou 83 ans.
– C’était tout ce qu’il y avait comme indices, c’était maigre ! Et encore, c’était au conditionnel, rien n’était sûr !
– Pourquoi l’avait-on recherché ?
– Parce qu’une lettre écrite de sa main avait été oubliée et retrouvée après la réforme des PTT, au fond d’un casier de tri. Cette lettre disait qu’il léguait un trombone à coulisse à Madame Alban, qu’elle saurait quoi en faire. Le clerc de notaire de l’époque qui avait été mandaté était allé voir cette dame. Elle passait des jours tranquilles dans une maison de retraite du département de l’Isère. Le trombone avait été soigneusement conservé dans un placard d’une salle de spectacle à Paris.
Quand je suis allé lui rendre visite, elle m’a dit qu’elle avait donné l’instrument à son frère musicien et qu’elle avait gardé la lettre.
Elle ne se souvenait que de son pseudonyme, Albert le Rouge dit « le Rouquin ». Il était chaud sur la bibine disait-on à l’époque. Mais elle n’avait rien remarqué de ce côté-là. Elle l’avait décrit comme un charmant garçon plus porté sur la danse, les conquêtes et la musique que sur le rouge. Cette réputation avait été surfaite lors d’un gala où il s’était pris une cuite mémorable à la suite d’un déboire amoureux. C’est comme ça qu’il s’étaient connus.
Au début de mes recherches, je pensais qu’il était musicien à cause du trombone… Il n’était pas musicien mais imprésario.
– Imprésario ! L’affaire était classée alors !
– Non ! Parce qu’elle me la donna à lire. Elle avait remarqué que certains mots comportaient des fautes d’orthographe. Il manquait certaines lettres dans certains mots, alors qu’il parlait très bien le Français.
– Mais il n’était pas américain, questionna Georges Verdini ? Il pouvait faire des fautes non !
– Oui, mais non ! Regarde !
Philip Marlow sortit la lettres de deux pages de sa sacoche.
– Ici, il fait bien l’accord, et là, il ne le fait pas. Là et là… et encore deux ici…et là, il manque encore des lettres !
– Il était peut-être bourré à ce moment-là, dit Georges en se tordant le nez avec le poing ?
– Possible ! dit Marlow en souriant. Je suis allé voir le frère de Madame Alban qui avait découvert une autre lettre planquée dans le trombone. Il a bien voulu me la donner.
– C’était un message codé, s’écria Georges en tapant du plat de la main sur la table.
– Bingo ! T’as gagné ! Il se savait surveillé et il avait remisé à la hâte l’instrument dans un placard. La lettre n’est pas datée, mais on sait qu’il passait des informations de la zone occupée en zone libre pendant la guerre. Il est décédé d’un infarctus lors d’un concert de jazz quand il apprit le décès de Charlie Parker.
Dieu soit loué ! Il est mort avant même d’avoir atteint 73 ans. Et sûrement pas d’un infarctus lors d’un concert de jazz, raciste inculte qu’il était, méprisant totalement cette « musique de nègres » qu’il eût été bien incapable d’apprécier.
. Mort quand ?
Quelques semaines semaines avant le début de la crise mondiale que son élection aurait pu déclencher.
. Mort comment ?
Battu à mort acculé contre le mur qu’il voulait que les Mexicains construisent et paient et qui n’aura été finalement ce jour-là infranchissable que pour lui.
. Mort par qui ?
Ecrasé, laminé, aplati, réduit à l’état de tortilla par les 30 glorieuses blondes qu’il s’était tant plu à tripoter, insulter, à traiter comme selon lui toute femme devait l’être, n’étant née que pour ça.
. Mort pourquoi ?
Parce qu’il y était allé un peu fort le rouquin !
Décoiffant, Grumpy,absolument décoiffant !!!
Lui,de là haut, se réjouit que l’on prenne enfin les choses en main, afin de rétablir la vérité,après toutes les supputations émises à son sujet par les uns et les autres.
D’abord,il était né le premier mars 1931.Ensuite s’il était mort, c’est qu’il l’avait bien voulu. Pas de cirrhose ou d’infarctus dans l’histoire.Il était abstème,comment voulez vous que le rouquin le tue? Il n’aimait point le jazz mais le musette et, chose ignorée de tous, avait été l’amant d’Yvette Horner avant de se mettre à l’orgue Hamon après sa séparation d’avec cette femme si mal attifée, qui ne savait même pas faire cuire correctement une omelette.
Pendant les Trente Glorieuses,je vous signale – pensait-il tout haut – j’étais à Buenos Aires pour faire danser le tango, contre monnaie trébuchante, à des senoras entichées de mon accent et mon charme français.
Il avait du rentrer fissa, à cause d’une affaire louche concernant un trafic de maté qui s’était avéré mélangé,sans qu’il ne sache comment, à quelques résidus de cocaïne par le plus grand des hasards, .
Notre homme se fit oublier,épousa une japonaise contorsionniste qui lui donna deux enfants : un sumotori et une geisha. Tous les trois filèrent au Japon quand il évoqua la possibilité d’aller vivre dans le Larzac pour y élever des chèvres.
Il revint de sa campagne cinq ans plus tard, afin de s’associer avec son frère dans un business sur lequel il resta toujours très discret.
On entendait parler de lui au journal télévisé, ici et là ,mais jamais personne ne vit son visage.
Il fit fortune,spécula,perdit, dû faire la manche vers Barbès. C’est là qu’il apitoya une riche veuve qui lui offrit la gite et le couvert dans son cinq pièces de la rue du Bac.
Pendant quelques années, il lui fit la cuisine,l’amour,le ménage,l’accompagnant jusqu’à sa mort.Elle vivait sur un grand pied;ne lui laissa qu’un appartement hypothéqué et douze chats siamois à nourrir deux fois par jour.
Abattu,sans un sou,il jura que si jamais il y avait un félin de plus dans cette maison,il n’y survivrait pas.
Une des femelles mit bas .Quatre petits,portrait craché de leurs parents.
Il enferma les chats dans une chambre,lui s’enferma dans une autre,cessa de s »alimenter.
Huit jours plus tard il mourait.On le découvrit deux semaines après, et c’est là que les langues allèrent bon train.
Faute de savoir exactement où se situait son pays, on l’appelait « le rouquin ». Sa couleur de cheveux ni blond, ni brun, ni gris, y était pour quelque chose. Et sa façon de ne pas se coiffer.
Parce que chez lui, déjà jeune, on était toujours dans le vent des clairières.
Il ne savait pas exactement où et quand il était né. Quelque part au bord des Maramures, là où les ours de l’époque s’invitaient souvent à table.
Sa mère travaillait à la maison, à colmater les murs et les estomacs de ses dernières portées.
Son père était bûcheron. Ses journées étaient longues mais sa femme savait toujours le retrouver…la nuit…en suivant les flacons vides d’alcool de prunes.
A l’âge indéterminé où l’on ne sait pas vers quoi se diriger, il était dans la bonne moyenne.
D’ailleurs il préférait la déambulation. Il ramassait les coquilles des noisettes grignotés par les écureuils et en fabriquait des flûtes approximatives.
Il tendait des peaux de taupes sur des boîtes de conserve et battait le rappel de sa fratrie, à l’heure du coucher.
Un jour, il échangea avec un voisin une tête de marteau contre un lot de boyaux de chat.
Il les tendit sur deux planches bricolées. On ne sait pas laquelle des vibrations se planta dans son crâne, mais pour lui, ce fut une étape.
Plus tard,il s’accrocha avec son père. Le « vieux » voulait l’initier à l’art du tronçonnage mais « le rouquin », par expérience, craignait beaucoup de la cognée.
Bien que ne connaissant rien des suites pour violon seul de Bach, il entama sa première fugue.
Pour aller où,….juste ailleurs!
A l’époque le Nord n’était qu’une grosse calotte bolchévique, et pour lui le Sud un désert où broutaient des chameaux. A l’est, son grand-père lui avait raconté, une bassine d’eau et il ne savait pas nager.
Il partit donc vers le soleil levant, cette grosse ampoule attirant plus d’un moustique.
Au bord de sa région, il croisa un gitan. Celui-ci lui échangea un violon fendu contre ce qui s’avéra être ,il l’apprit beaucoup plus tard, un couteau suisse.
Si le voyage forme la jeunesse, il déforme aussi les chevilles.Les semelles de bois des Maramures, c’était du solide….trop raides, peut-être ?
Quand il en avait marre de marcher, le « rouquin » se posait pour bosser dans les fermes. Le soir, il écoutait les chants des peuples et les transcrivait sur sa boîte à crincrin.
Il traversa ainsi l’Europe, chaque chemin boisé des contrebandes l’autorisant à traverser le pauvre filet des frontières.
On note sa trace, en France, près de Strasbourg. Sans le savoir, il avait suivi la piste des cigognes. Mais aucun nid ne l’y attendait.
Il croisa un polonais avec qui il sympathisa, créèrent un duo. Le polonais se déguisait en ours et « le rouquin » le faisait danser du violon.
Ca permettait de mettre du beurre sur les tartines.
Et bientôt, comme il disait…. »du beurre dans le pinard! ».
Le goulot de l’alcoolisme est toujours trop large et « le rouquin » y tombât.
Sa destinée l’amena à Paris, là où tout est possible à ceux qui savent perdre la tête.
Il commença par l’égarer, à écouter les vantards du son unique, de l’exotisme génial.
On le traîna dans plus d’un tripot louche où se croisaient toutes les consommations, alcools désaccordés et musiques frelatées.
C’est là qu’il rencontra With Bud Sullivan et Crazy Bobby Marshall, deux américains exilés avec qui il forma son premier et dernier trio.
Ils jouaient de pâles imitations du répertoire de Joe Venuti, My Gypsy Rhapsody, I want to ring the bells.
Le propriétaire du lieu, les logeait, nourrissait et les abreuvait.
Il y traina toute sa petite vie et contrairement à la légende qui colle aux musiciens maudits, il ne mourut même pas sur scène.
Un soir de beuverie, il glissa sur une merde de chien et tomba dans la Seine.
On ne retrouva jamais son corps et de son œuvre, juste une « Valse des Maramures » qu’un certain Grapello lui piqua.
Bravo on le voit et on se balade
Merci Zelodie
Scarlatti oui c’est ça. Attendez un peu, un peu d’embonpoint, toujours joyeux, gentil, aimable. Son métier, ma mémoire… je ne rajeunis pas, vous savez. Il ne faisait pas grand chose, mais on le voyait partout et il mangeait, oui il avait un solide coup de fourchette. Aimable, bavard, toujours souriant, je le revois maintenant. Vraiment un bel appétit. Je ne crois pas qu’il m’ait jamais parlé d’un métier, d’une profession. Sa bonne santé venait disait-il de sa terre dont il se nourrissait. Impressionnant le bonhomme. Ça fait longtemps que je ne l’ai pas vu. Décédé ah… je ne savais pas. Il faut dire qu’il n’était pas vraiment utile, il mangeait. Pour le reste tout sourire mais… enfin vous le savez mieux que moi. Maladie ? Une attaque ah … une belle mort, finalement.
Vous vouliez ? Ah je vois, son fils souhaiterait entrer dans notre cercle, être invité à nos événements. Avec les restrictions budgétaires que nous connaissons … il fait quoi ? Il fait quoi dans la vie ? Rien ? Rien du tout ? Comme son père. Écoutez, dans ce cas… rien faire …. tout un métier !
Recette du « PAS GRAND CHOSE »
Ingrédients :
UN MORT
UN INFARCTUS
UN MONDE
UN CONCERT DE JAZZ.
30 GLORIEUSES
UN DEBUT DE CRISE
73 OU 83 ans.
Préparation
Ficelez le MONDE pour qu’il se maintienne en forme pendant l’ INFARCTUS
Épluchez 30 GLORIEUSES puis lavez-les.
Piquez UN MORT et faites-le cuire. Il colorera le bouillon pendant la cuisson.
Mettez dans un faitout tous les morceaux, préalablement enveloppés dans UN CONCERT DE JAZZ
Salez en DEBUT DE CRISE
Puis laissez mijoter pendant au moins 73 OU 83 ans .
Liez le tout en réalisant UN ROUX
Dégustez
Une idée originale et efficace merci
Encore un peu et on en mangerait si l’on ne redoutait une digestion compliquée.